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15/09/2023 | FRANCE | N°22NT03588

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 15 septembre 2023, 22NT03588


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 15 mars 2022 par lequel le préfet du Calvados lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.

Par un jugement n° 2201020 du 16 septembre 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistr

ée le 19 novembre 2022, M. A..., représenté par Me Tsaranazy, demande à la cour :

1°) d'annuler ce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 15 mars 2022 par lequel le préfet du Calvados lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.

Par un jugement n° 2201020 du 16 septembre 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 novembre 2022, M. A..., représenté par Me Tsaranazy, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 septembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Calvados du 15 mars 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour a été signée par une autorité incompétente ; elle méconnaît les articles L. 423-1 et L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été signée par une autorité incompétente ; elle est fondée sur une décision illégale de refus de titre de séjour ;

- la décision fixant le pays de renvoi a été signée par une autorité incompétente ; elle est fondée sur une décision illégale d'obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 décembre 2022, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 octobre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Chollet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant ivoirien né le 16 octobre 1976 à Abidjan (Côte d'Ivoire) est entré une première fois en France le 12 novembre 2014 sous couvert d'un visa de court séjour délivré par les autorités allemandes, valable du 10 novembre 2014 au 20 novembre 2014. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 30 novembre 2015 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile les 23 mai 2016 et 16 février 2017. Par un arrêté du 24 novembre 2017, dont la légalité a été confirmée par jugement du 18 janvier 2018 du tribunal administratif de Caen, le préfet du Calvados lui a alors refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français. Le requérant relève appel du jugement du 16 septembre 2022 du tribunal administratif de Caen rejetant sa demande tendant à l'annulation d'un arrêté du 15 mars 2022 par lequel le préfet du Calvados lui a de nouveau refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné.

2. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté, que le requérant reprend en appel sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau, doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 2 du jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger marié avec un ressortissant français, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an lorsque les conditions suivantes sont réunies : / 1° La communauté de vie n'a pas cessé depuis le mariage ; / 2° Le conjoint a conservé la nationalité française ; / 3° Lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, il a été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ". L'article L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " L'étranger, entré régulièrement et marié en France avec un ressortissant français avec lequel il justifie d'une vie commune et effective de six mois en France, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable ". L'article L. 412-1 de ce code prévoit que : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1 ". En outre, aux termes de l'article L. 312-3 du même code : " Le visa de long séjour est délivré de plein droit au conjoint de ressortissant français. Il ne peut être refusé qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public ".

4. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que la délivrance de la carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " au conjoint d'une ressortissante française est subordonnée à certaines conditions, parmi lesquelles celle d'être en possession d'un visa de long séjour qui ne peut être refusé que dans les cas prévus à l'article L. 312-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si les dispositions de cet article n'impliquent pas que ce visa de long séjour fasse l'objet d'une demande expresse distincte de celle du titre de séjour sollicité auprès de l'autorité préfectorale, compétente pour procéder à cette double instruction, il n'en demeure pas moins que l'autorité préfectorale n'est tenue d'accorder sur place le visa à un conjoint d'une ressortissante française, vivant en France avec cette dernière depuis plus de six mois, qu'à l'étranger entré régulièrement en France.

5. Il est constant que M. A... a bénéficié d'un visa de court séjour délivré par les autorités allemandes valable du 10 novembre 2014 au 20 novembre 2014. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il a déclaré lors d'une audition au commissariat de police de Deauville le 24 novembre 2017 être allé en train en Italie au printemps ou à l'été précédent où il a rencontré une femme titulaire d'un titre de séjour italien. Dès lors, M. A..., qui avait en outre fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français le 4 juillet 2016, et d'un courrier du 20 juin 2017 lui rappelant le caractère exécutoire de cette décision dont le pli a été présenté à son adresse le 23 juin 2017 mais n'a pas été réclamé, ne justifie pas d'une entrée régulière sur le territoire français. Par ailleurs, il est constant que le requérant ne justifie pas d'un visa de long séjour. Par conséquent, il ne remplit pas les conditions d'entrée régulière ou de détention d'un visa long séjour pour bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 423-1 et L. 423-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En troisième lieu, il est constant que M. A... s'est marié avec une ressortissante de nationalité française le 15 mai 2021. Toutefois, à la date de la décision contestée, la communauté de vie du couple était récente puisqu'elle n'est justifiée par les pièces produites qu'à compter de mai 2021, notamment des factures d'électricité et les relevés d'un compte bancaire commun. M. A... n'est en outre pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine dès lors qu'il a déclaré lors de sa demande d'asile, mais également lors de son audition le 24 novembre 2017, avoir son épouse et cinq enfants en Côte d'Ivoire. S'il soutient que ses propres allégations sont erronées, le certificat de célibat daté du 7 janvier 2021 qu'il produit est dépourvu d'authenticité et de valeur probante, ainsi que le fait valoir en défense le préfet, dès lors notamment qu'il vise la loi n° 64-374 du 7 octobre 1964 relative à l'état civil, modifiée par la loi n° 83-799 du 2 août 1983, qui a été abrogée par la loi n° 2018-862 du 19 novembre 2018 relative à l'état civil. Enfin, la circonstance que M. A... a travaillé irrégulièrement en France en contrat à durée déterminée durant la période de 2019 à 2021 ne suffit pas davantage à caractériser une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, eu égard aux buts en vue desquels la décision de refus de séjour a été prise. Dans ces conditions, la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette décision sur la situation personnelle et familiale de M. A....

7. En dernier lieu, la décision portant refus de titre de séjour n'étant pas annulée, M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation, par voie de conséquence, de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de celle fixant le pays de destination.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Tsaranazy et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera transmise pour information au préfet du Calvados.

Délibéré après l'audience du 29 août 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Derlange, président assesseur,

- Mme Chollet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 septembre 2023.

La rapporteure,

L. CHOLLET

Le président,

L. LAINÉ

Le greffier,

C. WOLF

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT03588


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03588
Date de la décision : 15/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Laure CHOLLET
Rapporteur public ?: M. PONS
Avocat(s) : TSARANAZY NOMENJANAHARY

Origine de la décision
Date de l'import : 24/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-09-15;22nt03588 ?
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