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03/05/2024 | FRANCE | N°22NT02226

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 2ème chambre, 03 mai 2024, 22NT02226


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. E... B..., Mme A... B..., Mme F... B..., M. C... H... et M. D... H... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 12 mars 2019 par laquelle le conseil municipal de Divatte-sur-Loire a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune déléguée de Barbechat.



Par un jugement n° 1905049 du 14 juin 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.



Procédure devant la cour :
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Par une requête et des mémoires, enregistrés les 12 juillet 2022, 24 juillet 2023 et

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B..., Mme A... B..., Mme F... B..., M. C... H... et M. D... H... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 12 mars 2019 par laquelle le conseil municipal de Divatte-sur-Loire a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune déléguée de Barbechat.

Par un jugement n° 1905049 du 14 juin 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 12 juillet 2022, 24 juillet 2023 et

10 décembre 2023, M. E... B..., Mme A... B... et Mme F... B..., représentés par Me Giroud, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la délibération du 12 mars 2019 du conseil municipal de Divatte-sur-Loire ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Divatte-sur-Loire le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier pour ne pas avoir suffisamment motivé les raisons pour lesquelles il a écarté le moyen tiré de l'incohérence du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) avec l'orientation du projet d'aménagement et de développement durables visant à préserver les conditions de maintien et de développement des exploitations agricoles ;

- le règlement du plan local d'urbanisme (PLU) est incohérent avec l'orientation du projet d'aménagement et de développement durables visant à préserver les conditions de maintien et de développement des exploitations agricoles ;

- le PLU est incompatible avec le SCOT du Pays du Vignoble nantais en ce que ce plan a identifié des sentiers comme itinéraires piétonniers, à préserver au titre de l'article L. 151-38 du code de l'urbanisme, sans avoir engagé aucune coopération avec la profession agricole ;

- l'absence d'inscription des itinéraires en cause dans le plan départemental des itinéraires et des promenades de Loire-Atlantique témoigne d'une erreur manifeste d'appréciation entachant la désignation des itinéraires.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 28 novembre 2022 et 6 octobre 2023, la commune de Divatte-sur-Loire, représentée par Me Caradeux, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Montes-Derouet,

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,

- et les observations de Me Giroud, pour les consorts B..., et de Me Dubos, substituant Me Caradeux, pour la commune de Divatte-sur-Loire.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 20 octobre 2009, le conseil municipal de Barbechat a prescrit la révision du plan local d'urbanisme de cette commune. Par une délibération du 22 mars 2016, la commune nouvelle de Divatte-sur-Loire a repris et poursuivi la procédure de révision ainsi engagée par la commune de Barbechat, devenue commune déléguée. Par une délibération du

12 mars 2019, le conseil municipal de Divatte-sur-Loire a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune déléguée de Barbechat. Par un jugement du 14 juin 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande des consorts B... et des consorts H... tendant à l'annulation de la délibération du 12 mars 2019. Les consorts B... relèvent appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Pour écarter le moyen tiré de l'incohérence du classement de 80 % de la zone agricole en secteurs Ap et Av, où les constructions et installations liées à l'exploitation agricole sont interdites, avec l'objectif du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) de préservation des conditions de maintien et de développement des exploitations agricoles et viticoles, les premiers juges ont relevé, d'une part, que la zone A prévoit la possibilité de nouvelles constructions et installations et, d'autre part, que les restrictions au droit de construire prévues par le règlement applicable à ces secteurs sont cohérentes avec d'autres objectifs du PADD dont ceux visant à " préserver de manière générale les espaces à valeur agricole ", dont les secteurs bocagers ou semi-bocagers, à " préserver ces espaces naturels et agricoles de tout mitage d'espace ", à " préserver les grandes entités naturelles de la commune participant à la qualité et à la diversité des paysages " et à " préserver et valoriser des éléments structurants participant à la qualité du cadre de vie paysager de la commune ". Ce faisant, les premiers juges ont suffisamment motivé leur jugement. Il s'ensuit que le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité sur ce point.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ".

5. Pour apprécier la cohérence exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans ce projet, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan à une orientation ou à un objectif de ce projet ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

6. Il ressort des pièces du dossier que le plan local d'urbanisme prévoit le classement des espaces agricoles en zone A, pour une superficie totale de 156,6 ha, en secteur Av, pour une superficie totale de 173,6 ha et enfin en secteur Ap, pour une superficie totale de 493,1 ha. Ces deux derniers secteurs qui correspondent à des secteurs majeurs dans l'identité de la commune à travers leur aspect paysager, représentent respectivement 20,7 % et 59 % de la zone agricole. Si, ainsi que le soutiennent les requérants, le PADD préconise, dans la fiche 2 intitulée " Préserver et savoir valoriser les milieux naturels sensibles, les zones humides, la ressource en eau et les continuités écologiques ", la prise en compte de l'espace et de l'économie agricole et viticole de manière à préserver les conditions de maintien et de développement des exploitations agricoles et viticoles en termes notamment d'implantation de nouveaux bâtiments agricoles, cet objectif s'inscrit dans l'orientation visant plus largement à " préserver et valoriser les milieux naturels et agricoles, les continuités écologiques " que les auteurs du PLU ont également déclinée dans une fiche 1 intitulée " Préserver et savoir valoriser les milieux naturels sensibles, les zones humides, la ressource en eau et les continuités écologiques ", notamment en préservant " de manière générale les espaces à valeur agricole, en particulier des secteurs bocagers ou semi-bocagers (...) ainsi que des espaces agricoles ou en friches étant à même de participer à des continuités écologiques ". Le rapport de présentation expose à cet égard que l'agriculture tient " au sein du territoire une place centrale, puisque les pratiques agricoles sont un gage d'entretien et de maintien des prairies bocagères de fonds de vallée et de préservation de la biodiversité, de ces grandes continuités écologiques, mais aussi parce que les cultures agricoles participent directement à des continuités écologiques, en étant positionnées en espace de transition entre des vallons humides ou entre espaces boisés et vallons ". En interdisant, dans ces secteurs Ap et Av, les nouvelles constructions, y compris les constructions à destination d'exploitation agricole et viticole, à l'exception de celles qui sont nécessaires aux services publics ou qui présentent un intérêt collectif, le règlement ne contrarie pas les objectifs énoncés dans les fiches 1 et 2, alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de l'avis émis par la chambre d'agriculture, les sièges des exploitations agricoles existantes ont été classés en zone A où sont admises les nouvelles constructions et installations liées et nécessaires à l'exploitation agricole et viticole. Enfin, il ressort des pièces du dossier que les auteurs du PLU ont également entendu, dans une fiche 3 intitulée " Préserver et valoriser des éléments structurants participant à la qualité du cadre de vie paysager de la commune ", préserver les grandes entités naturelles de la commune participant à la qualité et à la diversité des paysages, dont la vallée de La Divatte et les paysages viticoles, entretenir et renouveler le patrimoine boisé et bocager et prendre en compte certains cônes de vue sur des points de repère forts du paysage, notamment des cônes de vue à fort intérêt paysager. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que le règlement du PLU serait incohérent avec le PADD doit être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme et les documents en tenant lieu ainsi que les cartes communales sont compatibles avec : / (...) 1° Les schémas de cohérence territoriale prévus à l'article L. 141-1 ; (...). ".

8. A l'exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les schémas de cohérence territoriale (SCOT) peuvent contenir des normes prescriptives, ceux-ci doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs. Les PLU sont soumis à une simple obligation de compatibilité avec ces orientations et objectifs. Si ces derniers peuvent être en partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux auteurs des PLU, qui déterminent les partis d'aménagement à retenir en prenant en compte la situation existante et les perspectives d'avenir, d'assurer, ainsi qu'il a été dit, non leur conformité aux énonciations des SCOT, mais leur compatibilité avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent. Pour apprécier la compatibilité d'un PLU avec un SCOT, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier.

9. Le document d'orientations et d'objectifs du SCOT du Pays du Vignoble nantais dispose en son point 5.6 " Développer le tourisme vert, l'agrotourisme et le tourisme patrimonial en s'appuyant sur le Pays d'art et d'histoire " que, s'agissant de " l'aménagement des liaisons douces " : " les communes en coopération avec la profession agricole et sous réserve d'une gestion efficace des conflits d'usage potentiels avec l'activité agricole doivent avant toute ouverture de nouvelles liaisons douces, analyser avec la profession agricole les incidences sur la fonctionnalité des espaces agricoles (morcellement, accessibilité, circulation des animaux et des engins). ".

10. Il ressort des pièces du dossier que le plan de zonage du PLU a identifié comme itinéraires piétonniers à préserver au titre de l'article L. 151-38 du code de l'urbanisme, les sentiers CR 81, 82, 103 et 108. Les allégations des requérants selon lesquelles ces chemins " n'existent pas " ou " auraient disparu " sont contredites par les pièces du dossier, notamment par les énonciations du jugement du tribunal de grande instance de Nantes rendu le 8 novembre 2018, confirmé par la cour d'appel de Rennes dans son arrêt du 12 mai 2020, devenu définitif après le rejet, le 3 juin 2021, par la Cour de cassation, du pourvoi formé contre lui, qui a reconnu, d'une part, leur existence depuis " un temps immémorial " en dépit des empiètements opérés, sur certains tronçons, par les requérants, dans le cadre de leur activité d'élevage, alors que des mises en demeure ont été réitérées par la commune de Barbechat, puis par la commune de Divatte-sur-Loire en vue de rendre à la circulation publique les chemins, d'autre part, leur qualité de chemin rural. Les requérants ne sauraient en outre contester la qualité de chemin rural au sentier n° 103 dont la disparition et l'absence d'ouverture à l'usage du public ne sont pas davantage établies par les pièces du dossier. Il s'ensuit que la qualification de " liaisons douces " de ces chemins par le PLU ne constitue pas une ouverture de nouvelles liaisons douces au sens et pour l'application des dispositions précitées du document d'orientations et d'objectifs du SCOT. Par ailleurs, et en tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que l'ouverture complète au public des chemins ruraux litigieux a fait l'objet par le passé, notamment en 2015 à l'occasion de la mise à jour par la commune de Barbechat de son recensement des chemins ruraux, de plusieurs réunions de conciliation avec la chambre d'agriculture de la Loire-Atlantique, dont certaines en présence des consorts B..., malgré le refus persistant de ces derniers de mettre fin aux empiètements sur ces chemins. Le moyen tiré de ce que le PLU applicable sur la commune déléguée de Barbechat serait sur ce point incompatible avec le SCOT du Pays du Vignoble Nantais doit, par suite, être écarté.

11. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 151-38 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut préciser le tracé et les caractéristiques des voies de circulation à conserver, à modifier ou à créer, y compris les rues ou sentiers piétonniers et les itinéraires cyclables, les voies et espaces réservés au transport public. (...) ".

12. La seule circonstance que les chemins en cause ne seraient pas répertoriés dans le plan départemental des itinéraires et des promenades de Loire-Atlantique ne permet pas de révéler l'erreur manifeste d'appréciation qui entacherait leur identification comme itinéraires piétonniers à préserver au titre de l'article L. 151-38 du code de l'urbanisme. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit, par suite, et en tout état de cause, être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Divatte-sur-Loire, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que les consorts B... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge des consorts B... une somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Divatte-sur-Loire et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête des consorts B... est rejetée.

Article 2 : Les consorts B... verseront à la commune de Divatte-sur-Loire une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B..., à Mme A... B..., à Mme F... B... et à la commune de Divatte-sur-Loire.

Délibéré après l'audience du 9 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de chambre,

- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,

- M. Dias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 mai 2024.

La rapporteure,

I. MONTES-DEROUET

La présidente,

C. BUFFET

La greffière,

M. G...

La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT02226


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT02226
Date de la décision : 03/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. BUFFET
Rapporteur ?: Mme Isabelle MONTES-DEROUET
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : SELARL CARADEUX CONSULTANTS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-03;22nt02226 ?
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