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29/03/2024 | FRANCE | N°22NT02524

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 2ème chambre, 29 mars 2024, 22NT02524


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 5 avril 2019 par laquelle le conseil métropolitain de Nantes Métropole a approuvé le plan local d'urbanisme de Nantes Métropole.



Par un jugement n° 1906072 du 28 juin 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour :



Par une requête et des mémoires, enregistrés les 2 août 2

022, 10 janvier et 1er février 2023, M. A..., représenté par Me Bardoul, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 5 avril 2019 par laquelle le conseil métropolitain de Nantes Métropole a approuvé le plan local d'urbanisme de Nantes Métropole.

Par un jugement n° 1906072 du 28 juin 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 2 août 2022, 10 janvier et 1er février 2023, M. A..., représenté par Me Bardoul, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 juin 2022 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la délibération du 5 avril 2019 du conseil de Nantes Métropole approuvant le plan local d'urbanisme métropolitain ;

3°) de mettre à la charge de Nantes Métropole la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le classement en zone Ad de ses parcelles cadastrées section EB sous les nos 417 et 419 est entaché d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation ; ce classement n'est pas cohérent avec les orientations du projet d'aménagement et de développement durable (PADD) ;

- le classement litigieux porte une atteinte injustifiée à son droit de propriété garanti par l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 2 décembre 2022 et 25 janvier 2023, Nantes Métropole, représentée par la SELARL MRV Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- la code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dias, rapporteur,

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,

- les observations de Me Bardoul, représentant M. A... et de Me Vic, représentant Nantes Métropole

Une note en délibéré a été enregistrée pour M. A..., le 12 mars 2024.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 17 octobre 2014, le conseil communautaire de la communauté urbaine Nantes Métropole (Loire-Atlantique) a prescrit l'élaboration de son plan local d'urbanisme, a approuvé les objectifs poursuivis et a défini les modalités de la concertation. Les orientations du projet d'aménagement et de développement durables ont été délibérées en séance du 28 juin 2016. Par une délibération du même jour, le conseil métropolitain de Nantes Métropole a décidé que l'ensemble des dispositions contenues aux articles R. 151-1 à R. 151-55 du code de l'urbanisme dans leur rédaction en vigueur au 1er janvier 2016 serait applicable au futur plan local d'urbanisme. Par une délibération du 13 avril 2018, le conseil métropolitain a arrêté le projet de plan local d'urbanisme. L'enquête publique a eu lieu du 6 septembre au

19 octobre 2018. Par une délibération du 5 avril 2019, le conseil métropolitain de Nantes Métropole a approuvé le plan local d'urbanisme. M. A..., propriétaire des parcelles cadastrées à la section EB sous les nos 417 et 419, situées Chemin de la Métairie, relève appel du jugement du 28 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération 5 avril 2019 approuvant le plan local d'urbanisme métropolitain.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 151-2 du code de l'urbanisme : " Le plan local d'urbanisme comprend : 1° Un rapport de présentation ; 2° Un projet d'aménagement et de développement durables ; 3° Des orientations d'aménagement et de programmation ; 4° Un règlement ; 5° Des annexes. / Chacun de ces éléments peut comprendre un ou plusieurs documents graphiques. Ces documents graphiques peuvent contenir des indications relatives au relief des espaces auxquels il s'applique. ". Aux termes de l'article L. 151-5 du même code dans sa version applicable au litige : " Le projet d'aménagement et de développement durables définit : 1° Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques ; 2° Les orientations générales concernant l'habitat, (...) le développement économique et les loisirs, retenues pour l'ensemble de l'établissement public de coopération intercommunale ou de la commune. / Il fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain. (...) ". Aux termes de l'article L. 151-8 du même code : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ".

3. Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

4. Il ressort des pièces du dossier que le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) du plan local d'urbanisme métropolitain exprime, par une orientation stratégique thématique intitulée " Dessiner la métropole nature ", la " volonté d'une plus grande préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers pour qu'ils ne soient désormais plus au service des projets urbains mais constitutifs des projets d'aménagement " et énonce l'objectif de " Réduire de 50 % le rythme moyen annuel de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers ", en poursuivant un développement tourné vers le renforcement des centralités, d'une part, et en limitant l'étalement urbain, pour préserver les espaces agricoles, naturels et forestiers, d'autre part. Pour atteindre cet objectif, le PADD rappelle que " La mobilisation de toutes les communes, chacune en fonction de ses capacités et à son échelle, doit s'inscrire dans l'objectif de rechercher dans le tissu urbain constitué des espaces de renouvellement urbain, de maîtriser les extensions urbaines et de limiter très fortement le développement des hameaux " et prévoit de prioriser le développement dans l'enveloppe urbaine. Il indique enfin que " dans cette logique, les densités les plus importantes sont attendues à l'intérieur du périphérique et sur ses franges " pour " qu'au moins 80 % du développement urbain à l'horizon 2030 se réalise au sein de l'enveloppe urbaine, et que les 3/4 de la production de logements se réalisent à l'intérieur du périphérique et dans les centralités en extra-périphérique. ".

5. Il ressort des pièces du dossier que les auteurs du plan local d'urbanisme métropolitain ont délimité, à l'ouest de l'agglomération, une vaste zone Ad (espaces agricoles durables) correspondant aux espaces dont la vocation agricole est pérenne et où seules les constructions nouvelles liées à une exploitation agricole sont permises, qui inclut le secteur sud-ouest du territoire de Saint-Herblain, dans lequel se concentre l'essentiel de l'activité agricole de cette commune, en particulier aux lisières ouest du hameau de Chasseloire, dans lequel se situent les deux parcelles, appartenant M. A..., cadastrées section EB sous les nos 417 et 419, d'une contenance totale de 1 918 m². S'il est vrai que ces parcelles se trouvent non loin de la zone industrielle et commerciale Atlantis et de la route nationale N 444, elles se situent à l'extérieur du périphérique nantais et en dehors des centralités mentionnées au plan d'aménagement et de développement durables, dans un secteur à dominante rurale, identifié comme tel par le cahier communal de Saint-Herblain, annexé au plan local d'urbanisme contesté. Il suit de là que le classement en zone Ad des parcelles en cause n'est pas incohérent avec les orientations stratégiques du PADD, notamment celles tendant à ce " qu'au moins 80 % du développement urbain à l'horizon 2030 se réalise au sein de l'enveloppe urbaine et que les 3/4 de la production de logements se réalisent à l'intérieur du périphérique et dans les centralités en extra-périphérique ". Le moyen tiré de ce que ce classement ne serait pas cohérent avec le PADD doit, par suite, être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. ". L'article R. 151-23 du même code précise : " Peuvent être autorisées, en zone A : / 1°-Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ou au stockage et à l'entretien de matériel agricole par les coopératives d'utilisation de matériel agricole agréées au titre de l'article L. 525-1 du code rural et de la pêche maritime ; / 2° Les constructions, installations, extensions ou annexes aux bâtiments d'habitation, changements de destination et aménagements prévus par les articles L. 151-11, L. 151-12 et L. 151-13, dans les conditions fixées par ceux-ci. "

7. D'une part, il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.

8. D'autre part, il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

9. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles cadastrées section EB sous les nos 417 et 419 ne supportent pas d'autre construction qu'un abri de jardin en tôle, et forment un seul tènement entouré, sur trois de ses côtés, par des terrains eux-mêmes vierges de toute construction. Elles s'insèrent, ainsi, dans un îlot de terrains nus, d'une surface totale d'un peu plus d'un hectare, entre le Chemin des Métairies, à l'ouest, et le hameau de Chasseloire, à l'est. Bien que proches de ce hameau, classé en secteur UMe, ces parcelles qui ne se trouvent pas dans le périmètre à l'intérieur duquel le tissu bâti existant est en continuité et forme un ensemble morphologique cohérent, se situent en dehors de son enveloppe urbaine, contrairement à ce que soutient M. A.... Si le rapport de l'expert foncier mandaté par le requérant conclut que les parcelles cadastrées section EB nos 417 et 419 sont caractérisées par un sol limoneux-sableux, très acide, pauvre en nutriments ainsi qu'en termes d'activité biologique, qu'elles ne peuvent être amendées par des engrais, en raison notamment de la proximité de deux maisons d'habitation, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'îlot de terrains nus auquel s'intègre ce tènement serait lui-même dépourvu de tout potentiel agronomique et économique, alors que d'importantes surfaces agricoles sont exploitées, à moins de 100 mètres à l'ouest de la parcelle EB n°417, de l'autre côté du chemin qui la longe. La circonstance que l'examen du registre parcellaire graphique des dix dernières années indique qu'aucune activité agricole n'a été déclarée sur les parcelles de l'îlot en question ne permet pas davantage de conclure à l'absence de potentiel agricole, notamment pour le pâturage. Dans ces conditions, et sans qu'y fasse obstacle le fait que ces deux parcelles sont desservies par les réseaux publics d'assainissement et d'eau, leur classement en zone Ad concourt ainsi à la préservation du potentiel agronomique, biologique ou économique du secteur. Dans ces conditions, et compte tenu du parti d'aménagement retenu par les auteurs du plan local d'urbanisme de " réduire de 50 % le rythme annuel de consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers ", de " prioriser le développement dans l'enveloppe urbaine " et de " limiter très fortement le développement des hameaux ", le classement en zone Ad des parcelles de M. A... n'est entaché ni d'une erreur de fait ni d'une erreur manifeste d'appréciation.

10. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ". Il résulte de ces stipulations qu'une ingérence dans le droit de propriété doit respecter le principe de légalité, poursuivre un but légitime et ménager un juste équilibre entre les exigences de l'intérêt général et la sauvegarde des droits individuels.

11. Si M. A... soutient que le classement en zone Ad de ses parcelles l'empêche d'y construire sa résidence principale et porte ainsi une atteinte à son droit de propriété, ce classement n'apparaît pas, compte-tenu de sa justification et de ses effets, comme apportant des limites à l'exercice du droit de propriété de M. A... qui seraient disproportionnées au regard du but d'intérêt général poursuivi par les auteurs du plan, visant à la préservation du potentiel agricole du secteur du hameau de Chasseloire, sur le territoire de la commune de Saint-Herblain. Le moyen tiré de ce que le classement des parcelles en cause méconnaîtrait les stipulations de l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut donc qu'être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les frais du litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Nantes Métropole, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Nantes Métropole et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1 : Le requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera à Nantes Métropole une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à Nantes Métropole.

Délibéré après l'audience du 12 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de chambre,

- Mme Montes-Derouet, présidente assesseure,

- M. Dias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2024.

Le rapporteur

R. DIAS

La présidente

C. BUFFET

Le greffier

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 22NT02524


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT02524
Date de la décision : 29/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. BUFFET
Rapporteur ?: M. Romain DIAS
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : SELARL MRV

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-29;22nt02524 ?
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