La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/09/2023 | FRANCE | N°23NT00265

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 26 septembre 2023, 23NT00265


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de l'arrêté du 10 mai 2022 par lequel le préfet de Maine-et-Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2208238 du 6 janvier 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du 10 mai 2022 et a rejeté le s

urplus des conclusions de M. A....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de l'arrêté du 10 mai 2022 par lequel le préfet de Maine-et-Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2208238 du 6 janvier 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du 10 mai 2022 et a rejeté le surplus des conclusions de M. A....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 1er février 2023 le préfet de Maine-et-Loire demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a annulé l'arrêté du 10 mai 2022 du préfet de Maine-et-Loire ;

2°) de rejeter dans cette mesure la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes ;

Il soutient que :

- c'est à tort que le magistrat désigné a annulé son arrêté du 10 mai 2022 au motif qu'il n'était pas établi que la décision de la Cour nationale du droit d'asile rejetant la demande d'asile de M. A... avait été notifiée à ce dernier avant l'édiction de la mesure d'éloignement en litige alors que la Cour nationale du droit d'asile a rejeté la demande d'asile de M. A... par une décision lue en audience publique le 4 mai 2022, et qu'en application des dispositions de l'article L. 542-1 du code de l'entrée et séjour des étrangers et droit d'asile, à la date de l'arrêté contesté, M. A... ne disposait donc plus du droit de se maintenir sur le territoire français ;

- s'agissant des autres motifs d'illégalité soulevés en première instance par M. A..., il s'en remet à l'ensemble des observations formulées dans son mémoire en défense en date du 7 novembre 2022 contestant le bien-fondé de la requête.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 juin 2023 M. B... A..., représenté par Me Peschanski, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour, le cas échéant, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, injonction assortie d'une astreinte de 50 euros par jour de retard, en application de l'article L 911-3 du code de justice administrative ;

3°) à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 1500 euros à verser à Me Peschanski en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de son renoncement à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Il soutient que :

- la décision est entachée d'une erreur de fait alors qu'il est entré sur le territoire au moyen d'un visa D ;

- la décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Viéville a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant tchadien, est entré régulièrement en France le 29 octobre 2019. Il a formé une demande d'asile qui a été rejetée par une décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 21 juillet 2021, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 4 mai 2022. Par un arrêté du 10 mai 2022, le préfet de Maine-et-Loire, en application du 1° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré. Par un jugement du 6 janvier 2023, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté et rejeté le surplus des conclusions de M. A.... Le préfet de Maine-et-Loire relève appel de ce jugement.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 541-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français. ". Et aux termes de l'article L. 542-1 du même code : " ...Lorsqu'un recours, contre la décision de rejet de l'office a été formé dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français prend fin à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ou, s'il est statué par ordonnance, à la date de la notification de celle-ci ". Enfin, l'article R. 532-54 du même code dispose que : " Le secrétaire général de la Cour nationale du droit d'asile notifie la décision de la cour au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et l'informe dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend du caractère positif ou négatif de la décision prise. Il la notifie également au directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ".

3. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile qui forme un recours devant la Cour nationale du droit d'asile contre la décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant sa demande a le droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la date de lecture en audience publique de la décision de la Cour ou, si celle-ci statue par ordonnance, jusqu'à ce qu'il ait reçu notification de celle-ci par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

4. Il ressort des mentions de la décision par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a rejeté le recours de M. A... à l'encontre de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 21 juillet 2021, produite en appel par le préfet de Maine-et-Loire, que cette décision, qui n'a pas été rendue par ordonnance, a été lue en audience publique le 4 mai 2022. Dans ces conditions, et dès lors que les mentions de la décision de la Cour nationale du droit d'asile font foi jusqu'à preuve contraire, le préfet pouvait légalement prononcer le 10 mai 2022 une mesure d'éloignement. Il suit de là que le préfet de Maine-et-Loire est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a considéré que l'arrêté du 10 mai 2022 méconnaissait les dispositions des articles L. 542-1 et R. 532-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'a annulé pour ce motif.

5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes et devant la cour.

Sur les autres moyens soulevés par M. A... :

En ce qui concerne le moyen commun aux décisions contestées :

6. L'arrêté contesté du 10 mai 2022 a été signé par Mme Magali Daverton secrétaire générale de la préfecture de Maine-et-Loire, qui disposait, en application d'un arrêté de délégation de signature du 15 novembre 2019 régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture de Maine-et-Loire du 18 novembre 2019 d'une délégation pour signer " tout arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département de Maine-et-Loire ", à l'exception de certains actes limitativement énumérés, au nombre desquels ne figurent pas les décisions de refus de titre de séjour, d'obligation de quitter le territoire français ou de fixation du pays de destination. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de cette signataire manque en fait et doit être écarté.

En ce qui concerne les moyens articulés contre l'obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, il ressort des motifs de la décision contestée que le préfet de Maine-et-Loire a rappelé les conditions d'entrée et de séjour en France de M. A..., le rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile de sa demande d'asile avant de conclure qu'il ne disposait plus du droit de séjourner en France en application des articles L 542-1 et L. 542-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet a également relevé que M. A... est célibataire sans enfant, qu'il ne dispose pas en France de liens personnels et familiaux anciens, intenses et stables et que la décision ne porte pas une atteinte disproportionnée à sa situation personnelle et à sa vie familiale et au droit protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Enfin, l'arrêté précise que M. A... n'établit pas être exposé à des peines ou à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine et les raisons pour lesquelles l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ont rejeté sa demande de reconnaissance du statut de réfugié. Ce faisant et alors même que la décision contestée ne mentionne pas les études engagées par M. A... et son recours en rectification d'erreur matérielle de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, elle doit être regardée comme étant régulièrement motivée.

8. En deuxième lieu, il ressort de la motivation de sa décision que l'autorité préfectorale a procédé à un examen circonstancié de la situation personnelle de M. A... et a exercé son pouvoir d'appréciation sans s'estimer liée par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile rejetant la demande d'asile de l'intéressé.

9. En troisième lieu, quand bien même la secrétaire générale de la préfecture de Maine-et-Loire n'aurait pas fait état des études engagées par M. A..., ce dernier n'apporte aucun élément suffisamment circonstancié qui permettrait de faire regarder la décision en litige comme entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable à la date de la décision attaquée et reprenant les dispositions de l'ancien article L. 311-6, applicable à la date du dépôt de la demande de titre de séjour : " Lorsqu'un étranger a présenté une demande d'asile qui relève de la compétence de la France, l'autorité administrative, après l'avoir informé des motifs pour lesquels une autorisation de séjour peut être délivrée et des conséquences de l'absence de demande sur d'autres fondements à ce stade, l'invite à indiquer s'il estime pouvoir prétendre à une admission au séjour à un autre titre et, dans l'affirmative, à déposer sa demande dans un délai fixé par décret. Il est informé que, sous réserve de circonstances nouvelles, notamment pour des raisons de santé, et sans préjudice de l'article L. 611-3, il ne pourra, à l'expiration de ce délai, solliciter son admission au séjour. / Les conditions d'application du présent article sont précisées par décret en Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article D. 431-7 du même code, reprenant les dispositions de l'ancien article D. 311-3-2 : " Pour l'application de l'article L. 431-2, les demandes de titres de séjour sont déposées par le demandeur d'asile dans un délai de deux mois. Toutefois, lorsqu'est sollicitée la délivrance du titre de séjour mentionné à l'article L. 425-9, ce délai est porté à trois mois ".

11. En l'espèce, et contrairement à ce qui est soutenu, M. A... a été effectivement informé de la possibilité de demander un titre de séjour pour un autre motif que l'asile lors de l'enregistrement de sa demande d'asile le 23 décembre 2019 en application des anciennes dispositions de l'article L. 311-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 311-38 du même code. Il lui appartenait alors de déposer une demande de titre de séjour en qualité d'étudiant dans un délai de deux mois à compter de la remise de la notice d'information qu'il a lui-même signée, ce qu'il n'a pas fait. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions rappelées au point 10 ne peut donc qu'être écarté.

12. En cinquième lieu, aux termes de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union. / Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne s'adresse uniquement aux institutions et organes de l'Union. Il suit de là que le moyen tiré de sa violation par une autorité d'un Etat membre est inopérant. Toutefois, il résulte également de cette jurisprudence que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter son point de vue de manière utile et effective. En particulier, il n'implique pas l'obligation, pour le préfet, d'entendre l'étranger spécifiquement au sujet de l'obligation de quitter le territoire français qu'il envisage de prendre après avoir statué sur le droit au séjour à l'issue d'une procédure ayant respecté son droit d'être entendu.

13. En l'espèce, s'il est constant que M. A... n'a pas été invité par l'administration à présenter, préalablement à l'édiction des décisions contestées, ses observations écrites ou orales sur la perspective d'une mesure d'éloignement, il ne pouvait cependant ignorer, depuis le rejet de sa demande d'asile, qu'il était susceptible de faire l'objet d'une telle mesure et n'établit, ni même n'allègue, avoir sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux ou avoir été empêché de s'exprimer avant que ne soit prise l'obligation de quitter le territoire français contestée. Il ne ne fait pas état, dans le cadre de la présente instance, d'éléments qui, s'ils avaient été connus de l'autorité préfectorale, auraient pu la conduire à prendre une décision différente. Par suite le moyen tiré de la violation du droit d'être entendu doit être écarté.

14. En sixième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 611-1-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I.- L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 4° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ". Eu égard ce qui a été rappelé au point 4, la demande de reconnaissance de la qualité de réfugié de M. A... étant définitivement rejetée à la date de l'arrêté litigieux, l'autorité préfectorale a pu légalement, en application des dispositions précitées, l'obliger à quitter le territoire français.

15. En septième lieu, si le requérant soutient que le préfet a commis une erreur de fait, il ne ressort pas des termes de la décision contestée que ce dernier aurait retenu dans l'arrêté contesté que M. A... serait entré irrégulièrement sur le territoire français. Si le préfet a pu mentionner dans ses écritures en défense l'irrégularité de l'entrée du requérant sur le territoire, cette circonstance est sans influence sur la régularité de la décision contestée dès lors que le requérant ne justifie pas avoir déposé de demande de titre de séjour en qualité d'étudiant, notamment après la remise du document d'information mentionné au point 11.

16. En huitième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...). ". Aux termes de l'article L. 424-3 du même code : " La carte de résident prévue à l'article L. 424-1, délivrée à l'étranger reconnu réfugié, est également délivrée à : / (...) 4° Ses parents si l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection est un mineur non marié, sans que la condition de régularité du séjour ne soit exigée ". Enfin, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...). ".

17. M. A... soutient que l'obligation de quitter le territoire français porte une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, méconnait les dispositions précitées des articles L. 423-23 et L. 424-3 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Toutefois, l'intéressé est entré en France en octobre 2019 à l'âge de 20 ans, est célibataire et sans enfant. Il n'apporte aucun élément sur la réalité de ses attaches privées et familiales ou sa particulière intégration et sur l'ancienneté de son séjour en France, alors qu'il n'établit pas être dénué d'attaches personnelles et familiales au Tchad, pays où il a ses attaches culturelles et linguistiques et dont il possède la nationalité et où il a vécu l'essentiel de son existence. Les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des articles L. 423-3 et L. 424-3 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent par suite être écartés.

18. En neuvième lieu, si le requérant fait valoir qu'il est scolarisé et a vocation à être admis en qualité d'étudiant sur le territoire français, il ne justifie pas avoir déposé de demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si l'appelant justifie être entré en France au moyen d'un visa de long séjour exigé par l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, être inscrit à l'université d'Angers pour l'année universitaire 2021-2022 en DU d'études françaises et DU Passerelles pour étudiants en exil et s'il justifie avoir été admis pour ce dernier DU avec 12.852 de moyenne, ce diplôme universitaire ne s'adresse qu'aux étudiants en exil non-francophones, titulaires d'au moins un diplôme de fin d'études secondaires et souhaitant commencer ou poursuivre des études supérieures dans le système universitaire français. Par ailleurs, M. A... ne justifie pas des résultats obtenus dans le DU d'études françaises. Dans ces conditions, le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

En ce qui concerne les moyens dirigés contre la décision fixant le pays de renvoi :

19. En premier lieu, il ressort de la motivation de la décision que la secrétaire générale de la préfecture a procédé à un examen circonstancié de la situation de M. A... avant de fixer le pays de renvoi.

20. En deuxième lieu, les motifs de la décision révèlent que la secrétaire générale de la préfecture ne s'est pas abstenue d'exercer son pouvoir d'appréciation avant de fixer le pays de renvoi.

21. En troisième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur version applicable au litige : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Aux termes de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". M. A... fait valoir qu'un retour dans son pays d'origine l'exposerait à des peines ou à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne produit cependant aucun élément en ce sens alors au demeurant que sa demande d'asile a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que la Cour nationale du droit d'asile. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

22. Il résulte de tout ce qui précède, que le préfet de Maine-et-Loire est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 10 mai 2022. Ce jugement doit, dès lors, être annulé et la demande de première instance présentée par M. A... doit être rejetée de même, par voie de conséquence, que les conclusions présentées par M. A... à fin d'injonction sous astreinte et au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°2208238 du 6 janvier 2023 du magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes ainsi que les conclusions présentées par celui-ci devant la cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera transmise au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 8 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente,

- M. Geffray président-assesseur,

- M. Viéville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 septembre 2023.

Le rapporteur

S. ViévilleLe président

I. Perrot

La greffière

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

N°23NT00265 2

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00265
Date de la décision : 26/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Sébastien VIEVILLE
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : PESCHANSKI

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-09-26;23nt00265 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award