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10/02/2023 | FRANCE | N°22NT02084

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 10 février 2023, 22NT02084


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2020 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a retiré son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2013685 du 15 mars 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2020 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a retiré son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2013685 du 15 mars 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 juin 2022 M. A..., représenté par Me Thoumine, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 octobre 2020 du préfet de la Loire-Atlantique ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 800 euros au profit de son avocate, Me Thoumine, en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

sur la décision portant retrait de titre de séjour :

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du 2 bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

sur la décision portant obligation de quitter le territoire :

- l'illégalité de la décision portant refus de séjour entraîne par voie d'exception l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 octobre 2022, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Par une décision du 30 mai 2022, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les observations de Me Thoumine, assistant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant ivoirien né selon ses dires le 3 juin 2001, déclare être entré en France le 19 septembre 2016. Par une ordonnance d'ouverture d'une tutelle d'Etat du 12 décembre 2016, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Nantes a confié la tutelle de M. A... au président du conseil départemental de Loire-Atlantique. Par un courrier daté du 8 février 2019, M. A... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Le préfet de la Loire-Atlantique lui a délivré un titre de séjour " vie privée et familiale ", valable du 20 novembre 2019 au 20 novembre 2020. Par une décision du 12 octobre 2020, dont M. A... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation, le préfet de la Loire-Atlantique a retiré son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. Par un jugement du 15 mars 2022, le tribunal a rejeté cette demande. M. A... fait appel de ce jugement.

Sur la décision de retrait du titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée ; (...) ". En vertu des dispositions de l'article R. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'étranger qui sollicite la délivrance d'une première carte de séjour doit présenter à l'appui de sa demande notamment les pièces mentionnées à l'article R. 311-2-2 du même code. Aux termes de cet article : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente les documents justifiant de son état civil et de sa nationalité (...). ". Aux termes de l'article L. 111-6 de ce code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil (...) des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ".

3. Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger et rédigé dans les formes usitées dans le pays concerné peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

4. Il ressort des termes de la décision contestée que pour retirer le titre de séjour de M. A..., le préfet de la Loire-Atlantique s'est fondé sur le motif tiré de ce que, en raison du défaut de caractère probant de l'acte d'état civil de l'intéressé, révélant des manœuvres frauduleuses, son identité n'est pas établie.

5. Pour contester ce motif, M. A... a présenté des extraits, délivrés à plusieurs dates, du registre de l'état civil de la commune de Yopougon (Côte d'Ivoire) du 3 juin 2001 portant le n° 7018, faisant état de sa naissance le même jour. Il ressort toutefois des pièces produites en défense qu'une levée d'acte réalisée auprès de la commune de Yopougon par les autorités consulaires françaises en Côte d'Ivoire a révélé que l'acte de naissance n° 7018 du 30 mai 2001 ne correspondait pas au requérant mais à M. B..., Adama A..., né le 24 mai 2001. Il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment de simples échanges sur le compte Facebook de la mairie de Yopougou, que la levée d'acte aurait concerné un autre centre d'état civil de Yopougon que le centre de Selmer indiqué. En outre, la réponse, par courriel du 5 mai 2022, du responsable communication de la mairie de Yopougon indiquant que le document existe bel et bien, sans jonction de ce document, est insuffisamment probante et la lettre du 5 mai 2022 adressée au maire de Yopougon par l'avocate de M. A... afin de confirmer l'authenticité de l'acte de naissance de ce dernier est restée sans réponse. Dans ces conditions, le préfet de la Loire-Atlantique a pu légalement se fonder sur le seul motif tiré de l'absence de minorité établie de M. A... pour refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En second lieu, M. A... est célibataire et sans enfant. Sa présence sur le territoire français depuis septembre 2016, soit quatre ans environ à la date de la décision contestée, est encore récente. S'il ressort des pièces du dossier que le requérant est titulaire d'un brevet d'études professionnelles et d'un baccalauréat professionnel " métiers de l'électricité et de ses environnements connectés " et qu'il était inscrit, à la date de la décision contestée, en première année de BTS " électrotechnique " et en contrat d'apprentissage avec l'entreprise SPIE, ni ces éléments, ni l'attestation de proches faisant état de leur intention de le désigner comme parrain civil de leur enfant à naître ne suffisent à justifier de l'intensité et de la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France, alors qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans le pays dont il a la nationalité, où résident ses sœurs selon ses propres déclarations à la préfecture. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle et qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, la décision portant retrait de titre de séjour n'étant pas annulée, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation du retrait de titre de séjour doit être écarté.

8. En deuxième lieu, il y a lieu d'écarter, pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 6, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions relatives aux frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 26 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Penhoat, premier conseiller,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 février 2023.

La rapporteure

P. C...La présidente

I. Perrot

La greffière

S. Pierodé

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT02084


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NT02084
Date de la décision : 10/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : THOUMINE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-02-10;22nt02084 ?
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