Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 2 décembre 2016 par laquelle le préfet du Val d'Oise a rejeté sa demande de naturalisation, ainsi que la décision du ministre de l'intérieur du 13 juillet 2018 rejetant son recours administratif.
Par un jugement no 1809849 du 13 juillet 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 septembre 2021 et le 7 juin 2022, Mme A... C..., représentée par Me Cabral, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 13 juillet 2018 ;
2°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 13 juillet 2018 ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande de naturalisation, dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la décision contestée du ministre de l'intérieur est entachée d'erreurs de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 décembre 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... C... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Bréchot a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 2 décembre 2016, le préfet du Val d'Oise a rejeté la demande de naturalisation présentée par Mme A... C.... Par une décision du 13 juillet 2018, le ministre de l'intérieur, saisi d'un recours hiérarchique sur le fondement de l'article 45 du décret du 30 décembre 1993, a confirmé ce rejet. Mme A... C... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 13 juillet 2018 du ministre de l'intérieur.
2. Aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger ". Aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions ". En vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite. Dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant.
3. Pour rejeter la demande de naturalisation de Mme A... C..., le ministre de l'intérieur s'est fondé sur le motif tiré de ce que l'environnement dans lequel elle évolue " ne lui parait pas compatible avec la faveur que constitue la nationalité française " dès lors que l'intéressée est connue des services spécialisés de sécurité en qualité de trésorière de l'association " Organisation des Moudjahidines du Peuple d'Iran " ainsi que " pour son travail de lobbying en faveur de cette association ", et qu'elle est en relation avec plusieurs de ses membres, dont son compagnon.
4. Il ressort des pièces du dossier, notamment des énonciations d'une note du 18 juin 2018 de la direction générale de la sécurité intérieur (DGSI) du ministère de l'intérieur, produite à l'instance, que Mme A... C... est connue des services de renseignement pour son activité de trésorière de l'association " des familles de Moudjahidines du Peuple d'Iran en Irak " et pour son travail de lobbying en faveur de l'Organisation des moudjahidines du peuple d'Iran (OMPI), organisation d'origine étrangère connue pour ses actions radicales. La note précise que, durant son entretien le 13 juillet 2016, l'intéressée a tenté de minimiser ses liens avec cette organisation, alors qu'il a été relevé que la secrétaire générale de celle-ci était domiciliée depuis plusieurs années à Cergy-Pontoise (Val d'Oise) dans un logement lui appartenant et que son compagnon, M. F..., est également connu comme membre de l'organisation. Si la requérante fait valoir qu'elle a exercé, durant huit mois entre 2003 et 2004, des fonctions de trésorière, non pas au sein de l'Organisation des moudjahidines du peuple d'Iran, mais auprès de l'association des familles des Moudjahidines du peuple d'Iran en Irak, cette seule erreur matérielle est sans incidence sur la légalité du motif opposé à sa demande de naturalisation dès lors qu'il n'est pas établi que cette association, ainsi que l'indique son objet social, serait sans lien avec l'Organisation des moudjahidines du peuple d'Iran. Par ailleurs, si Mme A... C... soutient qu'elle ne peut avoir hébergé Mme E..., élue en 2017 secrétaire générale de l'Organisation des moudjahidines du peuple d'Iran, dans l'appartement qu'elle possède à Cergy-Pontoise, cet appartement ayant été mis à la disposition de son père, elle ne justifie pas suffisamment de la réalité de cette allégation par la production d'une facture de 2013 de souscription d'un abonnement à Internet au nom de son père, d'une attestation de vente de son appartement en 2020 et d'une attestation d'une voisine de cet appartement. Enfin, en se bornant à soutenir que M. F..., avec lequel elle ne conteste pas sérieusement entretenir une relation amoureuse, ne saurait être membre de l'Organisation des moudjahidines du peuple d'Iran aux motifs que les membres de cette organisation " ne peuvent ni travailler, ni entretenir des relations amoureuses ", mais " exclusivement se dévouer à la cause de l'entité ", et à produire une attestation de M. F... aux termes de laquelle celui-ci n'a jamais été en contact avec des membres de cette organisation depuis 2014, Mme A... C... ne remet pas sérieusement en cause les énonciations de faits figurant dans la note de la direction générale de la sécurité intérieure qui font état de tels liens. Dans ces conditions, et alors même que l'Organisation des moudjahidines du peuple d'Iran ne figure plus sur la liste de l'Union européenne des entités faisant l'objet de mesures restrictives dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, le ministre de l'intérieur n'a entaché sa décision ni d'erreurs de fait ni d'une erreur manifeste d'appréciation en se fondant, pour rejeter la demande de naturalisation présentée par Mme A... C..., sur le motif énoncé au point 3.
5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Dès lors, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Buffet, présidente de chambre,
- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,
- M. Bréchot, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 décembre 2022.
Le rapporteur,
F.-X. BréchotLa présidente,
C. Buffet
La greffière,
A. Lemée
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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No 21NT02552