La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/06/2024 | FRANCE | N°23NT01937

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 5ème chambre, 04 juin 2024, 23NT01937


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 20 septembre 2012 par laquelle le conseil municipal de Clisson (Loire-Atlantique) a approuvé la modification n° 4 du plan local d'urbanisme de la commune.



Par un jugement n° 1301061 du 4 novembre 2014, le tribunal administratif de Nantes a annulé la délibération du 20 septembre 2012 portant modification n° 4 du plan local d'urbanisme de la commune de Clisson en tant

qu'elle ne réserve pas le cas de l'habitation implantée sur la parcelle ZH 136 et a pour effet d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 20 septembre 2012 par laquelle le conseil municipal de Clisson (Loire-Atlantique) a approuvé la modification n° 4 du plan local d'urbanisme de la commune.

Par un jugement n° 1301061 du 4 novembre 2014, le tribunal administratif de Nantes a annulé la délibération du 20 septembre 2012 portant modification n° 4 du plan local d'urbanisme de la commune de Clisson en tant qu'elle ne réserve pas le cas de l'habitation implantée sur la parcelle ZH 136 et a pour effet d'interdire toute possibilité de rénovation ou d'extension de ladite habitation.

Par un arrêt du 29 avril 2016, la cour administrative d'appel de Nantes a donné acte du désistement de la requête de la commune de Clisson tendant à l'annulation de ce jugement du

4 novembre 2014.

Procédure d'exécution devant la cour :

Mme A... a présenté, le 6 mars 2023, une demande tendant à obtenir l'exécution du jugement du 4 novembre 2014 du tribunal administratif de Nantes.

Par une ordonnance du 4 juillet 2023, le président de la cour administrative d'appel a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.

Par des mémoires, enregistrés les 3 août, 6 septembre et 5 décembre 2023 et le 15 février 2024, Mme B... A..., représentée par Me Le Brun, demande à la cour :

1°) d'enjoindre à la commune de Clisson de procéder à la modification du règlement du plan local d'urbanisme communal applicable à la parcelle cadastrée section ZH numéro 136 en vue de l'exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes du 4 novembre 2014, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à venir ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Clisson la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement du 4 novembre 2014 n'a jamais été exécuté s'agissant de la réglementation du plan local d'urbanisme opposable à sa parcelle ZH 136 ;

- il appartenait à la commune en application de l'article L. 153-7 du code de l'urbanisme d'élaborer de nouvelles règles, au terme d'une modification simplifiée du plan sur le fondement de l'article L. 153-45 du code de l'urbanisme, au besoin en demandant à la juridiction de lui préciser les modalités d'exécution de sa décision ;

- la commune n'établit pas que dans le cadre de la révision en cours du plan local d'urbanisme, son règlement réservera les possibilités d'extension et de rénovation des constructions existantes en zone Atf ;

- depuis lors ses différentes demandes d'autorisation d'extension ou de rénovation de sa construction ont été rejetées par la commune.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 19 juillet 2023 et le 4 octobre 2023, la commune de Clisson, représentée par Me Vic, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- le jugement du 4 novembre 2014 n'imposait pas de réviser le zonage de la parcelle ZH 136 ;

- Mme A... s'est vue délivrer des permis de construire les 11 décembre 2015 et

6 septembre 2018 autorisant la démolition et la reconstruction du bâtiment existant ;

- par ailleurs le zonage de la parcelle n'étant pas illégal, le règlement opposable ne peut autoriser des constructions en contradiction avec les règles législatives régissant les zones agricoles ;

- une modification ne pouvait intervenir qu'au terme d'une révision générale du plan local d'urbanisme en application du 3° du I de l'article L. 153-31 du code de l'urbanisme, laquelle a été prescrite en 2020 et devrait être approuvée en 2024 ; le règlement projeté de la zone Atf réservera des possibilités d'extension et de rénovation des constructions existantes ;

- cette révision permettra la pleine exécution du jugement.

Par une ordonnance du 16 février 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 8 mars 2024.

Par une lettre du 12 mars 2024, la cour a, sur le fondement des dispositions de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative, invité la commune de Clisson à produire des pièces en vue de compléter l'instruction.

Par un mémoire enregistré le 25 mars 2024, la commune de Clisson a, en réponse à cette mesure d'instruction, produit des pièces qui ont été communiquées le 26 mars 2024 à Mme A....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rivas,

- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,

- et les observations de Me Le Brun, représentant Mme A..., et de Me Vic, représentant la commune de Clisson.

Considérant ce qui suit :

Sur la demande d'exécution :

1. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. " et aux termes de l'article R. 921-2 du même code : " La demande d'exécution d'un jugement frappé d'appel, même partiellement, est adressée à la juridiction d'appel. / La demande d'exécution d'un arrêt rendu par une cour administrative d'appel est adressée à celle-ci. (...) ".

2. Par une délibération du 20 septembre 2012 le conseil municipal de Clisson (Loire-Atlantique) a approuvé la modification n° 4 de son plan local d'urbanisme, laquelle avait notamment pour objet de classer la parcelle cadastrée ZH 136 dont Mme A... est propriétaire, dans un sous-secteur Atf créé au sein d'une zone A. Ce sous-secteur Atf autorise l'aménagement de terrains familiaux permettant l'implantation de caravanes et d'équipements liés destinés aux gens du voyage. Par un jugement du tribunal administratif de Nantes du 4 novembre 2014, à la demande de Mme A..., cette délibération a été annulée en tant qu'elle ne réserve pas le cas de l'habitation implantée sur la parcelle ZH 136 et a pour effet d'interdire toute possibilité de rénovation ou d'extension de ladite habitation. Un arrêt du 29 avril 2016 de la cour administrative d'appel de Nantes a donné acte à la commune de Clisson du désistement de sa requête tendant à l'annulation de ce jugement. A la demande de Mme A..., par une ordonnance du 4 juillet 2023, le président de la cour administrative d'appel de Nantes a ouvert une procédure juridictionnelle en vue de prescrire les mesures d'exécution du jugement du 4 novembre 2014 du tribunal administratif de Nantes.

3. Aux termes de l'article L. 153-7 du code de l'urbanisme : " En cas d'annulation partielle par voie juridictionnelle d'un plan local d'urbanisme, l'autorité compétente élabore sans délai les nouvelles dispositions du plan applicables à la partie du territoire communal concernée par l'annulation. (...) ".

4. Le premier alinéa de l'article L. 153-7 du code de l'urbanisme fait obligation à l'autorité compétente d'élaborer, dans le respect de l'autorité de la chose jugée par la décision juridictionnelle ayant partiellement annulé un plan local d'urbanisme, de nouvelles dispositions se substituant à celles qui ont été annulées par le juge, alors même que l'annulation contentieuse aurait eu pour effet de remettre en vigueur, en application des dispositions de l'article L. 600-12 du même code ou de son article L. 174-6, des dispositions d'un plan local d'urbanisme ou, pour une durée maximale de vingt-quatre mois, des dispositions d'un plan d'occupation des sols qui ne méconnaîtraient pas l'autorité de la chose jugée par ce même jugement d'annulation.

5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que, quels qu'en soient les motifs, aucune modification des dispositions du plan local d'urbanisme opposables à la parcelle ZH 136 permettant de satisfaire aux obligations de l'article L. 153-7 du code de l'urbanisme n'est intervenue depuis le jugement du 4 novembre 2014, qu'il s'agisse du règlement écrit ou du règlement graphique. En conséquence, la commune doit être regardée comme n'ayant pas exécuté le jugement du 4 novembre 2014.

6. En deuxième lieu, contrairement à ce que demande Mme A..., l'exécution de ce jugement n'impose pas de soustraire ladite parcelle à un classement en zone agricole ou plus spécifiquement en zone Atf, mais uniquement de prévoir des dispositions qui, pour l'habitation implantée sur la seule parcelle ZH 136 à la date du jugement du 4 novembre 2014, rendront possible sa rénovation ou son extension.

7. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que peu après l'annulation juridictionnelle décidée par le tribunal administratif de Nantes le 4 novembre 2014, la commune de Clisson et Mme A... ont entamé une médiation et Mme A... s'est vu délivrer par le maire de Clisson les 11 décembre 2015 et 14 septembre 2018, des permis de construire autorisant d'une part la démolition et la reconstruction d'un espace de vie en commun et, d'autre part, un permis de construire pour la reconstruction d'un hangar sur sa parcelle cadastrée ZH 136.

8. En quatrième lieu, il résulte également de l'instruction que la commune de Clisson a entamé un processus de révision de son plan local d'urbanisme, par une délibération du 17 décembre 2020. Il ressort notamment des indications fournies par la commune qu'elle prévoit d'arrêter son projet de plan local d'urbanisme en 2024, pour une approbation en février 2025. Il résulte par ailleurs d'écrits réitérés du maire de Clisson adressés à la juridiction, ainsi qu'à Mme A... en juillet 2023, que pour la parcelle en débat il est prévu, à l'occasion de cette révision, de permettre l'extension des constructions à usage d'habitations existantes et la réalisation d'annexes à ces constructions à usage d'habitation existantes, sous certaines conditions non précisées, et de manière limitée. Le maire de Clisson précise également qu'il ne sera toutefois pas permis de réaliser un logement supplémentaire et que le stationnement de caravanes et de camping-cars sera autorisé de manière temporaire.

9. Dans ces conditions, eu égard à l'état d'avancement de ces travaux de révision du plan local d'urbanisme, et alors qu'il n'est pas allégué qu'il existerait désormais une urgence particulière à ce que ce plan local d'urbanisme soit modifié plus rapidement que le calendrier présenté, il est enjoint à la commune de Clisson de procéder à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes dans un délai de dix mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé ce délai. Dans cette perspective et dans l'attente, la commune de Clisson communiquera successivement à la cour administrative d'appel de Nantes, dès leur adoption, les parties utiles au regard de la présente instance de son projet de plan local d'urbanisme tel qu'il aura été arrêté par son conseil municipal, puis celles soumises à enquête publique, et enfin la version approuvée de son plan local d'urbanisme.

Sur les frais d'instance :

10. Il convient, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Clisson, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A....

D E C I D E :

Article 1er : Il est enjoint à la commune de Clisson d'adopter, dans le délai de dix mois à compter de la notification du présent arrêt, une délibération relative à son plan local d'urbanisme réservant le cas de l'habitation implantée sur la parcelle ZH 136 en n'interdisant pas toute possibilité de rénovation ou d'extension de ladite habitation.

Article 2 : La commune de Clisson communiquera successivement, dans cette attente, à la cour administrative d'appel de Nantes, dès leur adoption, les parties utiles au regard de la présente instance du projet de révision de son plan local d'urbanisme tel qu'il aura été arrêté par son conseil municipal, puis celles soumises à enquête publique, et enfin la version approuvée de son plan local d'urbanisme.

Article 3 : Une astreinte de cent cinquante euros par jour de retard est prononcée à l'encontre de la commune de Clisson si elle ne justifie pas de l'exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes du 4 novembre 2014 dans le délai mentionné à l'article 1er ci-dessus, et jusqu'à la date de cette exécution.

Article 4 : La commune de Clisson versera à Mme B... A... une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Clisson.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juin 2024.

Le rapporteur,

C. RIVAS

Le président,

S. DEGOMMIER

La greffière,

S. PIERODÉ

La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT01937


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT01937
Date de la décision : 04/06/2024
Type de recours : Exécution décision justice adm

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : SARL ANTIGONE

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-04;23nt01937 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award