Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Sous le n° 1805936, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du préfet du Morbihan du 7 mai 2004 portant approbation des modifications du tracé et des caractéristiques de la servitude de passage des piétons le long du littoral ainsi que des suspensions de cette servitude et instituant des servitudes de passage des piétons transversales au rivage, sur la commune de l'Ile-aux-Moines.
Sous le n° 1805938, M. B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 23 août 2018 du préfet du Morbihan accordant un permis d'aménager pour la mise en place d'une servitude de passage des piétons sur le littoral sur plusieurs terrains situés au lieu-dit Pointe de Nioul à l'Ile-aux-Moines.
Par un jugement n°s 1805936, 1805938 du 4 juin 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ces demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2021, M. B..., représenté par Me Meresse, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 4 juin 2021 du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Morbihan du 7 mai 2004 portant approbation des modifications du tracé et des caractéristiques de la servitude de passage des piétons le long du littoral, des suspensions de cette servitude et instituant des servitudes de passage des piétons transversales au rivage sur la commune de l'Ile-aux-Moines ;
3°) d'annuler l'arrêté du 23 août 2018 du préfet du Morbihan accordant un permis d'aménager pour la mise en place d'une servitude de passage des piétons sur le littoral sur plusieurs terrains situés au lieu-dit Pointe de Nioul à l'Ile-aux-Moines ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision du 7 mai 2004 est irrégulière faute d'une motivation suffisante ; cette décision est illégale en raison de sa tardiveté au regard de l'enquête publique organisée en 2002 ; le nouveau tracé porte une atteinte disproportionnée à son intimité domiciliaire alors qu'un tracé alternatif était possible ;
- l'arrêté du 23 août 2018 est illégal en raison des seize années écoulées entre l'enquête publique conduite en 2002 et l'intervention de l'arrêté modifiant le tracé en 2018 ; il y a eu modification des circonstances de fait dans ce délai, dont un changement de propriétaire ou l'installation de ruches sur sa propriété dès 2010 ; cet arrêté est illégal en raison de l'illégalité de la décision du 7 mai 2004.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 décembre 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rivas,
- et les conclusions de M. Mas, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... est propriétaire de plusieurs terrains situés lieu-dit Pointe de Nioul à l'Ile-aux-Moines (Morbihan). Le 7 mai 2004, le préfet du Morbihan a approuvé des modifications du tracé et des caractéristiques de la servitude de passage des piétons sur le littoral sur le territoire de cette commune insulaire. Par un arrêté du 23 août 2018, la même autorité a accordé à l'Etat (Direction départementale des territoires et de la mer) un permis d'aménager pour la mise en place de cette servitude de passage modifiée. Le recours administratif formé le 18 octobre 2018 par M. B..., tendant au retrait des décisions des 7 mai 2004 et 23 août 2018, a été rejeté par le préfet du Morbihan. Par un jugement du 4 juin 2021, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation des décisions préfectorales des 7 mai 2004 et 23 août 2018.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne l'arrêté préfectoral du 7 mai 2004 approuvant des modifications du tracé et des caractéristiques de la servitude de passage des piétons sur le littoral :
2. Aux termes de l'article L. 160-6 du code de l'urbanisme, alors en vigueur : " Les propriétés privées riveraines du domaine public maritime sont grevées sur une bande de trois mètres de largeur d'une servitude destinée à assurer exclusivement le passage des piétons. / L'autorité administrative peut, par décision motivée prise après avis du ou des conseils municipaux intéressés et au vu du résultat d'une enquête publique effectuée comme en matière d'expropriation : / a) Modifier le tracé ou les caractéristiques de la servitude, afin, d'une part, d'assurer, compte tenu notamment de la présence d'obstacles de toute nature, la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage de la mer, d'autre part, de tenir compte des chemins ou règles locales préexistants (...). ".
3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du 7 mai 2004 du préfet du Morbihan mentionne les dispositions du code de l'urbanisme dont il est fait application, dont l'article L. 160-6 précité. S'agissant plus particulièrement des parcelles E 294 et 257 situées à la pointe du Nioul, il est mentionné en annexe à cet arrêté que la servitude doit être modifiée sur la parcelle E 257 afin de tenir compte d'une haie littorale existante à préserver et d'un sentier déjà tracé. Pour la parcelle E 294, il est mentionné que la modification de la servitude s'explique par des motifs de sécurité liés à la proximité de la falaise et au profil de cette dernière. Dans ces conditions, l'arrêté préfectoral contesté est suffisamment motivé en droit et en fait et le moyen tiré du défaut de motivation doit dès lors être écarté.
4. En deuxième lieu, si M. B... soutient que l'arrêté du 7 mai 2004 est intervenu tardivement au regard de l'enquête publique qui l'a précédé, cette dernière est intervenue du 28 août au 16 septembre 2002, soit moins de deux ans avant l'arrêté contesté. Par ailleurs, l'intéressé ne peut utilement se fonder sur des circonstances postérieures à l'arrêté du 7 mai 2004, comme l'installation de ruches sur certaines parcelles en 2010, pour contester la légalité de cette décision, qui s'apprécie à la date de son édiction. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
5. En troisième lieu, M. B... soutient que le tracé modifié de la servitude de passage le rapproche de son habitation, située sur la parcelle E 249. Il ne ressort cependant pas des pièces du dossier, par lesquelles l'intéressé se borne à produire à l'appui de ce moyen une photographie aérienne d'une partie de la pointe, ni que l'intéressé aurait été propriétaire d'une maison d'habitation et d'un jardin d'agrément sur les parcelles respectivement cadastrées E 249 et 250 à la date de l'arrêté contesté, alors qu'il indique n'avoir acquis cette maison qu'après 2004 ni, en tout état de cause, que ce nouveau tracé porterait atteinte à son intimité dans l'exercice de son droit de propriété, ou que celle-ci ne pourrait être préservée. Par suite, outre que la circonstance qu'il existerait un tracé alternatif ne saurait suffire à démontrer l'illégalité du tracé retenu par l'arrêté préfectoral contesté, et eu égard aux motifs de sécurité des lieux et de ses usagers établis par les pièces du dossier, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise par le préfet dans la modification du tracé retenu doit être écarté.
En ce qui concerne l'arrêté préfectoral du 23 août 2018 délivrant un permis d'aménager :
6. En premier lieu, M. B... soutient que l'arrêté préfectoral du 23 août 2018 accordant un permis d'aménager à l'Etat pour la mise en place de la servitude de passage piétons modifiée sur le littoral décidée le 7 mai 2004 est irrégulier dès lors qu'il s'est écoulé seize ans entre l'enquête publique préalable à cette modification qui s'est tenue du 28 août au 16 septembre 2002, préalablement à l'arrêté précité du 7 mai 2004, et l'arrêté du 23 août 2018. Toutefois, d'une part aucune disposition légale ou réglementaire n'imposait de faire précéder le permis d'aménager délivré en 2018 de l'organisation d'une enquête publique. D'autre part, la modification du tracé de la servitude de passage des piétons, notamment sur les parcelles E 252 et 254, a produit des effets de droit dès son adoption par l'arrêté du 7 mai 2004, alors même que pour certaines portions de ce tracé sa mise en œuvre n'a été permise que par l'arrêté du 23 août 2018 contesté. A cet égard, les changements de propriétaires des terrains supportant la servitude ainsi que les conditions de leur utilisation, M. B... se prévalant notamment de l'installation de ruches à compter de 2010, intervenus après l'arrêté du 7 mai 2004 sont sans incidence sur l'appréciation de la légalité de l'arrêté du 23 août 2018. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'une nouvelle enquête publique s'imposait préalablement à l'adoption de l'arrêté du 23 août 2018.
7. En second lieu, si M. B... soutient, par la voie de l'exception, que l'arrêté du 7 mai 2004 est illégal, il n'assortit pas ce moyen présenté à l'appui de sa contestation de l'arrêté du 23 août 2018 des précisions nécessaires pour en apprécier son bien-fondé. S'il devait être compris comme soutenant que l'arrêté du 23 août 2018 est illégal en raison de l'illégalité de l'arrêté du 7 mai 2004 du fait de l'enquête publique trop ancienne qui a précédé cette décision, cette enquête ne présente pas un tel caractère, ainsi qu'il a été précisé au point 4. Ce moyen doit donc en tout état de cause être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur les frais d'instance :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par M. B....
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Une copie en sera adressée pour information au préfet du Morbihan.
Délibéré après l'audience du 26 mai 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- M. Frank, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juin 2023.
Le rapporteur,
C. RIVAS
Le président,
J. FRANCFORT
La greffière,
H. EL HAMIANI
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT02117