Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... G... et Mme H... G... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les délibérations du 29 novembre 1996 et du 5 septembre 1997 du conseil municipal d'Auverse, décidant respectivement de procéder à l'échange de deux portions de chemins ruraux et de donner pouvoir au maire de signer toutes pièces nécessaires à la conclusion d'un protocole d'accord, ainsi que le protocole conclu par son maire pour l'aliénation par voie d'échange des chemins ruraux n° 4 de Villeneuve à Mouliherne et de Pontigné à Mouliherne et de procéder à la réintégration dans le patrimoine de la collectivité de ces chemins.
Par un jugement n° 1805617 du 15 novembre 2022, le tribunal administratif de Nantes a annulé la délibération du 29 novembre 1996 du conseil municipal de la commune d'Auverse (article 1er), a enjoint à la commune de Noyant-Villages d'engager la procédure de résolution amiable de l'échange décidé en application de cette délibération du 29 novembre 1996 et, à défaut d'y parvenir dans un délai de quatre mois à compter de la notification de ce jugement, de saisir le juge du contrat afin qu'il tire les conséquences de l'annulation de la délibération du 29 novembre 1996 (article 2), et a rejeté le surplus des conclusions des parties (article 3).
Procédures devant la cour :
I. Par une requête n° 23NT00107 et un mémoire, enregistrés les 13 janvier et 14 septembre 2023, la commune de Noyant-Villages, représentée par Me Tertrais, demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 novembre 2022 ;
2°) à titre subsidiaire, de limiter toute injonction prononcée à son encontre à l'obligation de procéder à un réexamen de la situation factuelle et juridique des portions de chemins litigieuses avant d'en tirer les conséquences de droit en termes d'attribution ;
3°) de mettre à la charge solidaire des consorts G... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande de M. et Mme G... était irrecevable parce que leur fils n'avait pas qualité pour les représenter, parce qu'elle était tardive et porte, en tout état de cause atteinte au principe de sécurité juridique, et que les délibérations litigieuses ne leur font pas grief ;
- les chemins en cause ne sont pas des chemins ruraux ; ils relèvent de la propriété des consorts F... et ne desservent aucun autre riverain ; une partie de ces chemins n'existe plus, pour avoir été mise en culture ou pour être en pratique totalement boisée ; ils pourraient être qualifiés de chemins d'exploitation ; l'affectation à l'usage du public n'est pas établie ; la commune n'a pas assuré leur entretien ; leur propriété par la commune n'est pas établie d'autant que des cessions de chemins ruraux ont été réalisées à la fin du XIXème siècle et qu'une enquête publique a été faite à la fin des années 60 et qu'ils ont en tout état de cause été frappés d'usucapion ; les délibérations litigieuses ont permis de concrétiser avec les consorts F... les cessions envisagées à la fin des années 60 pour tirer les conséquences de la désaffectation des chemins en cause depuis des décennies ;
- la cession de ces chemins n'a pas été faite par échange ;
- les consorts F... étaient prioritaires pour acquérir ces biens, en application de l'article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime ;
- l'annulation de la délibération du 29 novembre 1996 n'implique pas nécessairement la réintégration des chemins litigieux dans son patrimoine.
Par des mémoires enregistrés, les 13 et 18 juillet, 3 et 17 octobre, 13 novembre et 13 décembre 2023, M. et Mme A... et H... G..., représentés par Me Riccardi, demandent à la cour de rejeter les conclusions de la commune de Noyant-Villages et de M. et Mme F..., d'enjoindre à la commune de saisir le juge du contrat afin qu'il tire les conséquences de l'annulation de la délibération du 29 novembre 1996, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de mettre à la charge respectivement de la commune et de M. et Mme F... une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la requête et particulièrement les pages 16 à 24 est irrecevable faute de critiquer le jugement litigieux ;
- les moyens de la commune de Noyant-Villages et de M. et Mme F... ne sont pas fondés ;
- les actes litigieux sont illégaux ;
- la commune de Noyant-Villages n'a pas exécuté le jugement attaqué.
Par des mémoires, enregistrés les 20 octobre et 20 décembre 2023, Mme D... F..., née B... et M. C... F..., représentés par Me Dalibard, demandent à la cour, à titre principal, d'annuler les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 novembre 2022, de rejeter les conclusions de M. et Mme G... ou de désigner un expert dans le cadre d'un arrêt avant-dire droit aux fins de déterminer l'état des chemins objet du litige, à titre subsidiaire, d'enjoindre à la commune de Noyant-Villages de régulariser en leur faveur la procédure d'aliénation des chemins litigieux et de mettre à la charge de M. et Mme G... une somme de 7 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la demande de M. et Mme G... était irrecevable parce que leur fils n'avait pas qualité pour les représenter, parce qu'elle était tardive et porte, en tout état de cause atteinte au principe de sécurité juridique, et que les délibérations litigieuses ne leur font pas grief ;
- les conclusions de première instance de M. et Mme G... à fin d'injonction étaient irrecevables comme présentées à titre principal ;
- les conclusions de première instance de M. et Mme G... à fin d'annulation de la délibération du 29 novembre 1996, préparatoire du contrat concomitamment contesté, n'étaient pas recevables ;
- la délibération du 29 novembre 1996 est régulière et légale ;
- la cession a été effectuée après enquête publique, conformément à l'article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime ;
- les chemins en cause ne sont pas des chemins ruraux ; ils sont désaffectés de l'usage du public depuis au moins les années 60 du fait de leur abandon et de l'exploitation agricole ; aucun itinéraire du plan départemental des itinéraires de promenade et randonnée (PDIPR) ne traverse le domaine de Villeneuve ;
- la commune n'entretient pas et ne surveille pas de tels chemins ;
- la cession de ces chemins n'a pas été faite par échange ;
- le maire avait compétence liée, par sa décision implicite de rejet du 10 juin 2018, pour rejeter la demande des consorts G... de réintégration des chemins en cause dans le patrimoine de la commune, alors qu'en vertu de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration, les consorts F... disposaient d'une décision favorable non retirable et, en tout état de cause, avaient bénéficié de l'usucapion au moins depuis 2007, en application des articles 2272 et suivants du code civil, ce qui rend inopérant la contestation de la délibération litigieuse ;
- ils peuvent, en tout état de cause, bénéficier de la prescription acquisitive même si la délibération du 29 novembre 1996 est annulée rétroactivement ;
- l'annulation de cette délibération n'impliquait pas l'injonction prononcée alors qu'une régularisation était possible en organisant une enquête publique ou en prenant une délibération désaffectant les chemins à l'usage du public ;
- l'intérêt général s'oppose à la résiliation judiciaire de la vente ;
- la possibilité de résilier judiciairement le contrat est prescrite, en application de l'article 2224 du code civil ;
- le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
- une expertise judiciaire permettrait de vérifier clairement l'assiette cadastrale des deux chemins ruraux litigieux et s'ils sont praticables.
II. Par une requête n° 23NT00135 et des mémoires, enregistrés les 16 janvier, 15 septembre, 20 octobre et 20 décembre 2023, Mme D... F..., née B... et M. C... F..., représentés par Me Dalibard, demandent à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 novembre 2022 et de rejeter les conclusions de M. et Mme G... ou de désigner un expert dans le cadre d'un arrêt avant-dire droit aux fins de déterminer l'état des chemins objet du litige ;
2°) à titre subsidiaire, d'enjoindre à la commune de Noyant-Villages de régulariser en leur faveur la procédure d'aliénation des chemins litigieux ;
3°) de mettre à la charge de M. et Mme G... une somme de 7 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la demande de M. et Mme G... était irrecevable parce que leur fils n'avait pas qualité pour les représenter, parce qu'elle était tardive et porte, en tout état de cause atteinte au principe de sécurité juridique et que les délibérations litigieuses ne leur font pas grief ;
- les conclusions de première instance de M. et Mme G... à fin d'injonction étaient irrecevables comme présentées à titre principal ;
- les conclusions de première instance de M. et Mme G... à fin d'annulation de la délibération du 29 novembre 1996, préparatoire du contrat concomitamment contesté, n'étaient pas recevables ;
- la délibération du 29 novembre 1996 est régulière et légale ;
- la cession a été effectuée après enquête publique, conformément à l'article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime ;
- les chemins en cause ne sont pas des chemins ruraux ; ils sont désaffectés à l'usage du public depuis au moins les années 60 du fait de leur abandon et de l'exploitation agricole ; aucun itinéraire du plan départemental des itinéraires de promenade et randonnée (PDIPR) ne traverse le domaine de Villeneuve ;
- la commune n'entretient pas et ne surveille pas de tels chemins ;
- la cession de ces chemins n'a pas été faite par échange ;
- le maire avait compétence liée, par sa décision implicite de rejet du 10 juin 2018, pour rejeter la demande des consorts G... de réintégration des chemins en cause dans le patrimoine de la commune, alors qu'en vertu de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration, les consorts F... disposaient d'une décision favorable non retirable et, en tout état de cause, avaient bénéficié de l'usucapion au moins depuis 2007, en application des articles 2272 et suivants du code civil, ce qui rend inopérant la contestation de la délibération litigieuse ;
- ils peuvent, en tout état de cause, bénéficier de la prescription acquisitive même si la délibération du 29 novembre 1996 est annulée rétroactivement ;
- l'annulation de cette délibération n'impliquait pas l'injonction prononcée alors qu'une régularisation était possible en organisant une enquête publique ou en prenant une délibération désaffectant les chemins à l'usage du public ;
- l'intérêt général s'oppose à la résiliation judiciaire de la vente ;
- la possibilité de résilier judiciairement le contrat est prescrite, en application de l'article 2224 du code civil ;
- le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
- une expertise judiciaire permettrait de vérifier clairement l'assiette cadastrale des deux chemins ruraux litigieux et s'ils sont praticables.
Par des mémoires enregistrés, les 13 et 18 juillet, 3 et 17 octobre, 13 novembre et 13 décembre 2023, M. A... et Mme H... G..., représentés par Me Riccardi, demandent à la cour de rejeter les conclusions de la commune de Noyant-Villages et de M. et Mme F..., d'enjoindre à la commune de saisir le juge du contrat afin qu'il tire les conséquences de l'annulation de la délibération du 29 novembre 1996, sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de mettre à la charge respectivement de la commune et de M. et Mme F... une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, pour les mêmes motifs que ceux exposés sous le n° 23NT00107.
Par un mémoire, enregistré le 15 septembre 2023, la commune de Noyant-Villages, représentée par Me Tertrais, demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 novembre 2022 et de confirmer son article 3 ;
2°) à titre subsidiaire, de limiter tout injonction prononcée à son encontre à l'obligation de procéder à un réexamen de la situation factuelle et juridique des portions de chemins litigieuses avant d'en tirer les conséquences de droit en termes d'attribution ;
3°) de mettre à la charge solidaire des consorts G... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande de M. et Mme G... était irrecevable parce que leur fils n'avait pas qualité pour les représenter, parce qu'elle était tardive et porte, en tout état de cause atteinte au principe de sécurité juridique et que les délibérations litigieuses ne leur font pas grief ;
- les chemins en cause ne sont pas des chemins ruraux ; ils relèvent de la propriété des consorts F... et ne desservent aucun autre riverain ; une partie de ces chemins n'existe plus, pour avoir été mise en culture ou pour être en pratique totalement boisée ; ils pourraient être qualifiés de chemins d'exploitation ; l'affectation à l'usage du public n'est pas établie ; la commune n'a pas assuré leur entretien ; leur propriété par la commune n'est pas établie d'autant que des cessions de chemins ruraux ont été réalisées à la fin du XIXème siècle et qu'une enquête publique a été faite à la fin des années 60 et qu'ils ont en tout état de cause été frappés d'usucapion ; les délibérations litigieuses ont permis de concrétiser avec les consorts F... les cessions envisagées à la fin des années 60 pour tirer les conséquences de la désaffectation des chemins en cause depuis des décennies ;
- la cession de ces chemins n'a pas été faite par échange ;
- les consorts F... étaient prioritaires pour acquérir ces biens, en application de l'article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime ;
- l'annulation de la délibération du 29 novembre 1996 n'implique pas nécessairement la réintégration des chemins litigieux dans son patrimoine.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code civil ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Derlange, président assesseur,
- les conclusions de Mme Rosemberg, rapporteure publique,
- et les observations de Me Tertrais, pour la commune de Noyant-Villages, de Me Dalibard pour M. et Mme F... et de M. et Mme G....
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 11 décembre 1985, le conseil municipal d'Auverse (Maine-et-Loire) a décidé de faire intervenir un géomètre afin de vendre des chemins communaux se trouvant au sein du domaine de Villeneuve au propriétaire de celui-ci. Cette vente ne s'est pas concrétisée mais M. F..., nouveau propriétaire de ce domaine depuis 1988, a souhaité acquérir ces chemins. Par une délibération du 29 novembre 1996, se référant à la délibération de 1985, le conseil municipal d'Auverse a décidé de céder le chemin de Pontigné à Mouliherne et le chemin rural n° 4 de Villeneuve à Mouliherne à M. F... en échange d'un morceau d'un autre chemin de sa propriété, avec versement d'une soulte en cas d'inégalité de l'échange. Un protocole d'accord a été signé entre le maire d'Auverse et M. F.... Le 5 septembre 1997, le conseil municipal d'Auverse a donné pouvoir à son maire pour signer toutes pièces et actes nécessaires à la concrétisation de ce protocole. Le 7 novembre 1997, un acte authentique d'échange notarié a été signé par le maire d'Auverse et M. et Mme F..., procédant à l'échange des parcelles en cause avec une soulte à la charge de ces derniers. Par une requête enregistrée le 18 juin 2018, M. et Mme G..., propriétaires d'une parcelle à proximité du domaine de Villeneuve et contribuables de la commune de Noyant-Villages, ont contesté la cession de ces deux chemins devant le tribunal administratif de Nantes. La commune de Noyant-Villages, commune nouvelle dont Auverse est devenue commune déléguée, d'une part, et M. et Mme F..., d'autre part, relèvent appel du jugement du 15 novembre 2022 par lequel le tribunal a annulé la délibération du 29 novembre 1996 du conseil municipal de la commune d'Auverse et a enjoint à la commune de Noyant-Villages d'engager la procédure de résolution amiable de l'échange décidé en application de cette délibération et, à défaut d'y parvenir dans un délai de quatre mois à compter de la notification de ce jugement, de saisir le juge du contrat afin qu'il tire les conséquences de cette annulation.
2. Les requêtes de la commune de Noyant-Villages et de M. et Mme F... sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :
3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-2 du code de justice administrative : " Les requêtes et les mémoires doivent, à peine d'irrecevabilité, être présentés soit par un avocat, soit par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, lorsque les conclusions de la demande tendent au paiement d'une somme d'argent, à la décharge ou à la réduction de sommes dont le paiement est réclamé au requérant ou à la solution d'un litige né de l'exécution d'un contrat (...) ". Aux termes de l'article R. 431-4 du même code : " Dans les affaires où ne s'appliquent pas les dispositions de l'article R. 431-2, les requêtes et les mémoires doivent être signés par leur auteur et, dans le cas d'une personne morale, par une personne justifiant de sa qualité pour agir. ". Aux termes de l'article R. 431-5 du même code : " Les parties peuvent également se faire représenter : / 1° Par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2 (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme A... et H... G... ont signé leurs écritures à compter du 5 juillet 2021, et ont ainsi régularisé la demande de première instance déposée par leur fils, en s'appropriant les conclusions et moyens présentés auparavant. Par suite, la commune de Noyant-Villages et M. et Mme F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges n'ont pas rejeté la demande de M. et Mme G... comme irrecevable, sur le fondement des articles R. 431-4 et R. 431-5 du code de justice administrative.
5. En deuxième lieu, si les requérants soutiennent que la demande de M. et Mme G... était tardive, les attestations qu'ils produisent, en particulier de la secrétaire de mairie d'Auverse en fonction du 18 septembre 1995 au 31 décembre 2003, d'une conseillère municipale élue en juin 1995 et du maire actuel de la commune, compte tenu de leur caractère très général et notamment imprécis sur la date d'affichage de la délibération du 29 novembre 1996, ne sont pas de nature à permettre de présumer de la réalité et de la date de cet affichage. L'extrait du registre des délibérations communales du 29 novembre 1996 versé au dossier ne permet pas davantage d'attester de la réalité et de la date de cet affichage. Au surplus, alors qu'en application des dispositions de l'article R. 121-9 du code des communes, alors en vigueur, " l'affichage a lieu par extraits à la porte de la mairie " et qu'il ressort des pièces du dossier que l'affichage des actes de la commune d'Auverse était fait sur un panneau implanté sur le mur de l'ancienne mairie, rue des écoles, et non pas à la porte de la mairie, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la délibération litigieuse a été régulièrement publiée et que cela a pu faire courir le délai de recours contentieux. Dès lors que les éléments relevés par les requérants ne permettent pas d'établir à quelle date M. et Mme G... auraient eu connaissance de cette délibération, les fins de non-recevoir soulevées en première instance au titre de la tardiveté de la demande ne pouvaient qu'être écartées, sans que puisse utilement être opposé le principe de sécurité juridique qui ne saurait, par le seul écoulement du temps, rendre irrecevable le recours d'un tiers intéressé à l'encontre d'une décision dont il n'est pas établi qu'il a pu en prendre connaissance de manière effective.
6. En troisième lieu, il ressort de sa rédaction que la délibération du 29 novembre 1996 a pour objet de décider la cession du chemin de Pontigné à Mouliherne et du chemin rural n° 4 de Villeneuve à Mouliherne, par voie d'échange, dans le cadre d'un protocole d'accord, à M. F..., quand bien même la délibération du 11 décembre 1985 à laquelle elle fait référence avait prévu la vente de ces chemins au précédent propriétaire du domaine de Villeneuve. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges n'ont pas jugé irrecevables les conclusions à fin d'annulation de la délibération du 29 novembre 1996, qui constitue en elle-même un acte décisoire susceptible de recours.
7. En quatrième lieu, la circonstance que seuls les propriétaires riverains de chemins ruraux sont mis en demeure d'acquérir les terrains attenant à leurs propriétés, en application de l'article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime, ne faisait pas obstacle à ce que M. et Mme G... se portent acquéreurs de tels biens. En tout état de cause, en leur qualité de contribuables de la commune de Noyant-Villages personnellement intéressés à ce que les actes concernant la gestion du patrimoine communal soient accomplis dans les conditions prescrites par la loi, ils avaient intérêt pour agir devant le tribunal.
8. En cinquième lieu, M. et Mme F... ne sont pas fondés à soutenir que les conclusions à fin d'injonction présentées par M. et Mme G... auraient dû être rejetées comme présentées à titre principal et sans demande préalable, alors qu'il ressort clairement de la page 15 de la requête introductive devant le tribunal qu'ils ont demandé, à titre principal, l'annulation de la délibération du 29 novembre 1996 et, en conséquence, des mesures d'injonction, ce qui a conduit les premiers juges, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, à prononcer les injonctions litigieuses.
9. En sixième et dernier lieu, en tout état de cause, M. et Mme F... ne peuvent utilement se prévaloir de ce que " depuis que le Conseil d'Etat a ouvert aux tiers le recours en contestation de validité du contrat, il en a tiré comme conséquence la fermeture corrélative du recours pour excès de pouvoir contre les actes détachables du contrat " dès lors qu'il résulte de la décision du 4 avril 2014, Département de Tarn-et-Garonne, à laquelle ils font référence, que le recours en contestation de la validité du contrat ainsi défini ne peut être exercé par les tiers qui n'en bénéficiaient pas qu'à l'encontre des contrats signés à compter de la date à laquelle cette décision du Conseil d'Etat a été rendue publique.
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation de la délibération du 29 novembre 1996 du conseil municipal de la commune d'Auverse :
10. Aux termes de l'article L. 161-1 du code rural et de la pêche maritime : " Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune. ". Aux termes de l'article L. 161-2 du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " L'affectation à l'usage du public peut s'établir notamment par la destination du chemin, jointe au fait d'une circulation générale et continue, ou à des actes réitérés de surveillance et de voirie de l'autorité municipale. / La destination du chemin peut être définie notamment par l'inscription sur le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée. ". Aux termes de l'article L. 161-10 du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Lorsqu'un chemin rural cesse d'être affecté à l'usage du public, la vente peut être décidée après enquête par le conseil municipal, à moins que les intéressés groupés en association syndicale conformément à l'article L. 161-11 n'aient demandé à se charger de l'entretien dans les deux mois qui suivent l'ouverture de l'enquête. / Lorsque l'aliénation est ordonnée, les propriétaires riverains sont mis en demeure d'acquérir les terrains attenant à leurs propriétés. / Si, dans le délai d'un mois à dater de l'avertissement, les propriétaires riverains n'ont pas déposé leur soumission ou si leurs offres sont insuffisantes, il est procédé à l'aliénation des terrains selon les règles suivies pour la vente des propriétés communales. ".
11. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que les chemins de Pontigné à Mouliherne et n° 4 de Villeneuve à Mouliherne existaient, que leur tracé était identifié, en particulier sur le domaine de Villeneuve, et qu'ils étaient la propriété de la commune d'Auverse à la date de la délibération du 29 novembre 1996, dont l'objet était précisément de les céder à M. F.... Il n'est pas établi, ni même allégué, que ces chemins auraient été classés comme voies communales. Il ressort des pièces du dossier et des propres déclarations de M. et Mme F... qu'à cette date ils permettaient la communication entre différentes voies et lieux publics, notamment Mouliherne, Pontigné, les routes départementales RD 79 et RD 186 et les lieux dits " E... chemins ", le " Theil " et la " Mare ". Il ressort des très nombreuses pièces produites par M. et Mme G..., non sérieusement contestées par les requérants, que quand bien même ces chemins ont pu éventuellement être désaffectés au cours de périodes antérieures, ils servaient régulièrement à l'exercice de diverses activités touristiques et de loisirs comme la randonnée pédestre et cycliste ou la chasse. D'ailleurs, il ressort des pièces du dossier que le chemin n° 4 de Villeneuve à Mouliherne a été inscrit sur le plan départemental des itinéraires de promenade et de randonnée par une délibération du 8 février 1988 du conseil général, après approbation du conseil municipal d'Auverse s'étant engagé à en conserver le caractère public et ouvert par une délibération du 7 décembre 1984, et il n'est pas établi qu'il ne l'était plus en 1996. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les chemins de Pontigné à Mouliherne et n° 4 de Villeneuve à Mouliherne étaient des chemins ruraux faisant partie du domaine privé de la commune d'Auverse à la date de leur aliénation et qu'ils ne pouvaient pas être cédés, conformément à l'article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime faute d'avoir cessé d'être affectés à l'usage du public.
12. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la cession litigieuse ait été précédée de l'enquête publique exigée aux termes de l'article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime. L'enquête publique qui a été menée en 1967 dans le cadre d'un projet de cession de plusieurs chemins ruraux de la commune d'Auverse, eu égard à son ancienneté et aux changements de circonstances de droit et de fait intervenus depuis lors, illustrés notamment par la délibération précitée du 7 décembre 1984 de la commune d'Auverse, ne saurait être considérée comme assurant cette garantie donnée au public en application des dispositions de l'article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont également relevé ce motif d'illégalité de la délibération contestée.
13. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier, en particulier des termes mêmes de la délibération du 29 novembre 1996 et de l'acte authentique notarié du 7 novembre 1997 que, contrairement à ce que prétendent les requérants, la cession des chemins ruraux en cause a été effectuée par voie d'échange et non pas d'une vente ou d'une dation en paiement. La circonstance que cet échange ait été accompagné d'une soulte ne saurait permettre de le requalifier en contrats de vente simultanés. Or il résulte des dispositions précitées de l'article L. 161-10 du code rural et de la pêche maritime que les communes ne peuvent, pour l'aliénation des chemins ruraux, avoir recours à une autre procédure que celle de la vente dans les conditions qu'il mentionne. Il suit de là que la délibération du conseil municipal d'Auverse du 26 novembre 1996 est intervenue en méconnaissance de ces dispositions et se trouve ainsi entachée d'une erreur de droit. Par conséquent, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges l'ont également annulée pour ce motif.
14. En quatrième et dernier lieu, il ressort clairement de l'objet même de la délibération du 29 novembre 1996 que M. et Mme F... n'avaient pas acquis précédemment les chemins ruraux litigieux par usucapion. Les requérants ne peuvent donc s'en prévaloir pour soutenir que cette délibération serait illégale.
15. Enfin, à supposer même que, comme le soutiennent M. et Mme F..., le maire d'Auverse aurait eu compétence liée pour rejeter la demande des consorts G... de réintégration des chemins en cause dans le patrimoine de la commune, cette circonstance est sans influence sur le caractère opérant des moyens soulevés à l'encontre de la délibération du 29 novembre 1996, prise par le conseil municipal de cette commune.
16. Il ressort de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de désigner un expert, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la délibération du 29 novembre 1996.
En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :
17. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " et aux termes de 1'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet ".
18. L'annulation d'un acte détachable d'un contrat de droit privé n'impose pas nécessairement à la personne publique partie au contrat de saisir le juge du contrat afin qu'il tire les conséquences de cette annulation. Il appartient au juge de l'exécution de rechercher si l'illégalité commise peut être régularisée et, dans l'affirmative, d'enjoindre à la personne publique de procéder à cette régularisation. Lorsque l'illégalité commise ne peut être régularisée, il lui appartient d'apprécier si, eu égard à la nature de cette illégalité et à l'atteinte que l'annulation ou la résolution du contrat est susceptible de porter à l'intérêt général, il y a lieu d'enjoindre à la personne publique de saisir le juge du contrat afin qu'il tire les conséquences de l'annulation de l'acte détachable.
19. En premier lieu, si M. et Mme F... soutiennent que la cession pourrait être régularisée, notamment en procédant à une enquête publique et à une vente, l'affectation à l'usage du public des chemins ruraux litigieux constatée au point 11, qui ne saurait être remise en cause par les irrégularités de droit ou de fait ayant le cas échéant empêché leur utilisation par la suite, fait obstacle à une telle régularisation. L'illégalité commise en procédant à la cession de tels biens implique dès lors nécessairement qu'ils soient réintégrés dans le patrimoine de la commune de Noyant-Villages.
20. En deuxième lieu, compte tenu du fait que la cession litigieuse a privé le public de l'usage de chemins ruraux, l'annulation de l'acte authentique d'échange notarié du 7 novembre 1997 et leur réintégration dans le patrimoine communal, n'est pas susceptible de porter une atteinte significative à l'intérêt général du seul fait, opposé par M. et Mme F..., qu'un recours indemnitaire de leur part pourrait impliquer des conséquences financières pour la commune.
21. En troisième et dernier lieu, il résulte clairement de l'instruction que M. et Mme F... ne peuvent bénéficier ni de la prescription trentenaire alors qu'à la date de la délibération contestée les chemins ruraux litigieux étaient affectés à l'usage du public, ni de la prescription décennale, faute de possession de bonne foi et d'un juste titre. En tout état de cause, il appartiendra au juge judiciaire du contrat saisi par la commune de Noyant-Villages de se prononcer le cas échéant sur ce point, y compris pour apprécier la recevabilité de la requête qui lui sera présentée.
22. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont ordonné à la commune de Noyant-Villages de saisir le juge du contrat afin qu'il tire les conséquences de l'annulation de la délibération du 29 novembre 1996. Dès lors qu'il résulte de l'instruction que la procédure de résolution amiable de l'échange décidé en application de la délibération du 29 novembre 1996 n'a pas été menée dans le délai prescrit par le tribunal et que la commune n'a pas saisi le juge du contrat, comme il lui appartenait de le faire une fois ce délai écoulé, il y a lieu d'assortir l'injonction de saisir ce juge, prononcée par le tribunal administratif, d'une astreinte de 200 euros par jour de retard à compter d'un délai de deux mois à partir de la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle, à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. et Mme G..., qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante.
24. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Noyant-Villages, d'une part, et de M. et Mme F..., d'autre part, la somme de 2 000 euros à verser à M. et Mme G... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de la commune de Noyant-Villages et de M. et Mme F... sont rejetées.
Article 2 : Il est enjoint à la commune de Noyant-Villages de saisir le juge du contrat afin qu'il tire les conséquences de l'annulation de la délibération du 29 novembre 1996, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter d'un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 3 : La commune de Noyant-Villages, d'une part, et M. et Mme F..., d'autre part, verseront chacun la somme de 2 000 euros à M. et Mme G... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... et H... G..., à M. C... F..., à Mme D... F... et à la commune de Noyant-Villages.
Délibéré après l'audience du 13 février 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Derlange, président assesseur,
- Mme Picquet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 mars 2024.
Le rapporteur,
S. DERLANGE
Le président,
L. LAINÉ
Le greffier,
C. WOLF
La République mande et ordonne au préfet de Maine-et-Loire en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
Nos 23NT00107,23NT00135