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25/06/2024 | FRANCE | N°23NT00575

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 1ère chambre, 25 juin 2024, 23NT00575


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013 à hauteur, respectivement d'un montant de 275 965 euros et 113 187 euros en droits et en pénalités, ainsi que des amendes pour achats de complaisance et pour paiement en espèces.



Par une ordonnance n°1804294 du 24 décembre

2021, la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Nantes lui a donné acte du désist...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 et 2013 à hauteur, respectivement d'un montant de 275 965 euros et 113 187 euros en droits et en pénalités, ainsi que des amendes pour achats de complaisance et pour paiement en espèces.

Par une ordonnance n°1804294 du 24 décembre 2021, la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Nantes lui a donné acte du désistement de sa demande.

Par un arrêt n° 22NT00462 du 8 juillet 2022, la cour administrative d'appel de Nantes, saisie d'un appel présenté par Mme A... B..., a annulé l'ordonnance n° 1804294 de la présidente de la quatrième chambre du tribunal administratif de Nantes du 24 décembre 2021 et a renvoyé l'affaire au tribunal où elle a été de nouveau enregistrée le 8 juillet 2022 sous le n° 2208812.

Par un jugement n° 2208812 du 30 décembre 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la requête Mme B....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 février 2023 et un mémoire enregistré le 5 octobre 2023, Mme B..., représentée par Me Martin demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 30 décembre 2022 ;

2°) de la décharger intégralement des rappels d'impôt sur le revenu tant en principal que majorations et intérêts de retard mis en recouvrement au titre de ses revenus 2012 et 2013 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du Code de Justice administrative.

Elle soutient que :

- la proposition de rectification du 7 décembre 2015 est insuffisamment motivée ; la complexité des formules et de la méthodologie utilisée par l'Administration fiscale ne lui ont pas permis de présenter utilement une défense.

- la méthode de reconstitution utilisée par l'administration est radicalement viciée dans son principe dès lors que la méthode est unique, complexe et repose sur dix termes de calcul ; les formules de calcul sont illisibles et des données extérieures à l'entreprise n'auraient pas dû être prises en compte, les données propres et des conditions d'exploitation de l'entreprise n'ayant pas été prises en compte ; les corrections appliquées ne sont pas expliquées ; la tonne a été retenue à tort comme unité de référence et a été appliquée en lieu et place des kilos ; l'activité a été arrêtée dès le 23 décembre 2013, ce qui n'a pas été pris en compte ; s'agissant de la variation des stocks sur certains types de métaux entre les entrées et les sorties, celle-ci s'explique par le traitement et le recyclage des métaux et conformément à la tolérance comptable applicable aux stocks difficilement valorisables, notamment en raison des différentes opérations nécessaires entre l'entrée et la sortie ; l'administration se fonde sur la seule analyse des données du logiciel de gestion Nessy qui n'a été recoupée avec aucune autre méthode ou données extérieures de nature à corroborer ces résultats ; la détermination du prix moyen ne peut trouver à s'appliquer à l'activité en cause ; la détermination du chiffre d'affaire reconstitué est hors de proportion avec l'activité et les capacités de l'entreprise ; il n'a pas été pris en compte l'arrêt de son activité ;

- les stocks établis selon la méthode de reconstitution sont erronés et il ne peut donc lui être reproché d'avoir minorer ceux-ci ;

- s'agissant des factures encaissées en 2014 pour un montant de 104 927 euros, elle n'a jamais admis le rattachement à l'exercice 2013 de ces produits ;

- les pénalités mises à sa charge ne sont pas fondées.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 août 2023 et un mémoire enregistré le 6 novembre 2023, le ministre de l'économie des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Viéville,

- les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.

- et les observations de Me Denais représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a exercé dans le cadre d'une entreprise individuelle une activité de récupération et de traitement de métaux en dernier lieu sur le territoire de la commune de Saint-Nazaire, jusqu'au 27 décembre 2013, date de cession de son fonds de commerce, l'activité de l'établissement ayant cependant perduré jusqu'au 30 juin 2014 date de vente du stock et de mise en conformité du terrain. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur les exercices clos en 2012, 2013 et jusqu'au 31 août 2014 pour la taxe sur la valeur ajoutée à l'issue de laquelle une proposition de rectification du 7 décembre 2015 portant sur des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu à hauteur de 275 965 euros en droits et en pénalités au titre de l'année 2012 et 246 789 euros en droits et en pénalités au titre de l'année 2013, correspondant à l'imposition dans ses mains des rehaussements opérés par le service en matière de bénéfices industriels et commerciaux. Ces rectifications ont été maintenues à la suite des observations de la contribuable et la réclamation présentée après la mise en recouvrement intervenue le 30 avril 2017 a été rejetée. Mme A... B... a alors saisi le tribunal administratif de Nantes aux fins de décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que des pénalités correspondantes. Par une ordonnance n° 1804294 du 24 décembre 2021, la présidente de la 4ème chambre du tribunal administratif de Nantes lui a donné acte du désistement d'office de sa demande. Par un arrêt n° 22NT00462 du 8 juillet 2022, la cour administrative d'appel de Nantes a toutefois annulé cette ordonnance et renvoyé l'affaire au tribunal de Nantes. Par jugement du 30 décembre 2022 dont Mme B... relève appel, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la requête de Mme B....

Sur les conclusions à fin de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations.

3. La proposition de rectification du 7 décembre 2015 mentionne tout d'abord les bases légales à partir desquelles la procédure de contrôle des données de gestion des fichiers des écritures comptables a été menée puis les conditions dans lesquelles un fichier général synthétisant l'ensemble des entrées et des sorties de stocks a été élaboré, la nature des traitements informatiques réalisés sur ce fichier ayant permis, d'une part, de révéler l'existence de factures anti ou post datées, une chronologie de factures non respectée, l'existence de régularisation de stocks d'entrée ou de sorties sans équivalence avec la réalité de l'exploitation de l'entreprise et, d'autre part, de reconstituer les stocks de l'entreprise à l'ouverture et à la clôture de chaque exercice et période vérifiée. La proposition de rectification détaille également les motifs du rejet de la comptabilité de Mme B... en raison de la clôture comptable tardive des exercices vérifiés et du maintien jusqu'aux 1er et 2 juin 2015 d'une comptabilité informatique à partir seulement d'un brouillard de caisse, de l'absence de pièces justificatives du stock, de différences existantes entre les dates mentionnées pour une même écriture entre le livre de police et la comptabilité, de l'existence de plusieurs lignes et plusieurs numéros de pièces pour un même numéro d'écriture et à l'existence de solde créditeur de caisse. Elle précise également l'absence de comptabilisation au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2013 de factures pour la somme totale de 104 927 euros. Elle mentionne par ailleurs que la dépense d'entretien du véhicule personnel de Mme B... n'a pas été effectuée dans l'intérêt de l'entreprise et que la dépense de changement de la chenille d'une tractopelle par des patins en caoutchouc constitue une immobilisation dès lors qu'elle a pour effet d'allonger la durée de vie de l'engin de chantier. Ainsi, et au regard de l'ensemble des éléments qui viennent d'être rappelés, la proposition de rectification du 7 décembre 2015 est suffisamment motivée en droit et en fait. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que cette proposition de rectification n'aurait pas été suffisamment motivée. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales précité doit, dès lors, être écarté.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

S'agissant de la charge de la preuve :

4. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions ou le comité mentionnés à l'article L. 59 ou le comité prévu à l'article L. 64 est saisi d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission ou le comité. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission ou du comité. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. / Elle incombe également au contribuable à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu, comme en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69. ".

5. En l'espèce, le service vérificateur a rejeté la comptabilité de l'entreprise individuelle de Mme B... comme étant dépourvue de caractère probant après avoir relevé la clôture comptable tardive des exercices contrôlés ayant permis le maintien jusqu'aux 1er et 2 juin 2015 d'une comptabilité informatique en mode brouillard de caisse, l'absence de pièces justificatives du stock, les différences existantes entre les dates mentionnées pour une même écriture entre le livre de police et la comptabilité, l'existence de plusieurs lignes et plusieurs numéros de pièces pour un même numéro d'écriture et l'existence de solde créditeur de caisse pour les exercices clos le 30 juin 2012 et le 30 juin 2013 et l'achat de ferraille passé en écriture comptable globalisée. Le service a ainsi suffisamment établi, comme cela lui incombe, le caractère non probant de la comptabilité de la requérante, et a pu l'écarter. Par ailleurs, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a, dans son avis du 30 juin 2016, d'une part, validé la méthode de reconstitution mise en œuvre par l'administration fiscale et sur laquelle se fondent les rehaussements en matière de bénéfices industriels et commerciaux et, d'autre part, décliné sa compétence quant à la détermination du revenu global imposable. Il suit de là que la requérante supporte la charge de la preuve du caractère exagéré du bien-fondé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu.

S'agissant de la méthode de reconstitution retenue par le service :

6. Pour reconstituer les chiffres d'affaires des exercices clos les 30 juin 2012, 30 juin 2013 et 31 décembre 2013, le service vérificateur a opéré un retraitement informatique des données issues d'un logiciel de gestion " Nessy " permettant la saisie des achats, l'édition des factures d'achats, l'édition du livre de police et la saisie des sorties et conservant en mémoire les prix et quantités en tonnes d'entrée et de sortie des matériaux. Ces données ont été complétées par les factures de ventes générées manuellement au vu des bordereaux récapitulatifs de pesées adressés par les acheteurs et par des factures d'achats recueillies dans le cadre du droit de communication. Le service a également procédé à des corrections d'erreurs manifestes de saisie de ventes qui s'avéraient supérieures au montant cumulé des achat et des stocks. Ces retraitement et recoupements ont permis de reconstituer les stocks existants au début et à la fin de chaque exercice vérifié. Il résulte ainsi de l'instruction et notamment de la proposition de rectification que la méthode de reconstitution mise en œuvre par le service qui reprend la méthodologie employée pour le traitement des données de gestion informatique a permis d'identifier la nature des métaux, les quantités mesurées en tonnes qui ont fait l'objet de transactions à l'achat et à la vente sur un exercice. Les quantités de métaux ont été valorisées au regard du cumul des achats ou des ventes la nature des métaux et le prix moyen à la tonne pour chaque nature de métaux à la vente et à l'achat a été fixé à partir des traitements informatiques. Le service a alors déterminé la quantité de métaux disponible sur les exercices et déterminé la valorisation en euros du stock final, les achats de métaux non déclarés ayant été valorisés en euros pour chaque exercice au prix d'achat moyen.

7. Mme B... soutient que la correction des anomalies dans les données informatiques ne permet de connaitre ni la nature de ces anomalies pas davantage que la modalité de la correction pratiquée et que les chiffres corrigés auraient dû être rapprochés de traitements informatiques d'entreprises ayant la même activité que la sienne. Toutefois, Mme B... ne produit aucune donnée d'entreprise équivalente à la sienne alors au demeurant que le service a valorisé les stocks à partir de données de gestion de l'entreprise qui lui sont propres. En outre, il résulte de l'instruction que le service a corrigé des disproportions manifestes entre les quantités de métaux renseignées en entrée et en sortie qui s'avéraient beaucoup trop importantes par rapport à la réalité de l'activité, n'étaient pas représentatives de mouvements physiques de métaux et pour lesquelles Mme B... n'a fourni aucune explication. Ces corrections, précisées dans les tableaux récapitulatifs présentés en annexe 3 et suivantes de la proposition de rectification du 7 décembre 2015 ont consisté à diviser certaines quantités par 10, 100 ou 1000. Enfin, Mme B... ne démontre pas que les écarts constatés par le service entre les tonnages des entrées et des sorties de matière auraient été corrigés par des écritures de régularisation.

8. Ensuite, l'appelante fait valoir que le prix unitaire moyen n'est pas applicable à son activité qui se mesure en kilogramme et non à la tonne. Cependant, l'unité de mesure utilisée dans le logiciel Nessy est la tonne. De plus, il résulte de l'instruction que les prix d'achat au kilogramme de métaux que Mme B... a pu mentionner au cours du contrôle sont comparables aux prix moyens calculés par tonnes. Par suite, le choix de la tonne comme unité de mesure des quantités de matériaux est sans incidence sur la méthode de reconstitution mise en œuvre.

9. Si Mme B... fait encore valoir que le prix des métaux est sujet à des fluctuations importantes de sorte que le service ne pouvait valablement retenir comme il l'a fait un prix moyen par exercice, il résulte de l'instruction que pour déterminer le prix moyen des métaux, il a été pris en compte chaque entrée et sortie de métaux en précisant le prix de revient et de revente à la tonne sans tenir compte des régularisations constatées correspondant à des changements de catégorie de métaux. Ainsi, le cours d'achat des métaux a été déterminé à partir des prix d'entrée ou de sortie tels que figurant dans le logiciel utilisé par Mme B... et dans les documents qui ont pu être consultés à l'occasion de la vérification. Dès lors, le prix moyen, issu des données figurant dans le logiciel Nessy de Mme B... a pu être valablement utilisé pour procéder aux valorisations des métaux.

10. Mme B... soutient que tous les achats figurent sur les registres de police et ont été facturés. Cependant, il résulte de l'instruction que tous les achats effectués n'ont pas été renseignés dans le logiciel Nessy et le service a constaté, au titre de chaque exercice, que certaines quantités de métaux détenues étaient insuffisantes pour expliquer le montant des ventes.

11. S'agissant enfin de l'incohérence des résultats de reconstitution de l'administration et en particulier de l'écart de 20 000 tonnes constaté entre les sorties cumulées sur les périodes vérifiées et les entrées cumulées, l'analyse des données de gestion par le service a permis de constater que des écritures de régularisation avaient été passées lors d'erreurs de catégorisation des métaux. Cependant, alors que chaque écriture de changement de catégorie devrait pouvoir être compensée, certaines écritures n'ont pas d'équivalence matière de sorte que, sur l'ensemble de la période vérifiée, il y a eu plus de sorties que d'entrées correspondantes. Ces données de gestion ne sont donc pas représentatives de mouvements physiques de métaux, mais de corrections informatiques seulement. Par ailleurs, si Mme B... fait valoir que l'entreposage des dizaines de milliers de tonnes reconstituées par le service n'est de toute évidence pas possible, l'administration fait valoir sans être contredite que les stocks finaux déterminés en fin d'exercice sont tout à fait compatibles avec les capacités de stockage.

12. Il résulte de ce qui précède que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'absence de caractère radicalement vicié dans son principe de la méthode employée pour reconstituer les chiffres d'affaires de l'activité de Mme B... au titre des exercices clos les 30 juin 2012, 30 juin 2013 et 31 décembre 2013.

S'agissant de la minoration des stocks :

13. Mme B... fait valoir que les rectifications apportées aux revenus imposables procèdent pour l'essentiel de la reconstitution opérée par l'administration et que cette méthode étant toutefois intégralement contestée et la minoration des stocks invoquée par l'administration n'étant pas établie, elle est par conséquent fondée à solliciter la décharge des rappels de droit correspondants et la réformation du jugement déféré sur ce point. Elle n'apporte toutefois aucun élément à l'appui de ses allégations alors par ailleurs qu'ainsi qu'il vient d'être dit, la méthode retenue par l'administration pour reconstituer les chiffres d'affaires des exercices clos les 30 juin 2012, 30 juin 2013 et 31 décembre 2013 n'apparait pas radicalement vicié dans son principe.

S'agissant du rattachement de factures non comptabilisées au titre de l'exercice clos en 2013:

14. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. / 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. / 2 bis. Pour l'application des 1 et 2, les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient la livraison des biens pour les ventes ou opérations assimilées et l'achèvement des prestations pour les fournitures de services. (...). ".

Si Mme B... conteste le rattachement des produits en cause à l'année 2013, il résulte cependant de l'instruction qu'elle a encaissé, sur la période du 1er janvier 2014 au 31 août 2014, période qui n'a pas fait l'objet du contrôle, des factures établies en 2013, pour un montant total de 104 927 euros dont le produit devait donc être rattaché au chiffre d'affaires de cet exercice. En outre, il résulte de l'instruction et des éléments retranscrits en annexe de la proposition de rectification que les ventes litigieuses ne figurent pas dans le journal des ventes pour la période du 1er janvier 2014 au 31 août 2014.

Sur les pénalités :

15. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...). ".

16. Pour appliquer aux rehaussements d'impôt sur le revenu mis à la charge de l'intéressée au titre de la période contrôlée une majoration de 40 %, l'administration fiscale a retenu que Mme B... ne pouvait ignorer ni ses obligations de tenue d'une comptabilité sincère et d'un livre de police contenant l'intégralité des renseignements prévues par les dispositions légales et réglementaires applicables ni que la cession de son fonds de commerce engendrerait des incidences fiscales au regard des immobilisations non cédées, ni ses obligations en matière de justification des mises au rebut, ces manquements étant par ailleurs répétés sur l'ensemble de la période contrôlée.

17. S'agissant du rattachement de produits à l'exercice clos en 2013, Mme B..., de par ses fonctions de dirigeante, ne pouvait de bonne foi ignorer les règles de rattachement des produits, alors que les ventes en cause ne figuraient pas dans le journal de ventes de 2014.

18. En revanche, s'agissant de la majoration appliquée sur les cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu afférentes à la reconstitution des stocks résultant de la reconstitution effectuée par le service, eu égard à la complexité de l'activité exercée par la requérante et eu égard aux problèmes de suivi dans la gestion des stocks, il ne résulte pas de l'instruction que Mme B... aurait eu la volonté d'éluder l'impôt. Il s'ensuit que Mme B... est fondée à demander à être déchargée de la pénalité afférentes aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu sur les années 2012 et 2013 résultant de la reconstitution des stocks.

19. Il résulte de ce tout qui précède que Mme B... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses conclusions à fin de décharge de la pénalité de 40% de l'article 1729 du code général des impôts appliquée sur les cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu sur les années 2012 et 2013 résultant de la reconstitution des stocks.

Sur les frais de justice :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie principalement perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à Mme B... la somme qu'elle réclame au titre des frais de justice.

D E C I D E :

Article 1er : Mme B... est déchargée de la pénalité de 40% de l'article 1729 du code général des impôts appliquée sur les cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu des années 2012 et 2013 résultants de la reconstitution des stocks.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 30 décembre 2022 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Quillévéré, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- M. Viéville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 juin 2024.

Le rapporteur

S. VIÉVILLELe président

G. QUILLÉVÉRÉ

La greffière

H. DAOUD

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23NT0057502


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00575
Date de la décision : 25/06/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. QUILLÉVÉRÉ
Rapporteur ?: M. Sébastien VIEVILLE
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : FIDUCIAL LEGAL BY LAMY

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-25;23nt00575 ?
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