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15/09/2023 | FRANCE | N°22NT03137

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 15 septembre 2023, 22NT03137


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C..., épouse B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 7 avril 2022 par lequel le préfet du Calvados lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement nos 2201034, 2201035 du 20 juin 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cou

r :

Par une requête enregistrée le 28 septembre 2022, Mme C..., épouse B..., représenté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C..., épouse B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 7 avril 2022 par lequel le préfet du Calvados lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement nos 2201034, 2201035 du 20 juin 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 septembre 2022, Mme C..., épouse B..., représentée par Me Tsaranazy, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 20 juin 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 avril 2022 du préfet du Calvados lui faisant obligation de quitter le territoire français avec interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an ;

3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de lui délivrer un certificat de résidence " vie privée et familiale " ou de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le préfet du Calvados a méconnu le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de son arrêté sur sa situation personnelle ;

- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français n'est pas motivée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 novembre 2022, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.

Il s'en rapporte à ses écritures de première instance.

Mme C..., épouse B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 août 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Derlange, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., épouse B..., ressortissante algérienne, née le 29 décembre 1971, est entrée en France le 5 janvier 2019. Par décision du 3 août 2020, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile. Par un arrêté du 7 avril 2022, le préfet du Calvados l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination et lui a interdit le retour en France pendant une durée d'un an. Mme C..., épouse B... relève appel du jugement du 20 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, contrairement à ce que soutient Mme C..., épouse B..., la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire français comporte les éléments de droit et de fait qui la fondent. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".

4. Mme C..., épouse B... fait valoir qu'elle souffre d'une affection chronique à l'épaule pour laquelle elle a été opérée deux fois, sans résultats satisfaisants, et qui a été reconnue en tant que telle par la caisse primaire santé. Toutefois, ces circonstances ne permettent pas d'établir que son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, alors qu'elle n'établit pas que, comme elle le prétend, une interruption des soins de neurostimulation transcutanée qu'elle suit entrainerait un handicap irréversible. Dans ces conditions, le préfet du Calvados n'a pas méconnu les dispositions précitées du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en l'obligeant à quitter le territoire français.

5. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".

6. Mme C..., épouse B... fait valoir que toute sa famille réside désormais en France, à savoir son mari et ses quatre enfants, en situation régulière, sa sœur, sa belle-fille et son petit-fils, de nationalité française. Toutefois, elle n'établit pas que le dénommé Amine B... est son fils, comme elle le prétend et il ressort du livret de famille versé au dossier qu'elle a une fille, née en 1992, dont elle ne conteste pas qu'elle réside en Algérie. Il ressort des pièces du dossier que son époux est également sous le coup d'une mesure d'éloignement et que deux de leurs enfants résidant en France sont majeurs, mariés, avec des enfants et disposant de leur indépendance financière. Il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard en particulier au caractère récent de leur entrée en France, que Mme C..., épouse B... ne pourrait pas retourner en Algérie, avec son époux et leur unique enfant mineur. Dans ces conditions, le préfet du Calvados n'a pas, en l'obligeant à quitter le territoire français et en lui interdisant le retour en France pendant une durée d'un an, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a pris une telle mesure d'éloignement et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas fondée à soutenir, qu'en prenant l'arrêté contesté, le préfet du Calvados aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa vie personnelle.

7. Il ressort de tout ce qui précède que Mme C..., épouse B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 20 juin 2022, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt, qui rejette la requête de Mme C..., épouse B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de l'intéressée aux fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de Mme C..., épouse B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C..., épouse B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., épouse B..., à Me Tsaranazy et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera transmise, pour information, au préfet du Calvados.

Délibéré après l'audience du 29 août 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Derlange, président assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 septembre 2023.

Le rapporteur,

S. DERLANGE

Le président,

L. LAINÉ

Le greffier,

C. WOLF

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT03137


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03137
Date de la décision : 15/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Stéphane DERLANGE
Rapporteur public ?: M. PONS
Avocat(s) : TSARANAZY NOMENJANAHARY

Origine de la décision
Date de l'import : 24/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-09-15;22nt03137 ?
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