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24/10/2023 | FRANCE | N°21NT02190

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 24 octobre 2023, 21NT02190


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I..., M. H..., M. E... et M. A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2018 par lequel le maire de la commune de Guipavas (Finistère) ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. F... pour la division en deux lots à bâtir de la parcelle cadastrée section BB n° 477, située rue des Verdiers, ainsi que la décision du 26 septembre 2018 rejetant leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1805771 du 23 juin 2021, le tribunal administra

tif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I..., M. H..., M. E... et M. A... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2018 par lequel le maire de la commune de Guipavas (Finistère) ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. F... pour la division en deux lots à bâtir de la parcelle cadastrée section BB n° 477, située rue des Verdiers, ainsi que la décision du 26 septembre 2018 rejetant leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1805771 du 23 juin 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 1er août, 24 septembre et 29 octobre 2021 (ce dernier non communiqué), M. B... H..., M. D... I... et M. G... E..., représentés par Me Vallantin, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2018 du maire de Guipavas et la décision du 26 septembre 2018 rejetant leur recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Guipavas le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté contesté a été pris sans consultation du service gestionnaire de la voirie en violation de l'article R. 423-53 du code de l'urbanisme ;

- il ne respecte ni l'article UH 3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune Guipavas ni le règlement du lotissement " Les terrasses de Rody " ;

- il a été pris en méconnaissance de l'article 3 des dispositions communes du règlement du plan local d'urbanisme et de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- il ne respecte pas les articles L. 442-1 et L. 442-1-2 du code de l'urbanisme.

Par un courrier du 15 septembre 2021, M. I... a été désigné comme représentant unique des requérants par son mandataire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 août 2021, M. F..., représenté par Me Buors, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge des requérants la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté contesté ;

- aucun des moyens invoqués par les requérants n'est fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2021, la commune Guipavas, représentée par Me Bonnat, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge solidaire des requérants le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté contesté ;

- aucun des moyens invoqués par les requérants n'est fondé.

Par une ordonnance du 2 novembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 2 décembre 2021.

Un mémoire présenté par M. I... et autres a été enregistré le 18 juillet 2023 et n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Ody,

- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,

- les observations de Me Halna du Fretay substituant Me Vallantin, pour M. I... et autres, celles de Me Bonnat, pour la commune de Guipavas et celles de Me Buors, pour M. F....

Une note en délibéré, présentée pour M. B... H..., M. D... I... et M. G... E..., a été enregistrée le 10 octobre 2023.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 23 juin 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. I... et autres tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 juillet 2018 par lequel le maire de Guipavas ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée par M. F... pour la division en deux lots à bâtir de la parcelle cadastrée section BB n° 477, située rue des Verdiers, ainsi que la décision du 26 septembre 2018 rejetant leur recours gracieux. M. I... et autres relèvent appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :

2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis d'aménager de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

4. Il ressort des pièces du dossier, notamment des titres de propriété produits devant les premiers juges, que M. I..., M. E... et M. H... sont propriétaires respectivement des parcelles situées 35, 55 et 50 rue des Verdiers, à proximité immédiate de la parcelle d'assiette du projet de division contestée, sur lesquelles sont implantées leurs maisons d'habitation respectives. Les requérants font état, pour justifier de leur intérêt à demander l'annulation de l'arrêté de non-opposition à déclaration préalable contesté, des risques de nuisances sonores et de la gêne occasionnée par la création de deux nouveaux accès sur la rue des Verdiers, laquelle est une voie en impasse très étroite. La division en deux lots à bâtir est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation et d'utilisation par les requérants de leurs biens. Par suite, la fin de non-recevoir, tirée du défaut d'intérêt à agir de M. I... et autres, opposée par M. F... et par la commune de Guipavas à la demande de première instance doit être écartée.

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 24 juillet 2018 :

5. Aux termes de l'article 3 des dispositions communes du règlement du plan local d'urbanisme de Guipavas : " Les voies publiques ou privées doivent répondre à l'importance ou à la destination des constructions ou des aménagements envisagés, elles doivent permettre une circulation aisée, le passage des véhicules de secours et ne doivent pas présenter un risque pour la sécurité des usagers. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic ". Ces dispositions ont le même objet que celles, également invoquées par les requérants, de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et posent des exigences qui ne sont pas moindres. Dès lors, c'est par rapport aux dispositions du règlement du plan local d'urbanisme que doit être appréciée la légalité de la décision contestée.

6. Il ressort des pièces du dossier, notamment des plans et photographies produits, que le projet contesté est desservi par la rue des Verdiers, qui est une voie en impasse longée à son entrée, sur les deux côtés, par des murets en pierre bordant les propriétés riveraines, et dont la largeur, comprise entre 2,20 et 2,50 mètres, ne permet pas le croisement des véhicules. Il ressort également des pièces du dossier que les lots 1 et 2 à créer se situent respectivement entre 60 et 100 mètres et entre 100 et 130 mètres de l'entrée de la rue débouchant sur la rue de Rody, axe très emprunté reliant le centre bourg de Guipavas à la plage du Moulin Blanc et à la route départementale 165. En outre, la rue des Verdiers, qui dessert cinq autres habitations, présente une courbe qui ne permet pas une visibilité de l'ensemble de la rue avant de s'y engager. Dès lors, en cas de survenue de deux véhicules circulant en sens inverse, une manœuvre de marche arrière s'impose pour l'un des véhicules, soit dans la rue des Verdiers étroite, courbe et sans bas-côtés, soit vers la rue de Rody, où le véhicule aborde une intersection située dans un virage dans un site où débouchent également une sortie de propriété privée et la rue des Tourterelles, qui dessert une dizaine d'habitations. Dans ces conditions et quand bien même le nombre de véhicules empruntant la rue des Verdiers est restreint et la vitesse réduite, la circulation présente, pour la sécurité de tous les usagers de la voie publique, y compris des cyclistes et piétons, un risque qu'aucune prescription spéciale ne pourrait supprimer ou réduire suffisamment. Par suite, en décidant ne pas s'opposer à la déclaration préalable déposée par M. F..., le maire de Guipavas a fait une inexacte application des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme de la commune citées ci-dessus.

7. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen invoqué par les requérants n'est susceptible, en l'état du dossier, de fonder l'annulation de la décision contestée. Par ailleurs, et pour l'application des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du même code, le vice mentionné au point précédent, tiré de ce que l'arrêté de non-opposition à déclaration préalable ne respecte pas l'article 3 des dispositions communes du règlement du plan local d'urbanisme de Guipavas, n'est pas susceptible d'être régularisé.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. I... et autres sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. I... et autres, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à la commune de Guipavas et à M. F... des sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Guipavas le versement à M. I..., M. H... et M. E... d'une somme de 500 euros chacun au titre des mêmes frais.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 23 juin 2021, l'arrêté du 24 juillet 2018 du maire de la commune de Guipavas et la décision du 26 septembre 2018 rejetant le recours gracieux de M. I... et autres sont annulés.

Article 2 : La commune de Guipavas versera à M. I..., à M. H... et à M. E... une somme de 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Guipavas et par M. F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... I..., représentant unique des requérants, à la commune de Guipavas et à M. C... F....

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 octobre 2023.

La rapporteure,

C. ODY

Le président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au préfet du Finistère en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT02190


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT02190
Date de la décision : 24/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: Mme Cécile ODY
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : FRANCK BUORS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-10-24;21nt02190 ?
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