Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.
Par un jugement n° 2105231 du 15 avril 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 4 juillet 2022, M. B..., représenté par Me Gourlaouen, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 avril 2022 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 30 avril 2021 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de réexaminer sa situation administrative dans le délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de procéder à l'effacement de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen dans le délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 700 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que sa requête était recevable sur le fondement des articles L. 512-1 et L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, devenu les articles L. 613-3, L. 613-4 et L. 614-6 du même code ; il n'a pas été informé par la préfecture de son droit d'avertir son consulat ou une personne de son choix conformément à l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il n'a pas davantage été informé des coordonnées d'associations de défense des étrangers et de l'ordre des avocats ; les délais de recours ne lui étaient en conséquence pas opposables ; les conditions de notification de l'arrêté portant obligation de quitter sans délai le territoire français la veille d'un week-end portent atteinte à son droit à un recours effectif ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français et celles lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée d'un an sont insuffisamment motivées et sont entachées d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire méconnaît le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée d'un an méconnaît le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2022, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 juin 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant marocain né le 1er juin 1979 à Casablanca (Maroc) déclare être arrivé en France pour la première fois en juin 2016. Il a été interpellé lors d'un contrôle d'identité à bord d'un train le 30 avril 2021 puis placé en rétention administrative par les services de la police aux frontières de Nantes. Il relève appel du jugement du magistrat désigné par le président tribunal administratif de Nantes du 15 avril 2022, qui a rejeté comme irrecevable en raison de sa tardiveté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an.
2. Aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) / II. L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai peut, dans les quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, demander au président du tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision refusant un délai de départ volontaire, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. / (...) ". Aux termes de l'article L. 512-2 du même code : " Dès notification de l'obligation de quitter le territoire français, l'étranger auquel aucun délai de départ volontaire n'a été accordé est mis en mesure, dans les meilleurs délais, d'avertir un conseil, son consulat ou une personne de son choix. L'étranger est informé qu'il peut recevoir communication des principaux éléments des décisions qui lui sont notifiées en application de l'article L. 511-1. Ces éléments lui sont alors communiqués dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend ".
3. Par ailleurs, l'article R. 776-2 du code de justice administrative dispose : " Conformément aux dispositions du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification par voie administrative d'une obligation de quitter sans délai le territoire français fait courir un délai de quarante-huit heures pour contester cette obligation et les décisions relatives au séjour, à la suppression du délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour ou à l'interdiction de circulation notifiées simultanément. Cette notification fait courir ce même délai pour demander la suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement dans les conditions prévues à l'article L. 743-3 du même code. ". Aux termes du II de l'article R. 776-5 du même code : " II. - Les délais de quarante-huit heures mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-4 et les délais de quinze jours mentionnés aux articles R. 776-2 et R. 776-3 ne sont susceptibles d'aucune prorogation. ".
4. Il résulte de ces dispositions que, pour être recevables, les requêtes dirigées contre une mesure d'obligation de quitter le territoire sans délai doivent être présentées au greffe du tribunal, pour y être enregistrées, dans un délai de 48 heures suivant la notification de l'arrêté comportant cette décision. Ce délai de quarante-huit heures, qui n'est pas un délai franc et n'obéit pas aux règles définies à l'article 642 du nouveau code de procédure civile, se décompte d'heure à heure et ne saurait recevoir aucune prorogation. Il n'est pas contesté que l'arrêté contesté a été notifié à M. B... le vendredi 30 avril 2021 à 17 h 40 et que cette notification a été accompagnée de la remise à M. B... d'un document en langue française, que ce dernier a indiqué comprendre et lire, mentionnant les délais et voies de recours contre cette décision et indiquant qu'il lui était possible de prendre la connaissance de son dossier et d'être assisté de son avocat ou de demander qu'il lui en soit désigné un. La requête de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux n'a été enregistrée au greffe du tribunal administratif que le 7 mai 2021, soit nécessairement après l'expiration du délai de quarante-huit heures prévu par le II de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. Pour soutenir que sa requête était néanmoins recevable, M. B... fait valoir qu'il n'a pas reçu les informations prévues par les dispositions de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la possibilité d'avertir un conseil, son consulat ou une personne de son choix. Toutefois, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier qu'il était à même de comprendre les voies et délais de recours contre la décision qui lui était notifiée, l'éventuel défaut de ces informations ne permet pas d'écarter la tardiveté constatée.
6. M. B... ne peut davantage utilement soutenir que le préfet aurait omis de l'informer des coordonnées d'associations de défense des étrangers et de l'ordre des avocats.
7. Enfin, il résulte des termes mêmes du II de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article R. 776-5 du code de justice administrative que le ressortissant étranger qui a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire sans délai ne peut demander l'annulation de cette décision au président du tribunal administratif que dans un délai de quarante-huit heures décompté d'heure à heure suivant sa notification, la circonstance qu'un samedi, un dimanche ou un jour férié est compris dans le cours de ce délai n'ayant pas pour effet de l'interrompre ou de le suspendre. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les conditions dans lesquelles lui a été notifié l'arrêté litigieux, soit la veille d'un week-end à 17h40, l'auraient privé de son droit effectif au recours.
8. Il résulte de tout ce qui précède que les circonstances invoquées par M. B... ne sont pas de nature à établir que le délai de recours de 48 heures ne lui était pas opposable. Sa requête présentée devant le tribunal administratif de Nantes ayant été présentée au-delà de ce délai, ainsi qu'il a été dit, elle est tardive et par suite irrecevable. M. B... n'est par suite pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande comme irrecevable. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des frais liés au litige doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Gourlaouen et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 7 mars 2023, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Derlange, président assesseur,
- Mme Chollet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mars 2023.
La rapporteure,
L. C...
Le président,
L. LAINÉ
La greffière,
S. LEVANT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22NT02108