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10/01/2023 | FRANCE | N°21NT00096

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 10 janvier 2023, 21NT00096


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Les Amis du Golfe du Morbihan a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 29 mai 2018 par lequel le maire de la commune de Baden a délivré à M. D... un permis de construire portant sur la restauration d'une maison, la reconstruction d'un muret et l'édification d'une clôture sur un terrain situé Pointe du Blair.

Par un jugement n° 1803609 du 9 novembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a admis l'intervention de la fédération d'associations de protecti

on de l'environnement du Golfe du Morbihan et a rejeté la demande de l'associati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Les Amis du Golfe du Morbihan a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 29 mai 2018 par lequel le maire de la commune de Baden a délivré à M. D... un permis de construire portant sur la restauration d'une maison, la reconstruction d'un muret et l'édification d'une clôture sur un terrain situé Pointe du Blair.

Par un jugement n° 1803609 du 9 novembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a admis l'intervention de la fédération d'associations de protection de l'environnement du Golfe du Morbihan et a rejeté la demande de l'association Les Amis du Golfe du Morbihan.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 janvier et 10 novembre 2021, lequel n'a pas été communiqué, l'association Les Amis du Golfe du Morbihan, représentée par Me Lefevre, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 mai 2018 du maire de Baden (Morbihan) délivrant à M. D... un permis de construire portant sur la restauration d'une maison, la reconstruction d'un muret et l'édification d'une clôture sur un terrain situé Pointe du Blair ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Baden le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre de la première instance ainsi que 3 000 euros sur le même fondement au titre de la présente instance.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularités ; il n'est pas suffisamment motivé ; les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé au regard des exigences posées par les dispositions de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme ;

- il a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière dans la mesure où il n'a pas été soumis à enquête publique préalable, en violation des dispositions de l'article L. 121-24 du code de l'urbanisme ;

- le dossier de demande de permis de construire est incomplet et comporte des erreurs ;

- l'arrêté contesté ne respecte pas les dispositions de l'article L. 111-23 du code de l'urbanisme et des articles NDs 1 et NDs 2 du règlement du plan local d'urbanisme de Baden ;

- il a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article NDs 10 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 121-16 du code de l'urbanisme ;

- il a été pris en violation des articles L. 113-1 et L. 121-17 du code de l'urbanisme ;

- il ne respecte pas les dispositions de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté contesté qui autorise la création d'une station d'épuration n'a pas été précédé d'une étude environnementale, en violation de l'article R. 122-2 du code de l'environnement et son annexe ;

- il a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 111-23 du code de l'urbanisme et ne respecte pas les dispositions des articles ND 11 et R. 111-27 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2021, M. et Mme D..., représentés par la société d'avocats Le Roy, Gourvennec, Prieur, concluent au rejet de la requête et demandent à la cour de mettre à la charge de l'association Les Amis du Golfe du Morbihan le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent qu'aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2021, la commune de Baden, représentée par Me Rouhaud, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'association Les Amis du Golfe du Morbihan le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- les observations de Me Lefevre, représentant l'association Les Amis du Golfe du Morbihan, celles de Me Boisset substituant Me Rouhaud représentant la commune de Baden et celles de Me Riou substituant Me Prieur, représentant M. et Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 9 novembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a admis l'intervention de la fédération des associations de protection de l'environnement du Golfe du Morbihan et a rejeté la demande de l'association Les Amis du Golfe du Morbihan tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 mai 2018 par lequel le maire de la commune de Baden (Morbihan) a délivré à M. D... un permis de construire portant sur la restauration d'une maison, la reconstruction d'un muret et l'édification d'une clôture sur deux parcelles cadastrées section YA n°s 99 et 76, situées à la Pointe du Blair. L'association Les Amis du Golfe du Morbihan relève appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces de la procédure que l'association Les Amis du Golfe du Morbihan invoquait en première instance un moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme. Si le tribunal administratif a retenu au point 41 du jugement attaqué, en réponse au moyen tiré de la violation de l'article ND 11 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Baden, que le terrain d'assiette du projet est inclus dans le site inscrit du Golfe du Morbihan, dans le site Natura 2000 référencé FR 300029, dans une zone importante pour la conservation des oiseaux, dans un espace boisé classé, qu'elle est en limite d'un site RAMSAR référencé FR72000005 et enfin que l'environnement de la construction doit être regardé comme présentant des qualités paysagères et écologiques particulièrement remarquables, il n'a toutefois pas examiné le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme. Dans ces conditions et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen soulevé tiré de l'irrégularité du jugement attaqué, l'association Les Amis du Golfe du Morbihan est fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'un défaut de réponse à un moyen qui n'était pas inopérant. Par suite, le jugement attaqué doit être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par l'association Les Amis du Golfe du Morbihan devant le tribunal administratif de Rennes.

Sur l'intervention de la Fédération d'associations de protection de l'environnement du golfe du Morbihan en première instance :

4. Selon ses statuts, la Fédération d'associations de protection de l'environnement du golfe du Morbihan " réunit des associations ayant pour but la protection de l'environnement et du cadre de vie (...) ", " exerce son action principalement sur les territoires du pays de Vannes et du pays d'Auray et de la zone maritime adjacente (...) " et a notamment pour buts " de protéger l'environnement terrestre et côtier, qu'il s'agisse notamment de la biodiversité, des écosystèmes, des paysages, du patrimoine naturel, historique ou culturel, de l'urbanisme (...). ". En outre, son agrément au titre de la protection de l'environnement a été tacitement renouvelé pour cinq ans à compter du 9 avril 2019. Elle justifie dès lors d'un intérêt à l'annulation de l'arrêté du 29 mai 2018 du maire de la commune de Baden. Par suite, son intervention en première instance au soutien de la requête présentée par l'association Les Amis du Golfe du Morbihan est recevable.

Sur la légalité de l'arrêté du maire de Baden en date du 29 mai 2018 :

5. En premier lieu, aux termes de l'article A. 424-1 du code de l'urbanisme : " La décision expresse prise sur une demande de permis de construire, d'aménager ou de démolir ou sur une déclaration préalable prend la forme d'un arrêté. (...) ". Aux termes de l'article A. 424-2 du même code : " L'arrêté prévu au premier alinéa de l'article A. 424-1 : / (...) d) Vise les avis recueillis en cours d'instruction et leur sens. / (...) ".

6. Si l'association Les Amis du Golfe du Morbihan soutient que l'arrêté contesté ne vise pas les avis recueillis au cours de l'instruction de la demande de permis de construire ni leur sens, cette circonstance est par elle-même sans incidence sur la légalité de l'arrêté.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. / (...) Il en est de même lorsqu'elle est assortie de prescriptions, oppose un sursis à statuer ou comporte une dérogation ou une adaptation mineure aux règles d'urbanisme applicables. ".

8. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté contesté a été pris sur le fondement des dispositions de l'article L. 111-23 du code de l'urbanisme, lequel prévoit que : " La restauration d'un bâtiment dont il reste l'essentiel des murs porteurs peut être autorisée, sauf dispositions contraires des documents d'urbanisme et sous réserve des dispositions de l'article L. 111-11, lorsque son intérêt architectural ou patrimonial en justifie le maintien et sous réserve de respecter les principales caractéristiques de ce bâtiment. ". Ces dispositions prévoient un régime juridique spécifique applicable aux projets de restauration qui satisfont aux conditions énoncées et ne constituent pas une dérogation au sens de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme. Par suite, l'association requérante ne peut utilement invoquer le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté contesté.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 431-6 du code de l'urbanisme : " Lorsque le terrain d'assiette comporte des constructions, la demande précise leur destination, par référence aux différentes destinations et sous-destinations définies aux articles R. 151-27 et R. 151-28, leur surface de plancher et indique si ces constructions sont destinées à être maintenues et si leur destination ou sous-destination est modifiée par le projet. ". Aux termes de l'article R. 431-9 du même code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. / Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement. / Lorsque le terrain n'est pas directement desservi par une voie ouverte à la circulation publique, le plan de masse indique l'emplacement et les caractéristiques de la servitude de passage permettant d'y accéder. (...) ".

10. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

11. Il ressort des pièces du dossier que le dossier de demande de permis de construire qui porte sur la restauration d'un bâtiment ancien comprend de nombreux plans de façade et plans de coupe montrant les éléments existants conservés, et ceux à reconstruire, permettant de connaître avec exactitude l'ensemble des cotes de la construction projetée ainsi que les plantations maintenues, supprimées ou créées. Le plan de masse présente également les modalités de raccordement de la construction projetée aux différents réseaux d'eau potable, d'électricité et de télécommunication et comprend un courrier de l'association syndicale libre de la Pointe du Blair, constituée des propriétaires voisins, portant acceptation écrite du raccordement de la construction projetée aux réseaux privés d'eau, d'électricité et de téléphone. En outre, il ressort des pièces du dossier qu'aucune voie d'accès nouvelle n'est créée sur les parcelles d'assiette du projet, sur lesquelles il existe une piste forestière, qui doit être maintenue, menant à la construction. Enfin, le cadre 5.5 du formulaire Cerfa indique avec précision la répartition des surfaces de plancher créées entre la destination " habitation " et la destination " bureaux " définies par le code de l'urbanisme. A supposer même qu'il eût fallu indiquer un changement de destination plutôt qu'une conservation des destinations existantes, cette circonstance ne pouvait induire l'administration en erreur dès lors que le dossier fait état de ce que la construction était, du fait de son état dégradé, inoccupée et impropre à tout usage. Dans ces conditions, l'association Les Amis du Golfe du Morbihan n'est pas fondée à soutenir que le dossier de demande de permis de construire présente un caractère incomplet ou erroné.

12. En quatrième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 111-23 du code de l'urbanisme citées au point 8 que le législateur a entendu permettre la restauration de bâtiments anciens caractéristiques des traditions architecturales et cultures locales laissés à l'abandon mais dont demeure l'essentiel des murs porteurs dès lors que le projet respecte les principales caractéristiques du bâtiment en cause et à condition que les documents d'urbanisme applicables ne fassent pas obstacle aux travaux envisagés. Lorsqu'un projet répond à ces conditions, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de l'autoriser, y compris si le pétitionnaire ne s'est pas expressément prévalu de l'article L. 111-23 du code de l'urbanisme au soutien de sa demande de permis de construire, à moins que d'autres dispositions applicables y fassent légalement obstacle.

13. Le projet autorisé par l'arrêté litigieux du 29 mai 2018 consiste en la restauration d'un bâtiment dont il ressort des pièces du dossier, notamment d'une étude historique et patrimoniale menée en novembre 2016, qu'il a été édifié au début du 20ème siècle dans le cadre d'un projet d'aménagement d'un port en eau profonde au sein du golfe du Morbihan, à l'embouchure de la rivière d'Auray, le bâtiment ayant vocation à devenir la " maison du port " à l'extrémité de la Pointe du Blair. Ce projet a été mené par le comte B... C..., figure emblématique du golfe du Morbihan au début du 20ème siècle, également propriétaire de l'Ile de Berder sur laquelle il a fait édifier son manoir agrémenté d'une tour hexagonale, d'une chapelle et de nombreuses dépendances. Si le projet de port en eau profonde a finalement été abandonné, de sorte que le bâtiment n'a été ni achevé ni occupé, il appartient à l'histoire et au patrimoine du golfe du Morbihan et constitue en outre un amer côtier référencé pour la navigation. L'architecte des bâtiments de France a ainsi émis un avis favorable au projet en retenant qu'il " permet de restituer un emblème patrimonial local et de conforter sa vocation d'amer. ".

14. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier notamment des plans joints à la demande de permis de construire et des photographies produites par les parties que si la charpente et la toiture du bâtiment, partiellement couvert par la végétation, ont disparu dans les années 60-70, le bâtiment conserve ses deux façades nord et sud ainsi que ses murs pignons est et ouest, dont seuls les sommets sont partiellement effondrés. Dans ces conditions, le bâtiment conserve l'essentiel de ses murs porteurs au sens des dispositions de l'article L. 111-23 du code de l'urbanisme.

15. De plus, il ressort des pièces du dossier, notamment de l'étude historique et patrimoniale menée en novembre 2016 à la demande du pétitionnaire et des plans de restauration datés du 18 octobre 1948, que le bâtiment en granit et mortier de chaux et sable, de plan rectangulaire, présentait trois niveaux dont le dernier se trouvait sous une toiture couverte d'ardoises, à deux pans et brisée, comprenant des lucarnes. Le projet litigieux conserve la hauteur et le volume de la construction, prévoit l'utilisation des mêmes matériaux de construction en extérieur, et n'en modifie pas l'emprise au sol. Si la création d'un sous-sol et l'ouverture de deux larges baies vitrées à cinq pans en rez-de-chaussée sur les pignons est et ouest sont prévues, alors que la construction ne comptait pas de sous-sol et comprenait seulement deux ouvertures sur le pignon est et aucune sur le pignon ouest, ces modifications n'affectent pas les caractéristiques principales du bâtiment.

16. Enfin, l'article N 1 du règlement du plan local d'urbanisme de Baden dispose que : " Occupations et utilisations du sol interdites / (...) En secteur Nds et Ndsg : / - toute construction, installation ou extension de construction existante dans et hors de la bande des 100 mètres par rapport à la limite haute du rivage (...) ". L'article N 2 du même règlement dispose quant à lui que : " Occupations et utilisations du sol soumises à conditions particulières / (...) 2.4.1. En secteur Nds, sous condition d'une bonne intégration à l'environnement tant paysagère qu'écologique : / 2.4.1.2. Pour les constructions situées dans la bande des 100 mètres par rapport au rivage : / l'aménagement, dans le volume existant, des constructions à usage d'habitation ainsi que l'aménagement (même si cela entraîne dans le volume existant un changement de destination) de bâtiments présentant un intérêt architectural, historique ou patrimonial et sous réserve d'une parfaite intégration et mise en valeur du bâtiment et des abords. ". Il résulte de ces dispositions que le plan local d'urbanisme de Baden ne s'oppose pas à la réalisation du projet d'aménagement dans le volume existant du bâtiment concerné, lequel présente un intérêt historique et patrimonial. Il suit de là que le projet litigieux constitue une restauration qui satisfait à l'ensemble des conditions énoncées à l'article L. 111-23 du code de l'urbanisme.

17. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " L'extension de l'urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. ". Aux termes de l'article L. 121-13 du même code : " L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés au 1° de l'article L. 321-2 du code de l'environnement est justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. (...) ". Aux termes de l'article L. 121-16 du même code : " En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage (...) ". Aux termes enfin de l'article L. 121-17 du même code dans sa rédaction applicable au présent litige : " L'interdiction prévue à l'article L. 121-16 ne s'applique pas aux constructions ou installations nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. (...) ". Il résulte de ces dispositions que, sous réserve des exceptions qu'elles prévoient, notamment pour les activités agricoles, dans les communes littorales, ne peuvent être autorisées, dans les zones situées en dehors des espaces déjà urbanisés, que les constructions réalisées en continuité soit avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement, et, s'agissant des espaces proches du rivage, à la condition qu'elles n'entraînent qu'une extension limitée de l'urbanisation spécialement justifiée et motivée et qu'elles soient situées en dehors de la bande littorale des cent mètres à compter de la limite haute du rivage. Ne peuvent déroger à l'interdiction de toute construction sur la bande littorale des cent mètres que les projets réalisés dans des espaces urbanisés, caractérisés par un nombre et une densité significatifs de constructions, à la condition qu'ils n'entraînent pas une densification significative de ces espaces. En outre, le respect du principe de continuité posé par l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme s'apprécie en resituant le terrain d'assiette du projet dans l'ensemble de son environnement, sans s'en tenir aux constructions situées sur les seules parcelles limitrophes de ce terrain.

18. La restauration du bâtiment existant implanté à la Pointe du Blair ne saurait être regardée comme une extension de l'urbanisation au sens des articles L. 121-8 et L. 121-13 du code de l'urbanisme ni comme l'édification d'une construction nouvelle dans la bande des cent mètres au sens de l'article L. 121-16 du même code et pour l'application de l'article L. 121-17 de ce code. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de ces dispositions sont écartés.

19. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies ou des plantations d'alignements. ". Aux termes de l'article L. 113-2 du même code : " Le classement interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements. (...) ". Pour refuser un permis de construire ou une autorisation de travaux sur le fondement de ces dispositions, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'apprécier si la construction ou les travaux projetés sont de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création de boisements.

20. Il est constant que les parcelles d'assiette du projet litigieux sont classées en espaces boisés par le règlement du plan local d'urbanisme de Baden. Il ressort des pièces du dossier, notamment des plans produits, que le projet de restauration qui n'étend pas l'emprise au sol de la construction existante et qui ne prévoit pas la création d'une nouvelle voie d'accès qui traverserait des boisements n'emporte pas un changement d'affectation ou un mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation et la protection des boisements au sens de l'article L. 113-2 du code de l'urbanisme. En conséquence, les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 113-1 et L. 113-2 du code de l'urbanisme sont écartés.

21. En septième lieu, aux termes de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. / Un décret fixe la liste des espaces et milieux à préserver, comportant notamment, en fonction de l'intérêt écologique qu'ils présentent, les dunes et les landes côtières, les plages et lidos, les forêts et zones boisées côtières, les îlots inhabités, les parties naturelles des estuaires, des rias ou abers et des caps, les marais, les vasières, les zones humides et milieux temporairement immergés ainsi que les zones de repos, de nidification et de gagnage de l'avifaune désignée par la directive 79/409 CEE du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages. ". Aux termes de l'article L. 121-24 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Des aménagements légers peuvent être implantés dans ces espaces et milieux lorsqu'ils sont nécessaires à leur gestion, à leur mise en valeur notamment économique ou, le cas échéant, à leur ouverture au public. / Un décret définit la nature et les modalités de réalisation de ces aménagements. (...) ".

22. D'une part, le projet litigieux portant sur la restauration d'une construction existante qui satisfait l'ensemble des conditions énoncées à l'article L. 111-23 du code de l'urbanisme ne porte pas atteinte à la préservation de la Pointe du Blair ni aux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral. Par suite, le maire de Baden a pu autoriser le projet sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme.

23. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que ce même projet ne porte pas sur une nouvelle construction ou implantation au sens des dispositions citées. Par suite, l'association requérante ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-24 du code de l'urbanisme.

25. En huitième lieu, pour les motifs énoncés au point 16, le projet de restauration litigieux ne méconnaît pas les dispositions citées au même point des articles N 1 et N 2 du règlement du plan local d'urbanisme de Baden.

26. En neuvième lieu, aux termes de l'article N 10 du règlement du plan local d'urbanisme de Baden applicable en secteur Nds : " La hauteur des constructions éventuellement autorisées dans la zone devra être limitée à ce qui est strictement nécessaire à leur utilité ". Dès lors que les dispositions de l'article L. 111-23 du code de l'urbanisme imposent de respecter les caractéristiques principales du bâtiment à restaurer, et que le projet s'y conforme, l'association Les Amis du Golfe du Morbihan n'est pas fondée à soutenir que la hauteur de la construction n'est pas strictement nécessaire à son utilité au sens des dispositions précitées. Ce moyen est par conséquent écarté.

27. En dixième lieu, aux termes de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet de construction porte sur une dépendance du domaine public, le dossier joint à la demande de permis de construire comporte une pièce exprimant l'accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public. ".

28. Il ressort des pièces du dossier que la direction départementale des territoires et de la mer du Morbihan a émis le 28 mars 2018 un avis défavorable au projet initial au motif qu'en fixant la limite de propriété à 6,50 mètres de la façade sud de l'édifice, le projet empiétait de 0,50 mètre sur le domaine public maritime. Il ressort toutefois des pièces du dossier, notamment des plans du dossier de demande de permis de construire dont M. et Mme D... précisent qu'ils ont été modifiés pour tenir compte de l'avis du 28 mars 2018, que la limite de propriété est désormais fixée à 6 mètres de sorte que le projet n'empiète pas sur le domaine public maritime. Il suit de là que le moyen tiré de la violation des dispositions précitées de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme doit être écarté.

29. En onzième lieu, dès lors que les dispositions de l'article L. 111-23 du code de l'urbanisme imposent de respecter les caractéristiques principales du bâtiment à restaurer, et que le projet s'y conforme, l'association Les Amis du Golfe du Morbihan n'est ni fondée à soutenir que les dispositions spécifiques aux toitures et façades et aux éléments de paysage énoncées à l'article N 11 du règlement du plan local d'urbanisme de Baden ne sont pas respectées ni que la restauration autorisée, par son architecture et son aspect extérieur, est de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt du site. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des articles R. 111-27 du code de l'urbanisme et N 11 du règlement du plan local d'urbanisme de Baden doivent être écartés.

30. En douzième lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment de la notice explicative du dossier de demande de permis de construire et de l'évaluation d'incidences Natura 2000, que le projet prévoit un système d'assainissement autonome avec la mise en place dans le sous-sol de la maison d'installations étanches de stockage des effluents, lesquelles sont périodiquement vidangés pour être évacués vers une filière de traitement conforme à la réglementation. Par suite, contrairement à ce que soutient l'association Les Amis du Golfe du Morbihan, le projet ne prévoit pas l'installation d'un système de collecte et de traitement des eaux résiduaires et elle ne peut utilement soutenir que le projet devait être précédé d'une étude environnementale en application des dispositions des articles L. 122-1 et R. 122-2 du code de l'environnement.

31. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en première instance par M. et Mme D..., que l'association Les Amis du Golfe du Morbihan n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 29 mai 2018 par lequel le maire de la commune de Baden a accordé à M. D... un permis de construire.

Sur les frais liés au litige :

32. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Baden, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à l'association Les Amis du Golfe du Morbihan des sommes qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En outre, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'association Les Amis du Golfe du Morbihan et, en tout état de cause, de la Fédération d'associations de protection de l'environnement du Golfe du Morbihan le versement à la commune de Baden et à M. et Mme D... des sommes qu'ils demandent au titre des mêmes frais.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1803609 du tribunal administratif de Rennes du 9 novembre 2020 est annulé.

Article 2 : L'intervention de la Fédération d'associations de protection de l'environnement du Golfe du Morbihan devant le tribunal administratif de Rennes est admise.

Article 3 : La demande présentée par l'association Les Amis du Golfe du Morbihan devant le tribunal administratif de Rennes est rejetée.

Article 4 : Les conclusions présentées par l'association Les Amis du Golfe du Morbihan au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Les conclusions présentées par la commune de Baden et M. et Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Les Amis du Golfe du Morbihan, à la commune de Baden, à M. et Mme D... et à la Fédération d'associations de protection de l'environnement du Golfe du Morbihan.

Délibéré après l'audience du 16 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Rivas, président de la formation de jugement,

- M. Frank, premier conseiller,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 janvier 2023.

La rapporteure,

C. A...

Le président de la formation

de jugement,

C. RIVAS Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT00096


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00096
Date de la décision : 10/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. RIVAS
Rapporteur ?: Mme Cécile ODY
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : SELARL LE ROY GOURVENNEC PRIEUR

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-01-10;21nt00096 ?
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