Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mises à sa charge au titre des années 2015 à 2017.
Par un jugement n° 2004686 du 7 juillet 2023 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 15 septembre 2023 Mme B..., représentée par Me Lefeuvre, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que la proposition de rectification dont elle a été rendue destinataire ne comportait que certains éléments relatifs à la rectification dont la SCI Vireva 2, dont elle est gérante majoritaire, a fait l'objet et que le service n'a pas attendu la présentation des observations de la SCI Vireva 2 ce qui constitue une méconnaissance des droits de la défense ;
- le service n'apporte pas la preuve de l'existence de l'acte anormal de gestion commis par la SCI Vireva 2 ; elle n'a recueilli aucune somme d'argent provenant de la SCI Vireva 2 et n'a donc bénéficié d'aucune distribution de sa part ; le montant du taux d'intérêt qui lui a été appliqué est manifestement excessif par rapport au taux pratiqué par les banques ;
- c'est à tort que le service a assorti les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu en litige de la majoration de 40 % pour manquement délibéré, dès lors qu'il invoque un contrôle précédent qui est contesté et qu'il n'a pas appliqué cette majoration à la SCI Vireva 2.
Par un mémoire en défense enregistré le 12 décembre 2023 le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Penhoat,
- les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.
- et les observations de Me Lefeuvre, représentant Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... B... est gérante associée à hauteur de 90 % de la société civile immobilière (SCI) Vireva 2, qui a opté pour la taxation de ses résultats à l'impôt sur les sociétés et dont l'activité est la location d'immeubles nus et le siège est situé au 29 boulevard Guist'hau à Nantes (Loire-Atlantique). La SCI Vireva 2 a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017 étendue au 30 juin 2018 en matière de taxe sur la valeur ajoutée. Aux termes de ce contrôle, l'administration fiscale a, par proposition de rectification du 12 décembre 2018, notifié à Mme B... en sa qualité de gérante de la SCI Vireva 2 des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des années 2015 à 2017. L'administration fiscale ayant par ailleurs estimé que l'absence de rémunération, par la perception d'intérêts, de prêts consentis en compte courant d'associé par la SCI Vireva 2 à Mme B... constituait une distribution de la SCI Vireva 2 vers sa dirigeante, elle a, en conséquence, notifié à l'intéressée une proposition de rectification le 12 décembre 2018 aux termes de laquelle le service procède à l'imposition de ces distributions dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre des années 2015 à 2017. La réclamation formée par Mme B... le 28 août 2019 ayant été rejetée par une décision du 2 mars 2020 de l'administration fiscale, l'intéressé a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mises à sa charge au titre des années 2015 à 2017. Mme B... relève appel du jugement du 7 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. S'agissant de revenus distribués, cette motivation peut résulter, soit de la reproduction de la teneur de la proposition de rectification adressée à la société distributrice, soit de la jonction de cette proposition de rectification en annexe du document adressé au bénéficiaire des distributions, dès lors du moins que le document concernant la société est lui-même suffisamment motivé.
3. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectification adressée à Mme B... du 12 décembre 2018 mentionne les textes applicables, la nature des impositions et les périodes concernées et énoncent les motifs sur lesquels l'administration a entendu se fonder pour justifier les redressements envisagés en reproduisant notamment les passages de la proposition de rectification adressée à la SCI Vireva 2 sur lesquels elle s'est fondée pour établir les impositions supplémentaires mises à la charge de Mme B.... Il suit de là que l'intéressée était informée des motifs de droit et de fait qui ont fondé les rectifications de manière suffisante pour lui permettre de présenter utilement ses observations, ce qu'elle a d'ailleurs fait par courrier du 14 février 2019. Dans ces conditions et alors même que la SCI Vireva 2 n'avait pas répondu aux rectifications qui lui ont été notifiées, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la procédure serait entachée d'irrégularité, ni, en tout état de cause, qu'elle serait intervenue en méconnaissance des droits de la défense.
Sur le bien-fondé des impositions :
4. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...). ".
5. Mme B... dont les rehaussements ont été notifiés selon la procédure de rectification contradictoire, n'ayant pas accepté les rectifications découlant du rattachement à son revenu global des revenus regardés comme distribués à la suite de la vérification de comptabilité de la SCI Vireva 2, il incombe à l'administration d'apporter la preuve, d'une part, de l'existence et du montant des revenus distribués et, d'autre part, de leur appréhension par cette dernière.
6. L'administration a relevé au cours de la vérification de comptabilité de la SCI Vireva 2 que le compte courant d'associé de Mme B... au sein de la SCI Vireva 2 présentait un solde débiteur de 210 816,52 euros au 31 décembre 2015 et de 202 759, 71 euros au 31 décembre 2016. Ce solde débiteur a correspondu à la mise à disposition de Mme B... de sommes sans intérêt, ce qui autorisait l'administration à regarder la société comme ayant effectué une avance de fonds sans intérêt qui constitue un acte anormal de gestion. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a réintégré dans les bénéfices de la société les intérêts au versement desquels la société pouvait prétendre qui ont été déterminés sur la base de la moyenne des taux effectifs pratiqués par les établissements de crédits pour des prêts à taux variables d'une durée supérieure à deux ans. Il résulte de l'instruction que les avances dont a bénéficié l'appelante ont été consenties sans aucune contrepartie. Si Mme B... conteste le taux d'intérêt fixé par le service pour déterminer le montant des intérêts à réintégrer dans son revenu imposable, elle ne produit aucun élément expliquant sur quelle base le taux d'intérêt pourrait être déterminé et ne le critique par suite pas utilement. Dès lors, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe du caractère anormal de ces avances sans intérêts consenties par la SCI Vireva 2 à Mme B..., dont le montant a été imposé à bon droit dans les revenus imposable à l'impôt sur le revenu de Mme B... sur le fondement du 1° du I de l'article 109 du code général des impôts.
Sur les pénalités :
7. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".
8. Afin de justifier l'application de la pénalité pour manquement délibéré au titre de l'année 2015, l'administration a relevé que Mme B... ne pouvait ignorer les conséquences fiscales du caractère débiteur de son compte courant d'associé et d'autre part, de ce qu'un précédent contrôle avait mis en évidence une distribution d'une société dont la requérante est également gérante à raison de la présence d'un solde débiteur du compte courant d'associé. Par suite, alors même que la requérante a contesté le précédent contrôle et que la SCI Vireva 2 ne s'est pas vue appliquer cette pénalité, l'administration apporte la preuve du caractère délibéré des manquements constatés et justifie du bien-fondé de l'application des pénalités prévues au a) de l'article 1729 du code général des impôts.
9. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a refusé de faire droit à sa demande. Par suite, sa requête, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 26 janvier 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Quillévéré, président de chambre,
- M. Geffray président-assesseur,
- M. Penhoat, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 février 2024.
Le rapporteur
A. PENHOATLe président de chambre,
G. QUILLÉVÉRÉ
La greffière
H. DAOUD
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
No 23NT027262