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13/06/2023 | FRANCE | N°22NT01484

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 13 juin 2023, 22NT01484


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 8 octobre 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a confirmé la décision du préfet du Rhône ajournant à deux ans sa demande de naturalisation.

Par un jugement n° 1811717 du 16 juillet 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 mai et 30 juin 2022, Mme B..., représentée par Me Shiba

ba, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 juillet 2021 du tribunal administratif d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 8 octobre 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a confirmé la décision du préfet du Rhône ajournant à deux ans sa demande de naturalisation.

Par un jugement n° 1811717 du 16 juillet 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 13 mai et 30 juin 2022, Mme B..., représentée par Me Shibaba, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 juillet 2021 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 8 octobre 2018 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur d'enregistrer sa demande de naturalisation sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, avec liquidation mensuelle de l'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que le motif opposé par le ministre ne pouvait légalement fonder la décision contestée, eu égard aux dispositions de l'article 21-24 du code civil, de l'article 37 du décret du 30 décembre 1993, de l'article 21-13-2 du code civil et de sa situation appréciée globalement.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 3 juin et 5 juillet 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Rivas a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B... née C..., ressortissante algérienne née le 1er août 1972, a sollicité l'acquisition de la nationalité française. Par une décision du 14 mai 2018 le préfet du Rhône a ajourné sa demande à deux ans. Le ministre de l'intérieur a confirmé cet ajournement par une décision du 8 octobre 2018. Par un jugement du 16 juillet 2021, dont Mme B... relève appel, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.

2. Pour ajourner à deux ans la demande de naturalisation présentée par Mme B... le ministre de l'intérieur s'est fondé dans sa décision du 8 octobre 2018 sur les dispositions de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité et la circonstance que la postulante n'avait pas réalisé pleinement son insertion professionnelle.

3. En premier lieu, aux termes de l'article 21-13-2 du code civil : " Peuvent réclamer la nationalité française à leur majorité, par déclaration souscrite auprès de l'autorité administrative en application des articles 26 à 26-5, les personnes qui résident habituellement sur le territoire français depuis l'âge de six ans, si elles ont suivi leur scolarité obligatoire en France dans des établissements d'enseignement soumis au contrôle de l'Etat, lorsqu'elles ont un frère ou une sœur ayant acquis la nationalité française en application des articles 21-7 ou 21-11. / L'article 21-4 est applicable aux déclarations souscrites en application du premier alinéa du présent article. ".

4. Mme B... ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions à l'appui de sa contestation de la décision du ministre de l'intérieur, dès lors qu'elle a demandé à bénéficier d'une acquisition de la nationalité française par naturalisation et non procédé à l'enregistrement d'une déclaration de nationalité française souscrite sur le fondement de l'article 21-13-2 du code civil, dont le contentieux relève au surplus de la juridiction judiciaire. En conséquence, le moyen tiré de la violation de cette disposition ne peut qu'être écarté.

5. En second lieu, aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger. ". Aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " (...) Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande ". L'autorité administrative dispose, en matière de naturalisation ou de réintégration dans la nationalité française, d'un large pouvoir d'appréciation. Elle peut, dans l'exercice de ce pouvoir, prendre en considération notamment, pour apprécier l'intérêt que présenterait l'octroi de la nationalité française, l'intégration de l'intéressé dans la société française, son insertion sociale et professionnelle et le fait qu'il dispose de ressources lui permettant de subvenir durablement à ses besoins en France.

6. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., née en 1972, s'est mariée en 1992 et est mère de cinq enfants nés entre 2000 et 2012. En 2017, lorsqu'elle a demandé à être naturalisée, elle a indiqué être séparée de son conjoint depuis le 30 septembre 2016 et avoir travaillé pour la dernière fois en 1998/99 comme agent d'entretien. En 2017 elle a été allocataire du revenu de solidarité active et de diverses prestations de solidarité prenant en compte ses cinq enfants restant à charge. A la date de décision contestée, Mme B... était titulaire depuis le 1er mai 2018 d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein conclu comme agent de service avec la société Onet pour une rémunération brut mensuelle de 1 534,90 € brut. Eu égard au motif de la décision contestée, Mme B... ne peut utilement se prévaloir du fait que divers membres de sa famille dont son père et sa fratrie sont français ou bien encore du fait qu'elle-même a été scolarisée en France. Dans ces conditions, eu égard au large pouvoir d'appréciation dont il dispose pour accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite, et au fait que Mme B... n'avait repris une activité salariée, après une longue interruption, que depuis quelques mois à la date de la décision contestée, à laquelle s'apprécie sa légalité, le ministre chargé des naturalisations a pu, sans entacher sa décision d'erreur de droit ni d'erreur manifeste d'appréciation, ajourner à deux ans la demande d'acquisition de la nationalité française de Mme B... pour le motif tenant au fait qu'elle n'avait pas alors pleinement réalisé son insertion professionnelle.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte, ainsi que celles présentées au titre des frais d'instance, sont rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... née C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 26 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- M. Rivas, président assesseur,

- M. Frank, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juin 2023.

Le rapporteur,

C. RIVAS

Le président,

J. FRANCFORT

La greffière,

H. EL HAMIANI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT01484


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT01484
Date de la décision : 13/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : SHIBABA

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-06-13;22nt01484 ?
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