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16/07/2024 | FRANCE | N°24NT00591

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 1ère chambre, 16 juillet 2024, 24NT00591


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 11 mars 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré.



Par un jugement n° 2209539 du 10 octobre 2023 le tribunal administratif de Nante

s a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 11 mars 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré.

Par un jugement n° 2209539 du 10 octobre 2023 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 février 2024, M. C..., représenté par Me Pollono, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 mars 2022 du préfet de la Loire-Atlantique ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de

1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

S'agissant de la régularité du jugement :

- le tribunal a omis de répondre au moyen tiré de ce que le préfet de la Loire-Atlantique s'est regardé lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile pour apprécier les risques personnels encourus en cas de retour en République du Congo ;

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- la décision est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'erreur de fait au regard de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, tant en ce qui concerne le refus de délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " qu'en ce qui concerne le refus de délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

- la précédente mesure d'éloignement dont il a fait l'objet ne lui a jamais été notifiée ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en méconnaissance des articles L. 611-3, R. 611-1 et R. 425-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que l'avis du collège de médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration était nécessaire ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 611-3 et R. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et médicale ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 mai 2024 le préfet de la

Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 janvier 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- l'arrêté du 1er avril 2021 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Penhoat,

- et les observations de Me Pavy substituant Me Pollono, représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant de la République démocratique du Congo né le 5 janvier 1993, déclare être entré en France le 1er novembre 2019. Sa demande de reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée par une décision du 31 août 2020 du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile en date du 19 janvier 2021. Après le rejet de sa demande de réexamen, l'intéressé a sollicité son admission au séjour pour motifs de santé et ses demandes ont été rejetées pour irrecevabilité par des décisions des 3 juin 2020 et 24 juin 2021. Il a sollicité par la suite, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 421-1 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 11 mars 2022, le préfet de la Loire-Atlantique a refusé son admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque ce délai sera expiré. M. B... relève appel du jugement du 10 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier que le premier juge n'a pas répondu au moyen, qui n'était pas inopérant, invoqué par M. C... et tiré de ce que la décision fixant le pays de destination est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet s'est regardé lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile pour apprécier les risques personnels encourus en cas de retour en République du Congo. Le jugement attaqué doit, en raison de cette omission, être annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions dirigées contre cette décision.

3. Il y a lieu de statuer immédiatement par la voie de l'évocation sur les conclusions de M. C... dirigées contre la décision fixant le pays de destination et par la voie de l'effet dévolutif de l'appel sur ses autres conclusions présentées devant le tribunal administratif de Nantes.

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, il ressort des mentions de l'arrêté contesté que le préfet de la Loire-Atlantique, après avoir rappelé le parcours administratif de M. C... et son maintien irrégulier sur le territoire postérieurement au rejet de sa demande d'asile, a fait état que l'intéressé, actuellement en licence informatique à l'université de Nantes, est célibataire et a un enfant né en 2012 qui réside en République démocratique du Congo et a vérifié qu'aucune circonstance ne faisait obstacle à une mesure d'éloignement. La seule circonstance que le préfet ne fait pas état du séjour de l'intéressé en Russie ni de la présence de sa grand-mère en France et mentionne à tort dans la décision contestée que celui-ci s'est prévalu d'un contrat à durée indéterminée alors qu'il avait produit une promesse d'embauche n'est pas suffisant pour démontrer qu'il n'aurait pas examiné sa situation personnelle, ce qui au demeurant ne ressort pas de l'arrêté attaqué.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail (...) ". Il ressort des pièces du dossier que M. C... n'était pas titulaire du visa requis par l'article L. 5221-2 du code du travail requis pour l'obtention d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet de la Loire-Atlantique a pu refuser, pour ce motif, de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 421-1.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. M. C... fait valoir qu'il réside en France depuis 2019, qu'il entretient une relation sentimentale avec une bénéficiaire de la protection internationale en France depuis l'été 2021, qu'il est investi dans diverses associations et que sa grand-mère, de nationalité française et avec qui il a des liens stables, est sur le territoire français. Cependant, alors que la relation sentimentale invoquée est récente, M. C... a vécu en République démocratique du Congo jusqu'à l'âge de 26 ans, et ne démontre pas être dépourvu de toutes attaches familiales dans son pays d'origine dès lors qu'y résident encore son enfant. Dans ces conditions, en prenant la décision contestée, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas commis d'erreur dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".

9. En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative doit d'abord vérifier si des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifient la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale ", ensuite, en cas de motifs exceptionnels, si la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " est envisageable. Dans ce dernier cas, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ".

10. D'une part, les éléments relatifs à sa situation en France dont fait état M. C..., tels que rappelés au point 4 du présent arrêt, ainsi que les circonstances que son état de santé serait fragile et qu'il a quitté la République démocratique du Congo il y a plusieurs années dans des circonstances particulières ne suffisent pas à établir que cette situation relèverait des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant son admission exceptionnelle au séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par suite, en refusant de délivrer un titre de séjour à M. C... sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de l'intéressé.

11. D'autre part, comme l'ont relevé à juste titre les premiers juges, le préfet ne s'est pas fondé sur l'absence de visa de long séjour ou sur l'absence de contrat de travail visé par la direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités pour refuser de délivrer à M. C... une carte de séjour portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " au titre de l'admission exceptionnelle au séjour prévue par les dispositions précitées. A ce titre, l'intéressé fait valoir qu'il a travaillé dix jours au mois d'avril 2021 dans le cadre d'une mission d'intérim pour la cueillette du muguet ainsi qu'en qualité de manutentionnaire auprès de l'entreprise Eurotex Discount dans le cadre d'un contrat de durée déterminée d'une durée de trois mois la même année et qu'il dispose d'une promesse d'embauche en date du 15 novembre 2021 tout en relevant que cet emploi relève de la liste des métiers dits " en tension " annexée à l'arrêté interministériel du 1er avril 2021 visé ci-dessus. Toutefois, un demandeur qui justifie d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité figurant dans la liste annexée à l'arrêté interministériel du 1er avril 2021 ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là même, des motifs exceptionnels exigés par la loi. Eu égard à cet emploi et aux autres éléments produits au dossier relatifs à la situation professionnelle, c'est sans erreur manifeste d'appréciation que le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas fait usage de son pouvoir discrétionnaire pour régulariser la situation de M. C....

12. En cinquième lieu, si le préfet a relevé à tort que le requérant s'est prévalu d'un contrat à durée indéterminée alors qu'il avait produit une promesse d'embauche et qu'il s'était soustrait à l'exécution d'une précédente obligation de quitter le territoire français, il résulte de l'instruction qu'il aurait pris la même décision sans commettre ces erreurs.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

13. En premier lieu, il convient d'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges le moyen tiré de ce que la décision contestée est entachée d'un défaut de motivation, moyen que M. C... réitère en appel sans apporter d'élément nouveau.

14. En deuxième lieu, il résulte des points 4 à 12 que le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté.

15. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. C... notamment au regard de ses problèmes de santé.

16. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. / (...) ". Aux termes de l'article R. 611-1 du même code : " Pour constater l'état de santé de l'étranger mentionné au 9° de l'article L. 611-3, l'autorité administrative tient compte d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que, dès lors qu'il dispose d'éléments d'information suffisamment précis permettant d'établir qu'un étranger, résidant habituellement en France, présente un état de santé susceptible de le faire entrer dans la catégorie des étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, le préfet doit, lorsqu'il envisage de prendre une telle mesure à son égard, et alors même que l'intéressé n'a pas sollicité le bénéfice d'une prise en charge médicale en France, recueillir préalablement l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII).

17. M. C... soutient en appel que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'un vice de procédure dès lors que le préfet de la Loire-Atlantique aurait dû solliciter l'avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration préalablement à sa décision en ce qu'il avait connaissance de son état de santé précaire dès lors qu'il a sollicité à plusieurs reprises son admission au séjour pour motifs de santé. Toutefois, le requérant n'établit pas, ni même n'allègue avoir, notamment par la production d'éléments médicaux nouveaux, informé avant le prononcé de la décision en cause le préfet de la gravité et de l'évolution de ses pathologies qui auraient dû conduire cette autorité à solliciter l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Par suite, le moyen tiré de ce qu'en l'absence d'un tel avis, la mesure d'éloignement en cause aurait été édictée au terme d'une procédure irrégulière ne peut qu'être écarté.

18. En cinquième lieu, M. C... soutient que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne pourrait pas bénéficier effectivement en République démocratique du Congo d'un traitement approprié. Il est constant que l'intéressé souffre d'une hypoacousie à l'oreille gauche ainsi que d'une myopéricardite. Si M. C... établit l'existence d'un suivi médical en France depuis le mois de mai 2020, dont deux épisodes d'hospitalisation en raison de sa myopéricardite en mai 2020 puis en février 2021, il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des certificats médicaux produits que son état de santé nécessiterait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Au surplus, il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de son pays d'origine, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Dès lors, en prenant une obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M. C..., le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas méconnu les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

19. En sixième et dernier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7. De même, le moyen tiré d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée sur sa situation personnelle et médicale doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés aux point 7 et 18.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

20. En premier lieu, la décision fixant le pays de nationalité de M. C... comme pays de son renvoi mentionne sa nationalité congolaise et précise que celui-ci n'établit pas que sa vie privée ou sa liberté sont menacées dans son pays d'origine ou qu'il y serait exposé à des peines ou traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, elle est suffisamment motivée en fait et en droit.

21. En deuxième lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée par le présent arrêt, doit être écarté le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence.

22. En troisième lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier, ni des termes de la décision contestée que le préfet de la Loire-Atlantique se serait senti lié par les décisions du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

23. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

24. M. C... soutient qu'en cas de retour en République démocratique du Congo, il risque de subir des traitements inhumains et dégradants en raison de fausses accusations portées à son encontre. Toutefois, alors d'ailleurs que la demande d'asile présentée par l'intéressé a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 31 août 2020, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 19 janvier 2021, la seule attestation rédigée par son conseil à Kinshasa, qui au demeurant n'a pas été considérée par les services de l'OFPRA comme présentant des garanties suffisantes d'authenticité, ne permet pas de justifier de la réalité de craintes personnelles et actuelles en cas de retour en République démocratique du Congo. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

25. En cinquième et dernier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7. De même, le moyen tiré d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée sur sa situation personnelle et médicale doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés aux point 7 et 18.

26. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé, d'une part, à demander l'annulation de l'arrêté du 11 mars 2022 du préfet de la Loire-Atlantique en tant qu'il fixe le pays de destination et, d'autre part, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2209539 du 10 octobre 2023 du tribunal administratif de Nantes est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de M. C... tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 11 mars 2022 en tant qu'il fixe le pays de destination.

Article 2 : Les conclusions de M. C... présentées devant le tribunal administratif de Nantes et tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 11 mars 2022 en tant qu'il fixe le pays de destination ainsi que le surplus de ses conclusions présentées en appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 28 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Quillévéré, président de chambre,

- M. Geffray président-assesseur,

- M. Penhoat, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 juillet 2024.

Le rapporteur

A. PENHOATLe président

G. QUILLÉVÉRÉ

La greffière

H. DAOUD

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°24NT00591 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24NT00591
Date de la décision : 16/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. QUILLÉVÉRÉ
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : CABINET POLLONO

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-16;24nt00591 ?
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