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21/07/2023 | FRANCE | N°22NT02233

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 21 juillet 2023, 22NT02233


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2021 du préfet de la Loire-Atlantique portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois ainsi que l'arrêté du même jour portant assignation à résidence pour une durée de six mois.

Par un jugement n° 2112173 du 7 juin 2022 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demand

e.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 13 jui...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2021 du préfet de la Loire-Atlantique portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois ainsi que l'arrêté du même jour portant assignation à résidence pour une durée de six mois.

Par un jugement n° 2112173 du 7 juin 2022 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 13 juillet 2022 et 7 mars 2023 M. A... B..., représenté par Me Guérin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ces arrêtés ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce que si le tribunal a communiqué un dernier mémoire en défense du préfet le matin de l'audience, les premiers juges ont omis de viser et statuer sur le moyen soulevé à l'audience tiré des particularités du régime de garde à vue ;

- le jugement est entaché d'erreurs de droit, de fait et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que la requête était tardive ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision est entachée d'incompétence ;

- elle est entachée d'incompétence négative, le préfet a agi en situation de compétence liée ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de droit et de fait en ce qu'elle est fondée sur les dispositions de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que sa situation est exclusivement régie par les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- elle été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu en application des stipulations de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle n'a pas été précédée de l'examen de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'erreur de fait en ce qu'elle indique qu'il est sans ressources légales alors qu'il dispose d'une promesse d'embauche lui permettant de régulariser sa situation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la décision refusant un délai de départ volontaire :

- la décision est entachée d'incompétence ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il justifie de garanties de représentation suffisantes ;

S'agissant de la décision portant interdiction de retour :

- la décision est entachée d'incompétence ;

- elle est insuffisamment motivée, notamment au regard des considérations humanitaires ;

- elle est entachée d'erreur de droit en ce que le préfet n'établit pas qu'il constituerait une menace pour l'ordre public ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle n'a pas été précédée de l'examen de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de la décision portant assignation à résidence :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreurs de droit ;

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 6 mars 2023 le préfet de la

Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du

18 juillet 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Penhoat ;

- et les observations de Me Guérin, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant algérien né le 7 décembre 1976, a été interpellé et placé en garde à vue, le 24 octobre 2021, pour des faits de violences volontaires avec arme. Le préfet de la Loire-Atlantique a pris à son encontre le 24 octobre 2021 un arrêté portant obligation de quitter sans délai le territoire français, fixation du pays de renvoi en cas de reconduite d'office et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Par un second arrêté du 24 octobre 2021, le préfet de la Loire-Atlantique a également assigné le requérant à résidence pour une durée de six mois. M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler ces deux arrêtés. Par un jugement du 7 juin 2022 ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le moyen ou la branche de moyen relative aux particularités du régime de garde à vue aurait effectivement été soulevés dans la procédure écrite en première instance. Par suite, le jugement attaqué n'est pas entaché d'omission de réponse à un moyen invoqué.

3. En deuxième lieu, aux termes du II de l'article L. 614-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas assortie d'un délai de départ volontaire, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quarante-huit heures suivant la notification de la mesure. Il est statué sur ce recours selon la procédure et dans les délais prévus, selon le fondement de la décision portant obligation de quitter le territoire français, aux articles L. 614-4 ou L. 614-5.". Aux termes de l'article R. 776-2 du code de justice administrative : " II. - Conformément aux dispositions de l'article L. 614-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification par voie administrative d'une obligation de quitter sans délai le territoire français fait courir un délai de quarante-huit heures pour contester cette obligation et les décisions relatives au séjour, à la suppression du délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour ou à l'interdiction de circulation notifiées simultanément. Cette notification fait courir ce même délai pour demander la suspension de l'exécution de la décision d'éloignement dans les conditions prévues à l'article L. 752-5 du même code.". Aux termes de l'article R. 776-5 du même code : " (...) II. - Les délais de quarante-huit heures mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-4 et les délais de quinze jours mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-3 ne sont susceptibles d'aucune prorogation.". L'article R.776-19 de ce code précise : " Si, au moment de la notification d'une décision mentionnée à l'article R. 776-1, l'étranger est retenu par l'autorité administrative, sa requête peut valablement être déposée, dans le délai de recours contentieux, auprès de ladite autorité administrative ". Et l'article R. 421-5 du même code énonce que " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".

4. Il résulte de ces dispositions que l'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter sans délai le territoire français accompagnée d'une décision d'assignation à résidence peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de ces décisions. En fixant à quarante-huit heures le délai dans lequel un recours peut être introduit, le législateur a entendu que ce délai soit décompté d'heure à heure, et ne puisse être prorogé.

5. Il est constant que l'arrêté du 24 octobre 2021 contesté a été notifié à M. B..., qui était alors en garde à vue, le 24 octobre 2021 à 15h40, et que cette notification mentionnait les voies et délais de recours ainsi que la possibilité d'avoir recours à un avocat. Si M. B... fait valoir qu'il n'a pas été mis en mesure, aux date et heure où l'arrêté contesté lui a été notifié, d'avertir dans les meilleurs délais un avocat dès lors qu'il ne sait pas bien lire le français, il ressort des mentions portées sur le document valant notification de la décision portant obligation de quitter le territoire français que le requérant, qui a indiqué qu'il comprenait le français, a été informé oralement de son droit à bénéficier de l'assistance d'un avocat pour contester l'arrêté contesté ainsi que des voies et délais de recours. Dans ces conditions, et alors qu'il est constant que l'intéressé est sorti de garde à vue avant l'expiration du délai de recours, la notification de l'arrêté contesté doit être regardée comme ayant été effectuée régulièrement et a eu pour effet de faire courir le délai de quarante-huit heures mentionné aux dispositions précitées. La demande de M. B... enregistrée au tribunal administratif de Nantes le 27 octobre 2021 à 15h47 et tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de renvoi et portant interdiction de retour sur le territoire français était donc tardive, et c'est à bon droit que les premiers juges l'ont écartée comme irrecevable pour la partie de ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté portant obligation de quitter sans délai le territoire français, fixation du pays de renvoi en cas de reconduite d'office et interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

6. En troisième lieu, si M. B... soutient que le jugement attaqué est entaché d'erreurs de droit, d'erreur de fait et d'erreur manifeste d'appréciation, de tels moyens relèvent du bien-fondé du jugement et sont, par suite, sans incidence sur sa régularité.

Sur la légalité de la décision portant assignation à résidence :

7. L'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ".

8. L'arrêté portant assignation à résidence vise notamment les dispositions de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique que M. B... fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai et que la fermeture des frontières et la suspension des liaisons terrestres, maritimes ou aériennes alors en vigueur en raison de l'épidémie de covid-19 font obstacle à une exécution immédiate de cette mesure d'éloignement. Cet arrêté comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivé.

9. M. B... se trouvant dans un cas, prévu au 1° de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans lequel l'autorité compétente peut décider de l'assigner à résidence, il n'est pas fondé à prétendre que cette autorité aurait, en décidant de l'assigner à résidence, commis une erreur de droit.

10. En dernier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant assignation à résidence doit être annulée par voie de conséquence.

11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 octobre 2021 portant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de renvoi et portant interdiction de retour sur le territoire français, comme étant irrecevable ainsi que la décision du même jour portant assignation à résidence. Par voie de conséquence, les conclusions de l'intéressé à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre de l'intérieur et des

outre-mer.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 28 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- M. Penhoat, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 juillet 2023.

Le rapporteur

A. PenhoatLa présidente

I. Perrot

La greffière

S. Pierodé

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°22NT02233 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NT02233
Date de la décision : 21/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : GUERIN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-07-21;22nt02233 ?
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