Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2022 par lequel le préfet du Calvados lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2201764 du 13 juin 2023, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 juillet 2023, M. B..., représenté par Me Demba Ndiaye, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 13 juin 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2022 du préfet du Calvados ;
3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de réexaminer sa demande de titre de séjour, dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le préfet du Calvados a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation professionnelle ;
- le préfet du Calvados a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 septembre 2023, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens du requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Derlange, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant marocain né le 15 octobre 1988 à Casablanca, est entré sur le territoire français le 8 novembre 2018, sous couvert d'un visa Schengen valable jusqu'au 11 décembre 2018, selon ses déclarations. Le 21 septembre 2021, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 421-1, L. 435-1 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 21 octobre 2022, le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 13 juin 2023 par lequel tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 régit la délivrance de titres de séjour pour l'exercice d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un tel titre de séjour ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 435-1 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation de la situation d'un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié.
3. Si M. B... prétend que la mention de sa nationalité italienne sur certains de ses contrats résulterait d'une simple erreur de son employeur et non d'une fraude de sa part, il ne conteste pas avoir signé lesdits contrats. En tout état de cause, les bulletins de salaire et les contrats produits, notamment en tant que chef de partie, second de cuisine ou cuisinier, s'ils permettent d'établir son activité depuis le mois de novembre 2018 dans la restauration, ne suffisent pas à justifier d'une expérience très importante. En outre, M. B... n'établit pas, ni même n'allègue disposer de diplômes ou de formation ni d'une expérience en la matière, antérieure à son entrée en France. Dans ces conditions, le préfet du Calvados n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en ne procédant pas à la régularisation de la situation de M. B... en qualité de salarié.
4. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
5. M. B... se borne à soutenir qu'il entretient des relations particulièrement intenses avec la République française et ses symboles ainsi qu'avec ses employeurs et collègues de travail et qu'il ne constitue aucune menace pour l'ordre public puisqu'il n'a jamais fait l'objet de poursuites pénales encore moins d'une quelconque condamnation. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire, sans charge de famille en France et qu'il a vécu au moins jusqu'à l'âge de trente ans au Maroc, où vivent ses parents et ses deux sœurs. Dans ces conditions, le préfet du Calvados n'a pas porté d'atteinte disproportionnée au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale en prenant l'arrêté contesté. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté contesté.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Le présent arrêt, qui rejette la requête de M. B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions du requérant aux fins d'injonction doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Une copie en sera transmise, pour information, au préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 5 mars 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Derlange, président assesseur,
- Mme Picquet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 mars 2024.
Le rapporteur,
S. DERLANGE
Le président,
L. LAINÉ
Le greffier,
C. WOLF
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23NT02043