Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2020 par lequel le maire d'Elven a ordonné la mise en sécurité, dans le cadre d'un péril imminent, de l'immeuble situé au lieu-dit Kerzio sur les parcelles cadastrées section
I nos 95 et 96.
Par un jugement n° 2100434 du 12 juin 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de Mme B....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 août 2023, Mme B..., représentée par Me Le Guen, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 12 juin 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2020 par lequel le maire d'Elven a ordonné la mise en sécurité, dans le cadre d'un péril imminent, de l'immeuble situé au lieu-dit Kerzio sur les parcelles cadastrées section I nos 95 et 96 ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Elven la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'est pas établi que la minute était signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ;
- l'arrêté en litige ne permet pas d'identifier clairement la personne qui en est le signataire, contrairement aux dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
- les désordres affectant l'immeuble en cause ne constituaient pas un péril imminent au sens de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation ;
- la solution technique préconisée par l'arrêté de péril afin de faire cesser le prétendu péril est inadaptée ;
- l'arrêté contesté est illégal en ce qu'il comporte une mise en demeure d'avoir à effectuer des travaux qui sont irréalisables pour elle, le montant des travaux demandés au regard du montant de l'acquisition étant disproportionné.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2024, la commune d'Elven, représentée par Me Lahalle, conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à ce que soit mise à la charge de Mme B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme B... n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Picquet,
- les conclusions de Mme Rosemberg, rapporteure publique,
- et les observations de Me Le Guen, représentant Mme A... B..., et de Me Vautier, substituant Me Lahalle représentant la commune d'Elven.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 24 novembre 2020, le maire d'Elven a ordonné la mise en sécurité, dans le cadre de la procédure urgente prévue en cas de péril imminent, de l'immeuble situé au lieu-dit Kerzio sur les parcelles cadastrées section I nos 95 et 96, appartenant à Mme A... B.... Cette dernière a demandé au tribunal administratif de Rennes l'annulation de cette décision. Par un jugement du 12 juin 2023, le tribunal a rejeté sa demande. Elle fait appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. La minute du jugement attaqué comporte la signature du président de la formation de jugement, du rapporteur et de la greffière d'audience. Par suite, elle est régulière au regard des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative qui prévoit que la minute comporte ces trois signatures en cas de formation collégiale. Dès lors, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le jugement est entaché d'une irrégularité sur ce point.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par une administration comportera la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci (...) ".
4. Il résulte de l'instruction que la décision contestée mentionne, en caractères lisibles, les nom, prénom et qualité de son auteur, le maire de la commune d'Elven, ainsi que sa signature manuscrite. Par conséquent, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté comme manquant en fait.
5. En second lieu, aux termes de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation, applicable à l'arrêté contesté en vertu de l'article 19 de l'ordonnance n° 2020-1144 du 16 septembre 2020 relative à l'harmonisation et à la simplification des polices des immeubles, locaux et installations : " En cas de péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, demande à la juridiction administrative compétente la nomination d'un expert qui, dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination, examine les bâtiments, dresse constat de l'état des bâtiments mitoyens et propose des mesures de nature à mettre fin à l'imminence du péril s'il la constate. / Si le rapport de l'expert conclut à l'existence d'un péril grave et imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité, notamment, l'évacuation de l'immeuble. / Dans le cas où ces mesures n'auraient pas été exécutées dans le délai imparti, le maire les fait exécuter d'office. En ce cas, le maire agit en lieu et place des propriétaires, pour leur compte et à leurs frais. / Si les mesures ont à la fois conjuré l'imminence du danger et mis fin durablement au péril, le maire, sur le rapport d'un homme de l'art, prend acte de leur réalisation et de leur date d'achèvement. / Si elles n'ont pas mis fin durablement au péril, le maire poursuit la procédure dans les conditions prévues à l'article L. 511-2. ". La contestation d'un arrêté de péril imminent, pris sur le fondement de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation relève du contentieux de pleine juridiction. Par suite, la légalité d'un tel arrêté s'apprécie à la date à laquelle le juge se prononce.
6. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expert judiciaire du 19 novembre 2020, que la charpente de la maison en cause présente un état préoccupant, que les étaiements déjà en place sont eux-mêmes précaires, ne sont pas prolongés à l'étage inférieur et conduisent à un report des charges sur les murs. La dégradation de la charpente, causée par l'humidité, est aggravée par le fait qu'elle est exposée aux intempéries du fait de l'absence d'ardoises à certains endroits du toit. Il apparaît également que les maçonneries extérieures de la maison sont affectées de nombreuses fragilités, pouvant conduire à des chutes de pierre. En particulier, le rapport d'expert relève le danger d'effondrement de parties de la corniche. Enfin, le linteau en granit de la porte d'entrée principale, fissuré, n'assure plus son rôle porteur. Ainsi, et alors même que le risque électrique n'a pas été retenu par le maire, les désordres affectant l'immeuble en cause constituent, contrairement à ce que soutient la requérante, un péril imminent au sens de l'article L. 511-3 cité au point 5.
7. Par ailleurs, les mesures prescrites par l'arrêté du 24 novembre 2020, reprenant les conclusions de l'expert judiciaire du 19 novembre 2020, consistent en une reprise des étaiements de la charpente du toit pour les compléter à l'étage inférieur, un étaiement du linteau de la porte d'entrée principale, le bâchage intégral de la toiture et l'interdiction d'accéder au terrain d'assiette de la maison. Contrairement à ce que soutient Mme B..., ces mesures présentent ainsi un caractère provisoire et sont rendues nécessaires par les désordres, constitutifs d'un péril imminent, affectant l'immeuble. Enfin, si la requérante fait valoir que le montant des travaux demandés apparait disproportionné au regard du montant de l'acquisition du bien immobilier, cette circonstance, à la supposer établie, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Elven, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de cette dernière la somme demandée par la commune d'Elven au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Elven au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune d'Elven.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Derlange, président assesseur,
- Mme Picquet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 septembre 2024.
La rapporteure,
P. PICQUET
Le président,
L. LAINÉ
La greffière,
A. MARTIN
La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23NT02461