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16/05/2023 | FRANCE | N°21NT01758

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 16 mai 2023, 21NT01758


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête et un déféré, M. et Mme E..., M. et Mme A... et la préfète d'Ille-et-Vilaine ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 16 juillet 2018 par lequel le maire de Saint-Sulpice-des-Landes a délivré à la SCEA L'Orée du Bois un permis de construire un hangar agricole sur un terrain situé lieu-dit " La Grée de La Hactais ", ainsi que la décision portant rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté.

Par un jugement n°s 1805

092, 1805704 du 5 mai 2021, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 16 j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête et un déféré, M. et Mme E..., M. et Mme A... et la préfète d'Ille-et-Vilaine ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 16 juillet 2018 par lequel le maire de Saint-Sulpice-des-Landes a délivré à la SCEA L'Orée du Bois un permis de construire un hangar agricole sur un terrain situé lieu-dit " La Grée de La Hactais ", ainsi que la décision portant rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté.

Par un jugement n°s 1805092, 1805704 du 5 mai 2021, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 16 juillet 2018 du maire de Saint-Sulpice-des-Landes ainsi que la décision portant rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 1er juillet 2021 sous le n° 21NT01758, et un mémoire enregistré le 17 mai 2022, lequel n'a pas été communiqué, la SCEA L'Orée du Bois, représentée par Me Le Derf-Daniel, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 mai 2021 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) de rejeter les demandes de première instance présentées par Mme E..., M. et Mme A... et la préfète d'Ille-et-Vilaine devant le tribunal administratif de Rennes ;

3°) de mettre à la charge de Mme E..., M. et Mme A... et de l'Etat, le versement de la somme globale de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il est entaché d'une contradiction de motifs ;

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé ; l'examen du caractère nécessaire du projet doit se faire indépendamment et préalablement à celui de sa proportionnalité ;

- le projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 124-3 du code de l'urbanisme ainsi que celles de la carte communale applicable sur le territoire de la commune de Saint-Sulpice-des-Landes ;

- les autres moyens soulevés par les demandeurs de première instance devant le tribunal administratif et devant la cour ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2021, le préfet d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2021, Mme E... et M. et Mme A..., représentés par Me Douard, concluent au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la SCEA L'Orée du Bois le versement à chacun de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

II. Par une requête enregistrée le 2 juillet 2021 sous le n° 21NT01831, la commune de Saint-Sulpice-des-Landes, représentée par Me Donias, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 mai 2021 du tribunal administratif de Rennes ;

2°) de rejeter les demandes de première instance présentées par Mme E..., M. et Mme A... et la préfète d'Ille-et-Vilaine devant le tribunal administratif de Rennes ;

3°) de mettre à la charge solidaire de Mme E..., de M. et Mme A... et de l'Etat, le versement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande présentée par Mme E... et M. et Mme A... était irrecevable, en ce qu'ils n'ont pas intérêt à agir à l'encontre de la décision contestée ;

- le projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 124-3 du code de l'urbanisme ainsi que celles de la carte communale applicable sur le territoire de la commune de Saint-Sulpice-des-Landes ; le projet est nécessaire à l'exploitation agricole de la pétitionnaire ; la superficie de stockage du projet est nécessaire et proportionnée. ;

- les autres moyens soulevés par les demandeurs de première instance devant le tribunal administratif et devant la cour ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2021, le préfet d'Ille-et-Vilaine, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2021, Mme E... et M. et Mme A..., représentés par Me Douard, concluent au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la SCEA L'Orée du Bois le versement à chacun de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- et les observations Me Hipeau, représentant la SCEA l'Orée du Bois, de Me Laville-Collomb, représentant la commune de Saint-Sulpice-des-Landes, et de Me Peneau, représentant Mme E... et M. et Mme A....

Une note en délibéré, présentée pour la SCEA l'Orée du Bois, a été enregistrée le 21 avril 2023 dans l'instance n° 21NT01758.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 16 juillet 2018, le maire de Saint-Sulpice-des-Landes (Ille-et-Vilaine) a délivré à la SCEA L'Orée du Bois un permis de construire un hangar agricole de stockage de fourrages, céréales et matériels d'une superficie de 2 760 m², situé lieu-dit " La Grée de la Hactais " sur des parcelles cadastrées section ZL nos 6, 7 et 8 d'une superficie totale de 45 930 m². La SCEA L'Orée du Bois et la commune de Saint-Sulpice-des-Landes relèvent appel du jugement du 5 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de M. et Mme E..., de M. et Mme A... et de la préfète d'Ille-et-Vilaine, l'arrêté du 16 juillet 2018 du maire de Saint-Sulpice-des-Landes ainsi que la décision portant rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté.

2. Les requêtes n°s 21NT01758 et 21NT01831 présentées par la SCEA L'Orée du Bois et la commune de Saint-Sulpice-des-Landes sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. En premier lieu, les moyens tirés de ce que le jugement attaqué serait entaché d'une contradiction de motifs et d'erreurs concernant l'examen du caractère nécessaire du projet ne sont pas susceptibles d'entacher sa régularité, mais seulement son bien-fondé. Par suite, ils ne peuvent être utilement invoqués pour contester la régularité du jugement attaqué.

4. En second lieu, il ressort du jugement attaqué que le tribunal administratif de Rennes a retenu, par des motifs suffisamment précis, le moyen tiré de ce que le projet contesté n'est pas nécessaire à l'activité agricole de la SCEA L'Orée du Bois et méconnaît ainsi l'article R. 124-3 du code de l'urbanisme et la carte communale applicable sur le territoire de Saint-Sulpice-des-Landes. Par suite, la SCEA L'Orée du Bois n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité sur ce point.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance, en tant qu'elle a été présentée par Mme E... et M. et Mme A... :

5. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ".

6. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

7. Il ressort des pièces du dossier que Mme E..., M. et Mme A... sont respectivement propriétaires des parcelles cadastrées à la section ZL sous les n°s 11 et 12, et à la section ZL sous les n°s 254, 256 et 258, sur lesquelles sont implantées leurs maisons d'habitations, lesquelles sont situées à environ 150 mètres des parcelles d'assiette du projet, consistant en l'édification d'un hangar agricole d'une superficie de 2 760 m². Les demandeurs se prévalent des nuisances sonores et visuelles engendrées par le projet, et notamment du flux de circulation des camions susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation et de jouissance de leurs biens. Dans ces conditions, ils justifient d'un intérêt suffisant leur donnant qualité pour demander l'annulation du permis de construire délivré le 16 juillet 2018 par le maire de Saint-Sulpice-des-Landes. Par suite, la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance, en tant qu'elle a été présentée par M. et Mme E..., M. et Mme A..., doit être écartée.

En ce qui concerne le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif de Rennes :

8. Aux termes de l'article L. 161-4 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " La carte communale délimite les secteurs où les constructions sont autorisées et les secteurs où les constructions ne sont pas admises, à l'exception de l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension des constructions existantes ou des constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à l'exploitation agricole ou forestière et à la mise en valeur des ressources naturelles. ". Aux termes de l'article R. 161-4 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le ou les documents graphiques délimitent les secteurs où les constructions sont autorisées et ceux où les constructions ne peuvent pas être autorisées, à l'exception : / 1° De l'adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l'extension des constructions existantes ; / 2° Des constructions et installations nécessaires : / a) A des équipements collectifs ou à des services publics si elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole ou pastorale ou forestière dans l'unité foncière où elles sont implantées et ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages ; / b) A l'exploitation agricole ou forestière ; / c) A la mise en valeur des ressources naturelles. Aux termes de la carte communale de Saint-Sulpice-des-Landes, applicable au permis de construire contesté : " (...) Hors zones constructibles, en tout état de cause, les demandes d'autorisation d'occuper le sol seront refusées en application des articles L. 111-2 et R. 111-14-1 du code de l'urbanisme. Toutefois, pourront être autorisées (sous réserve des autres dispositions du code de l'urbanisme) : (...) / - Les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs, à l'exploitation agricole ou à la mise en valeur des ressources naturelles (...). ".

9. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet de la SCEA L'Orée du Bois est situé en dehors des zones constructibles délimitées par la carte communale de Saint-Sulpice-des-Landes, et notamment par ailleurs du formulaire Cerfa renseigné par cette société et de la notice descriptive des travaux, que le projet contesté consiste en " la construction d'un hangar agricole de stockage fourrages, céréales et matériels avec toiture photovoltaïque ", d'une superficie de 2 760 m2. Il ressort également des pièces du dossier, et notamment de l'étude réalisée le 7 novembre 2018 par un comptable de l'organisme CER France, que la SCEA L'Orée du Bois, qui exploite un élevage bovin de 480 animaux ainsi que 1 800 places d'engraissement de porcs, nécessite, pour l'élevage bovin, un espace de stockage de 1 400 m² afin d'y entreposer 450 tonnes de paille et 200 tonnes de foin, ainsi que, pour l'élevage porcin, un espace de stockage de 1 200 m2 afin d'y entreposer 1 350 tonnes de céréales destinées à la fabrique d'aliments à la ferme (FAF). Ces stockages agricoles nécessitent ainsi un espace d'une surface d'environ 2 600 m² auquel il convient d'ajouter un espace consacré à l'entreposage du matériel agricole. La circonstance que le siège d'exploitation de la SCEA serait situé à environ 3,5 kilomètres des parcelles d'assiette du projet ne suffit pas à établir que le hangar ne serait pas nécessaire à son activité, et alors que le pétitionnaire a indiqué, sans être contredit sur ce point, qu'il souhaitait implanter un bâtiment de stockage sur des terres moins fertiles que celles qui se trouvent à côté de son exploitation, sise à la Lande pendue. Les demandeurs de première instance ne contestent au demeurant pas l'allégation de la société selon laquelle son activité est en croissance et tend à produire elle-même du fourrage et des céréales, et non de les acheter. Par suite, et à supposer même que la superficie du hangar ne serait pas totalement utilisée chaque jour de l'année et que l'approvisionnement alimentaire des bêtes serait susceptible d'être réparti annuellement, le maire n'a pas fait une inexacte application des dispositions citées au point 8 en délivrant le permis de construire contesté.

10. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes s'est fondé sur le motif tiré de ce que le projet litigieux n'est pas nécessaire à l'exploitation agricole de la SCEA L'Orée du Bois au sens des dispositions citées au point 8.

11. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme E..., M. et Mme A... et le préfet d'Ille-et-Vilaine, en première instance comme devant la cour.

En ce qui concerne les autres moyens soulevés par Mme E..., M. et Mme A... et le préfet d'Ille-et-Vilaine :

12. Les permis de construire, qui sont délivrés sous réserve des droits des tiers, ont pour seul objet d'assurer la conformité des travaux qu'ils autorisent avec la règlementation de l'urbanisme, en vertu de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une demande de permis de construire vient à disposer, au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif. Un tiers justifiant d'un intérêt pour agir et saisissant dans le délai de recours le juge de l'excès de pouvoir d'une demande recevable en ce sens est fondé à demander l'annulation du permis de construire qui aurait été accordé dans un tel cas. La fraude, dont le juge de l'excès de pouvoir apprécie l'existence à la date du permis de construire, est caractérisée lorsqu'il ressort des pièces du dossier, y compris le cas échéant au vu d'éléments dont l'administration n'avait pas connaissance à cette date, que le pétitionnaire a eu l'intention de tromper l'administration ou s'est livré à des manœuvres en vue d'obtenir un permis de construire indu.

13. Ainsi qu'il a été dit au point 9, il ressort des pièces du dossier, que la SCEA L'Orée du Bois a indiqué dans son dossier de demande que le projet contesté consiste en " la construction d'un hangar agricole de stockage fourrages, céréales et matériels avec toiture photovoltaïque ". Toutefois, dans son courrier en réponse au recours gracieux exercé par le sous-préfet de Redon contre son arrêté du 16 juillet 2018, le maire de Saint-Sulpice-des-Landes a indiqué le 25 septembre 2018 que " La SCEA l'Orée du Bois veut construire ce hangar dans le but d'y installer son stockage de fourrages, céréales et matériels (...). De plus, la SCEA de L'Orée du Bois a prévu de mettre une partie de ce hangar à disposition de la société Lermite, négociant agricole situé dans le bourg de Saint-Sulpice-des-Landes. En effet, la société Lermite voudrait délocaliser une partie de son activité (...) au lieudit La Grée de la Hactais. ". Le même document indique par ailleurs que la société Lermite exerce une activité consistant notamment en la transformation de paille en litière, et que les panneaux photovoltaïques sur la toiture du hangar sont prévus pour permettre d'alimenter en énergie cette activité. Au surplus, il ressort des pièces du dossier que le projet de plan local d'urbanisme intercommunal de Bretagne Porte de Loire Communauté, arrêté le 18 avril 2019, prévoit la création d'un secteur de taille et capacité d'accueil limitées à vocation économique dédié à un " projet de délocalisation d'un négoce agricole " sur le terrain d'emprise du bâtiment envisagé. Il ressort enfin des mentions de l'ordonnance n° 01805093 du 12 novembre 2018 du juge des référés du tribunal administratif de Rennes, que le gérant de la SCEA L'Orée du Bois a lui-même indiqué, lors de l'audience en référé du 8 novembre 2018, que " son hangar ne sera certes utilisé entièrement qu'une partie de l'année et il envisage de le mettre à disposition d'autres exploitants ou de tiers pour le surplus (...) Il s'agit d'un arrangement supplémentaire ". Les mentions de cette décision font foi, jusqu'à preuve du contraire. Par suite, et alors que cette utilisation du hangar n'a pas été mentionné par le pétitionnaire dans le dossier de demande, et que le maire disposait d'informations concernant cette même utilisation du bâtiment, les demandeurs sont fondés à soutenir que le pétitionnaire s'est livré, avec le concours du maire de la commune, à des manœuvres en vue d'obtenir un permis de construire indu, que l'arrêté de permis de construire du 16 juillet 2018 ne répond pas, en outre, aux fins d'intérêt général en vue desquelles il pouvait légalement être pris selon la procédure retenue, et que cet arrêté encourt l'annulation pour ces motifs.

14. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens invoqués n'est susceptible, en l'état du dossier, de fonder cette annulation. Par ailleurs, et pour l'application de l'article L. 600-5-1 du même code, le vice mentionné au point précédent, tiré de ce que le permis de construire est entaché de fraude et de détournement de pouvoir, n'est pas susceptible d'être régularisé.

15. Il résulte de tout ce qui précède que la SCEA L'Orée du Bois et la commune de Saint-Sulpice-des-Landes ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 16 juillet 2018 du maire de Saint-Sulpice-des-Landes ainsi que la décision portant rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté.

Sur les frais liés au litige :

16. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme E..., de M. et Mme A... ainsi que de l'Etat qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demandent la commune de Saint-Sulpice-des-Landes et la SCEA L'Orée du Bois au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

17. D'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SCEA L'Orée du Bois le versement à Mme E..., à M. A... et à Mme A... de la somme globale de 1 500 euros à verser au titre des mêmes frais.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de la SCEA L'Orée du Bois et de la commune de Saint-Sulpice-des-Landes sont rejetées.

Article 2 : La SCEA L'Orée du Bois versera une somme globale de 1 500 euros à Mme E..., M. A... et Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... E..., à M. D... A..., à Mme C... A..., au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à la commune de Saint-Sulpice-des-Landes et à la SCEA L'Orée du Bois.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 14 avril 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Rivas, président de la formation de jugement,

- M. Frank, premier conseiller,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 mai 2023.

Le rapporteur,

A. B...Le président de la formation

de jugement

C. RIVAS

La greffière,

H. EL HAMIANI

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 21NT01758, 21NT01831


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT01758
Date de la décision : 16/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. RIVAS
Rapporteur ?: M. Alexis FRANK
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : PENAUD et DOUARD AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-05-16;21nt01758 ?
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