Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 13 février 2023 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités espagnoles.
Par un jugement n° 2302670 du 21 mars 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de Maine-et-Loire de procéder au réexamen de la situation de Mme D....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 avril 2023, le préfet de Maine-et-Loire demande à la cour d'annuler le jugement du 21 mars 2023.
Il soutient que l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 n'implique pas la remise du Guide du demandeur d'asile et s'en remet à ses écritures de première instance pour le surplus.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mai 2023, Mme D..., représentée par Me Philippon, conclut au rejet de la requête du préfet de Maine-et-Loire et à l'annulation du jugement du 21 mars 2023 en tant qu'il est fondé sur un moyen de légalité externe et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la compétence du signataire de la requête du préfet de Maine-et-Loire n'est pas établie ;
- l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 exige la remise du Guide du demandeur d'asile ;
- le préfet de Maine-et-Loire n'a pas procédé à l'examen sérieux de sa situation personnelle ;
- la décision contestée, qui ne prend pas en compte sa vulnérabilité est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et de sa situation personnelle ;
- elle réitère ses moyens développés en première instance.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 février 2023, maintenue le 11 mai 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Derlange, président assesseur,
- et les conclusions de M. Pons, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante ivoirienne, née le 7 mai 1986, est entrée irrégulièrement en France le 26 novembre 2022 et y a sollicité l'asile, le 10 janvier 2023. Par un arrêté du 13 février 2023, le préfet de Maine-et-Loire a décidé de transférer Mme D... aux autorités espagnoles. Le préfet de Maine-et-Loire relève appel du jugement du 21 mars 2023 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté et lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation de Mme D....
Sur la recevabilité de la requête :
2. Aux termes de l'article R. 431-12 du code de justice administrative, relatif à la représentation des parties devant la cour administrative d'appel : " (...) Les recours, les mémoires en défense et les mémoires en intervention présentés au nom de l'Etat sont signés par le ministre intéressé ". Aux termes de l'article R. 811-10 du même code : " (...) Sauf dispositions contraires, les ministres intéressés présentent devant la cour administrative d'appel les mémoires et observations produits au nom de l'Etat (...) ". L'article R. 811-10-1 du même code dispose que : " Par dérogation aux dispositions de l'article R. 811-10, le préfet présente devant la cour administrative d'appel les mémoires et observations produits au nom de l'Etat lorsque le litige est né de l'activité des services de la préfecture dans les matières suivantes : / 1° Entrée et séjour des étrangers en France (...) ".
3. Par un arrêté du 7 septembre 2021, régulièrement publié le 9 septembre suivant au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture, le préfet de Maine-et-Loire a accordé à Mme Magali Daverton, secrétaire générale de la préfecture de Maine-et-Loire, signataire de la requête, une délégation à l'effet de signer, notamment, tout document relevant des attributions de l'Etat dans ce département, à certaines exceptions limitativement énumérées au rang desquelles ne figurent pas les requêtes d'appel. La fin de non-recevoir tirée de l'incompétence du signataire de la requête doit donc être écartée.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. Aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; /e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits (...) /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. (...) /3. La Commission rédige, au moyen d'actes d'exécution, une brochure commune ainsi qu'une brochure spécifique pour les mineurs non accompagnés, contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) no 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les États membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux États membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement. ". Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre l'ensemble des éléments d'information prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. La remise de ces éléments doit intervenir en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations, c'est-à-dire au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, entretien qui doit notamment permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations. Cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature desdites informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie.
5. Il est constant que Mme D... s'est vue remettre, d'une part, la brochure A " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de ma demande d'asile ' " dans sa version actualisée du mois d'avril 2014 et, d'autre part, la brochure B " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' ". La requérante ne soutient pas sérieusement que ces documents ne comporteraient pas l'ensemble des informations nécessaires aux demandeurs d'une protection internationale en application de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013, dès lors que l'examen de leurs contenus respectifs établit qu'à elles seules ces deux brochures " A " et " B " permettent aux demandeurs d'asile de bénéficier d'une information complète sur l'application du règlement. Notamment, si Mme D... soutient que ces deux brochures ne contiendraient pas d'information sur le délai accordé pour contester une décision de transfert, une telle information figure en réalité page 12 du document B qu'elle a elle-même versé au dossier. La circonstance non contestée que le préfet de Maine-et-Loire ne lui ait pas communiqué le " guide du demandeur d'asile " est sans influence sur la régularité de la procédure suivie dès lors que le caractère suffisant des informations ainsi communiquées est établi. Par suite, le préfet de Maine-et-Loire est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté du 13 février 2023 portant transfert de Mme D... aux autorités espagnoles, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur ce motif tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 en raison de l'absence de communication à l'intéressée du " guide du demandeur d'asile ".
6. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme D... devant le tribunal administratif de Nantes et la cour.
7. En premier lieu, le préfet de Maine-et-Loire a, par un arrêté du 31 août 2022 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du même jour, donné délégation à M. B... C..., adjoint à la cheffe du pôle régional Dublin à la direction de l'immigration et des relations avec les usagers de la préfecture, signataire de la décision contestée, en cas d'absence ou d'empêchement de M. A..., directeur de l'immigration et des relations avec les usagers et de Mme F..., cheffe du pôle, dont il n'est pas établi qu'ils n'étaient pas absents ou empêchés, à l'effet de signer les décisions d'application du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 prises à l'égard des ressortissants étrangers, notamment les décisions de transfert. Ainsi, le moyen tiré de l'absence de délégation de signature régulière du signataire de l'arrêté contesté manque en fait et doit être écarté.
8. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Maine-et-Loire n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressée. Par suite, le moyen tiré de ce que la motivation de l'arrêté litigieux révèle un défaut d'examen particulier de la situation de Mme D... doit être écarté.
9. En troisième lieu, Mme D... soutient que les brochures mentionnées à l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ne lui ont été communiquées que le 10 janvier 2023, le jour de son entretien individuel au guichet unique de la préfecture, sans qu'il soit établi que cela ait été fait avant sa prise d'empreintes alors qu'elle s'était déjà présentée dans une structure de premier accueil des demandeurs d'asile le 4 janvier 2023. Toutefois, eu égard à ce qui a été dit au point 4, dès lors qu'il n'est pas contesté que les brochures A et B conformes aux modèles figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, qui contiennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ont été remises à Mme D... au plus tard lors de l'entretien du 10 janvier 2023, qui a permis de s'assurer qu'elle avait compris correctement ces informations et pu faire valoir ses observations en temps utile, l'irrégularité alléguée ne peut qu'être écartée. En effet, si Mme D... fait valoir qu'elle a des difficultés à lire des textes complexes en langue française, alors qu'elle a signé le résumé de son entretien du 10 janvier 2023, mené en langue française et dans lequel elle a notamment certifié sur l'honneur que les renseignements la concernant sont exacts, elle n'établit pas n'avoir pas été mise en mesure de prendre connaissance de ces informations. Dès lors, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 doit être écarté dans toutes ses branches.
10. En quatrième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'Etat membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. (...) ".
11. Il ressort des mentions figurant sur le résumé signé par Mme D... qu'elle a bénéficié le 10 janvier 2023, soit avant l'intervention de la décision contestée, de l'entretien individuel prévu par l'article 5 précité du règlement n° 604/2013. Aucun élément du dossier ne permet d'établir que cet entretien n'aurait pas été mené par une personne qualifiée en vertu du droit national, ni qu'il n'aurait pas été effectué dans des conditions assurant sa confidentialité. Dès lors, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 n'est pas fondé et doit être écarté.
12. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 141-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'un étranger fait l'objet d'une décision (...) de transfert vers l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et qu'il ne parle pas le français, il indique au début de la procédure une langue qu'il comprend. Il indique également s'il sait lire./ Ces informations sont mentionnées sur la décision (...) de transfert (...).". Et aux termes de l'article L. 141-3 du même code : " Lorsque les dispositions du présent code prévoient qu'une information ou qu'une décision doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits dans cette langue, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire. (...) ".
13. Mme D..., qui ne prétend pas ne pas parler français ne peut utilement se prévaloir des dispositions précitées de l'article L. 141-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, elle ne précise pas en quoi le préfet de Maine-et-Loire aurait méconnu l'article L. 141-3 du même code. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de ces dispositions doivent être écartés.
14. En sixième lieu, aux termes de l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. L'État membre auprès duquel une demande de protection internationale a été introduite et qui estime qu'un autre État membre est responsable de l'examen de cette demande peut, dans les plus brefs délais et, en tout état de cause, dans un délai de trois mois à compter de la date de l'introduction de la demande au sens de l'article 20, paragraphe 2, requérir cet autre État membre aux fins de prise en charge du demandeur. Nonobstant le premier alinéa, en cas de résultat positif ("hit") Eurodac avec des données enregistrées en vertu de l'article 14 du règlement (UE) n° 603/2013, la requête est envoyée dans un délai de deux mois à compter de la réception de ce résultat positif en vertu de l'article 15, paragraphe 2, dudit règlement. Si la requête aux fins de prise en charge d'un demandeur n'est pas formulée dans les délais fixés par le premier et le deuxième alinéas, la responsabilité de l'examen de la demande de protection internationale incombe à l'État membre auprès duquel la demande a été introduite (...) ".
15. Il est constant que Mme D... a sollicité l'asile en préfecture le 10 janvier 2023. A supposer même qu'elle se soit présentée à la structure de premier accueil le 4 janvier 2023, comme elle le soutient, il ressort des pièces du dossier que les autorités espagnoles ont été saisies dès le 19 janvier 2023, soit dans le délai de trois mois prescrit par les dispositions de l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Contrairement à ce qu'elle soutient, le préfet de Maine-et-Loire établit que les autorités espagnoles ont accepté de la prendre en charge, le 24 janvier 2023 et que la totalité de ses empreintes décadactylaires ont été relevées. Par suite, ses moyens sur ces points, tirés de l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et des dispositions combinées de l'annexe II du règlement (UE) n° 118/2014 du 30 janvier 2014 et de l'article 9 du règlement (UE) n° 603/2013 doivent, en tout état de cause, être écartés.
16. En septième et dernier lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ".
17. Mme D... fait état de l'existence de défaillances affectant les conditions d'accueil et de prise en charge des demandeurs d'asile faisant l'objet de mesures de transfert auprès des autorités espagnoles, mais les documents qu'elle a produit à l'appui de ces affirmations ne permettent pas de tenir pour établi qu'elle serait elle-même exposée à un risque sérieux de ne pas être traitée par ces autorités dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile, alors que l'Espagne est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Les autres éléments présentés ne permettent pas d'établir qu'elle se trouvait à la date de l'arrêté contesté dans une situation de vulnérabilité exceptionnelle imposant d'instruire sa demande d'asile en France, en particulier s'agissant de son état de santé, alors notamment qu'elle n'avait fait aucune déclaration à cet égard lors de son entretien. En tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ne pourrait pas être prise en charge médicalement en Espagne, en tant que de besoin. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision litigieuse serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ou des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle doivent être écartés.
18. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de Maine-et-Loire est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté contesté, lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation de Mme D... dans un délai d'un mois à compter de la notification de ce jugement et a mis à la charge de l'Etat la somme de 800 euros à verser à son conseil, en application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative. Dès lors, ce jugement doit être annulé et les conclusions de première instance de Mme D..., y compris celles à fin d'injonction et présentées au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
19. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de Mme D... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2302670 du 21 mars 2023 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Nantes est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié Mme E... D..., à Me Philippon et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Une copie en sera transmise, pour information, au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 29 août 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Derlange, président assesseur,
- Mme Picquet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 septembre 2023.
Le rapporteur,
S. DERLANGE
Le président,
L. LAINÉ
Le greffier,
C. WOLF
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23NT01133