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12/04/2024 | FRANCE | N°22NT03926

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 2ème chambre, 12 avril 2024, 22NT03926


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 5 décembre 2019 par laquelle le conseil municipal de Couffé (Loire-Atlantique) a approuvé la révision générale du plan local d'urbanisme de la commune, en tant qu'elle classe en zone A la parcelle cadastrée section ZX n°150 située au lieudit du Bas Vieux Couffé ainsi que la décision du 6 mai 2020 par laquelle le maire a rejeté leur recours gracieux.



Par un jugem

ent n° 2005412 du 18 octobre 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 5 décembre 2019 par laquelle le conseil municipal de Couffé (Loire-Atlantique) a approuvé la révision générale du plan local d'urbanisme de la commune, en tant qu'elle classe en zone A la parcelle cadastrée section ZX n°150 située au lieudit du Bas Vieux Couffé ainsi que la décision du 6 mai 2020 par laquelle le maire a rejeté leur recours gracieux.

Par un jugement n° 2005412 du 18 octobre 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 décembre 2022, M. et Mme A..., représentés par

Me Viaud, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la délibération du 5 décembre 2019 par laquelle le conseil municipal de Couffé a approuvé la révision générale du plan local d'urbanisme de la commune en tant qu'elle classe en zone A la parcelle cadastrée section ZX n°150 ainsi que la décision du 6 mai 2020 portant rejet de leur recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Couffé le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le classement de leur parcelle est incompatible avec le SCOT du Pays d'Ancenis ; l'axe 1 du document d'orientation et d'objectifs du SCOT prescrit que, si les extensions, dans les hameaux, sont proscrites, le comblement des dents creuses est permis ; il s'agit d'une prescription qui s'impose au PLU ; leur parcelle constitue une dent creuse ;

- le classement de leur parcelle est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; le hameau dans lequel est située la parcelle présente un caractère urbanisé ; cette parcelle est desservie par les réseaux publics et la voirie communale ; elle est dénuée de toute valeur agronomique, biologique et écologique ; sa proximité d'autres habitations et sa taille rendent impossible toute exploitation agricole ; le hameau ne s'insère pas dans un espace agricole et est éloigné de toute exploitation agricole ; leur parcelle comme le hameau ne participent pas de la préservation du potentiel des terres agricoles de la commune ; le maintien du classement de la parcelle en zone U ne porterait pas atteinte au parti d'aménagement retenu par les auteurs du PLU.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2023, la commune de Couffé, représentée par Me Rouhaud, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. et Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Montes-Derouet,

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,

- et les observations de Me Noury, substituant Me Viaud, pour M. et Mme A... et D..., substituant Me Rouhaud, pour la commune de Couffé.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 16 juillet 2015, le conseil municipal de Couffé (Loire-Atlantique) a prescrit la révision générale du plan local d'urbanisme communal. Par une délibération du

6 décembre 2018, le conseil municipal a arrêté le projet de plan local d'urbanisme. Par une délibération du 5 décembre 2019, la commune de Couffé a approuvé la révision générale du plan local d'urbanisme. Par un jugement du 18 octobre 2022, dont relèvent appel M. et Mme A..., le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la délibération du 5 décembre 2019 en tant qu'elle procède au classement en zone A de la parcelle cadastrée à la section ZX n°150 dont ils sont propriétaires ainsi que de celle de la décision du 6 mai 2020 par laquelle le maire a rejeté leur recours gracieux.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, en vertu de l'article L.142-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige, les plans locaux d'urbanisme doivent être compatibles avec les schémas de cohérence territoriale. Aux termes de l'article L. 141-5 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Dans le respect des orientations définies par le projet d'aménagement et de développement durables, le document d'orientation et d'objectifs détermine :/ 1° Les orientations générales de l'organisation de l'espace et les grands équilibres entre les espaces urbains et à urbaniser et les espaces ruraux, naturels, agricoles et forestiers ;/ 2° Les conditions d'un développement urbain maîtrisé et les principes de restructuration des espaces urbanisés, de revitalisation des centres urbains et ruraux, de mise en valeur des entrées de ville, de valorisation des paysages et de prévention des risques ;/ 3° Les conditions d'un développement équilibré dans l'espace rural entre l'habitat, l'activité économique et artisanale, et la préservation des sites naturels, agricoles et forestiers. /Il assure la cohérence d'ensemble des orientations arrêtées dans ces différents domaines ". Aux termes de l'article L. 141-9 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Pour la réalisation des objectifs définis à l'article L. 141-5, le document d'orientation et d'objectifs peut, en fonction des circonstances locales, imposer préalablement à toute ouverture à l'urbanisation d'un secteur nouveau : / 1° L'utilisation de terrains situés en zone urbanisée et desservis par les équipements mentionnés à l'article L. 111-11 (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'à l'exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les schémas de cohérence territoriale peuvent contenir des normes prescriptives, ceux-ci doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs. Les plans locaux d'urbanisme sont soumis à une simple obligation de compatibilité avec ces orientations et objectifs. Si ces derniers peuvent être en partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux auteurs des plans locaux d'urbanisme, qui déterminent les partis d'aménagement à retenir en prenant en compte la situation existante et les perspectives d'avenir, d'assurer, ainsi qu'il a été dit, non leur conformité aux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais leur compatibilité avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent. Pour apprécier la compatibilité d'un plan local d'urbanisme avec un schéma de cohérence territoriale, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier.

4. Il ressort des pièces du dossier que le document d'orientation et d'objectifs (DOO) du schéma de cohérence territoriale (SCOT) du pays d'Ancenis expose, dans l'axe 1 " Un pays rayonnant et équilibré ", qu'il convient de " préserver les villages et hameaux en maîtrisant leur croissance et en maintenant les services et équipements de première nécessité ". A cette fin, ce document affirme " la nécessité de la maîtrise de la croissance urbaine, à décliner à l'intérieur des communes tel que suit : Le bourg est le lieu privilégié du développement urbain dans le souci de confortation et de proximité des équipements et des services. Dans les hameaux, les extensions sont proscrites mais le comblement des dents creuses est permis (...) ". Si, dans le cadre de la maitrise de la croissance urbaine qu'il préconise, le DOO du SCOT proscrit, s'agissant des hameaux, leur extension tout en permettant des constructions nouvelles " par comblement des dents creuses ", cette orientation ne saurait être regardée, contrairement à ce que soutiennent les requérants, comme imposant aux auteurs des plans locaux d'urbanisme (PLU) de prévoir l'urbanisation des " dents creuses " susceptibles d'être identifiées dans les hameaux. Il en résulte que les auteurs du PLU de la commune de Couffé n'ont pas entaché leur délibération d'incompatibilité avec le SCOT en décidant, en vue de mettre fin à l'urbanisation rampante dans les hameaux au détriment des espaces naturels et agricoles, urbanisation que la commune de Couffé a connue sous l'empire du précédent PLU, de concentrer l'essentiel du développement urbain sur le bourg de Couffé et d'exclure toute possibilité de constructions nouvelles dans les hameaux, y compris dans les dents creuses. Le moyen tiré de l'incompatibilité de la délibération contestée avec le SCOT en tant qu'elle classe en zone A la parcelle des requérants doit, par suite, être écarté.

5. En second lieu, en vertu de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme, le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme définit notamment " Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques ". Aux termes de l'article L. 151-9 du même code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes de l'article R. 151-22 du même code : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ". L'article R. 151-23 du même code précise que " Peuvent être autorisées, en zone A : / 1° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ou au stockage et à l'entretien de matériel agricole par les coopératives d'utilisation de matériel agricole agréées au titre de l'article L. 525-1 du code rural et de la pêche maritime ; / 2° Les constructions, installations, extensions ou annexes aux bâtiments d'habitation, changements de destination et aménagements prévus par les articles L. 151-11, L. 151-12 et L. 151-13, dans les conditions fixées par ceux-ci. ".

6. Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.

7. Il appartient par ailleurs aux auteurs d'un plan local d'urbanisme (PLU) de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce PLU, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

8. Si, pour apprécier la légalité du classement d'une parcelle en zone A, le juge n'a pas à vérifier que la parcelle en cause présente, par elle-même, le caractère d'une terre agricole et peut se fonder sur la vocation du secteur auquel cette parcelle peut être rattachée, en tenant compte du parti urbanistique retenu ainsi que, le cas échéant, de la nature et de l'ampleur des aménagements ou constructions qu'elle supporte, ce classement doit cependant être justifié par la préservation du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles de la collectivité concernée, à plus forte raison lorsque les parcelles en cause comportent des habitations voire présentent un caractère urbanisé.

9. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée section ZX n° 150 dont les requérants contestent le classement en zone A se situe dans le hameau du Bas Vieux Couffé, distant d'environ 1 km du bourg, qui s'inscrit dans un vaste espace, boisé à l'ouest et agricole à l'est. Regroupant une quinzaine de constructions disséminées le long de la route du même nom, le hameau, qui a été intégralement classé en zone A, ne saurait être regardé comme constituant, contrairement à ce que soutiennent les requérants, un secteur urbanisé de la commune, les auteurs du PLU n'ayant à cet égard identifié comme secteur urbanisé que le bourg ainsi que les secteurs du Chêne Pierre, à proximité immédiate du bourg et du village des Mazeries. Si la parcelle en litige, d'une contenance de 2 569 m², s'insère entre deux parcelles bâties au nord et au sud et si elle est desservie par les réseaux, il est constant que, d'aspect naturel, elle ne supporte aucune construction et s'ouvre à l'est sur de vastes parcelles agricoles que les auteurs du PLU ont entendu préserver, ainsi qu'il ressort du projet d'aménagement et de développement durables (PADD), en excluant dans les hameaux toute construction nouvelle non directement liée et nécessaire à l'exploitation agricole, pour préserver les conditions de maintien et de développement des exploitations agricoles, valoriser des espaces pérennes pour l'agriculture et rompre, ainsi que l'expose le rapport de présentation, avec la forte dispersion d'un habitat résidentiel en campagne, source de conflits d'usage avec l'activité agricole, que le PLU antérieur avait autorisée. A supposer établie l'allégation selon laquelle la parcelle en cause serait elle-même dépourvue de toute valeur agronomique, biologique et écologique, cette circonstance est sans incidence sur la légalité du classement contesté dès lors qu'il ressort des pièces du dossier qu'elle participe, eu égard à sa situation, de la préservation du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles immédiatement environnantes. Sont également sans incidence sur la légalité de ce classement, les circonstances selon lesquelles la proximité des habitations voisines et la taille de la parcelle des requérants rendraient impossible toute exploitation agricole. Enfin, les requérants ne peuvent utilement soutenir, à l'encontre du classement contesté, que la commune de Couffé aurait légalement pu retenir un classement différent de la parcelle, notamment, en zone UM.

10. Il résulte des développements qui précèdent qu'eu égard aux caractéristiques propres de la parcelle cadastrée à la section ZX sous le n° 150 et au parti d'urbanisme retenu, le classement, par la délibération du 5 décembre 2019 du conseil municipal de Couffé, de cette parcelle en zone A n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Couffé, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme A... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme A... le versement à la commune de Couffé d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : M. et Mme A... verseront à la commune de Couffé une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Mme C... A... et à la commune de Couffé.

Délibéré après l'audience du 12 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de chambre,

- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,

- M. Dias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 avril 2024.

La rapporteure,

I. MONTES-DEROUET

La présidente,

C. BUFFET

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT03926


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03926
Date de la décision : 12/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. BUFFET
Rapporteur ?: Mme Isabelle MONTES-DEROUET
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : PARTHEMA 3

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-12;22nt03926 ?
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