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27/02/2024 | FRANCE | N°23NT02340

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 27 février 2024, 23NT02340


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités, d'un montant total de 54 875 euros, à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2016.



Par un jugement n° 2104349 du 31 mai 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire enregistrés le 28 juillet et 5 décembre 2023,

M. et Mme A..., représentés par Me Bondig...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités, d'un montant total de 54 875 euros, à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2016.

Par un jugement n° 2104349 du 31 mai 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 28 juillet et 5 décembre 2023,

M. et Mme A..., représentés par Me Bondiguel, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 31 mai 2023 ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'article 150-0 D du code général des impôts doit être lu comme signifiant que, sauf fraude, lorsque la société dont les titres sont cédés a été créée comme société commerciale et non pas comme holding animatrice, les conditions posées pour l'application de l'abattement de 85 % ne doivent être examinées qu'à son niveau et non pas à celui de ses filiales ; la société services et développement devenue France Hayon Développement remplit toutes les conditions posées par cette disposition ;

- la société Services et Développement, devenue France Hayon Développement, n'a jamais rempli les conditions pour être qualifiée de holding animatrice : elle n'est pas le mandataire social des filiales ; la convention du 26 février 2008 n'est pas une convention d'animation mais d'assistance administrative financière et commerciale ; elle n'a pas rendu des services à titre

" purement interne " au groupe, mais également à des sociétés tierces, notamment dans le cadre des actions de formations déployées sous le nom commercial de France Hayon Formation ; elle a eu une activité de négoce, de prestataire de services et de ventes de marchandises de 2007 au

1er mars 2016.

Par des mémoires en défense enregistré les 6 novembre et 15 décembre 2023, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, le ministre de l'économie des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Viéville,

- les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public ;

- et les observations de Me Bondiguel représentant M. et Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... ont cédé, le 1er mars 2016, 51 actions de la SAS France Hayon Développement à la société TVH France et réalisé à cette occasion une plus-value de 789 148 euros au titre de laquelle ils ont bénéficié de l'abattement renforcé de 85 % prévu au 3° du A du 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts. L'administration a remis en cause cet abattement dans une proposition de rectification du 25 septembre 2019 et a substitué à cet abattement celui de 65 % sur la plus-value résultant de la cession des 50 actions acquises en juin et juillet 2007 et celui de 50 % sur la plus-value résultant de la cession de l'action acquise le

29 mars 2017, prévus au 1 ter de l'article 150-0 D. Les observations de M. et Mme A... ont été rejetées le 10 janvier 2019, puis l'administration a réaffirmé sa position après un entretien avec le supérieur hiérarchique. Après la mise en recouvrement, M. et Mme A... ont formé une réclamation préalable le 23 mars 2021 qui a été rejetée par une décision du 30 juin 2021.

Par jugement du 31 mai 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la requête de

M. et Mme A... tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités au titre de l'année 2016. M. et Mme A... relèvent appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé des impositions litigieuses :

2. Aux termes de l'article 150-0 D du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " 1. Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0 A sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci diminué, le cas échéant, des réductions d'impôt effectivement obtenues dans les conditions prévues à l'article 199 terdecies-0 A, ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation. / Les gains nets résultant de la cession à titre onéreux ou retirés du rachat d'actions, de parts de sociétés, de droits démembrés portant sur ces actions ou parts, ou de titres représentatifs de ces mêmes actions, parts ou droits, mentionnés à l'article 150-0 A, ainsi que les distributions mentionnées aux 7,7 bis et aux deux derniers alinéas du 8 du II du même article, à l'article

150-0 F et au 1 du II de l'article 163 quinquies C sont réduits d'un abattement déterminé dans les conditions prévues, selon le cas, au 1 ter ou au 1 quater du présent article. / Le complément de prix prévu au 2 du I de l'article 150-0 A, afférent à la cession d'actions, de parts ou de droits mentionnés au deuxième alinéa du présent 1, est réduit de l'abattement prévu au même alinéa et appliqué lors de cette cession. / L'abattement précité ne s'applique pas à l'avantage mentionné à l'article 80 bis constaté à l'occasion de la levée d'options attribuées avant le 20 juin 2007, ni au gain net mentionné au I de l'article 163 bis G. / (...) / 1 quater. A. Par dérogation au 1 ter, lorsque les conditions prévues au B sont remplies, les gains nets sont réduits d'un abattement égal à : / 1° 50 % de leur montant lorsque les actions, parts ou droits sont détenus depuis au moins un an et moins de quatre ans à la date de la cession ; / 2° 65 % de leur montant lorsque les actions, parts ou droits sont détenus depuis au moins quatre ans et moins de huit ans à la date de la cession ; / 3° 85 % de leur montant lorsque les actions, parts ou droits sont détenus depuis au moins huit ans à la date de la cession. / B. - L'abattement mentionné au A s'applique : / 1° Lorsque la société émettrice des droits cédés respecte l'ensemble des conditions suivantes : / a) Elle est créée depuis moins de dix ans et n'est pas issue d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension ou d'une reprise d'activités préexistantes. Cette condition s'apprécie à la date de souscription ou d'acquisition des droits cédés ; / b) Elle est une petite ou moyenne entreprise au sens de l'annexe I du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité. Cette condition est appréciée à la date de clôture du dernier exercice précédant la date de souscription ou d'acquisition de ces droits ou, à défaut d'exercice clos, à la date du premier exercice clos suivant la date de souscription ou d'acquisition de ces droits ; / c) Elle n'accorde aucune garantie en capital à ses associés ou actionnaires en contrepartie de leurs souscriptions ; / d) Elle est passible de l'impôt sur les bénéfices ou d'un impôt équivalent ; / e) Elle a son siège social dans un État membre de l'Union européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales ; / f) Elle exerce une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, à l'exception de la gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier. / Lorsque la société émettrice des droits cédés est une société holding animatrice, au sens du troisième alinéa du V de l'article 885-0 V bis, le respect des conditions mentionnées au présent 1° s'apprécie au niveau de la société émettrice et de chacune des sociétés dans laquelle elle détient des participations. / Les conditions prévues aux quatrième à avant-dernier alinéas du présent 1° s'apprécient de manière continue depuis la date de création de la société ; / (...) / 1 quinquies. Pour l'application de l'abattement mentionné au 1, la durée de détention est décomptée à partir de la date de souscription ou d'acquisition des actions, parts, droits ou titres (...) ".

3. Aux termes de l'article 885-0 V bis, alors en vigueur, du code général des impôts :

" V. / (...) / Les souscriptions réalisées au capital d'une société holding animatrice ouvrent droit à l'avantage fiscal mentionné au I lorsque la société est constituée et contrôle au moins une filiale depuis au moins douze mois. Pour l'application du présent alinéa, une société holding animatrice s'entend d'une société qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations, participe activement à la conduite de la politique de leur groupe et au contrôle de leurs filiales et rend, le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers. / (...) ".

4. Il ressort des dispositions précitées que le bénéfice des dispositions du A du 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts est subordonné, notamment, à la condition que la société, dont les titres ou droits sont cédés, a été créée depuis moins de dix ans à la date de leur souscription ou de leur acquisition par le contribuable. Lorsque la société émettrice des titres ou droits cédés est une société holding animatrice, au sens du troisième alinéa du V de l'article 885-0 V bis, cité ci-dessus, le respect de cette condition doit être apprécié non seulement à son niveau, mais également à celui de chacune des sociétés dans laquelle elle détient des participations.

Afin d'effectuer cette dernière appréciation il y a lieu de se placer à la date d'acquisition par le contribuable des titres ou droits de la holding animatrice quand celle-ci détenait déjà, à cette date, la participation dans la société considérée et à la date à laquelle la holding a acquis les titres ou droits de la société considérée quand cette acquisition est intervenue postérieurement à l'acquisition par le contribuable des titres ou droits de la holding.

5. En l'espèce, l'administration, pour remettre en cause l'abattement de 85 % appliqué par M. et Mme A... à la cession des parts sociales de la société France Hayon Développement le 1er mars 2016, a opposé à ceux-ci le non-respect de la condition, propre aux sociétés holdings animatrices, tenant à la date de création des sociétés dans lesquelles elle détient des participations.

6. En premier lieu, M et Mme A... soutiennent que lorsque la société dont les titres sont cédés a été créée comme société commerciale et non pas comme holding animatrice, les conditions posées pour l'application de l'abattement de 85 % ne doivent être examinées qu'à son niveau et non pas à celui de ses filiales. Cependant, les dispositions précitées de l'avant dernier alinéa du 1° du B de l'article 150-0 1 quater du code général des impôts n'ont pas pour objet ou pour effet de ne soumettre que les seules sociétés ayant eu dès leur création la qualité d'holding animatrice au respect des conditions mentionnées au 1° tant au niveau de la société holding animatrice qu'à celui de chacune des sociétés dans laquelle la société holding animatrice détient des participations.

7. En second lieu, les appelants soutiennent que la société France Hayon Développement n'a jamais eu les caractéristiques d'une holding animatrice. Il résulte de l'instruction que les requérants ont reconnu spontanément qu'une convention a été conclue entre la SARL Service et Développement et la société France Hayon Services le 26 février 2008 pour acter la diversification de l'activité vers celle de holding animatrice, cette convention indiquant à titre liminaire que " les soussignées sont des entreprises ayant entre elles directement ou indirectement des liens de capital conférant à la société Services et Développements un pouvoir de contrôle effectif sur la société France Hayon Services " et déterminant les modalités de l'assistance administrative, financière et commerciale apportée. De même, les rapports de gestion de la gérance à l'assemblée générale ordinaire annuelle des 23 décembre 2010, 21 mars 2012 et 15 février 2016 de la société France Hayon Développement démontrent un développement de l'activité de prestations de service auprès des filiales au fur et à mesure des prises de participations. S'agissant plus particulièrement des rapports avec la société France Hayon Services, le rapport de gestion de la gérance à l'assemblée générale ordinaire annuelle du 23 juin 2008 indique que l'activité se concentre sur le suivi administratif, technique, commercial et financier de sa filiale, la société France Hayon Service. Ainsi, la société France Hayon Développement participe activement à la conduite de la politique du groupe et au contrôle de la filiale France Hayon Services, nonobstant la circonstance que cette dernière était cogérée par des personnes physiques. Par ailleurs, la société France Hayon Développement a rendu à la société France Hayon Services des services spécifiques, par la convention d'assistance du 26 février 2008 et la circonstance qu'elle ait délivré des actions de formations à des sociétés tierces ne saurait permettre de la regarder comme ayant rendu des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers à des sociétés extérieures au groupe. Enfin, la circonstance que la société France Hayon Développement ait conservé une activité opérationnelle sur l'ensemble de la période de détention des titres n'est pas de nature à empêcher qu'elle puisse être regardée comme ayant été, à la date de cession des parts par M. et Mme A..., comme ayant la qualité de holding animatrice. Par suite, la SARL Services et Développements, devenue France Hayon Développement, doit être regardée comme ayant la qualité de holding animatrice au sens du troisième alinéa du V de l'article 885-0 V bis du code général des impôts.

8. Il suit de là que, alors qu'il est constant que la société France Hayon Service a été créée en juillet 1996, soit plus de dix ans à la date à laquelle la SARL Services et Développement, devenue France Hayon Développement, a acquis sa participation dans son capital, l'administration a pu valablement opposer à M. et Mme A... le motif pris de ce que la condition tenant à la date de création des sociétés dans lesquelles la société holding animatrice détient des participations n'était pas remplie, et remettre en cause pour ce motif l'application de l'abattement dit " renforcé " de 85 % prévu au 1 quater de l'article 150-0 D du code général des impôts.

9. Il résulte de ce qui précède que M et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 9 février 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Geffray, président,

- M. Penhoat, premier conseiller,

- M. Viéville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 février 2024.

Le rapporteur

S. VIÉVILLELe président

J.E. GEFFRAY

La greffière

A. MARCHAIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23NT02340002


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NT02340
Date de la décision : 27/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GEFFRAY
Rapporteur ?: M. Sébastien VIEVILLE
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : SCP BONDIGUEL & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-27;23nt02340 ?
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