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04/04/2023 | FRANCE | N°21NT00359

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 04 avril 2023, 21NT00359


Vu la procédure suivante :

Par un arrêt avant dire droit du 10 mai 2022, dans l'instance n°s 21NT00359 et 21NT00451, la cour a statué sur les requêtes de la commune de Plémet et de M. F... et autres tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 octobre 2020 par lequel le préfet des Côtes-d'Armor a délivré à la société EDPR France Holding une autorisation unique pour l'implantation et l'exploitation d'un parc éolien comprenant cinq aérogénérateurs, un poste de livraison, un local technique et un mât de mesure météorologique sur le territoire de la commune de Plémet. La

cour a sursis à statuer sur ces demandes jusqu'à ce que le préfet des Côtes-...

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt avant dire droit du 10 mai 2022, dans l'instance n°s 21NT00359 et 21NT00451, la cour a statué sur les requêtes de la commune de Plémet et de M. F... et autres tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 octobre 2020 par lequel le préfet des Côtes-d'Armor a délivré à la société EDPR France Holding une autorisation unique pour l'implantation et l'exploitation d'un parc éolien comprenant cinq aérogénérateurs, un poste de livraison, un local technique et un mât de mesure météorologique sur le territoire de la commune de Plémet. La cour a sursis à statuer sur ces demandes jusqu'à ce que le préfet des Côtes-d'Armor ait procédé à la transmission d'un arrêté de régularisation de l'autorisation du 30 octobre 2020, en fixant un délai maximal de dix mois pour cette transmission.

I - Dans l'instance n° 21NT00359 :

Le 25 octobre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires a communiqué à la cour un arrêté en date du 24 octobre 2022 du préfet des Côtes-d'Armor portant régularisation de l'autorisation d'exploiter du 30 octobre 2020.

Par des mémoires enregistrés les 24 novembre 2022 et 10 février 2023 (ce dernier non communiqué), la commune de Plémet, représentée par Me Beguin, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2022 du préfet des Côtes-d'Armor ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 octobre 2020 du préfet des Côtes-d'Armor ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société EDPR France Holding la somme de 3 000 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté du 24 octobre 2022 contesté a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière ; la consultation publique organisée suite à l'avis rendu par la mission régionale d'autorité environnementale est entachée de plusieurs irrégularités : l'avis de consultation publique ne mentionnait pas les dates précises de cette consultation ni la période durant laquelle le public pouvait présenter ses observations, aucun affichage de cet avis n'a été effectué en préfecture ou en mairie et, enfin, le public n'a pas pu produire d'observations par courrier, seule la voie électronique étant admise ;

- les informations relatives aux capacités financières du porteur du projet contenues dans le dossier sont imprécises et erronées ;

- les capacités financières sont insuffisantes pour permettre de s'assurer qu'elle honorera ses obligations d'exploitant du parc éolien.

Par un mémoire, enregistré le 29 décembre 2022, la société EDPR France Holding, représentée par Me Guinot, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la commune de Plémet le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.

Par un mémoire enregistré le 6 janvier 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.

II. Dans l'instance n° 21NT00451 :

Le 25 octobre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires a communiqué à la cour un arrêté en date du 24 octobre 2022 du préfet des Côtes-d'Armor portant régularisation de l'autorisation d'exploiter du 30 octobre 2020.

Par des mémoires, enregistrés les 21 novembre et 6 décembre 2022 (ce dernier non communiqué), M. et Mme E... F..., l'association " Vent debout à Plémet ", M. B... L..., M. C... H..., Mme G... L..., M. et Mme J... et K... M... et M. et Mme D... I..., représentés par Me Collet, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2022 du préfet des Côtes-d'Armor ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 octobre 2020 du préfet des Côtes-d'Armor ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et au bénéfice de chacun d'eux une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que le préfet des Côtes-d'Armor n'a pas tenu compte des observations présentées au cours de la consultation publique.

Par un mémoire enregistré le 29 décembre 2022, la société EDPR France Holding, représentée par Me Guinot, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge des consorts F... et autres le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens invoqués par les requérants n'est fondé.

Par un mémoire enregistré le 6 janvier 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par les requérants n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- les observations de Me Delagne substituant Me Béguin pour la commune de Plémet et celles de Me Collet pour M. F... et autres.

Considérant ce qui suit :

1. Le 23 mars 2016, la société EDPR France Holding a déposé une demande d'autorisation unique pour l'implantation et l'exploitation d'un parc éolien comprenant cinq aérogénérateurs, un poste de livraison, un local technique et un mât de mesure météorologique sur le territoire de la commune de Plémet. Par un arrêté du 25 juin 2018, le préfet des Côtes-d'Armor a rejeté cette demande. Par un jugement n° 1803855 du 30 juillet 2020, le tribunal administratif de Rennes a annulé ce refus d'autorisation et enjoint au préfet des Côtes-d'Armor de réexaminer la demande de la société EDPR France Holding. Par un arrêté du 30 octobre 2020, le préfet des Côtes-d'Armor a délivré à la société pétitionnaire l'autorisation unique demandée. La commune de Plémet ainsi que M. et Mme F..., l'association " Vent debout à Plémet ", M. L..., M. H..., Mme L..., M. et Mme M... et M. et Mme I... demandent l'annulation de cette autorisation.

2. Par son arrêt avant dire droit du 10 mai 2022, la cour a jugé que l'autorisation délivrée par l'arrêté contesté du 30 octobre 2020 du préfet des Côtes-d'Armor était entachée d'illégalité en ce que, d'une part, le public et l'administration n'avaient pas été suffisamment informés quant aux capacités financières dont disposait la société pétitionnaire et, d'autre part, l'avis de l'autorité environnementale avait été émis dans des conditions qui ne répondaient pas aux exigences de la directive n° 2011/92/UE du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement. La cour a, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, sursis à statuer jusqu'à l'expiration d'un délai de six mois ou, dans l'hypothèse où l'organisation d'une enquête publique complémentaire aura été nécessaire, de dix mois, sur les demandes de la commune de Plémet et de M. F... et autres, afin de permettre à l'État de communiquer à la cour une autorisation environnementale de régularisation.

3. Le 25 octobre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires a communiqué à la cour un arrêté en date du 24 octobre 2022 du préfet des Côtes-d'Armor portant régularisation de l'autorisation du 30 octobre 2020. La commune de Plémet et M. F... et autres demandent à la cour d'annuler cet arrêté du 24 octobre 2022 et soutiennent que celui-ci n'a pas régularisé l'autorisation accordée par l'arrêté contesté du 30 octobre 2020.

4. Aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. / (...) ".

5. À compter de la décision par laquelle le juge recourt à l'article L. 181-18 du code de l'environnement, seuls des moyens dirigés contre la mesure de régularisation notifiée, le cas échéant, au juge peuvent être invoqués devant ce dernier. À ce titre, les parties peuvent, à l'appui de la contestation de l'acte de régularisation, invoquer des vices qui lui sont propres et soutenir qu'il n'a pas pour effet de régulariser le vice que le juge a constaté dans sa décision avant dire droit. Elles ne peuvent en revanche utilement soulever aucun autre moyen, qu'il s'agisse de moyens déjà écartés par la décision avant dire droit ou de moyens nouveaux, à l'exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.

Sur la régularisation de l'arrêté du 30 octobre 2020 par l'arrêté du 24 octobre 2022 :

En ce qui concerne le vice affectant l'avis de l'autorité environnementale :

6. Il résulte de l'instruction que la mission régionale d'autorité environnementale de Bretagne a été saisie le 21 juin 2022 d'une demande d'avis sur le projet de parc éolien litigieux. Le 22 août 2022, ce service a informé le préfet des Côtes-d'Armor de ce que faute de s'être prononcée dans le délai imparti de deux mois, elle devait être regardée comme n'ayant aucune observation à formuler sur le projet, conformément aux dispositions de l'article R. 122-7 du code de l'environnement. Il n'est pas soutenu que cet avis aurait été émis dans des conditions irrégulières. Dès lors, le vice tiré de ce que l'autorisation litigieuse n'avait pas été précédée d'un avis émis par une autorité disposant d'une autonomie réelle répondant aux exigences de l'article 6 de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 a été régularisé par l'arrêté du 24 octobre 2022 du préfet des Côtes-d'Armor.

En ce qui concerne le vice affectant l'information du public quant aux capacités financières de la société EDPR France Holding :

7. Il résulte de l'instruction que des informations complémentaires sur les capacités financières de la société EDPR France Holding ont été transmises au préfet des Côtes-d'Armor en juin 2022 et comprennent notamment une mise à jour détaillée des éléments de comptabilité de la société pétitionnaire, EDPR France Holding, dont le capital social est de près de 80 millions d'euros, ainsi qu'une lettre d'engagement par laquelle la société EDP Renewables Europe s'engage à allouer suffisamment de moyens financiers à sa filiale afin de lui permettre de disposer des capitaux nécessaires pour honorer ses obligations d'exploitant du parc éolien. En outre et en tout état de cause, la circonstance que l'exploitant du parc éolien n'a pas connu de résultats positifs au cours des années précédentes n'établit pas l'insuffisance de ses capacités financières. Le préfet des Côtes-d'Armor a soumis ces informations complémentaires sur les capacités financières de la société pétitionnaire à l'information du public du 22 août au 23 septembre 2022. Par suite, le vice relevé au point 15 de l'arrêt avant dire droit du 10 mai 2022 qui entachait l'arrêté contesté du 30 octobre 2020 a été régularisé par l'arrêté du 24 octobre 2022 du préfet des Côtes-d'Armor.

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'information et de consultation du public concernant l'arrêté du 24 octobre 2022 :

8. En l'absence d'obligation de soumettre le projet à une enquête publique complémentaire, compte tenu de l'absence d'avis émis par la mission régionale de l'autorité environnementale relevée ci-dessus, la régularisation ici en cause se trouvait soumise à la seule procédure prévue par l'article R. 123-46-1 du code de l'environnement. Il résulte de l'instruction que, conformément à ces dernières dispositions, l'avis de la mission régionale d'autorité environnementale et la mise à jour des informations relatives aux capacités techniques et financières de la société EDPR France Holding de juin 2022 ont été mis en ligne du 22 août au 23 septembre 2022 sur le site internet de la préfecture des Côtes-d'Armor. Etait en outre mentionnée, sur la même page, la possibilité pour le public de présenter des observations et propositions sur une adresse de messagerie électronique dédiée aux enquêtes publiques de la préfecture des Côtes-d'Armor, ce jusqu'au 23 septembre 2022. Par ailleurs, et contrairement à ce que soutiennent la commune de Plémet et M. F... et autres, l'information au public n'avait pas à faire l'objet d'un affichage en préfecture ou en mairie sur le fondement des dispositions précitées du code de l'environnement, qui ne faisaient pas non plus obligation au préfet des Côtes-d'Armor d'accepter les observations et propositions effectuées par courrier. En tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction que la circonstance que les observations et propositions du public devaient parvenir sur une adresse de messagerie électronique aurait empêché quiconque de se manifester.

9. Il résulte de ce qui précède que les vices entachant l'arrêté du 30 octobre 2020 du préfet des Côtes-d'Armor tirés de ce qu'il n'a pas été précédée d'un avis régulièrement émis par l'autorité environnementale et de ce que le public n'a pas été suffisamment informé quant aux capacités financières de la société pétitionnaire ont été régularisés par l'arrêté préfectoral du 24 octobre 2022. Par suite, les requêtes présentées par la commune de Plémet et par M. F... et autres tendant à l'annulation des arrêtés du préfet des Côtes-d'Armor des 30 octobre 2020 et 24 octobre 2022 doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge tant de la commune de Plémet et de M. F... et autres que de la société EDPR France Holding le versement des sommes qu'ils se réclament mutuellement au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de la commune de Plémet et de M. F... et autres sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société EDPR France Holding sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Plémet, à M. E... F..., représentant unique désigné par Me Collet, son mandataire, à la société EDPR France Holding et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet des Côtes-d'Armor.

Délibéré après l'audience du 17 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président,

- M. Rivas, président assesseur,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 avril 2023.

Le rapporteure,

C. A...Le président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°s 21NT00359...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00359
Date de la décision : 04/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: Mme Cécile ODY
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : CABINET LACOURTE RAQUIN TATAR AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-04-04;21nt00359 ?
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