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02/07/2024 | FRANCE | N°23NT01727

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 5ème chambre, 02 juillet 2024, 23NT01727


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiée (SAS) Vigilis, la SAS Financière de Saint-Niel, la société à responsabilité limitée (SARL) Pondinn, la société civile immobilière (SCI) Etap Invest et la SARL Etape Pontivienne ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision implicite par laquelle la maire de la commune de Pontivy a refusé de dresser un procès-verbal d'infraction pour la réalisation d'une voie d'accès sans autorisation et le défaut de conformit

d'un accès au regard des arrêtés portant permis de construire initial et permis de construir...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Vigilis, la SAS Financière de Saint-Niel, la société à responsabilité limitée (SARL) Pondinn, la société civile immobilière (SCI) Etap Invest et la SARL Etape Pontivienne ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision implicite par laquelle la maire de la commune de Pontivy a refusé de dresser un procès-verbal d'infraction pour la réalisation d'une voie d'accès sans autorisation et le défaut de conformité d'un accès au regard des arrêtés portant permis de construire initial et permis de construire modificatif délivrés à la société civile immobilière (SCI) Saint-Niel le 9 octobre 2014 et le 21 septembre 2020 pour la construction d'une jardinerie et de cellules commerciales sur la parcelle cadastrée section BS n° 63 située dans la zone d'activités de Saint-Niel.

Par un jugement n° 2100107 du 14 avril 2023, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision implicite de la maire de Pontivy refusant de mettre en œuvre les pouvoirs de police qu'elle détient au titre de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme en tant seulement qu'elle porte refus de constater l'infraction tenant à la réalisation d'un accès nord-est non conforme au permis de construire délivré à la SCI Saint-Niel le 9 octobre 2014 et modifié par arrêté du 21 septembre 2020 (article 1er), a enjoint à la maire de Pontivy, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, de dresser procès-verbal de l'infraction commise par la SCI Saint-Niel et d'en transmettre sans délai copie au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Lorient (article 2), a mis à la charge de la commune de Pontivy le versement d'une somme totale de 1 500 euros aux sociétés Vigilis, Financière de Saint-Niel, Pondinn, Etap Invest Etape pontivienne (article 3) et a rejeté le surplus des conclusions des parties (article 4).

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 juin 2023 et 8 janvier 2024 (ce dernier n'ayant pas été communiqué), la commune de Pontivy, représentée par Me Rouhaud, demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 de ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;

2°) de rejeter les demandes présentées par les sociétés Vigilis, Financière de Saint-Niel, Pondinn, Etap Invest et Etape Pontivienne devant le tribunal administratif de Rennes ;

3°) de mettre à la charge des sociétés Vigilis, Financière de Saint-Niel, Pondinn, Etap Invest et Etape Pontivienne le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- aucune infraction tenant à la réalisation d'un accès non autorisé n'est constituée ;

- en l'absence d'infraction constituée, la maire n'avait aucune obligation de faire dresser un procès-verbal en application de l'article L. 480-4 du code de l'urbanisme et les premiers juges ne pouvaient enjoindre à la maire d'y procéder.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 décembre 2023, la société Vigilis, la société Financière de Saint-Niel, la société Pondinn, la société Etap Invest et la société Etape Pontivienne, représentées par Me Poilvet, concluent au rejet de la requête et demandent à la cour de mettre à la charge solidaire de la commune de Pontivy et de la SCI Saint-Niel le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent qu'aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.

La requête a été communiquée le 15 juin 2023 au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Par un courrier du 11 janvier 2024, les parties ont été informées sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative que la cour était susceptible de relever d'office un moyen d'ordre public tiré de l'irrégularité du jugement attaqué tiré de ce que le tribunal administratif de Rennes a regardé à tort la commune de Pontivy comme ayant la qualité de partie défenderesse à l'instance, alors même que la décision implicite contestée a été prise par le maire au nom de l'Etat en application de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme.

Par un courrier du 3 juin 2024, les parties ont été informées sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative que la cour était susceptible de relever d'office un moyen d'ordre public tiré de ce que la commune de Pontivy n'a pas qualité pour relever appel du jugement n° 2100107 du 14 avril 2023 du tribunal administratif de Rennes, dès lors qu'en prenant la décision implicite contestée refusant de mettre en œuvre les pouvoirs de police au titre de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme, la maire de Pontivy a agi en qualité d'autorité de l'Etat.

Des observations en réponse au courrier du 3 juin 2024 ont été produites par la commune de Pontivy, représentée par Me Rouhaud, et enregistrées le 6 juin 2024.

Des observations en réponse au courrier du 3 juin 2024 ont été produites par les sociétés Vigilis, Financière de Saint Niel, Pondinn, Etap Invest, Etape Pontivienne, représentées par Me Poilvet, et enregistrées le 7 juin 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Ody,

- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,

- les observations de Me Oueslati substituant Me Rouhaud, représentant la commune de Pontivy et celles de Me Poilvet, représentant la société Vigilis et autres.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 9 octobre 2014, la maire de la commune de Pontivy a délivré à la société Saint-Niel un permis de construire pour l'édification d'une jardinerie et de cellules commerciales sur la parcelle cadastrée section BS n° 63, située au sein de la zone d'activités de Saint-Niel. Ce permis de construire a été prorogé par deux arrêtés des 20 février 2017 et 3 septembre 2018. A l'occasion des travaux, une voie d'accès provisoire a été aménagée le long des parcelles cadastrées section BS n°s 61 et 69, afin de permettre aux engins de chantier d'accéder à la parcelle par son angle nord-est. Informées par la société pétitionnaire de ce que la voie provisoire allait devenir définitive, la société Vigilis, la société Financière de Saint-Niel, la société Pondinn, la société Etap Invest et la société Etape Pontivienne, propriétaires des parcelles voisines de la voie créée et des hôtels et restaurants implantés sur ces parcelles, ont adressé à la commune de Pontivy un courrier en date du 9 septembre 2020 demandant à la maire de dresser un procès-verbal d'infraction sur le fondement des articles L. 480-1 et L. 480-4 du code de l'urbanisme et de prendre un arrêté interruptif de travaux sur le fondement de l'article L. 480-2 du même code. La maire de Pontivy a implicitement rejeté leur demande. Par un jugement n° 2100107 du 14 avril 2023, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision implicite de la maire de Pontivy refusant de mettre en œuvre les pouvoirs de police qu'elle détient au titre de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme en tant seulement qu'elle porte refus de constater l'infraction tenant à la réalisation d'un accès nord-est non conforme au permis de construire délivré à la SCI Saint-Niel le 9 octobre 2014 et modifié par arrêté du 21 septembre 2020 (article 1er), a enjoint à la maire de Pontivy, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, de dresser procès-verbal de l'infraction commise par la SCI Saint-Niel et d'en transmettre sans délai copie au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Lorient (article 2), a mis à la charge de la commune de Pontivy le versement d'une somme totale de 1 500 euros aux sociétés Vigilis, Financière de Saint-Niel, Pondinn, Etap Invest Etape pontivienne (article 3) et a rejeté le surplus des conclusions des parties (article 4). La commune de Pontivy relève appel des articles 1er et 2 de ce jugement.

2. D'une part, aux termes de l'article R. 811-10 du code de justice administrative : " (...) Sauf dispositions contraires, les ministres intéressés présentent devant la cour administrative d'appel les mémoires et observations produits au nom de l'Etat. (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme : " Les infractions aux dispositions des titres Ier, II, III, IV et VI du présent livre sont constatées par tous officiers ou agents de police judiciaire ainsi que par tous les fonctionnaires et agents de l'Etat et des collectivités publiques commissionnés à cet effet par le maire ou le ministre chargé de l'urbanisme suivant l'autorité dont ils relèvent et assermentés. Les procès-verbaux dressés par ces agents font foi jusqu'à preuve du contraire. / (...) Lorsque l'autorité administrative et, au cas où il est compétent pour délivrer les autorisations, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ont connaissance d'une infraction de la nature de celles que prévoient les articles L. 480-4 et L. 610-1, ils sont tenus d'en faire dresser procès-verbal. / Copie du procès-verbal constatant une infraction est transmise sans délai au ministère public. (...) ". En outre, aux termes de l'alinéa 10 de l'article L. 480-2 du même code : " Dans le cas de constructions sans permis de construire ou d'aménagement sans permis d'aménager, ou de constructions ou d'aménagement poursuivis malgré une décision de la juridiction administrative suspendant le permis de construire ou le permis d'aménager, le maire prescrira par arrêté l'interruption des travaux ainsi que, le cas échéant, l'exécution, aux frais du constructeur, des mesures nécessaires à la sécurité des personnes ou des biens ; copie de l'arrêté du maire est transmise sans délai au ministère public. Dans tous les cas où il n'y serait pas pourvu par le maire et après une mise en demeure adressée à celui-ci et restée sans résultat à l'expiration d'un délai de vingt-quatre heures, le représentant de l'Etat dans le département prescrira ces mesures et l'interruption des travaux par un arrêté dont copie sera transmise sans délai au ministère public. ".

4. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'il a connaissance d'une infraction résultant de l'exécution de travaux en l'absence du permis ou de la déclaration requise, le maire est tenu de dresser un procès-verbal et de prescrire par arrêté l'interruption des travaux en cours et agit alors au nom de l'Etat en sa qualité d'auxiliaire de l'autorité judiciaire. Dès lors, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 811-10 du code de justice administrative, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires avait seul qualité pour relever appel du jugement du 14 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision implicite par laquelle la maire de la commune de Pontivy a refusé de dresser un procès-verbal d'infraction pour la réalisation d'un accès nord-est non conforme au permis de construire modificatif délivré le 21 septembre 2020 à la SCI Saint-Niel et a décidé d'une mesure d'injonction. Par suite, la requête de la commune de Pontivy doit être rejetée comme étant irrecevable.

5. Il y a lieu en conséquence de ce qui précède de rejeter la demande présentée par la commune de Pontivy sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la commune de Pontivy le versement à la société Vigilis, la société Financière de Saint-Niel, la société Pondinn, la société Etap Invest et la société Etape Pontivienne de la somme qu'elles demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Pontivy est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Vigilis et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Pontivy, à la société Vigilis, à la société Financière de Saint-Niel, à la société Pondinn, à la société Etap Invest, à la société Etape Pontivienne, à la société civile immobilière Saint-Niel et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Rivas, président de la formation de jugement,

- Mme Ody, première conseillère,

- Mme Dubost, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juillet 2024.

La rapporteure,

C. ODY

Le président de la formation

de jugement,

C. RIVAS Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT01727


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT01727
Date de la décision : 02/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. RIVAS
Rapporteur ?: Mme Cécile ODY
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : SCP TEN FRANCE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-02;23nt01727 ?
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