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27/06/2023 | FRANCE | N°22NT01276

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 27 juin 2023, 22NT01276


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée sous le n° 2109902 M. A... B... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 30 juin 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre les décisions de l'autorité consulaire française à Addis-Abeba (Éthiopie) refusant la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour à M. G... A... B... et à Mme F... A... B..., en qualité de membres de famille de réfugi

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Par une requête enregistrée sous le n° 2109904 M. D... A... B... a demandé au t...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée sous le n° 2109902 M. A... B... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 30 juin 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre les décisions de l'autorité consulaire française à Addis-Abeba (Éthiopie) refusant la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour à M. G... A... B... et à Mme F... A... B..., en qualité de membres de famille de réfugié.

Par une requête enregistrée sous le n° 2109904 M. D... A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la même décision du 30 juin 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision de l'autorité consulaire française à Addis-Abeba (Éthiopie) refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en qualité de membre de famille de réfugié.

Par un jugement n°s 2109902, 2109904 du 28 mars 2022, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 30 juin 2021 et a enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de délivrer un visa de long séjour à MM. D... et G... A... B... et à Mme F... A... B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 avril 2022, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 mars 2022 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) de rejeter les demandes présentées devant le tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que l'identité des demandeurs de visa n'est pas établie par les pièces produites, lesquelles ont été produites avec une intention frauduleuse, justifiant les refus de visa opposés.

La requête a été communiquée à M. B... C... et M. D... A... B... qui n'ont pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Rivas a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C..., ressortissant érythréen né en 1972, s'est vu reconnaître la qualité de réfugié en 2016. Une demande de réunification familiale a été sollicitée par Mme E..., présentée comme sa conjointe, ainsi que par les trois enfants nés de cette union, MM. D... et G... A... B..., nés en 2003 et 2008, et Mme F... A... B... née en 2005. Des refus leur ont été opposés par les autorités consulaires françaises à Addis-Abeba (Éthiopie). Par une décision du 30 juin 2021 la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté ce recours. Toutefois, M. B... C... a indiqué en première instance que Mme E... s'est ensuite vu délivrer le visa long séjour sollicité. Par un jugement du 22 mars 2022, dont le ministre de l'intérieur relève appel, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision contestée du 30 juin 2021 en tant qu'elle concerne MM. D... et G... A... B... et Mme F... A... B.... Par une ordonnance du 24 mai 2022, le président de la 5ème chambre de la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté la demande de sursis à exécution de ce jugement présentée par le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

2. Aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : / 1° Par son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d'au moins dix-huit ans, si le mariage ou l'union civile est antérieur à la date d'introduction de sa demande d'asile ; (...) 3° Par les enfants non mariés du couple, n'ayant pas dépassé leur dix-neuvième anniversaire. (...) / L'âge des enfants est apprécié à la date à laquelle la demande de réunification familiale a été introduite. ". Aux termes de l'article L. 561-5 du même code : " Les membres de la famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. Ils produisent pour cela les actes de l'état civil justifiant de leur identité et des liens familiaux avec le réfugié ou le bénéficiaire de la protection subsidiaire. / En l'absence d'acte de l'état civil ou en cas de doute sur leur authenticité, les éléments de possession d'état définis à l'article 311-1 du code civil et les documents établis ou authentifiés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sur le fondement de l'article L. 121-9 du présent code, peuvent permettre de justifier de la situation de famille et de l'identité des demandeurs. Les éléments de possession d'état font foi jusqu'à preuve du contraire. Les documents établis par l'office font foi jusqu'à inscription de faux. ". La circonstance qu'une demande de visa de long séjour ait pour objet le rapprochement familial d'un conjoint ou des enfants d'une personne admise à la qualité de réfugié ne fait pas obstacle à ce que l'autorité administrative refuse la délivrance du visa sollicité en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur un motif d'ordre public. Figure au nombre de ces motifs le défaut de valeur probante des documents destinés à établir la réalité du lien matrimonial entre les époux ou du lien de filiation produits à l'appui des demandes de visa.

3. L'article L. 811-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. Cet article dispose que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

4. Il ressort des pièces du dossier que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté les demandes de visa au motif que l'identité de MM. D... et G... A... B... et de Mme F... A... B..., ainsi que leur lien familial avec M. B... C..., n'étaient pas établis.

5. Afin d'établir l'identité de ces trois personnes présentées comme ces enfants, M. B... C... a produit trois certificats de baptême faisant état d'une naissance pour des enfants qui y sont dénommés Weletehana le 25 juillet 2005, Meharezgi le 5 juillet 2003 et Welde Arham le 4 juillet 2008, ainsi qu'une copie du registre du haut-commissariat pour les réfugiés (HCR) en Éthiopie du 21 octobre 2019, comportant ces mêmes dates de naissance, avec des prénoms différents, et les photographies des trois intéressés. Il ressort par ailleurs des pièces au dossier que M. B... C... a déclaré ses trois enfants au bureau des familles de réfugiés avec des dates de naissance concordantes avec celles figurant sur les certificats de baptême communiqués. La circonstance que, dans une note du 25 septembre 2020, l'OFPRA indique à la fois, sans l'étayer et sans l'expliquer, que M. B... C... est le père de trois enfants, D... né le 1er juillet 2004, F... née le 1er juillet 2006 et G... né le 1er octobre 2008, et qu'il avait déclaré dans son formulaire de demande d'asile des naissances respectives pour ces trois enfants en 2003, 2005 et 2008, est insuffisante pour dénier toute validité aux documents produits, lesquels concordent sur des naissances en 2003, 2005 et 2008 et alors que les conditions dans lesquels l'intéressé a rempli, seul ou avec un tiers, son formulaire de demande d'asile ne sont pas établies. Enfin, les éléments photographiques communiqués n'établissent pas que les personnes enregistrées par le HCR en 2019 seraient différentes de celles ayant sollicité les visas en litige. Dans ces conditions, l'identité des trois demandeurs de visa ainsi que leur lien avec M. B... C... doit être tenue pour établie. Par suite, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a fait une inexacte application des dispositions précitées en rejetant le recours qui lui était soumis.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur et des outre-mer n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 30 juin 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision de l'autorité consulaire française à Addis-Abeba refusant de délivrer un visa d'entrée et de long séjour en qualité de membre de famille de réfugié à MM. D... et G... A... B... et à Mme F... A... B....

D E C I D E :

Article 1er : La requête du ministre de l'intérieur et des outre-mer est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à M. B... C... et à M. D... A... B....

Délibéré après l'audience du 9 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- M. Frank, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2023.

Le rapporteur,

C. RIVAS

Le président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT01276


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT01276
Date de la décision : 27/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : DRAVIGNY

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-06-27;22nt01276 ?
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