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26/09/2023 | FRANCE | N°22NT01404

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 26 septembre 2023, 22NT01404


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... et Mme D... A... épouse B... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 3 mars 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé contre la décision du 17 décembre 2020 de l'autorité consulaire française à Oran (Algérie) refusant de délivrer à M. B... un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française.

Par un jugement n° 2105184 du 8 novembre 2021

, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... et Mme D... A... épouse B... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 3 mars 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé contre la décision du 17 décembre 2020 de l'autorité consulaire française à Oran (Algérie) refusant de délivrer à M. B... un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française.

Par un jugement n° 2105184 du 8 novembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 mai et 1er juillet 2022, M. C... B... et Mme D... A... épouse B..., représentés par Me Guilbaud, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision du 3 mars 2021 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer le visa demandé ou de réexaminer la demande, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Guilbaud, leur avocate, de la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France contestée a été prise en violation des dispositions de l'article L. 211-2-1, repris par L. 312-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de leur vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juin 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par les requérants n'est fondé.

Mme A... épouse B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à hauteur de 25 % par une décision du 8 mars 2022 du bureau d'aide juridictionnelle (section administrative) du tribunal judiciaire de Nantes.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Ody,

- et les observations de Me Guilbaud, pour M. et Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 8 novembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. et Mme B... tendant à l'annulation de la décision 3 mars 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a refusé de délivrer à M. B... un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française. M. et Mme B... relèvent appel de ce jugement.

2. La décision contestée est fondée sur l'existence d'un faisceau suffisamment précis et concordant attestant du caractère complaisant du mariage, contracté le 29 février 2020 à des fins étrangères à l'institution matrimoniale, dans le seul but de faciliter l'établissement en France du demandeur.

3. Aux termes de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " (...) / Tout étranger souhaitant entrer en France en vue d'y séjourner pour une durée supérieure à trois mois doit solliciter auprès des autorités diplomatiques et consulaires françaises un visa de long séjour. La durée de validité de ce visa ne peut être supérieure à un an. / (...) / Le visa de long séjour ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. Le visa de long séjour est délivré de plein droit au conjoint de Français qui remplit les conditions prévues au présent article (...) ".

4. Il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté par l'autorité judiciaire le visa nécessaire pour que les époux puissent mener une vie familiale normale. Pour y faire obstacle, il appartient à l'administration, si elle allègue une fraude, de l'établir, la seule circonstance que l'intention matrimoniale d'un seul des deux époux ne soit pas contestée n'y faisant pas obstacle.

5. M. B..., ressortissant algérien né le 15 mars 1989, est entré en France le 24 mai 2019 sous couvert d'un visa de court séjour Schengen délivré par les autorités consulaires espagnoles et après avoir présenté sans succès auprès de l'autorité consulaire française deux demandes de visas de court séjour touristiques en 2017 et 2018. L'intéressé expose avoir rencontré Mme A..., ressortissante française née le 24 février 1968, quelques jours plus tard et s'être installé chez elle dès juin 2019. M. B... et Mme A... ont fixé la date de leur mariage au 16 décembre 2019. Il ressort des pièces du dossier que par un courrier du 4 décembre 2019, le procureur de la République près le tribunal judiciaire d'Orléans a informé les intéressés de sa décision de surseoir à la célébration de leur mariage afin de vérifier leur intention matrimoniale. Par un arrêté du 19 décembre 2019, le préfet du Loiret prononce à l'encontre de M. B... une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Par une décision du 29 janvier 2020, le procureur de la République a autorisé le mariage des époux, lequel a été célébré le 29 février 2020. M. B... est retourné en Algérie le 10 mars 2020 et a demandé le 26 juillet 2020 un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française. Il ressort également des pièces du dossier que M. B... est arrivé en France avec un certificat d'aptitude professionnelle en électricité automobile délivré le 22 avril 2019 et a déclaré, lors de son audition devant le service de la police aux frontières, avoir pris attache avec la préfecture du Loiret pour obtenir l'autorisation de travailler dans un garage. Si les époux B... justifient, depuis leur mariage, communiquer par voie électronique, les documents produits ne permettent pas davantage d'identifier de manière précise un projet de vie commune du couple et il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... participerait aux charges du mariage, alors même que Mme B... est reconnue travailleuse handicapée et perçoit l'allocation de sécurisation professionnelle de Pôle Emploi depuis juillet 2019. Enfin la circonstance que le procureur ne s'est finalement pas opposé au mariage des époux n'est pas à elle seule de nature à attester de la réalité de l'intention matrimoniale. Par suite, et alors même qu'aucun élément ne permettrait de remettre en cause la sincérité de l'intention matrimoniale de Mme A... épouse B..., qui s'est rendue en Algérie du 15 septembre au 6 octobre 2022, l'administration doit être regardée comme établissant l'existence d'une fraude de nature à justifier légalement, conformément aux dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le refus de visa sollicité.

6. En second lieu et compte tenu de ce qui précède, la décision contestée ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par les requérants ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... et Mme A... épouse B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à Mme D... A... épouse B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 7 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 septembre 2023.

La rapporteure,

C. ODY

Le président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT01404


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT01404
Date de la décision : 26/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: Mme Cécile ODY
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : GUILBAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-09-26;22nt01404 ?
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