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24/10/2023 | FRANCE | N°22NT03827

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 24 octobre 2023, 22NT03827


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009, ainsi que des majorations correspondantes.

Par un jugement n° 1900445 du 25 mai 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 décembre 2022, M. D... C..., représenté par Me Lefeuvre, d

emande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de l'intégralité ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2009, ainsi que des majorations correspondantes.

Par un jugement n° 1900445 du 25 mai 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 décembre 2022, M. D... C..., représenté par Me Lefeuvre, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de l'intégralité des rappels d'impôt mis en recouvrement ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 3.000 euros HT au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif n'a pas tiré les conséquences de la décision du tribunal correctionnel de Dijon qui l'a relaxé pour les faits d'opérations financières entre la France et l'étranger sur des fonds provenant d'infraction à la législation sur les stupéfiants ; il n'a pas eu la libre disposition de ces fonds, comme en attestent les procès-verbaux d'audition ; il n'a pas davantage eu la disposition des biens trouvés à son domicile mais seulement la garde temporaire de ceux-ci ;

- l'administration ne pouvait pas l'imposer sur la totalité des fonds dès lors que le juge correctionnel l'a condamné conjointement avec M. E... A... B... pour recel de biens venant de la cession non autorisée de stupéfiants à autrui commis du 1er février 2009 au 4 novembre 2009 à Saint Lumine de Clisson Chevigny Saint Sauveur.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 mai 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code pénal ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Viéville,

- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Postérieurement à un contrôle douanier du 3 novembre 2009 et à une perquisition en date du 5 novembre 2009 effectuée à son domicile, M. C... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel et a été condamné par le tribunal de grande instance de Dijon du 26 juin 2014 notamment pour recel de bien en lien avec la cession non autorisée de stupéfiants à autrui. L'administration fiscale, informée de la procédure pénale a, sur le fondement de l'article 1649 quater-0 B bis du code général des impôts, imposé M. C... à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux au titre de l'année 2009 sur l'ensemble des espèces appréhendées, soit la somme de 109 720 euros. Après mise en recouvrement, M. C... a présenté une réclamation qui a été rejetée par l'administration le 15 novembre 2018. Par un jugement du 14 octobre 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de décharge de M. C.... Il relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Aux termes de l'article 1649 quater-0 B bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " 1. (...) / . Lorsqu'il résulte des constatations de fait opérées dans le cadre d'une des procédures prévues aux articles 53, 75 et 79 du code de procédure pénale et que l'administration fiscale est informée dans les conditions prévues aux articles L. 82 C, L. 101 ou L. 135 L du livre des procédures fiscales qu'une personne a eu la libre disposition d'une somme d'argent, produit direct d'une des infractions visées au 2, cette personne est présumée, sauf preuve contraire appréciée dans le cadre des procédures prévues aux articles L. 10 et L. 12 de ce même livre, avoir perçu un revenu imposable égal au montant de cette somme au titre de l'année au cours de laquelle cette disposition a été constatée. / La présomption peut être combattue par tout moyen et procéder notamment de l'absence de libre disposition des sommes mentionnées au quatrième alinéa, du caractère non imposable de ces sommes ou du fait qu'elles ont été imposées au titre d'une autre année. / Lorsque plusieurs personnes ont la libre disposition des biens ou de la somme mentionnés respectivement au premier et au quatrième alinéas, la base du revenu imposable est, sauf preuve contraire, répartie proportionnellement entre ces personnes. / 2. Le 1 s'applique aux infractions suivantes : / a. crimes et délits de trafic de stupéfiants prévus par les articles 222-34 à 222-39 du code pénal (...) ".

3. Le régime d'imposition prévu par les dispositions de l'article 1649 quater 0 B bis du code général des impôts ne vise pas à imposer les profits issus de la revente ou du transport de produits illicites, mais à taxer le revenu imposable qui, correspondant à la valeur vénale des biens visés par ces dispositions, est présumé avoir été perçu par les personnes qui les détiennent et sont coupables des infractions mentionnées par ces dispositions. Il appartient alors au contribuable de combattre cette présomption, en établissant par exemple qu'il n'a pas eu en réalité la disposition des biens ou des sommes d'argent en cause. Il résulte de ces dispositions éclairées par les travaux préparatoires, que lorsqu'une personne n'a eu que la garde temporaire d'une somme d'argent, produit direct d'une des infractions visées au 2 de cet article, elle doit être regardée comme n'en ayant pas eu la libre disposition au sens de ces dispositions.

4. En premier lieu, M. C... soutient comme il l'avait fait devant les premiers juges que le tribunal n'a pas tiré les conséquences de la décision du tribunal correctionnel de Dijon, qui l'a relaxé des poursuites concernant les faits de réalisation d'opérations financières entre la France et l'étranger sur des fonds provenant d'infractions à la législation sur les stupéfiants. Cependant, par un arrêt du 26 novembre 2015, la Cour d'appel de Dijon a confirmé le jugement du tribunal correctionnel de Dijon sur la déclaration de culpabilité de M. C... pour détention, usage, transport et acquisition de manière illicite de stupéfiants et a, de plus, retenu le délit de non-justification de ressources par une personne en relations habituelles avec l'auteur de l'infraction à la législation sur les stupéfiants et de concours à une opération de blanchiment de produits d'un délit de trafic de stupéfiants. Par un arrêt du 5 janvier 2017, la Cour de cassation a cassé les seules dispositions de cet arrêt sur la peine. L'intéressé s'est ainsi rendu coupable d'infractions relevant du a) du 2 de l'article 1649 quater-0 B bis du code général des impôts. Il résulte des motifs des décisions pénales que la culpabilité de M. C... a ainsi été reconnue à la suite de la découverte dans le véhicule qu'il conduisait d'une somme de

104 440 euros, de petites quantités de résine de cannabis et d'une valise vide que le chien spécialisé des douanes dans la recherche de stupéfiants a marqué de manière appuyée. Les explications du requérant sur l'origine de la valise ayant servi au transport de stupéfiants, retrouvée vide ont été confuses et contradictoires. De même, la perquisition menée à son domicile a permis de saisir les sommes de 2 800 euros et 2 500 euros. Les enquêteurs ont en outre constaté au domicile du requérant la présence d'équipements hifi/multimédia et plus généralement un train de vie que ses revenus constitués d'indemnités chômage ne lui permettaient pas de financer. Enfin, si le requérant fait valoir qu'il a agi sur ordre d'un commanditaire pour lequel son frère a fait des transports d'argent et persiste dans le cadre de la présente instance à soutenir que les fonds en litige ne sont pas imposables en son nom dès lors qu'il n'en a pas eu la disposition n'en ayant que la garde temporaire, il n'apporte toutefois aucun élément de nature à en établir la réalité. Par suite, M. C..., qui ne renverse pas la présomption instituée par le 1 de l'article 1649 quater-0 B bis du code général des impôts, n'est pas fondé à soutenir que l'administration ne pouvait imposer les sommes en litige sur le fondement des dispositions précitées.

5. En second lieu, le requérant soutient que le juge correctionnel l'a reconnu solidairement coupable de recel de bien venant de la cession non autorisée de stupéfiants à autrui commis du 1er février 2009 au 4 novembre 2009 avec M. E... A... B... et que par suite, l'administration ne pouvait l'imposer seul sur la totalité des fonds saisis. Cependant, dans son arrêt du 26 novembre 2015, la cour d'appel de Dijon a relaxé M. A... B... de complicité de recel de biens venant de la cession non autorisée de stupéfiants à autrui et de concours à une opération de blanchiment de produits d'un délit de trafic de stupéfiants en considérant qu'il n'était nullement démontré que M. A... B... était en relation habituelle avec l'auteur de l'infraction sur la législation sur les stupéfiants. Par suite, le requérant, qui n'apporte aucun élément pour établir que M. A... B... aurait eu également la libre disposition des sommes saisies, n'est pas fondé à contester les impositions mises à sa charge.

6. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Quillévéré, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- M. Viéville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 octobre 2023.

Le rapporteur

S. ViévilleLe président

G. Quillévéré

La greffière

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°22NT0382702


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03827
Date de la décision : 24/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. QUILLEVERE
Rapporteur ?: M. Sébastien VIEVILLE
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : LEFEUVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-10-24;22nt03827 ?
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