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17/11/2023 | FRANCE | N°22NT01804

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 17 novembre 2023, 22NT01804


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société AXA France IARD a demandé au tribunal administratif de Rennes, à titre principal, de condamner in solidum, ou à défaut les uns ou les autres, la CRAMA, la société Entreprise Bihannic, la société Mutuelle d'Assurance du BTP (SMABTP), la société FCPL, la Mutuelle des architectes français (MAF), la société Sofresid Engineering, la société Soprema, la compagnie AXA Corporate Solutions, la société Aluminium Bretagne, la société Le Bel et associés, la compagnie MMA IARD Assurances Mutuel

les, la société Groupe F2E, la compagnie Allianz, la société Avel Acoustique, la com...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société AXA France IARD a demandé au tribunal administratif de Rennes, à titre principal, de condamner in solidum, ou à défaut les uns ou les autres, la CRAMA, la société Entreprise Bihannic, la société Mutuelle d'Assurance du BTP (SMABTP), la société FCPL, la Mutuelle des architectes français (MAF), la société Sofresid Engineering, la société Soprema, la compagnie AXA Corporate Solutions, la société Aluminium Bretagne, la société Le Bel et associés, la compagnie MMA IARD Assurances Mutuelles, la société Groupe F2E, la compagnie Allianz, la société Avel Acoustique, la compagnie Les Souscripteurs du Lloyd's de Londres, la société Bureau Véritas à lui verser la somme de 242 665,46 euros au titre des travaux réparatoires des désordres affectant le centre culturel " Le Triskell " situé sur le territoire de la commune de Ploeren, majorée des intérêts au taux légal capitalisés et la somme de 55 143,29 euros au titre des dépens, correspondant aux frais de l'expertise judiciaire et, à titre subsidiaire, de condamner la CRAMA à lui verser la somme de 96 999,60 euros toutes taxes comprises (TTC) au titre du désordre A relatif aux fissures et décollements des façades, la société Entreprise Bihannic et son assureur, la SMABTP, la société FCLP et son assureur, la MAF, la société Sofresid Engineering et son assureur, la compagnie AXA Corporate Solutions, et la société Bureau Véritas à lui verser la somme de 60 117,11 euros au titre des infiltrations par la toiture en zinc, la société Aluminium Bretagne et son assureur, la compagnie MMA IARD Assurances Mutuelles, à lui verser la somme de 3 243,43 euros TTC au titre des infiltrations par les verrières et menuiseries extérieures, la CRAMA, la SMABTP, la société Soprema et son assureur, la compagnie AXA Corporate Solution, à lui verser la somme de 15 583,64 euros au titre des infiltrations par les relevés d'étanchéité, la CRAMA, la SMABTP, la société FCPL et son assureur, la MAF, la société Le Bel et associés et son assureur, la compagnie MMA IARD Assurances Mutuelles, à lui verser la somme de 12 578,40 euros TTC au titre des infiltrations par colmatage, la société Le Bel et associés et son assureur, la compagnie MMA IARD Assurances Mutuelles, à lui verser la somme de 14 141,58 euros TTC au titre de la glissance des sols, la société Avel Acoustique et son assureur, la compagnie Les Souscripteur du Lloyd's de Londres, la société Sofresid et son assureur, la compagnie AXA Corporate Solutions, la société Groupe F2E et son assureur, la compagnie Allianz, à lui verser la somme de 12 000 euros TTC au titre de l'acoustique déficiente des salles de musique et la compagnie CRAMA à lui verser la somme de 7 200 euros TTC au titre des fissures sur le mur du parking Les Eglantiers.

Par un jugement n° 1803231 du 14 avril 2022, le tribunal administratif de Rennes a condamné la société Bihannic, la société FCLP et la société Sofresid Engineering in solidum à verser à la société AXA France IARD une somme de 51 679,09 euros TTC au titre des désordres affectant la couverture en zinc de l'ouvrage (article 1er), la société Aluminium Bretagne à verser à la société AXA France IARD une somme de 3 243,43 euros TTC au titre des désordres résultant des infiltrations par les verrières et menuiseries extérieures, la société CCSB, la société SCEG et la société Soprema in solidum à verser à la société AXA France IARD une somme de 14 509,63 euros TTC au titre des désordres tenant aux défauts des relevés d'étanchéité, la société SCEG, la société CCSB et la société FCLP in solidum à verser à la société AXA France IARD une somme de 8 804,88 euros TTC au titre des désordres résultant des infiltrations par colmatage (article 4), la société Le Bel et associés à verser à la société AXA France IARD une somme de 9 806,88 euros au titre des désordres affectant la glissance des sols, la société Avel Acoustique, la société Groupe F2E et la société Sofresid Engineering in solidum à verser à la société AXA France IARD une somme de 12 000 euros TTC au titre des désordres tenant à la déficience acoustique des salles de musique (article 6) et la société SCEG à verser à la société AXA France IARD une somme de 7 200 euros TTC au titre des désordres relatifs aux fissures du mur du parking Les Eglantiers (article 7), ces sommes étant assorties des intérêts à compter du 6 juillet 2018 et de leur capitalisation à la date du 6 juillet 2019 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date (article 8), et a condamné la société Bihannic à garantir la société FCLP et la société Sofresid Engineering à hauteur de 80 % de la condamnation prononcée à l'article 1er de ce jugement, la société FCLP à garantir la société Bihannic et la société Sofresid Engineering à hauteur de 15 % de la condamnation prononcée à l'article 1er de ce jugement, la société Sofresid Engineering à garantir la société Bihannic et la société FCLP à hauteur de 5 % de la condamnation prononcée à l'article 1er de ce jugement, la société CCSB à garantir la société FCLP à hauteur de 50 % de la condamnation prononcée à l'article 4 de ce jugement, la société SCEG à garantir la société FCLP à hauteur de 10 % de la condamnation prononcée à l'article 4 de ce jugement, la société Avel Acoustique à garantir la société Groupe F2E et la société Sofresid Engineering à hauteur de 35 % de la condamnation prononcée à l'article 6 de ce jugement, la société Groupe F2E à garantir la société Avel Acoustique et la société Sofresid Engineering à hauteur de 55 % de la condamnation prononcée à l'article 6 de ce jugement et la société Sofresid Engineering à garantir la société Avel Acoustique et la société Groupe F2E à hauteur de 10 % de la condamnation prononcée à l'article 6 de ce jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 juin 2022, la société AXA France IARD, représentée par Me Labourdette, demande à la cour de réformer le jugement du tribunal administratif de Rennes du 14 avril 2022 en ce qu'il a rejeté le surplus de sa demande au titre de la responsabilité décennale et :

1°) de condamner la société SCEG à lui verser la somme de 96 999,60 euros TTC au titre des fissures et décollements des façades ;

2°) de condamner in solidum les sociétés Avel Acoustique, Sofresid Engineering, SCEG, Groupe F2E, FCLP, Bihannic, Aluminium Bretagne, CCSB, Soprema et Le Bel et associés à lui verser la somme de 20 801,70 euros TTC au titre des frais annexes ;

3°) de condamner in solidum, d'une part, les sociétés Bihannic, FCLP et Sofresid Engineering à lui verser la somme de 8 438,02 euros au titre des mesures provisoires pour les infiltrations par les couvertures zinc, et d'autre part les sociétés CCSB, SCEG et Soprema à lui verser la somme de 1 074,01 euros TTC au titre des mesures provisoires pour les défauts d'étanchéité ;

4°) de condamner in solidum les sociétés Avel Acoustique, Sofresid, SCEG, Groupe F2E, FCLP, Bihannic, Aluminium Bretagne, CCSB, Soprema et Le Bel et Associés à lui verser la somme de 55 143,29 euros TTC au titre des frais d'expertise ;

5°) de mettre à la charge solidaire des sociétés Avel Acoustique, Sofresid, SCEG, Groupe F2E, FCLP, Bihannic, Aluminium Bretagne, CCSB, Soprema et Le Bel et Associés une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le désordre A relatif aux fissures et décollement des façades engage la responsabilité décennale de la société SCEG malgré les réserves émises dès lors qu'il s'est révélé dans son ampleur et sa gravité postérieurement à la réception et qu'en tout état de cause il ressort du procès-verbal de réception du lot peinture que les reprises de peintures ont été faites en septembre 2008 postérieurement aux reprises des fissures ;

- elle est fondée à demander, en tant que subrogée dans les droits de la commune de Ploeren, la condamnation in solidum des défenderesses à lui rembourser la somme de 20 801,70 euros qu'elle a été condamnée à verser par le tribunal administratif de Rennes au titre des frais annexes ;

- elle est fondée à demander, en tant que subrogée dans les droits de la commune de Ploeren, la condamnation in solidum des sociétés Bihannic, FCLP et Sofresid Engineering à lui verser la somme de 8 438,02 euros au titre des mesures provisoires pour les infiltrations par les couvertures zinc et des sociétés CCSB, SCEG et Soprema à lui verser la somme de 1 074,01 euros au titre des mesures provisoires pour les défauts d'étanchéité ;

- la seul circonstance qu'elle n'ait pas engagé son action subrogatoire en même temps que la demande de la commune de Ploeren ne peut changer la nature et donc le bien-fondé de sa demande de condamnation solidaire des défenderesses à lui rembourser les frais d'expertise.

Par un mémoire, enregistré le 17 août 2022, la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles (CRAMA) Bretagne-Pays de Loire, en sa qualité d'assureur de la société caudanaise d'entreprise générale (SCEG), représentée par Me Mouliere, demande à la cour de rejeter les conclusions de la société AXA France IARD à son encontre et de mettre à sa charge une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le désordre A relatif aux fissures et décollement des façades n'engage pas la responsabilité décennale de la société SCEG dès lors que les réserves émises n'ont pas été levée et qu'il ne relève pas eu égard à sa gravité de la garantie de l'article 1792 du code civil ;

- entreprise de gros œuvre, elle ne saurait être tenue de prendre en charge les frais annexes relatifs à la réparation de désordres dont elle n'est pas responsable ;

- les conclusions de la société AXA France IARD à hauteur de 1 074,01 euros au titre des mesures provisoires pour les défauts d'étanchéité ne sont pas fondées alors qu'elles portent sur une ventilation dans le local rangement sans lien avec le désordre de fissuration imputable au maçon, qui n'a aucun caractère provisoire ;

- dès lors que la société AXA France IARD a été condamnée par jugement du 31 août 2016 à rembourser les frais d'expertise à la commune qui les avait initialement exposés, elle ne peut invoquer sa qualité de subrogée dans les droits de la commune pour en demander le remboursement aux constructeurs ; si elle entend présenter une demande " au titre de son préjudice propre " et à l'encontre de sociétés privées, une telle demande ne relève pas de la compétence du juge administratif.

Par des mémoires, enregistrés le 13 septembre 2022 et le 10 mai 2023, la société Sofresid Engineering, représentée par Me Majerholc-Oiknine, demande à la cour, à titre principal, de rejeter l'ensemble des conclusions à son encontre et par la voie de l'appel provoqué, à titre subsidiaire, de condamner in solidum toutes parties succombantes à la garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre et de limiter sa condamnation à 378,39 euros TTC au titre des frais annexes et à 5 % au titre des mesures provisoires pour les infiltrations par les couvertures zinc (421,91 euros), des frais d'expertise (2 757,17 euros) et de l'article L.761-1 du code de justice administrative et, en tout état de cause de mettre à la charge solidaire de toutes parties succombantes une somme de 10 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa part de responsabilité est extrêmement limitée ; elle ne peut être rendue solidaire que dans cette mesure ;

- les conclusions de la société Axa France IARD au titre des frais annexes et de la somme de 8 438,02 euros au titre des mesures provisoires sont irrecevables car nouvelles en appel ;

- l'expert judiciaire n'a pas retenu la nécessité d'engager ces frais annexes à la réalisation des travaux ;

- elle ne saurait être tenue de régler des frais annexes sur des travaux qu'elle n'a pas été condamnée à rembourser à AXA France IARD, s'agissant de désordres qui ne la concernent pas ;

- la part des frais annexes susceptible de lui être imputée ne saurait excéder sa part de responsabilité retenue par le jugement attaqué ;

- l'expert judiciaire avait déjà intégré le coût des mesures provisoires à hauteur de 3 937,20 euros dans son décompte des travaux de reprise des infiltrations par la couverture en zinc, si bien que la condamnation de 51 679,09 euros indemnisant la société AXA France IARD englobe le coût des mesures provisoires ;

- la part au titre des mesures provisoires susceptible de lui être imputée ne saurait excéder sa part de responsabilité retenue par le jugement attaqué ;

- les parties au présent litige n'ont pas à supporter des dépens qui relèvent d'une précédente instance auxquelles elles sont demeurées étrangères ;

- les conclusions au titre des frais d'expertise constituent un prétendu préjudice propre de la société AXA France IARD à l'encontre de sociétés privées, qui ne relève pas de la compétence du juge administratif ;

- la part au titre de ces frais susceptible de lui être imputée ne saurait excéder sa part de responsabilité retenue par le jugement attaqué ;

- si un coût supplémentaire au titre des mesures provisoires relatives aux infiltrations par les couvertures zinc devait être alloué à la société AXA France IARD, elle ne saurait se voir imputer une part supérieure à sa part de responsabilité définitivement retenue par le tribunal au titre desdits désordres affectant la couverture en zinc, soit 5% correspondant à un montant maximum de 421,91euros ;

- si le remboursement du coût de l'expertise devait être alloué à la société AXA France IARD, elle ne saurait se voir imputer une part supérieure à sa part de responsabilité définitivement retenue par le tribunal, soit 5% correspondant à un montant maximum de 2 757,17 euros ;

- elle ne peut être condamnée in solidum avec les autres défendeurs, à les garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre, dès lors qu'elle n'a commis aucune faute à leur égard.

Par un mémoire, enregistré le 19 décembre 2022, la société François Chochon - Laurent Pierre (FCLP) et la Mutuelle des Architectes Français (MAF), représentées par Me Groleau, demandent à la cour, à titre principal, de rejeter l'ensemble des conclusions à l'encontre de la société FCLP et, à titre subsidiaire, de limiter sa condamnation à 1 127 euros TTC au titre des frais annexes et de condamner in solidum toute autre partie succombante à la garantir des condamnations prononcées à son encontre et, en tout état de cause de mettre à la charge de toute partie succombante une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle ne peut être condamnée solidairement alors qu'il n'est pas établi qu'elle a concouru à la réalisation des dommages autres que ceux relatifs aux infiltrations par la couverture zinc et aux infiltrations par colmatage dans la salle de musique ;

- les conclusions de la société Axa France IARD au titre des frais annexes et de la somme de 8 438,02 euros au titre des mesures provisoires sont irrecevables car nouvelles en appel ;

- la part au titre des frais annexes susceptible de lui être imputée ne saurait excéder sa part de responsabilité retenue par le jugement attaqué, soit globalement la somme de 1 127 euros ;

- l'expert judiciaire avait déjà intégré le coût des mesures conservatoires prises pour pallier aux infiltrations par la toiture zinc dans le montant global des travaux de reprise des infiltrations par la couverture en zinc, si bien que la condamnation de 51 679,09 euros indemnisant la société AXA France IARD englobe le coût des mesures provisoires ;

- la société AXA France IARD ne peut faire valoir son recours subrogatoire alors qu'elle a été condamnée par le jugement du 31 août 2016 à supporter les frais d'expertise et, en tout état de cause ses conclusions au titre des frais irrépétibles constituent un préjudice propre à l'encontre de sociétés privées qui ne relève pas de la compétence du juge administratif ;

- elle n'a eu qu'une part minime dans les désordres, ce qui devrait en tout état de cause conduire à limiter sa responsabilité à 10%.

Par un mémoire, enregistré le 20 décembre 2022, la société Groupe F2E, représentée par Me Sion, demande à la cour de rejeter la requête de la société AXA France IARD, en tout état de cause, de limiter sa responsabilité au titre des frais annexes et des frais d'expertise à hauteur de sa responsabilité résiduelle et de mettre à la charge de toute partie succombante une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la société AXA France IARD ne peut pas demander, dans le cadre de la subrogation, à être remboursée de frais d'expertises auxquels elle a été condamnée dans le cadre d'un autre contentieux ;

- si elle estime avoir subi un préjudice propre à ce titre, elle doit en réclamer la réparation au juge judiciaire ;

- sa condamnation in solidum au titre des frais annexes et des frais d'expertise est exclue s'agissant de plusieurs désordres avec des responsabilités distinctes.

Par un mémoire, enregistré le 30 janvier 2023, la société Soprema Entreprises, représentée par Me Collin, demande à la cour de condamner in solidum la société SCEG et la société CCSB à la garantir de la condamnation prononcée au titre des mesures conservatoires à hauteur de 70 %, de condamner in solidum les sociétés Avel Acoustique, Sofresid Engineering, SCEG, Groupe F2E, FCLP, Bihannic, Aluminium Bretagne, CCSB et Le Bel et associés à la garantir de toute condamnation prononcée au titre des frais annexes, des frais d'expertise et des frais irrépétibles à hauteur de 99 %, de débouter toutes parties de toutes demandes plus amples ou contraires, de rejeter toutes les conclusions de condamnation au titre des frais irrépétibles présentées à son encontre et, à tout le moins de les réduire à de plus justes proportions et de mettre à la charge de toute partie succombante une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa responsabilité a été estimée par l'expert à hauteur de 20 % de la somme de 14 509,63 euros, soit à peine plus de 1% du montant total des travaux, si bien que sa participation aux frais annexes ne devrait pas excéder 1 % de la somme de 20 801,70 euros ;

- la somme de 1 074,01 euros, réglée par la société AXA France IARD, a bien servi à financer des mesures provisoires destinées à pallier l'apport d'humidité en lien avec les infiltrations (par les relevés d'étanchéité et par les fissures) observées dans le local rangement et ce, dans l'attente de la réalisation des travaux, si bien qu'en cas de condamnation, elle serait fondée à solliciter la condamnation in solidum de la société SCEG et de la société CCSB à la garantir de la condamnation prononcée à hauteur de 70 % au regard du partage de responsabilité établi par l'expert judiciaire et entériné par le tribunal administratif.

Par un mémoire, enregistré le 12 avril 2023, la société Bihannic, représentée par Me Massip, demande à la cour, à titre principal, de rejeter l'ensemble des conclusions de la société AXA France IARD à l'encontre des sociétés CCSB et Bihannic, à titre subsidiaire de limiter les condamnations mises à sa charge à hauteur de sa part de responsabilité retenue par le tribunal administratif de Rennes, de condamner in solidum les sociétés FCLP et Sofresid Engineering à la garantir à hauteur de 20% des condamnations éventuellement prononcées à son encontre au titre des frais annexes, des mesures conservatoires et des frais d'expertise judiciaire, à titre très subsidiaire de condamner in solidum les sociétés FCLP, Sofresid Engineering, Soprema, Avel Acoustique, SCEG, Groupe F2E, Aluminium Bretagne et Le Bel et associés à la garantir de toutes les condamnations à son encontre et, en tout état de cause de ramener la demande de frais irrépétibles de la société AXA France IARD à de plus justes proportions et mettre à sa charge, le cas échéant in solidum avec toute autre partie succombante, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les sociétés CCSB et SMABTP ne sont pas parties à l'instance en cause d'appel ;

- les conclusions de la société Axa France IARD au titre des frais annexes et de la somme de 8 438,02 euros au titre des mesures provisoires sont irrecevables car nouvelles en appel ;

- la société AXA France IARD n'avait pas demandé sa condamnation au titre des frais annexes ;

- ces frais annexes étant extrêmement liés aux coûts des travaux réparatoires, elle ne pourrait tout au plus qu'être condamnée in solidum avec les sociétés FCLP et Sofresid Engineering à verser à la société AXA France IARD la somme de 5 167,91 euros, correspondant à 10% du montant auquel elle a été condamnée en principal et est fondée à demander la condamnation in solidum de ces sociétés à la garantir à hauteur de 20% de la condamnation éventuellement prononcée à ce titre ;

- la société AXA France IARD n'apporte aucun nouvel élément justificatif de nature à prouver d'une part qu'elle aurait indemnisé la commune de Ploeren pour des mesures conservatoires et d'autre part que ces mesures étaient nécessaires et liées au désordre des infiltrations par couverture ;

- elle est fondée à demander la condamnation in solidum des sociétés FCLP et Sofresid Engineering à la garantir à hauteur de 20% de la condamnation éventuellement prononcée au titre des mesures conservatoires ;

- l'exécution de la condamnation prononcée à l'encontre de la société AXA France IARD ne découle pas de l'assurance dommages-ouvrage mais tout au plus d'un préjudice propre de l'assureur, en dehors de sa police dommages ouvrage, ne relevant pas de la juridiction administrative ;

- la condamnation aux dépens et en particulier aux frais d'expertise ne pourrait qu'être prononcée proportionnellement aux condamnations au principal, ce qui la limiterait à une condamnation in solidum des sociétés Bihannic, FCLP et Sofresid Engineering à verser à la société AXA France IARD la somme de 26 573,55 euros ;

- elle est fondée à demander la condamnation in solidum des sociétés FCLP et Sofresid Engineering à la garantir à hauteur de 20% de la condamnation éventuellement prononcée au titre des frais d'expertise.

Par un mémoire, enregistré le 26 mai 2023, la société Avel accoustique, représentée par la SCP Boquet-Dagorn, demande à la cour de rejeter la requête de la société AXA France IARD, subsidiairement de limiter sa part dans une quelconque condamnation prononcée à son encontre à 3,92 % du total, de rejeter toute demande de condamnation in solidum, et donc de garantie, et de mettre à la charge de la société AXA France IARD une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande au titre des frais annexes est irrecevable comme nouvelle en appel ;

- le jugement rendu le 31 août 2016 par le tribunal administratif de Rennes n'a qu'une autorité relative à l'égard des tiers et la réserve sur le fait que la société AXA France IARD peut exercer des actions subrogatoires à l'encontre des participants aux opérations de construction n'est pas le soutien nécessaire du dispositif condamnant la société AXA France IARD au profit de la commune de Ploeren ;

- la société AXA France IARD a été condamnée, non pas en qualité d'assureur dommages-ouvrage, mais en qualité de défendeur condamné aux dépens si bien qu'elle ne peut réclamer le paiement des dépens qu'elle a dû supporter dans le cadre d'une autre instance, à laquelle au surplus n'étaient pas parties les intimés ;

- elle ne saurait, en tout état de cause, être condamnée qu'au prorata de sa part dans la condamnation totale prononcée en première instance, soit 3,92% ;

- sa condamnation solidaire ne se justifie pas alors que les désordres acoustiques de la salle de musique n'ont pas le moindre rapport, quant à leur réalisation, avec les autres désordres affectant notamment la solidité du gros-œuvre, la glissance du sol ou l'étanchéité de la couverture.

Par une ordonnance du 30 mai 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 juin 2023.

Un mémoire produit par la société AXA France IARD a été enregistré le 19 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des assurances ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Derlange, président assesseur,

- les conclusions de Mme Rosemberg, rapporteure publique,

- et les observations de Me Nadalini, substituant Me Labourdette, pour la société AXA France IARD et de Me Boquet, pour la société Avel Acoustique.

Considérant ce qui suit :

1. En 2004, la commune de Ploeren a décidé de construire un espace culturel multifonctionnel. La maîtrise d'œuvre a été confiée à un groupement d'entreprises, composé notamment de la société FCLP, en tant qu'architecte et mandataire, de la société Sofresid Engineering, en tant que bureau d'études techniques (BET) et de la société Avel Acoustique, en tant que bureau d'études acoustiques. Dix-neuf lots ont été attribués, notamment le lot n° 2 gros œuvre à la société SCEG. Par ailleurs, la commune de Ploeren a conclu, le 22 novembre 2006, un contrat d'assurance dommages-ouvrage, avec effet au 12 janvier 2006, avec la société AXA France IARD. Les travaux engagés le 12 janvier 2006 ont fait l'objet d'une réception avec réserves le 31 juillet 2008. Certaines de ces réserves n'ayant pu être levées et des désordres, notamment des infiltrations, étant apparus, la commune de Ploeren a obtenu la condamnation, le 31 août 2016, par le tribunal administratif de Rennes de la société AXA France IARD à lui verser la somme de 183 710,46 euros, assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ces intérêts, au titre de la couverture de ces préjudices par le contrat d'assurance dommages-ouvrage souscrit et à lui rembourser les frais d'expertise exposés à hauteur de 55 143,29 euros, au titre des dépens. La société AXA France IARD, se prévalant de sa qualité d'assureur subrogé dans les droits de son assurée, a saisi le tribunal administratif de Rennes afin de faire condamner solidairement, ou à défaut chacun pour son fait, divers participants à cette opération de travaux, ainsi que leurs assureurs, à lui verser la somme de 242 665,46 euros au titre du coût des travaux réparatoires des désordres affectant l'ouvrage construit, ainsi que la somme de 55 143,29 euros au titre des frais d'expertise.

2. Par un jugement du 14 avril 2022, le tribunal administratif, sur le fondement de la responsabilité décennale des constructeurs, en premier lieu, a condamné solidairement les sociétés Bihannic, titulaire du lot n° 5 couverture en zinc, FCLP, architecte mandataire du groupement de maîtrise d'œuvre, et Sofresid Engineering, BET du groupement de maîtrise d'œuvre, à verser à la société AXA France IARD une somme de 51 679,09 euros TTC au titre des désordres affectant la couverture en zinc (article 1er), puis a condamné la société Bihannic à garantir les deux autres à hauteur de 80 % de cette condamnation (article 12), la société FCLP à garantir Bihannic et Sofresid Engineering à hauteur de 15 % (article 13) et la société Sofresid Engineering à garantir Bihannic et FCLP à hauteur de 5 % (article 14), en deuxième lieu, a condamné la société Aluminium Bretagne, titulaire du lot n° 8 menuiseries extérieures, à verser à la société AXA France IARD une somme de 3 243,43 euros TTC au titre des désordres résultant des infiltrations par les verrières et menuiseries extérieures (article 2), en troisième lieu, a condamné solidairement les sociétés CCSB, lot n° 6 couvertures d'ardoise, SCEG, lot n° 2 gros œuvre, et Soprema, lot n° 7 étanchéité terrasses, à verser à la société AXA France IARD une somme de 14 509,63 euros TTC au titre des désordres tenant aux défauts des relevés d'étanchéité (article 3), en quatrième lieu, a condamné solidairement les sociétés SCEG, CCSB et FCLP à verser à la société AXA France IARD une somme de 8 804,88 euros TTC au titre des désordres résultant des infiltrations dans une salle de musique par colmatage d'une canalisation (article 4), et pour la répartition de cette indemnité a condamné les sociétés CCSB et SCEG à garantir la société FCLP à hauteur respectivement de 50 % (article 15) et 10 % (article 16), en cinquième lieu, a condamné la société Le Bel et associés, lot n° 13 revêtements de sols et faïences, à verser à la société AXA France IARD une somme de 9 806,88 euros au titre des désordres affectant la glissance des sols (article 5), en sixième lieu, a condamné solidairement les sociétés Avel Acoustique, FEE, lot n° 17 chauffage-ventilation, et Sofresid Engineering à verser à la société AXA France IARD une somme de 12 000 euros TTC au titre des désordres tenant à la déficience acoustique des salles de musique (article 6), et a condamné ces sociétés à se garantir mutuellement à hauteur respectivement de 35 % (article 17), 55 % (article 18) et 10 % (article 19), en septième lieu, a condamné la société SCEG à verser à la société AXA France IARD une somme de 7 200 euros TTC au titre des désordres relatifs aux fissures du mur du parking Les Eglantiers, en huitième lieu, a assorti les condamnations prononcées par les articles 1 à 7 des intérêts, à compter du 6 juillet 2018, et de leur capitalisation à compter du 6 juillet 2019 et à chaque échéance annuelle, en dernier lieu, a rejeté le surplus des conclusions de la société AXA France IARD et des autres parties (articles 9 à 11 et 20). La compagnie AXA France IARD relève appel de ce jugement et en demande la réformation en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions, aux fins d'obtenir en outre 96 999,60 euros au titre des fissures et décollements des façades, 20 801,70 euros au titre des frais annexes, 9 512,03 euros au titre des mesures provisoires et 55 143,29 euros au titre des frais d'expertise.

Sur les fins de non-recevoir opposées à la requête d'appel :

3. D'une part, il ressort du dossier de première instance et du jugement attaqué, en particulier de ses visas et points 17 et 19, que la société AXA France IARD avait saisi le tribunal administratif de conclusions tendant au versement à son profit des sommes de 8 438,02 euros et 1 074,01 euros au titre des mesures conservatoires. Par suite, les fins de non-recevoir tirées de ce qu'il s'agirait de conclusions nouvelles en appel doivent être écartées. D'autre part, il ressort du dossier de première instance et du jugement attaqué, en particulier de ses visas, que la société AXA France IARD avait demandé au tribunal le versement à son profit de la somme globale de 242 665,46 euros au titre des travaux réparatoires, qui correspond au total des chefs de préjudice dont elle a demandé également l'indemnisation à titre subsidiaire et d'un montant de 20 801,70 euros qui correspond exactement au montant demandé à la cour au titre des frais annexes. Par suite, les fins de non-recevoir tirées de ce qu'il s'agirait de conclusions nouvelles en appel doivent être écartées, y compris s'agissant de la société Bihannic visée par la demande globale de 242 665,46 euros.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 121-12 du code des assurances : " L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur. (...) ". Il résulte de ces dispositions que la subrogation légale de l'assureur dans les droits et actions de l'assuré est subordonnée au seul paiement à l'assuré de l'indemnité d'assurance en exécution du contrat d'assurance et ce, dans la limite de la somme versée.

En ce qui concerne les fissures et décollements de façades :

5. Il résulte des principes qui régissent la garantie décennale des constructeurs que des désordres apparus dans le délai d'épreuve de dix ans, de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination dans un délai prévisible, engagent leur responsabilité, même s'ils ne se sont pas révélés dans toute leur étendue avant l'expiration du délai de dix ans. La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserve et elle met fin aux rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs en ce qui concerne la réalisation de l'ouvrage. En l'absence de stipulations particulières prévues par les documents contractuels, lorsque la réception est prononcée avec réserves, les rapports contractuels entre le maître de l'ouvrage et les constructeurs ne se poursuivent qu'au titre des travaux ou des parties de l'ouvrage ayant fait l'objet des réserves.

6. La société AXA France IARD soutient, qu'en tant que subrogée dans les droits de la commune de Ploeren, elle a droit au remboursement de la somme de 96 999,60 euros relative à des fissures et décollements de façades malgré les réserves émises dès lors que ces désordres se sont révélés dans leur ampleur et gravité postérieurement à la réception et qu'en tout état de cause il ressort du procès-verbal de réception du lot peinture que les reprises de peintures ont été faites en septembre 2008 postérieurement aux reprises des fissures.

7. D'une part, il ressort du procès-verbal de réception du lot n° 2 gros œuvre du 31 juillet 2008 qu'il prononce la réception des travaux de ce lot avec des réserves mises à jour le 17 juillet 2008, portant notamment sur des fissures et cloquages des extérieurs des maisons et de la salle polyvalente, des fissures sur le mur de l'abri parents de l'extérieur de la médiathèque, des fuites en plafond et dans les angles dans la zone de circulation du secteur maison et une infiltration au niveau du sas menant à la salle polyvalente, supposant diverses reprises, réparations et finitions de la part de la société SCEG, titulaire du lot. Contrairement à ce que soutient la société AXA France IARD les vices qui ont été constatés par l'expert, page 17 de son rapport remis le 26 février 2015, ne sont pas distincts de ceux qui avaient fait l'objet de réserves le 31 juillet 2008, même si du fait de l'écoulement du temps certains des désordres constatés se sont aggravés, les fissures devenant infiltrantes et les cloquages entrainant des décollements en façades. Par suite, la commune de Ploeren doit être considérée comme ayant eu connaissance de ces vices lors de la réception et ne pouvait ignorer leurs conséquences à terme.

8. D'autre part, contrairement à ce que soutient la société AXA France IARD, le fait que le procès-verbal de réception du lot peinture, également établi le 31 juillet 2008, ne mentionne l'existence que d'une fissure et qu'il porte la mention " fait le 15/09 ", eu égard à l'objet spécifique de ce procès-verbal ne permet pas d'attester que des reprises des désordres constatés dans le procès-verbal de réception du lot n° 2 gros œuvre auraient été réalisées entre la date du 31 juillet 2008 et celle du 15 septembre 2008.

9. Il résulte des deux points précédents que, la responsabilité décennale des constructeurs ne pouvant être recherchée pour des désordres apparents à la réception, la société AXA France IARD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande de 96 999,60 euros relative à des fissures et décollements de façades.

En ce qui concerne les " frais annexes " :

10. La société AXA France IARD se borne à demander la condamnation in solidum des défenderesses à lui verser la somme de 20 801,70 euros au motif que le tribunal administratif de Rennes l'a condamnée à verser à la commune de Ploeren cette somme, correspondant à 10% du montant de 228 818,73 euros des travaux réparatoires, pour financer les interventions d'un maître d'œuvre, d'un contrôleur technique et d'un coordinateur sécurité protection santé et qu'elle lui a payé ladite somme en application du contrat d'assurance souscrit.

11. Toutefois, la seule qualité de subrogée dans les droits de la commune, sur le fondement du contrat d'assurance, ne lui ouvre pas le droit à être indemnisée par les constructeurs, sur le fondement de leur responsabilité décennale, faute de préciser à quel titre et dans quelle mesure chacun de ceux-ci devrait supporter la charge des sommes qu'elle a versées à son assurée. Dès lors que la société AXA France Iard ne précise pas pour quels motifs ces sociétés devraient prendre en charge ces frais de maîtrise d'œuvre, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande de 20 801,70 euros au titre de ces " frais annexes ".

En ce qui concerne les mesures conservatoires :

12. D'une part, il ressort de la page 38 du rapport d'expertise que la commune de Ploeren, pour faire face aux désordres en cause, en particulier aux infiltrations, a dû prendre diverses mesures provisoires comme la mise en place de protections dans la médiathèque, l'intervention de personnel technique pour un cheminement extérieur, la fourniture de petit matériel et l'achat de bâches, pour un total de 8 438,02 euros, et la ventilation d'un local pour 1 074,01 euros. Il ne résulte pas de l'instruction que, comme le prétendent les sociétés FCLP et MAF, ces sommes auraient été intégrées dans le poste de 51 679,09 euros relatif aux désordres de la couverture zinc évalué par l'expert et repris par le tribunal administratif. En revanche, il résulte de l'instruction que ces sommes de 8 438,02 euros et 1 074,01 euros ont été prises en compte par le tribunal administratif de Rennes en 2016 pour condamner la société AXA France IARD à verser une indemnité totale de 183 710,63 euros à la commune de Ploeren, que la société lui a payé en lui transmettant un chèque de 242 665,46 euros correspondant à la condamnation au principal prononcée à son encontre, assortie des intérêts, des frais d'expertise et des frais de l'instance. Dans ces conditions, la société AXA France IARD est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ne lui ont pas alloué également ces sommes de 8 438,02 euros et 1 074,01 euros.

13. D'autre part, eu égard au fait que l'expert a constaté que ces préjudices sont en lien avec les désordres par la couverture zinc à l'exception du coût de ventilation en lien avec les désordres d'étanchéité et qu'il n'y a pas de contestation sérieuse sur la part de responsabilité de chaque constructeur dans la survenance de ces désordres, il y a lieu de fixer les taux de garantie dans le premier cas à 80 % pour la société Bihannic, 15 % pour la société FCLP et 5 % pour la société Sofresid Engineering, et dans le second cas à 50 % pour la société SCEG, 30 % pour la société CCSB et 20 % pour la société Soprema. Toutefois, dès lors que la société Soprema a limité ses conclusions d'appel en garantie à 70 % concernant les sociétés SCEG et CCSB, il y a lieu de fixer leur taux de garantie respectif à 45 % et 25 %.

En ce qui concerne les frais d'expertise :

14. La société AXA France IARD n'est pas fondée à demander le remboursement à titre de dépens de la somme de 55 143,29 euros correspondant au coût des frais d'expertise exposés par la commune de Ploeren, qui a obtenu qu'elle soit mise à la charge de cette société aux termes du jugement du 31 août 2016, dès lors qu'elle n'a pas exposé de frais d'une telle nature dans le cadre du litige actuel. Au surplus, elle ne peut pas davantage prétendre à cette somme au titre de la subrogation légale de l'article L. 121-12 du code des assurances dès lors que ces frais remboursés au titre des dépens en 2016 ne relèvent pas d'un dommage du fait d'un tiers ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur au titre du contrat d'assurance. Par suite, la société AXA France IARD, qui se borne à soutenir qu'elle aurait obtenu les frais en cause si elle l'avait demandé en même temps que la commune de Ploeren, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande d'une somme de 55 143,29 euros au titre des frais d'expertise.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société AXA France IARD, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement des sommes que les autres parties demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge solidaire des parties condamnées aux points précédents la somme de 1 500 euros, à verser à la société AXA France IARD, sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Les sociétés Bihannic, FCLP et Sofresid Engineering sont condamnées in solidum à verser à la société AXA France IARD une somme de 8 438,02 euros au titre des mesures conservatoires de la couverture zinc.

Article 2 : Les sociétés SCEG, CCSB et Soprema sont condamnées in solidum à verser à la société AXA France IARD une somme de 1 074,01 euros au titre des mesures conservatoires de ventilation.

Article 3 : La société Bihannic garantira la société FCLP et la société Sofresid Engineering à hauteur de 80 % de la condamnation prononcée à l'article 1er.

Article 4 : La société FCLP garantira la société Bihannic et la société Sofresid Engineering à hauteur de 15 % de la condamnation prononcée à l'article 1er.

Article 5 : La société Sofresid Engineering garantira la société Bihannic et la société FCLP à hauteur de 5 % de la condamnation prononcée à l'article 1er.

Article 6 : La société Soprema garantira la société CCSB et la société SCEG à hauteur de 20 % de la condamnation prononcée à l'article 2.

Article 7 : La société CCSB garantira la société SCEG à hauteur de 30 % de la condamnation prononcée à l'article 2.

Article 8 : La société SCEG garantira la société CCSB à hauteur de 50 % de la condamnation prononcée à l'article 2.

Article 9 : La société CCSB garantira la société Soprema à hauteur de 25 % de la condamnation prononcée à l'article 2.

Article 10 : La société SCEG garantira la société Soprema à hauteur de 45 % de la condamnation prononcée à l'article 2.

Article 11 : Le jugement du tribunal administratif de Rennes n° 1803231 du 14 avril 2022 est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1 à 10 du présent arrêt.

Article 12 : Les sociétés Sofresid, SCEG, FCLP, Bihannic, CCSB et Soprema verseront in solidum la somme de 1 500 euros à la société AXA France IARD, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 13 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 14 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles (CRAMA) Bretagne-Pays de Loire, à la société Bihannic, à la société François Chochon - Laurent Pierre (FCLP), à la mutuelle des architectes français (MAF), à la société Sofresid Engineering, à la société Soprema, à la société Aluminium Bretagne, à la société Le Bel et associés, à la société Groupe F2E, à la société Avel Acoustique et à la société AXA France IARD.

Délibéré après l'audience du 24 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Derlange, président assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 novembre 2023.

Le rapporteur,

S. DERLANGE

Le président,

L. LAINÉ

Le greffier,

C. WOLF

La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT01804


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT01804
Date de la décision : 17/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINÉ
Rapporteur ?: M. Stéphane DERLANGE
Rapporteur public ?: Mme ROSEMBERG
Avocat(s) : GROLEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-11-17;22nt01804 ?
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