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27/02/2024 | FRANCE | N°23NT00255

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 27 février 2024, 23NT00255


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes, par deux requêtes distinctes, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2014 et 2016.

Par un jugement n°s 1906536, 1913519 du 2 décembre 2022, le tribunal administratif de Nantes, après les avoir jointes, a rejeté ses demandes.



Procédure devant la cour :




Par une requête enregistrée le 31 janvier 2023, M. B..., représenté par

Me Lefeuvre, demand...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes, par deux requêtes distinctes, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2014 et 2016.

Par un jugement n°s 1906536, 1913519 du 2 décembre 2022, le tribunal administratif de Nantes, après les avoir jointes, a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 janvier 2023, M. B..., représenté par

Me Lefeuvre, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de l'année 2014 :

- l'administration fiscale a examiné les éléments de la comptabilité de la société Normes Habitat 44 sans adresser d'avis de vérification de comptabilité à son représentant, en méconnaissance de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ;

- le vérificateur n'a pas cité dans la proposition de rectification le contenu de deux procès-verbaux d'audition obtenus auprès de l'autorité judiciaire ;

- la proposition de rectification n'est pas suffisamment motivée, en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

- la somme de 55 460 euros qu'il a perçue par virement correspond à un remboursement de compte courant d'associé et ne peut donc être qualifiée de revenu distribué ; elle devrait être imposée dans la catégorie des traitements et salaires ;

- il se prévaut, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction référencée BOI-RSA-BASE-20-20 paragraphe 10 ;

- il a procédé au remboursement des sommes de 27 961,94 euros et 92 041 euros, ainsi que l'indiquent les opérations enregistrées dans la comptabilité des sociétés Probatiso et Normes Habitat 44 ;

S'agissant de l'année 2016 :

- les sommes perçues les 8 septembre et 13 décembre 2016, soit respectivement 25 000 euros et 5 294,77 euros, constituent des salaires et la somme de 8 205,07 euros est représentative de remboursement de frais ;

- la somme de 254 000 euros inscrite au crédit de son compte courant d'associé ouvert au sein de la société Probatiso correspond au prêt qui lui a été consenti par Mme A..., par l'intermédiaire de la société DR D..., à hauteur de cette somme, qu'il a apportée à la société Elfa et qui correspond à un apport consenti par cette dernière à la société Probatiso, l'ensemble de ces opérations ayant été réalisé en un seul mouvement financier ;

S'agissant des pénalités :

- dans la mesure où les impositions supplémentaires mises à sa charge ne sont pas fondées, les majorations pour manquement délibéré mises à sa charge ne le sont pas davantage.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 juillet 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Penhoat,

- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... B... est associé et gérant de plusieurs sociétés exerçant leur activité dans le domaine de l'immobilier et de la construction et notamment de la SARL Normes Habitat 44. Il a fait l'objet de deux examens contradictoires de sa situation fiscale personnelle successifs au titre, d'une part, de l'année 2014 et, d'autre part, des années 2015 et 2016, à l'issue desquels l'administration fiscale a remis en cause le montant des revenus déclarés par l'intéressé au titre de ces trois années, et réintégré dans son revenu global des sommes imposables à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et dans celle des revenus d'origine indéterminée. Elle lui a par suite notifié, par deux propositions de rectification des 15 décembre 2017 et 27 juillet 2018, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2014, 2015 et 2016.

Les réclamations préalables présentées par M. B... en contestation de ces impositions ayant été rejetées par deux décisions des 30 avril 2019 et 24 octobre 2019, l'intéressé a demandé au tribunal administratif de Nantes, par deux requêtes distinctes, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2014 et 2016. M. B... relève appel du jugement du 2 décembre 2022 par lequel le tribunal a rejeté ses demandes.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage, soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent.

3. Il résulte de l'instruction que, pour imposer au nom au titre de l'année 2014, sur le fondement des dispositions du c) de l'article 111 du code général des impôts, les sommes correspondant à des avantages occultes provenant de la SARL Normes Habitat, l'administration fiscale a exercé son droit de communication auprès de l'autorité judiciaire en application des articles L. 81, L. 82 C, L. 101 et R. 81-4 du livre des procédures fiscales et a utilisé un procès-verbal d'audition n° 2016/000189/228 du 29 juin 2016 dont la proposition de rectification reproduit l'extrait pertinent et qui fait lui-même également référence à deux autres procès-verbaux n° 543-115 et 543-153. Dans ces conditions, les éléments d'information fournis à M. B... étaient suffisants pour lui permettre de demander communication des documents obtenus de tiers sur lesquels le service s'est fondé pour établir les rectifications. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, à le supposé soulevé, doit être écarté.

4. En second lieu, il convient d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, les moyens tirés de ce que, d'une part, l'administration fiscale a examiné les éléments de la comptabilité de la société Normes Habitat 44 sans adresser d'avis de vérification de comptabilité à son représentant, en méconnaissance de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales et, d'autre part, la proposition de rectification n'est pas suffisamment motivée, en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, moyens que M. B... réitère en appel sans apporter d'éléments de fait ou de droit nouveaux.

Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires :

En ce qui concerne l'année 2014 :

5. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ".

6. En premier lieu, il résulte de l'instruction que M. B... a bénéficié, le

16 septembre 2014, du versement sur son compte bancaire personnel d'une somme de

55 460 euros en provenance de la société Normes Habitat 44. Si M. B... persiste à soutenir que ce versement constitue un remboursement de compte courant, correspondant au crédit porté à son compte courant d'associé ouvert au sein de la société Normes Habitat 44 en contrepartie de sa renonciation à percevoir la rémunération qui lui était due à raison de l'exercice de ses fonctions de gérance de la société, il n'en justifie pas plus en appel qu'en première instance. A défaut de toute autre explication avancée par le requérant pour justifier l'encaissement par ses soins de cette somme et alors même que l'administration fiscale n'a pas engagé de vérification de comptabilité à l'encontre de la société Normes Habitat 44,

celle-ci doit être regardée comme apportant la preuve du bien-fondé de sa prise en compte comme revenus de capitaux mobiliers imposables sur le fondement des dispositions du c) de l'article 111 du code général des impôts. Par ailleurs, dès lors que l'existence d'un avantage occulte est établie, le requérant n'est en tout état de cause pas fondé à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la doctrine administrative BOI-RSA-BASE-20-20, inapplicable en matière de revenus occultes.

7. En second lieu, il est constant que la société Normes Habitat 44 a directement pris en charge, au titre de l'année 2014, les travaux de gros œuvre réalisés au droit de la résidence personnelle de M. B... ainsi que l'acquisition d'une cuisine destinée à aménager ladite résidence, pour des montants respectifs de 92 041 euros et 27 961,94 euros. Par suite, et alors même que l'administration n'a pas engagé de vérification de comptabilité à l'encontre de la société Normes Habitat 44, les sommes correspondantes, dont il n'est pas établi en tout état de cause par la production d'un extrait de comptabilité provisoire qu'elles auraient fait l'objet d'un remboursement ultérieur, ont été imposées à bon droit par le service sur le fondement des dispositions précitées du c) de l'article 111 du code général des impôts.

En ce qui concerne l'année 2016 :

8. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ". Les sommes mises à la disposition des associés non prélevées sur les bénéfices ont, sauf preuve contraire apportée par les associés, le caractère de revenus distribués, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

9. En premier lieu, l'administration fiscale établit la mise à disposition du contribuable au cours de l'année 2016 de la somme totale de 48 125 euros, par le constat de cinq versements reçus par M. B..., sur un compte bancaire ouvert à son nom, des sociétés Normes Habitat 44 et Probatiso, dont il est le gérant et associé. Si le requérant soutient que les versements réalisés par la société Probatiso le 8 septembre 2016 à hauteur de 25 000 euros et le 13 décembre 2016 à hauteur de 5 294,77 euros correspondent à des revenus salariés perçus au titre de son activité de gérance et que la somme de 8 205,07 euros correspond à des remboursements de frais, il n'apporte pas plus en appel qu'en première instance d'élément pour étayer le bien-fondé de ses allégations. Par suite, c'est à juste titre que l'administration a imposé la somme de 48 125 euros entre les mains de M. B... sur le fondement des dispositions précitées du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts.

10. En second lieu, l'administration fiscale a constaté l'existences de versements mensuels sur un compte bancaire détenu par M. B... présentant le libellé " Probatiso Rémunération " pour un montant total de 186 880 euros. Alors que l'intéressé avait déclaré la somme de 60 000 euros au titre des salaires perçus, et en l'absence de justification probante sur la nature de ces versements, l'administration a considéré que le solde, soit la somme de 126 880 euros, constituait des revenus distribués au sens des dispositions précitées du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. Si le requérant fait valoir que cette somme est représentative d'une créance détenue sur la société Probatiso à la suite d'un prêt personnel qu'il a souscrit auprès d'un tiers pour financer l'acquisition de terrains par la SCI Verna, il n'en justifie pas notamment par la production d'un courriel adressé par ses soins et de deux reconnaissances de dettes établis entre ce tiers et lui-même le 15 décembre 2016 et le 23 janvier 2017 pour des montants respectifs de 139 000 euros et 115 000 euros. Par suite, c'est à à bon droit que l'administration a imposé la somme de 126 880 euros entre les mains de

M. B... sur le fondement des dispositions précitées du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts.

Sur les pénalités :

11. M. B... ne développe aucun moyen propre à l'appui de sa demande de décharge des majorations pour manquement délibéré prévues au a. de l'article 1729 du code général des impôts.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a refusé de faire droit à sa demande. Par suite, sa requête, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 9 février 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Geffray, président,

- M. Penhoat, premier conseiller ;

- M. Viéville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 février 2024.

Le rapporteur

A. PENHOATLe président

J.-E. GEFFRAY

La greffière

A. MARCHAIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 23NT002552


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00255
Date de la décision : 27/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GEFFRAY
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : LEFEUVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-27;23nt00255 ?
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