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21/03/2023 | FRANCE | N°22NT00048

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 21 mars 2023, 22NT00048


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... et Mme E... A... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 27 janvier 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises en République démocratique du Congo refusant de délivrer à M. C... un visa de long séjour au titre du regroupement familial.

Par un jugement n° 2103904 du 6 décembre 2021, le tribunal administratif de

Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... et Mme E... A... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 27 janvier 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises en République démocratique du Congo refusant de délivrer à M. C... un visa de long séjour au titre du regroupement familial.

Par un jugement n° 2103904 du 6 décembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 janvier 2022, M. D... C... et Mme E... A..., représentés par Me Anglade, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 décembre 2021 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision du 27 janvier 2021 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur, à titre principal, de délivrer le visa sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de la demande de visa dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur conseil de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il a tenu compte du mémoire en défense du ministre de l'intérieur, enregistré au greffe du tribunal administratif de Nantes postérieurement à la clôture de l'instruction ;

- la décision contestée est entachée d'erreur d'appréciation ; l'identité de M. C..., et le lien marital avec Mme A..., sont établis par les actes d'état civil produits ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 février 2022, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique :

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 6 décembre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. D... C... et de Mme E... A... tendant à l'annulation de la décision du 27 janvier 2021 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision des autorités consulaires françaises en République démocratique du Congo refusant de délivrer à M. C... un visa de long séjour au titre du regroupement familial. M. C... et Mme A... relèvent appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Devant les juridictions administratives et dans l'intérêt d'une bonne justice, le juge a toujours la faculté de rouvrir l'instruction, qu'il dirige, lorsqu'il est saisi d'une production postérieure à la clôture de celle-ci. Il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de cette production avant de rendre sa décision et de la viser. S'il décide d'en tenir compte, il rouvre l'instruction et soumet au débat contradictoire les éléments contenus dans cette production qu'il doit, en outre, analyser. Par suite, en décidant de verser au contradictoire après la clôture de l'instruction le mémoire en défense du ministre qui a été produit après celle-ci, le président de la formation de jugement du tribunal administratif, qui doit être regardé comme ayant rouvert l'instruction, n'a pas entaché le jugement attaqué d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, désormais repris à l'article L. 311-1 du même code : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : / 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur (...) ". Aux termes de l'article L. 211-2-1 du même code, alors en vigueur, désormais repris à l'article L. 312-2 du même code : " (...) Tout étranger souhaitant entrer en France en vue d'y séjourner pour une durée supérieure à trois mois doit solliciter auprès des autorités diplomatiques et consulaires françaises un visa de long séjour (...) ". Si la venue en France de ressortissants étrangers a été autorisée au titre du regroupement familial, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que l'autorité consulaire use du pouvoir qui lui appartient de refuser leur entrée en France en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur des motifs d'ordre public. Figure au nombre de ces motifs l'absence de caractère authentique des actes d'état civil produits ainsi que l'absence de lien familial entre le demandeur de visa et le membre de famille que celui-ci entend rejoindre.

4. L'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, aujourd'hui repris à l'article L. 811-2 du même code prévoit par ailleurs, en son premier alinéa, que la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. L'article 47 du code civil dispose quant à lui que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

5. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser de délivrer le visa de long séjour sollicité pour M. C..., la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur le motif tiré de ce que l'identité du demandeur de visa, et partant son lien familial à l'égard de Mme A..., n'étaient pas établis.

6. A l'appui de la demande de visa présentée pour M. C..., ont été produits un acte de notoriété supplétif d'acte de naissance n°052/EC/ANS/I/2019, dressé le 3 juin 2019 par un officier d'état civil de la ville de Kinshasa-commune Ndjili, une ordonnance d'homologation de cet acte de notoriété datée du 5 juin 2019, un acte de naissance n°1386 établi le 6 juin 2019 par un officier d'état civil de la commune de la ville de Kinshasa- commune de Ndjili, une attestation de naissance délivrée le 13 novembre 2017 par le bourgmestre de la commune de Ndjili et un " attestation de confirmation ", délivrée par un officier d'état civil de la " ville-province de Kinshasa - bureau secondaire de l'état civil de quartier 6 ", qui certifie le caractère authentique de l'acte de notoriété supplétif d'acte de naissance n°052/EC/ANS/I/2019. Toutefois, il ressort des documents produits que l'original de l'acte de naissance n°1386, dressé le 6 juin 2019, ne fait aucunement référence à l'acte de notoriété n°052/EC/ANS/I/2019, alors que sa copie intégrale, délivrée le même jour, mentionne que cet acte a été dressé sur présentation de l'ordonnance d'homologation du 5 juin 2019 concernant le même acte de notoriété. Les requérants n'apportent aucune explication précise et circonstanciée sur la multiplicité des actes présentés, non plus que sur ces différentes anomalies. Par suite, les documents produits par les requérants doivent être regardés comme ne présentant pas un caractère probant permettant d'établir l'identité de M. C.... Par suite, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a pu, sans faire une inexacte application des dispositions précitées, rejeter la demande de visa en litige au motif que l'identité et le lien familial de M. C... à l'égard de Mme A... n'étaient pas établis.

7. En second lieu, eu égard aux développements qui précèdent, et à défaut d'établir l'identité de M. C..., le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... C... et Mme E... A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... et de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., à Mme E... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 3 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- M. Rivas, président-assesseur,

- M. Frank, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 mars 2023.

Le rapporteur,

A. B...Le président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 22NT00048


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT00048
Date de la décision : 21/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. Alexis FRANK
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : ANGLADE et PAFUNDI A.A.R.P.I

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-03-21;22nt00048 ?
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