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14/06/2024 | FRANCE | N°23NT03354

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 4ème chambre, 14 juin 2024, 23NT03354


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2021 par lequel le préfet de la Manche a rejeté sa demande de titre de séjour.



Par un jugement n° 2202325 du 26 mai 2023, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 17 novembre 2023, M. A..., représenté par Me Hourmant, demande à la cour :

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1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 26 mai 2023 ;



2°) d'annuler l'arrêté du 16 novemb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2021 par lequel le préfet de la Manche a rejeté sa demande de titre de séjour.

Par un jugement n° 2202325 du 26 mai 2023, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 novembre 2023, M. A..., représenté par Me Hourmant, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 26 mai 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2021 du préfet de la Manche ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Manche de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté est entaché d'incompétence dès lors qu'un nouveau préfet de la Manche a été nommé le 4 novembre 2021 ;

- le préfet de la Manche a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de sa situation personnelle ;

- il a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a méconnu l'article 9 de la convention franco-ivoirienne du 21 septembre 1992 et l'article L. 312-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par une ordonnance du 13 février 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 mars 2024.

Un mémoire produit pour M. A... a été enregistré le 25 avril 2024.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention franco-ivoirienne du 21 septembre 1992 relative à la circulation et au séjour des personnes ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Derlange, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant ivoirien, né le 22 janvier 2003, est entré en France en 2019. Le 17 juin 2021, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 16 novembre 2021, le préfet de la Manche a refusé de lui délivrer un titre de séjour. M. A... relève appel du jugement du 26 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, par un arrêté du 16 septembre 2019, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour, le préfet de la Manche a donné délégation à M. Laurent Simplicien, secrétaire général de la préfecture de la Manche, à l'effet de signer, notamment, tous arrêtés ou décisions relevant des attributions de l'État dans le département de la Manche, à l'exception de certains actes parmi lesquels ne figure pas la décision contestée. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date du 16 novembre 2021, à laquelle il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A..., le préfet de la Manche était toujours en fonction dans ce département et que son successeur n'a d'ailleurs été installé dans ses fonctions que le 22 novembre 2021. Dans ces conditions, la délégation de signature consentie à M. B... continuait à produire ses effets à la date de la décision contestée. Par suite, le moyen tiré de ce que cette décision aurait été prise par une autorité incompétente doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 9 de la convention franco-ivoirienne du 21 septembre 1992 : " Les ressortissants de chacun des Etats contractants désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation de niveau supérieur sur le territoire de l'autre Etat doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, justifier d'une attestation d'inscription ou de préinscription dans l'établissement d'enseignement choisi, ou d'une attestation d'accueil de l'établissement où s'effectue le stage, ainsi que, dans tous les cas, de moyens d'existence suffisants. / Les intéressés reçoivent un titre de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Ce titre de séjour est renouvelé annuellement sur justification de la poursuite effective des études ou du stage et de la possession de moyens d'existence suffisants. / Ces dispositions ne font pas obstacle à la possibilité d'effectuer dans l'autre Etat d'autres types d'études ou de stages de formation dans les conditions prévues par la législation applicable. ". Aux termes de l'article L. 312-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation aux dispositions de l'article L. 311-1, les étrangers titulaires d'un titre de séjour ou du document de circulation délivré aux mineurs en application de l'article L. 414-4 sont admis sur le territoire au seul vu de ce titre et d'un document de voyage. ".

4. L'article 9 de la convention franco-ivoirienne subordonne la délivrance du titre de séjour temporaire portant la mention " étudiant " à l'octroi d'un visa de long séjour, prévu à l'article 4 de la même convention. Contrairement à ce qui est soutenu par M. A..., il ne résulte ni de cette convention ni des dispositions de l'article L. 312-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la possession d'un document de circulation pour étranger mineur équivaudrait au visa de long séjour exigé pour l'obtention du titre de séjour étudiant prévu par la convention. Par suite, alors qu'il ne conteste pas le défaut de visa de long séjour qui lui est opposé, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Manche aurait dû lui délivrer un titre de séjour portant la mention " étudiant ".

5. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est célibataire, sans charge de famille en France. Il n'établit pas être dépourvu d'attaches en Côte d'Ivoire, où vit sa mère. S'il justifie avoir été pris en charge en France par son oncle, en vertu d'une délégation de l'autorité parentale consentie par sa mère, cette circonstance, dont il ressort des pièces du dossier qu'elle a été prise essentiellement pour lui permettre de poursuivre ses études en France, ne suffit pas à établir qu'il serait isolé dans son pays d'origine ou qu'il ne pourrait vivre qu'aux côtés de cet oncle. Il ne réside en France que depuis fin 2019 et malgré ses efforts d'intégration, notamment dans le cadre scolaire, il ne justifie ainsi pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels de nature à permettre son admission au séjour pour un motif en lien avec la " vie privée et familiale ". Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de la Manche aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de sa situation personnelle. Pour les mêmes motifs, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Manche aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou les dispositions de l'article L. 423-23 du du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 26 mai 2023, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt, qui rejette la requête de M. A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de l'intéressé aux fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à Me Hourmant et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Manche.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Derlange, président assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2024.

Le rapporteur,

S. DERLANGE

Le président,

L. LAINÉ

Le greffier,

C. WOLF

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT03354


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT03354
Date de la décision : 14/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINÉ
Rapporteur ?: M. Stéphane DERLANGE
Rapporteur public ?: Mme ROSEMBERG
Avocat(s) : HOURMANT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-14;23nt03354 ?
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