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14/11/2023 | FRANCE | N°21NT02401

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 14 novembre 2023, 21NT02401


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 20 juillet 2018 du conseil municipal de la commune de Pleurtuit approuvant son plan local d'urbanisme en tant qu'elle classe en zone Nplt leurs parcelles cadastrées section ZI nos 81 et 287, situées rue de la Fée.

Par un jugement n° 1900421 du 18 juin 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 ao

ût 2021, M. C... B... et Mme A... B..., représentés par Me Dressayre, demandent à la cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 20 juillet 2018 du conseil municipal de la commune de Pleurtuit approuvant son plan local d'urbanisme en tant qu'elle classe en zone Nplt leurs parcelles cadastrées section ZI nos 81 et 287, situées rue de la Fée.

Par un jugement n° 1900421 du 18 juin 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 août 2021, M. C... B... et Mme A... B..., représentés par Me Dressayre, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler la délibération du 20 juillet 2018 du conseil municipal de la commune de Pleurtuit approuvant son plan local d'urbanisme en tant qu'elle classe en zone Nplt, espaces remarquables terrestres découlant de la loi Littoral, leurs parcelles cadastrées section ZI nos 81 et 287.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est entaché d'une irrégularité née d'un défaut de motivation ;

- la délibération contestée est entachée d'un défaut de motivation au regard des dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- le zonage litigieux est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en raison de la continuité urbanistique de la parcelle ZI 81 avec la zone UH ;

- le zonage litigieux est incompatible avec le projet d'aménagement et de développement durables.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 février 2022, la commune de Pleurtuit, représentée par Me Rouhaud, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. et Mme B... le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens invoqués par les requérants n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Ody,

- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,

- et les observations de Me Cadic, substituant Me Rouhaud, pour la commune de Pleurtuit.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 18 juin 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. et Mme B... tendant à l'annulation de la délibération du 20 juillet 2018 du conseil municipal de la commune de Pleurtuit (Ille-et-Vilaine) approuvant son plan local d'urbanisme en tant qu'elle classe en zone Nplt, espaces remarquables terrestres découlant de la loi Littoral, leurs parcelles cadastrées section ZI nos 81 et 287, situées rue de la Fée. M. et Mme B... relèvent appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des termes du jugement attaqué que les premiers juges ont visé le moyen tiré de ce que le classement en zone Nplt des parcelles de M. et Mme B... présente une incohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de Pleurtuit et qu'il y a été répondu au point 22 de manière précise et développée. Par suite, l'irrégularité du jugement attaqué invoquée par les requérants et tirée d'un défaut de motivation dans la réponse apportée au moyen tiré de l'incohérence du classement en zone Nplt avec le projet d'aménagement et de développement durables manque en fait et doit dès lors être écartée.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, les dispositions de l'article L. 200-1 du code des relations entre le public et l'administration prévoient que les actes administratifs unilatéraux décisoires comprennent les actes règlementaires, les actes individuels et les autres actes décisoires non règlementaires. Toutefois, l'article L. 211-2 du même code définit le champ d'application matériel de l'obligation de motivation des actes administratifs et n'impose cette motivation en droit et en fait qu'aux décisions administratives individuelles défavorables qui entrent dans les catégories énumérées par ses points 1° à 8°. Le règlement graphique d'un plan local d'urbanisme délimitant les zonages applicables sur le territoire couvert par le document d'urbanisme présente un caractère règlementaire et ne constitue pas une décision administrative individuelle défavorable. Par suite, les dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dont se prévalent les requérants pour soutenir que le zonage du plan local d'urbanisme est entaché d'un défaut de motivation sont inopérantes et le moyen doit être écarté.

4. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 131-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Les schémas de cohérence territoriale sont compatibles avec : / 1° Les dispositions particulières au littoral (...). ". Aux termes de l'article L. 131-4 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Les plans locaux d'urbanisme et les documents en tenant lieu ainsi que les cartes communales sont compatibles avec : / 1° Les schémas de cohérence territoriale prévus à l'article L. 141-1 (...). ". Enfin, aux termes de l'article L. 131-7 de ce code, dans sa rédaction applicable au litige : " En l'absence de schéma de cohérence territoriale, les plans locaux d'urbanisme, les documents en tenant lieu et les cartes communales sont compatibles, s'il y a lieu, avec les documents énumérés aux 1° à 10° de l'article L. 131-1 et prennent en compte les documents énumérés à l'article L. 131-2. (...) ". Il résulte de ces dispositions que les plans locaux d'urbanisme doivent être compatibles avec les schémas de cohérence territoriale et qu'en l'absence de schéma de cohérence territoriale, ils doivent être compatibles, s'il y a lieu, avec les dispositions particulières au littoral prévues aux articles L. 121-1 à L. 121-51. Il en résulte également que les schémas de cohérence territoriale doivent être compatibles, s'il y a lieu, avec ces mêmes dispositions.

5. S'il appartient à l'autorité administrative chargée de se prononcer sur une demande d'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de la conformité du projet avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral, il résulte des dispositions précitées des articles L. 131-4 et L. 131-7 du code de l'urbanisme, que, s'agissant d'un plan local d'urbanisme, il appartient à ses auteurs de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de sa compatibilité avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral. Dans le cas où le territoire concerné est couvert par un schéma de cohérence territoriale, cette compatibilité s'apprécie en tenant compte des dispositions de ce document relatives à l'application des dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral, sans pouvoir en exclure certaines au motif qu'elles seraient insuffisamment précises, sous la seule réserve de leur propre compatibilité avec ces dernières.

6. D'autre part, aux termes de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. / Un décret fixe la liste des espaces et milieux à préserver, comportant notamment, en fonction de l'intérêt écologique qu'ils présentent, les dunes et les landes côtières, les plages et lidos, les forêts et zones boisées côtières, les îlots inhabités, les parties naturelles des estuaires, des rias ou abers et des caps, les marais, les vasières, les zones humides et milieux temporairement immergés ainsi que les zones de repos, de nidification et de gagnage de l'avifaune désignée par la directive 79/409 CEE du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages. ".

7. Le territoire de la commune de Pleurtuit est couvert par le schéma de cohérence territoriale des communautés du Pays de Saint-Malo. Le document d'orientations et d'objectifs de ce document d'urbanisme, dans sa version en vigueur à la date d'approbation de la délibération du 20 juillet 2018, identifie les secteurs potentiels pouvant comprendre des espaces remarquables au titre de la loi Littoral et il ressort du document cartographique annexé que les parcelles ZI 81 et 287 sont intégrées dans ces secteurs. Ce même document identifie les villages au sens des dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral et distingue ceux ayant vocation à être densifiés globalement, ceux ayant vocation à être étendus de manière contenue et ceux ayant vocation à être étendu de manière limitée. S'agissant de la commune de Pleurtuit, le village de Jouvente / Saint-Antoine est identifié comme ayant vocation à être étendu de manière contenue. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles ZI 81 et 287 se trouvent toutefois hors du périmètre global, au sens du schéma de cohérence territoriale, du village existant de Saint-Antoine, lequel regroupe des maisons d'habitation et quelques entreprises autour d'une chapelle. Les parcelles en litige se situent par ailleurs à proximité immédiate de la Rance qu'elles surplombent dans un site remarquable à protéger et, ainsi qu'en conviennent M. et Mme B..., appartiennent au " patrimoine naturel de la Rance ". Par suite, en classant les parcelles des époux B... en zone Nplt, espaces remarquables terrestres découlant de la loi Littoral, le conseil municipal n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées du code de l'urbanisme particulières au littoral, appréciation portée en tenant compte des dispositions du document d'orientations et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale des communautés du Pays de Saint-Malo.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3 ". Pour apprécier la cohérence exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables (PADD), il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou à un objectif du PADD ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

9. Il ressort des pièces du dossier que le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de Pleurtuit approuvé le 20 juillet 2018 prévoit cinq orientations, parmi lesquelles " accueillir et intégrer les nouveaux habitants " et " promouvoir une qualité environnementale et paysagère ". S'agissant de l'objectif d'accueil et d'intégration des nouveaux habitants, ce document prévoit essentiellement un renforcement et une densification du centre bourg de Pleurtuit et des pôles urbains identifiés. Il admet également un confortement des villages, notamment celui de Jouvente / Saint-Antoine en autorisant les constructions dans les cœurs d'ilot et les dents creuses ou en limite de village pour renforcer la lecture de la limite urbaine. S'agissant de l'objectif de promotion d'une qualité environnementale et paysagère, le projet d'aménagement et de développement durables prévoit la protection de la frange littorale que constituent à cet endroit les bords de Rance. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle ZI 81 appartenant aux époux B... ne se situe pas en cœur d'ilot du village de Jouvente / Saint-Antoine, ni n'en constitue une dent creuse. Elle est également trop éloignée du village pour la regarder comme renforçant la lecture de la limite urbaine. En revanche, la parcelle litigieuse se trouve à proximité immédiate du rivage de la Rance, entourée au nord, à l'est et au sud de vastes parcelles non bâties, laissées à l'état naturel ou à vocation agricole. Par suite et au regard des deux orientations du projet d'aménagement et de développement durables précédemment rappelées, le classement en zone Nplt de la parcelle ZI 81 des époux B... n'est pas incohérent avec le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme doit dès lors être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. et Mme B..., parties perdantes à la présente instance, le versement à la commune de Pleurtuit d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : M. et Mme B... verseront à la commune de Pleurtuit la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et A... B... et à la commune de Pleurtuit.

Délibéré après l'audience du 19 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Rivas, président de la formation de jugement,

- Mme Ody, première conseillère,

- Mme Dubost, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 novembre 2023.

La rapporteure,

C. ODY

Le président de la formation

de jugement,

C. RIVAS

La greffière,

S. PIERODÉ

La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT02401


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT02401
Date de la décision : 14/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. RIVAS
Rapporteur ?: Mme Cécile ODY
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : CABINET LEXCAP RENNES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-11-14;21nt02401 ?
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