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26/09/2023 | FRANCE | N°23NT00187

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 26 septembre 2023, 23NT00187


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 8 avril 2021 par lequel le préfet de la Mayenne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2108643 du 29 novembre 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

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Par une requête et un mémoire enregistrés les 20 janvier et 4 mai 2023 M. C..., représenté ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 8 avril 2021 par lequel le préfet de la Mayenne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2108643 du 29 novembre 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 20 janvier et 4 mai 2023 M. C..., représenté par Me Néraudau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 avril 2021 du préfet de la Mayenne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Mayenne de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et dans l'attente de le munir d'un récépissé ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges ont omis de se prononcer sur le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision fixant le pays de destination ;

- la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour est insuffisamment motivée, est entachée d'une erreur d'appréciation relative à son état-civil et à son identité, méconnaît les dispositions des articles L. 313-14 et L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, a été prise sans un examen particulier de sa situation personnelle notamment au regard de ces deux articles et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée et méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 avril 2023 le préfet de la Mayenne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 décembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Geffray,

- et les observations de Me Néraudau, représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant malien, déclarant être né le 25 octobre 2000 et entré irrégulièrement en France le 4 juin 2017 selon ses déclarations, a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance du département de la Mayenne à compter du 1er août 2017 jusqu'à sa majorité. Le 27 août 2019, il a sollicité du préfet de ce département son admission exceptionnelle au séjour et la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " travailleur temporaire " sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 8 avril 2022, le préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a obligé l'intéressé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque le délai sera expiré. Par un jugement du 29 novembre 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. M. A... relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Contrairement à ce que soutient M. C..., les premiers juges ont répondu, au point 3 du jugement attaqué, au moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision fixant le pays de destination. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement pour ce motif doit donc être écarté.

Sur la légalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :

3. M. C... reprend en appel sans apporter des éléments nouveaux en fait et en droit son moyen invoqué en première instance et tiré de l'insuffisante motivation de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif, d'écarter ce moyen.

4. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Mayenne n'a pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. C..., notamment en matière d'état-civil. Par ailleurs, cette autorité n'était pas tenue d'examiner la demande de délivrance d'un titre de séjour au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que la demande n'a pas été présentée sur ce fondement.

5. Aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande : 1° les documents justifiant de son état civil ; 2° les documents justifiant de sa nationalité ; (...) ". L'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit, en son premier alinéa, que la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. L'article 47 du code civil dispose quant à lui que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".

6. Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Par ailleurs, lorsqu'elles sont amenées à vérifier si l'étranger justifie de son état-civil et de sa nationalité conformément aux prescriptions de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, les autorités administratives françaises ne peuvent mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère que dans le cas où le jugement produit a un caractère frauduleux.

7. Pour justifier le refus de délivrer un titre de séjour, le préfet de la Mayenne a estimé que l'extrait d'acte de naissance du 12 août 2012 et le jugement supplétif du 10 novembre 2001, qui ont été présentés en août 2019 par M. C... à l'appui de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, étaient contrefaits. En effet, le service de la police des frontières a constaté le 22 janvier 2020 que, d'une part, sur le fondement des informations données par le consulat général de France à Bamako, le jugement supplétif, dont l'en-tête est anachronique par rapport à sa date d'émission, comporte un timbre humide qui ne correspond pas au tribunal qui a rendu le jugement et, d'autre part, l'extrait d'acte de naissance, dont les mentions pré-imprimées ont été faites selon un procédé non sécurisé, a été présenté sans la production de l'acte de naissance initial. Dès lors, le préfet, en se fondant sur l'analyse faite par ce service et en estimant que l'authenticité des actes d'état-civil du requérant n'était pas établie et que le jugement supplétif était entaché de fraude et en refusant pour ces motifs de délivrer un titre de séjour à l'intéressé, n'a pas commis d'erreur d'appréciation quant à l'application des dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Compte tenu de ce qui a été au point 7, il n'y a pas lieu d'examiner le bien-fondé du moyen invoqué par M. C... et tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-15, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. Comme il a été dit au point 4, M. C... n'a présenté aucune demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de la Mayenne n'a pas spontanément examiné le droit au séjour du requérant sur ce fondement. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions est inopérant.

10. M. C..., dont la durée du séjour en France est seulement de cinq ans à la date de l'arrêté contesté, et qui est célibataire et sans charge de famille en France, ne conteste pas avoir déclaré au préfet de la Mayenne que ses parents, son frère et sa sœur vivent au Mali et qu'il a régulièrement des contacts téléphoniques avec eux. Dans ces conditions d'entrée et de séjour, la décision contestée n'a pas porté au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

11. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Mayenne a entaché sa décision refusant la délivrance d'un titre de séjour d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de M. C....

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

12. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 10, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

13. La décision refusant la délivrance d'un titre de séjour n'étant pas annulée, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

14. La décision fixant le pays de destination précise la nationalité de M. C..., vise l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et mentionne que l'intéressé n'établit pas être exposé à une menace personnelle en cas de retour dans son pays d'origine. Dès lors, elle est suffisamment motivée.

15. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 10, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

16. M. C... n'apporte aucun élément permettant d'établir qu'il encourrait, en cas de retour dans son pays d'origine, des risques pour sa vie ou sa liberté ou qu'il y serait exposé à des traitements inhumains ou dégradants au sens des dispositions de l'article L. 513-2, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

17. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera adressée au préfet de la Mayenne.

Délibéré après l'audience du 8 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- M. Viéville, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 septembre 2023.

Le rapporteur

J.E. GeffrayLa présidente

I. Perrot

La greffière

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT00187


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00187
Date de la décision : 26/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : NERAUDAU

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-09-26;23nt00187 ?
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