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07/07/2023 | FRANCE | N°23NT00258

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 07 juillet 2023, 23NT00258


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 26 février 2021 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque ce délai sera expiré.

Par un jugement n° 2106685 du 29 novembre 2022 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure

devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 janvier 2023 M. A..., représenté par

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 26 février 2021 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque ce délai sera expiré.

Par un jugement n° 2106685 du 29 novembre 2022 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 janvier 2023 M. A..., représenté par

Me Bourgeois, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 février 2021 du préfet de la Loire-Atlantique ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et, dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier faute de justifier de la compétence du rapporteur pour siéger au sein de la formation du jugement du tribunal administratif de Nantes ; l'identité du magistrat rapporteur n'est pas mentionnée ;

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et méconnaît ses dispositions ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît l'article L. 511-4, 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- la décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 avril 2023, le préfet de la

Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Par une décision du 3 janvier 2023, le président du bureau d'aide juridictionnelle a accordé à M. A... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Penhoat a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant tunisien, né le 28 octobre 1987, est entré en France, pour une seconde fois, en 2018 selon ses déclarations. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 30 avril 2019, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 26 août 2019. Il a sollicité du préfet de la Loire-Atlantique la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-11, 7° et 11° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 26 février 2021, le préfet de la Loire-Atlantique a rejeté cette demande, a assorti ce rejet d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque ce délai sera expiré. M. A... relève appel du jugement du 29 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 222-1 du code de justice administrative : " Les jugements des tribunaux administratifs et les arrêts des cours administratives d'appel sont rendus par des formations collégiales (...) ". Contrairement à ce que soutient le requérant, il ressort de la minute du jugement attaqué que le nom du magistrat rapporteur est mentionné.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 221-2-1 du code de justice administrative : " En cas de nécessité d'un renforcement ponctuel et immédiat des effectifs d'un tribunal administratif, le vice-président du Conseil d'Etat peut déléguer, avec son accord, un magistrat affecté auprès d'une autre juridiction administrative, quel que soit son grade, afin d'exercer, pour une durée déterminée, toute fonction juridictionnelle auprès de ce tribunal ". Il ressort de l'ordonnance du vice-président du Conseil d'Etat du 6 septembre 2022 que M. C... D... a été délégué à compter du 1er octobre 2022 au tribunal administratif de Nantes en qualité de rapporteur pour une durée de trois mois. Par suite, ce dernier avait compétence pour siéger au sein de la formation de jugement qui a statué sur son recours.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ". La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, s'il peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays de renvoi.

5. Le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé, ainsi qu'il ressort de son avis du 12 octobre 2020, que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, et qu'il peut voyager sans risque. Pour contester le sens de cet avis, M. A... se borne à produire, comme en première instance, un certificat médical établi le 8 juin 2021 par un médecin psychiatre indiquant seulement qu'il est suivi depuis 2019 pour un état anxio-dépressif. Ce document, eu égard à ses mentions, ne suffit pas à démontrer que, contrairement à ce qu'ont estimé les médecins de l'OFII le 12 octobre 2020, le défaut de prise en charge médicale du requérant pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé. Par ailleurs, le motif tenant à l'absence de conséquences d'une exceptionnelle gravité en cas de défaut de soins justifiant à lui seul le refus litigieux, M. A... ne peut utilement faire valoir qu'il n'aurait pas la possibilité d'accéder effectivement à un traitement dans son pays d'origine. Dès lors, le préfet de la Loire-Atlantique a pu légalement refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En second lieu, il ressort des pièces du dossier qu'à la date du 26 février 2021 à laquelle a été pris l'arrêté contesté, M. A... n'était entré pour la dernière fois en France que récemment. L'intéressé, célibataire et sans charge de famille, n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu la majeure partie de son existence. S'il se prévaut d'une activité salariée en France, en tant qu'employé familial, cette activité, qui n'a pas fait l'objet d'une autorisation de travail, est ponctuelle et à temps très partiel. Ni cette activité, ni les engagements bénévoles de l'intéressé ne sauraient démontrer une insertion sociale et professionnelle significative au sein de la société française. Dans ces conditions, le préfet de la Loire-Atlantique, en refusant de délivrer le titre sollicité, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il n'a pas davantage porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise et n'a pas, par suite, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, la décision portant refus de titre de séjour n'étant pas annulée, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation du refus de titre de séjour doit être écarté.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / (...) ". Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus au point 5 du présent arrêt que les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne faisaient pas obstacle à ce qu'il soit fait obligation à M. A... de quitter le territoire français.

9. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 6, les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

10. En quatrième et dernier lieu, le requérant ne peut utilement, à l'encontre de la décision contestée, se prévaloir de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

11. La décision portant refus de titre de séjour n'étant pas annulée, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation du refus de titre de séjour doit être écarté.

12. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles relatives aux frais liés au litige.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 22 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray président-assesseur,

- M. Penhoat, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2023.

Le rapporteur

A. PenhoatLa présidente

I. Perrot

La greffière

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23NT002582

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00258
Date de la décision : 07/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : BOURGEOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-07-07;23nt00258 ?
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