Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 5 mars 2019 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour ainsi que l'arrêté du 7 septembre 2020 par lequel la même autorité lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée.
Par un jugement nos 2006146, 2007891, 2009483 et 2102249 du 24 février 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 août 2022, Mme D..., représentée par Me Renard, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 24 février 2022 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Maine-et-Loire du 5 mars 2019 ;
3°) d'annuler l'arrêté du préfet de Maine-et-Loire du 7 septembre 2020 ;
4°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, de réexaminer sa situation administrative dans le même délai et sous la même astreinte ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté du 5 mars 2019 est insuffisamment motivé ; il est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ; il méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision du 7 septembre 2020 refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision du 7 septembre 2020 portant obligation de quitter le territoire français est fondée sur une décision illégale de refus de titre de séjour ; elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle et d'une erreur manifeste d'appréciation ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision du 7 septembre 2020 fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ; elle est fondée sur une décision illégale d'obligation de quitter le territoire français ; elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 octobre 2022, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 juillet 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Chollet a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante géorgienne née le 3 janvier 1988 à Tbilissi (Géorgie) est entrée en France selon ses déclarations le 1er décembre 2014. Après le rejet de sa demande d'asile par décision du 6 mai 2015 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée le 18 septembre 2015 par la Cour nationale du droit d'asile, elle a sollicité le 2 octobre 2018 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, le 24 février 2020, à nouveau un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du même code. Elle relève appel du jugement du 24 février 2022 du tribunal administratif de Nantes rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 mars 2019 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour et de l'arrêté du 7 septembre 2020 par lequel la même autorité lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Le jugement est suffisamment motivé s'agissant du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aux points 9 à 11 du jugement attaqué, et s'agissant de l'atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale par l'obligation de quitter le territoire français du 7 septembre 2020 comme de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle, au point 17 du jugement attaqué. Si la requérante soutient que les premiers juges n'ont pas pris en considération l'état de santé de son mari en examinant le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, cette critique, qui se rapporte au bien-fondé des motifs retenus par le juge, ne peut être utilement invoqué pour contester la régularité du jugement attaqué.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne l'arrêté du 5 mars 2019 :
3. En premier lieu, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté du 5 mars 2019, que la requérante reprend en appel sans apporter de nouveaux éléments, doit être écarté par adoption des motifs retenus au point 4 du jugement attaqué.
4. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient la requérante, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Maine-et-Loire n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle, familiale et médicale avant de décider de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 alors en vigueur du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". En outre, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Pour l'application de ces dispositions et stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
6. La requérante fait valoir son intégration en France par la scolarisation de ses deux enfants, par l'absence de condamnation pénale et par des actions de bénévolat au sein de l'association " Consommation Logement et Cadre de Vie " d'Angers pour l'action " aide à la mise en cartons ", de la " Résidence Arceau " pour la réhabilitation du site, par sa participation à des ateliers d'intégration et de lien social assurés par l'association pour la promotion et l'intégration dans la région angevine, ainsi que des actions de bénévolat de son époux auprès de l'association Saint-Vincent de Paul Doutre. Toutefois, Mme D... ne fait état d'aucun obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue dans son pays d'origine avec ses deux enfants mineurs, qui pourront y suivre une scolarité, et son époux, qui fait également l'objet d'un refus de titre de séjour et d'une mesure d'éloignement, confirmés par un arrêt du même jour de la cour. Elle ne fait valoir en outre aucune insertion professionnelle ou sociale significative en dépit d'une présence en France relativement longue acquise malgré une mesure d'éloignement du 30 novembre 2015. Par suite, et alors même qu'une des sœurs de son époux et des neveux résideraient régulièrement en France, la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour ne méconnaît pas le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-14, devenu l'article L. 435-1, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ".
8. Les éléments de la vie personnelle de la requérante, tels que décrits au point 6 du présent arrêt, ainsi que l'état de santé de son époux, ne caractérisent pas des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, la requérante ne justifie pas non plus de l'existence de motifs exceptionnels lui permettant de prétendre à la délivrance d'un titre de séjour " salarié " sur le fondement des dispositions de cet article. Par suite, le préfet n'a pas manifestement méconnu les dispositions de cet article.
9. En dernier lieu, le moyen tiré de la méconnaissance du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, que la requérante reprend en appel sans apporter de nouveaux éléments, doit être écarté par adoption des motifs retenus au point 8 du jugement attaqué.
En ce qui concerne l'arrêté du 7 septembre 2020 :
S'agissant de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :
10. En premier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6, la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour ne méconnaît pas le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la situation personnelle de l'intéressée.
11. En second lieu, le moyen tiré de la méconnaissance du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, que la requérante reprend en appel sans apporter de nouveaux éléments, doit être écarté par adoption des motifs retenus au point 15 du jugement attaqué.
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
12. En premier lieu, la décision portant refus de titre de séjour n'étant pas annulée, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence.
13. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas examiné la situation personnelle de la requérante avant de l'obliger à quitter le territoire français.
14. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle.
15. En dernier lieu, les enfants mineurs de la requérante ont vocation à l'accompagner en cas de retour en Géorgie, avec son époux. En outre, leur scolarisation est récente et la requérante ne fait état d'aucun obstacle à ce que leur scolarité se poursuive en Géorgie. Dans ces conditions, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
16. La décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant fixation du pays de destination doit être annulée par voie de conséquence.
17. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... alias B... C..., à Me Renard et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 29 août 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Derlange, président assesseur,
- Mme Chollet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 septembre 2023.
La rapporteure,
L. CHOLLET
Le président,
L. LAINÉ
Le greffier,
C. WOLF
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22NT02626