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20/09/2024 | FRANCE | N°24NT00750

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 3ème chambre, 20 septembre 2024, 24NT00750


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du

31 janvier 2023 par lequel le préfet des Côtes d'Armor a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de conjointe d'un ressortissant français et l'a obligée à quitter le territoire.



Par un jugement n° 2303505 du 28 septembre 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 12 mars 2024, Mme B..., représentée par Me Mézin, demande à la cour :



1°) d'annuler ce ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du

31 janvier 2023 par lequel le préfet des Côtes d'Armor a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de conjointe d'un ressortissant français et l'a obligée à quitter le territoire.

Par un jugement n° 2303505 du 28 septembre 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 mars 2024, Mme B..., représentée par Me Mézin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 28 septembre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 31 janvier 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Côtes d'Armor de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que sa minute n'est pas signée ;

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé en droit ;

- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur de droit car le préfet aurait dû faire application des stipulations du traité franco-ivoirien du 21 septembre 1992 et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- à titre subsidiaire, une carte de séjour en qualité de visiteur aurait pu, sur le fondement de l'article L426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui être attribuée ;

- à titre infiniment subsidiaire, elle pouvait bénéficier d'une carte de séjour de régularisation ;

- l'illégalité du refus de titre de séjour entache d'illégalité la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision d'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- elle est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision est contraire aux dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 février 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Gélard a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante ivoirienne, relève appel du jugement du 28 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 janvier 2023 du préfet des Côtes d'Armor portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ".

3. Il ressort du dossier de procédure que la minute du jugement attaqué a été signée par le président-rapporteur, l'assesseure la plus ancienne ainsi que par le greffier d'audience. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, manque en fait et ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 2 et 3 du jugement attaqué, les moyens tirés de ce que la décision contestée portant refus de titre de séjour serait insuffisamment motivée et contraire aux stipulations du traité franco-ivoirien du 21 septembre 1992, dont les stipulations de l'article 10 renvoient expressément à la législation nationale pour la délivrance à un ressortissant ivoirien d'un titre l'autorisant à séjourner sur le territoire plus de trois mois, que la requérante reprend en appel sans apporter de précisions supplémentaires.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L.423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ". Par ailleurs, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

6. Il n'est pas contesté que Mme B..., qui a accompli l'intégralité de sa carrière professionnelle dans son pays d'origine et qui est retraitée depuis 2020, est entrée en France munie d'un passeport ivoirien revêtu d'un visa de court séjour à entrées multiples, valable du 30 décembre 2021 au 27 juin 2022. L'intéressée soutient être arrivée en France le 1er janvier 2022 et avoir rencontré à cette occasion M. C..., ressortissant français, avec lequel elle se serait installée maritalement dès le mois d'avril 2022. A l'appui de ses allégations, elle produit plusieurs attestations, très succinctes et stéréotypées, qui se bornent à indiquer qu'elle vit en concubinage depuis cette date avec l'intéressé. La requérante, qui ne justifie par ailleurs que de la présence en France d'une nièce, ne soutient pas être dépourvue de toutes attaches familiales dans son pays d'origine. Elle n'établit pas davantage être dans l'impossibilité de se rendre en France sous couvert de visas de court séjour, lesquels lui ont été jusqu'alors délivrés pour se rendre en France en 2005, 2008 et 2014. Par suite, compte tenu du caractère extrêmement récent de sa relation avec un ressortissant français à la date de la décision contestée, et alors même que le couple s'est marié le 28 octobre 2023, soit postérieurement à la décision contestée, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté litigieux serait contraire aux dispositions précitées de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui apporte la preuve qu'il peut vivre de ses seules ressources, dont le montant doit être au moins égal au salaire minimum de croissance net annuel, indépendamment de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale et de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur " d'une durée d'un an. / Il doit en outre justifier de la possession d'une assurance maladie couvrant la durée de son séjour et prendre l'engagement de n'exercer en France aucune activité professionnelle. / Par dérogation à l'article L. 414-10, cette carte n'autorise pas l'exercice d'une activité professionnelle. ". Il ressort des pièces du dossier que Mme B... indique disposer d'un revenu équivalent à 413 euros mensuels qui inclurait une cotisation à une mutuelle de santé. Toutefois ces ressources ne sont pas suffisantes pour lui permettre de satisfaire aux dispositions précitées.

8. En dernier lieu, compte tenu de ce qui vient d'être dit aux points 6 et 7, la requérante n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que le préfet aurait dû procéder à sa régularisation.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 13 à 16 du jugement attaqué, les moyens tirés de ce que la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français serait insuffisamment motivée, entachée d'illégalité en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que la requérante reprend en appel sans apporter de précisions supplémentaires.

10. En second lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. ". En se bornant à produire une prescription médicale établie le 15 juin 2023 pour un trajet aller-retour en véhicule sanitaire léger pour une hospitalisation la requérante n'établit pas que son état de santé nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite l'intéressée n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions précitées du 9°) de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans les prévisions desquelles elle n'entre pas.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Pour les mêmes motifs, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie sera transmise, pour information, au préfet des Côtes d'Armor.

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2024 à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente de chambre,

- M. Vergne, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 septembre 2024

La rapporteure,

V. GELARDLa présidente,

C. BRISSON

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24NT00750


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT00750
Date de la décision : 20/09/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. BRISSON
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. CATROUX
Avocat(s) : MEZIN SOCIETE D'AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 29/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-20;24nt00750 ?
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