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23/12/2022 | FRANCE | N°21NT00393

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 23 décembre 2022, 21NT00393


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'EURL MB Entreprise a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er juillet 2012 au 9 mars 2016, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 juin 2013, 2014 et 2015 ainsi que la décharge des amendes prononcées sur le fondement de l'article 1737 du code général des impôts au titre des exerci

ces clos les 30 juin 2013, 2014 et 2015 et au titre de la période du 1er juillet...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'EURL MB Entreprise a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er juillet 2012 au 9 mars 2016, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 juin 2013, 2014 et 2015 ainsi que la décharge des amendes prononcées sur le fondement de l'article 1737 du code général des impôts au titre des exercices clos les 30 juin 2013, 2014 et 2015 et au titre de la période du 1er juillet 2015 au 9 mars 2016.

Par un jugement n° 1707845 du 11 décembre 2020, le tribunal administratif de Nantes a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de l'EURL MB Entreprise tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée à concurrence de 590 euros pour la période du 1er juillet 2012 au 30 juin 2013 et de 14 186 euros pour la période du 1er juillet 2013 au 30 juin 2014, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés à hauteur de 18 439 euros au titre de l'exercice clos le 30 juin 2014 et des pénalités à hauteur de 40 651 euros au titre de ce même exercice, et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 11 février et 12 novembre 2021 et les 28 janvier, 1er juin et 1er juillet 2022 l'EURL MB Entreprise, représentée par Me Poirrier-Jouan, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration s'est fondée sur des documents bancaires obtenus auprès de tiers pour motiver les rectifications, sans l'informer ou sans l'informer suffisamment de l'origine et de la teneur de ces renseignements ou documents ; elle ne lui a pas communiqué les données résultant de sa consultation de la base de données de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, les résultats de ses vérifications portant sur les déclarations préalables à l'embauche et celles issues du registre du commerce et des sociétés ; compte tenu de ces manquements, les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures ont été méconnues ;

- le service a admis, au titre de l'impôt sur les sociétés, la déduction de charges correspondant à des factures qu'il a remises en cause au titre de la taxe sur la valeur ajoutée ; c'est à tort qu'il a remis en cause la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée de factures émises par les sociétés IDB, IDFOS et Elion ;

- elle conteste les rectifications portant sur deux factures de la société IDFOS des 31 décembre 2014 et 31 janvier 2015 respectivement de 6 496,72 euros HT et 18 965,05 euros hors taxes sur les chantiers de Saint-Jean d'Illac et Saint-Père en Retz ;

- l'application de l'amende de 50% prévue au 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts n'est pas justifiée ;

- l'article 1737 du code général des impôts n'est pas compatible avec l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par des mémoires en défense enregistrés les 5 août 2021 et 19 avril, 21 juin et 18 juillet 2022 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut

1°) au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé le 1er juillet 2021 d'un montant de 48 820 euros en matière d'impôt sur les sociétés au titre de la période du 1er juillet 2012 au 30 juin 2013 et de 48 657 euros en matière d'amende prévue à l'article 1737 du code général des impôts au titre de la même période ainsi qu'à hauteur du dégrèvement prononcé le 21 mars 2022 d'un montant de 58 773 euros en matière de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er juillet 2012 au 9 mars 2016 et d'un montant de 41 188 euros en matière d'impôt sur les sociétés au titre de la période du 1er juillet 2012 au 30 juin 2015 ;

2°) au rejet du surplus de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par l'EURL MB Entreprise ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'EURL MB Entreprise, qui exerce une activité de maçonnerie, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité en matière d'impôt sur les sociétés sur les exercices clos les 30 juin 2013, 2014 et 2015 et en matière de taxe sur la valeur ajoutée sur la période du 1er juillet 2012 au 9 mars 2016. Elle a été assujettie, à la suite d'une proposition de rectification du 24 octobre 2016, à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour l'ensemble de la période vérifiée, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices contrôlés et à des majorations pour manquement délibéré et manœuvres frauduleuses prévues à l'article 1729 du code général des impôts, et s'est vue également infliger l'amende prévue à l'article 1737 du même code. Elle a demandé au tribunal administratif de Nantes la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés ainsi que de l'amende appliquée. Par un jugement du 11 décembre 2020, le tribunal a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée à concurrence de 590 euros pour la période du 1er juillet 2012 au 30 juin 2013 et de 14 186 euros pour la période du 1er juillet 2013 au 30 juin 2014, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés à hauteur de 18 439 euros au titre de l'exercice clos le 30 juin 2014 et des pénalités à hauteur de 40 651 euros au titre de ce même exercice, et a rejeté le surplus de sa demande. L'EURL MB Entreprise relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ce surplus.

Sur l'étendue du litige :

2. L'administration a prononcé un dégrèvement, en droits et pénalités, par une décision du 1er juillet 2021, postérieure à l'introduction de la requête, d'un montant de 48 820 euros en matière d'impôt sur les sociétés au titre de la période du 1er juillet 2012 au 30 juin 2013 et de 48 657 euros en matière d'amende prévue à l'article 1737 du code général des impôts au titre de la même période. Par une décision le 21 mars 2022, elle a prononcé un dégrèvement en droits et pénalités de 58 773 euros en matière de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er juillet 2012 au 9 mars 2016 et de 41 188 euros en matière d'impôt sur les sociétés au titre de la période du 1er juillet 2012 au 30 juin 2015. Les conclusions de la requête de l'EURL MB Entreprise sont, dans ces mesures, devenues sans objet. Il n'y a, par suite, pas lieu d'y statuer.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent.

4. En premier lieu, contrairement à ce que soutient l'EURL MB Entreprise en ce qui concerne les crédits portés au compte courant d'associé, l'administration n'a pas demandé des renseignements ou documents bancaires auprès de tiers mais s'est bornée à relever, au cours de la vérification de comptabilité, les sommes créditées sur le compte courant de l'unique associé, soit une somme globale de 167 439 euros, comprenant notamment trois apports de 15 000 euros inscrits sous le libellé " regul legendre ", 20 000 euros pour l'achat d'un véhicule utilitaire et 13 940 euros pour l'acquisition d'une Mercedes Sprinter. Elle a également constaté qu'il n'existait aucune contrepartie ni mouvement financier enregistré et aucun justificatif de règlement de ces apports. Dans ces conditions, l'EURL ne peut pas se prévaloir de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales.

5. En deuxième lieu, l'administration a interrogé le 19 juillet 2016 la Banque Postale sur trois virements émis par l'EURL MB Entreprise, qui soutient que le service ne l'a pas informée de l'origine et de la teneur des renseignements ou documents obtenus. Le premier virement de

2 000 euros émis par l'EURL MB Entreprise au profit non de la société MCD BAT mais de la société Pro Façade a été abandonné à l'occasion du dégrèvement prononcé le 22 février 2018. Les deux autres virements de 12 070 euros et 11 690 euros au profit de la société MCD BAT ont été regardés comme réguliers et n'ont pas fait l'objet de rectification. Dès lors, le moyen est sans portée utile.

6. En troisième lieu, il n'est pas établi que le rappel de taxe sur la valeur ajoutée à hauteur de 24 081 euros, correspondant au montant de la taxe déductible sur les factures de sous-traitance de la société MCD BAT, résulte de l'exercice d'un droit de communication par le service auprès d'un organisme bancaire et non d'une simple constatation de la comptabilité de l'EURL MB Entreprise au cours de la vérification de comptabilité et de l'absence de justifications. En effet, l'EURL avait soldé partiellement le compte sous-traitant par plusieurs écritures d'opérations diverses en comptabilisant des règlements de fournisseurs de sous-traitance par le crédit du compte courant d'associé pour un montant global de 121 299,09 euros. D'ailleurs, il n'est pas sérieusement contesté que l'unique associé a déclaré avoir payé sur ses deniers personnels les factures de la société MCD BAT. Dès lors, l'EURL MB Entreprise n'est pas fondée à soutenir que l'administration, pour motiver les rectifications à hauteur de la somme de 24 081 euros, a utilisé des renseignements obtenus auprès de tiers. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article

L. 76 B du livre des procédures fiscales doit donc être écarté.

7. En quatrième lieu, l'administration ayant abandonné les rectifications relatives à des factures de sous-traitance des sociétés Gunes, CBA et Prestige Bat par un dégrèvement rappelé au point 2, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales est devenu sans porté utile en ce qui concerne ce chef de redressement.

8. En cinquième lieu, l'EURL invoque le caractère insuffisant des informations qui lui ont été données par l'administration pour remettre en cause la déduction de taxe sur la valeur ajoutée afférente à des charges de fourniture de personnel intérimaire auprès des entreprises IDB, IDFOS et Elion, au titre de la période courant du 1er juillet 2013 au 9 mars 2016, ainsi que les charges déclarées à raison de ces prestations au titre de l'impôt sur les sociétés pour les exercices clos les 30 juin 2014 et 2015.

9. Il résulte de l'instruction que l'administration s'est essentiellement fondée sur la comptabilité de la requérante et les documents que celle-ci a elle-même produits, notamment les factures, les relevés d'identité bancaire, les ordres de virement bancaire et les copies de chèques émis auprès d'entreprises tierces, et qu'elle a indiqué de manière suffisamment précise, dans la proposition de rectification, les éléments provenant de tiers qu'elle a pris en compte.

Les renseignements obtenus auprès d'autres services de l'administration fiscale, ou après consultation du fichier national des comptes bancaires et assimilés, dont elle assure la gestion, constituent des données internes à l'administration, qui n'ont pas été obtenues auprès de tiers. Enfin, l'administration fiscale a communiqué à la requérante les numéros des comptes bancaires figurant sur les relevés d'identité bancaires produits pour les entreprises IDB, IDFOS et Elion, pour lesquels elle a constaté qu'ils ne correspondaient pas à ces entreprises, ainsi que le nom des sociétés qui en sont en réalité titulaires.

10. En sixième lieu, l'EURL MB Entreprise soutient que l'administration, qui a consulté la base de données de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), ne l'a pas informée des résultats de ses vérifications concernant les déclarations préalables à l'embauche (DPAE) de salariés de la société Elion et de la société BKMB. Cependant, si l'administration admet s'être fondée sur deux déclarations préalables à l'embauche, obtenues auprès de l'URSSAF et qui n'ont pas été communiquées à la requérante, elle a accordé, par une décision du 22 février 2018, un dégrèvement pour les impositions correspondantes. En outre, la consultation du fichier des déclarations préalables à l'embauche étant restée infructueuse pour la plupart des intérimaires dont les noms figuraient sur les factures des entreprises IDB, IDFOS et Elion, l'administration n'était pas tenue de communiquer à la société requérante un document justifiant du caractère infructueux de cette recherche.

11. En septième lieu, les éléments communiqués par la troisième brigade de vérification de la direction départementale des finances publiques de la Seine-Saint-Denis relevaient de simples constats à partir de la consultation de fichiers internes ou accessibles au public, relatifs à l'absence de locaux détenus par les entreprises en cause, dont les adresses constituaient de simples adresses de domiciliation, et à l'absence de compte bancaire et de déclarations fiscales réalisées par celles-ci. Dès lors, le moyen tiré du défaut d'information et de communication des données fournies par une brigade de la direction départementale des finances publiques de la Seine-Saint-Denis, qui ont été transmises à celle de la Mayenne, doit être écarté. Par suite, l'EURL MB Entreprise n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait dû avoir accès à l'intégralité du dossier qui était en possession du service vérificateur.

12. Enfin, les données issues du registre du commerce et des sociétés sont librement accessibles au public. Elles n'avaient pas, dès lors, à être communiquées à la société

MB Entreprise.

13. Il résulte de tout ce qui vient d'être dit que le moyen tenant à la méconnaissance des garanties prévues à l'article L.76B du livre des procédures fiscales ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires :

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

14. En vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services. Dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance. Si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle, il appartient alors au contribuable d'apporter toutes justifications utiles sur la réalité de cette opération.

15. L'administration a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à des factures émises par les sociétés IDB, IDFOS et Elion pour la période du 1er juillet 2013 au 9 mars 2016. Pour écarter ces factures, elle a relevé l'absence de moyens humains de ces sociétés, qui étaient censées mettre du personnel à la disposition de l'EURL, et notamment l'absence de déclarations préalables à l'embauche et de justification du volume horaire des salariés, des discordances entre les dates d'emploi déclarées et la période de réalisation des prestations, l'absence de contrat de mise à disposition conclu avec les entreprises de travail temporaire et de feuilles d'heures permettant de retracer l'activité des intérimaires et le fait que les numéros de compte des sociétés d'intérim apparaissant sur leurs relevés d'identité bancaire correspondent aux comptes bancaires d'entreprises tierces. Les éléments apportés par l'administration sont ainsi suffisants pour estimer que les factures en cause ne correspondaient pas à des opérations effectivement réalisées par ces entreprises. De son côté, l'EURL MB Entreprise n'apporte aucun élément permettant de remettre en cause les constats ainsi effectués par l'administration ou de justifier de la réalité des prestations réalisées par les sociétés IDB, IDFOS et Elion. La seule circonstance que le service a admis, au titre de l'impôt sur les sociétés et au nom du réalisme fiscal, la déduction d'une partie des charges correspondant à des factures qu'il a remises en cause au titre de la taxe sur la valeur ajoutée est sans incidence. Par suite, l'administration établit que les factures en litige étaient des factures de complaisance et c'est à bon droit qu'elle a remis en cause la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée portée sur les factures émises par les sociétés IDB, IDFOS et Elion.

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

16. L'EURL MB Entreprise n'est pas fondée à contester les rectifications portant sur deux factures de la société IDFOS des 31 décembre 2014 et 31 janvier 2015 respectivement de

6 496,72 euros hors taxes et 18 965,05 euros hors taxes sur les chantiers de Saint-Jean d'Illac et Saint-Père en Retz, soit relativement à l'exercice clos le 30 juin 2015, dans la mesure où le litige ne porte plus sur cet exercice à la suite des dégrèvements prononcés.

Sur l'amende de 50 % prévue à l'article 1737 du code général des impôts :

17. Aux termes de l'article 1737 du code général des impôts : " I.- Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % du montant : / 1. Des sommes versées ou reçues, le fait de travestir ou dissimuler l'identité ou l'adresse de ses fournisseurs ou de ses clients (...) ou de sciemment accepter l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom ; / (...) ".

18. Il résulte des dispositions du 1 du I de l'article 1737 que l'administration peut mettre l'amende ainsi prévue à la charge de la personne qui a délivré la facture ou à la charge de la personne destinataire de la facture si elle établit que la personne concernée a, soit travesti ou dissimulé l'identité, l'adresse ou les éléments d'identification de son client ou de son fournisseur, soit accepté l'utilisation, en toute connaissance de cause, d'une identité fictive ou d'un prête-nom.

En déterminant le montant de cette amende en proportion du montant des sommes versées ou reçues au titre d'une facture irrégulière, les dispositions du 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts ont retenu une assiette en rapport avec l'infraction commise tenant au fait, pour l'émetteur ou le destinataire d'une facture, de travestir ou dissimuler l'identité ou l'adresse de ses fournisseurs ou de ses clients, certains éléments d'identification obligatoires ou de sciemment accepter l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom. Par ailleurs, en appliquant au montant des sommes versées ou reçues, un taux de 50 %, les dispositions contestées ont retenu un montant d'amende qui n'est pas disproportionné par rapport à la gravité des manquements que ces dispositions répriment, dès lors que ces manquements, réalisés par des professionnels dans le cadre de leur activité, font obstacle au contrôle des comptabilités tant du vendeur que de l'acquéreur d'un produit ou d'une prestation de service ainsi qu'au recouvrement des impositions dont ils sont le cas échéant redevables. Par suite, l'EURL MB Entreprise n'est pas fondée à soutenir que les dispositions du 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts portent une atteinte disproportionnée, au regard de l'objectif poursuivi, au droit au respect des biens garanti par les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

19. Il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification relative à l'application des amendes en litige d'un montant de 76 630 euros au titre de la période du 1er juillet 2014 au 30 juin 2015 et de 33 945 euros au titre de la période du 1er juillet 2015 au 9 mars 2016, que l'administration, après avoir relevé que l'EURL MB Entreprise n'établissait pas la réalité des prestations de mise à disposition de personnel effectuées par les sociétés de travail temporaire IDB, IDFOS et Elion et de celles de sous-traitance fournies par les sociétés Gunes, CBA et Prestige BAT, dans la mesure où ces entreprises ne justifiaient pas d'une activité réelle faute, en particulier, de disposer de locaux ou de comptes bancaires et d'avoir employé du personnel d'une manière effective dans le cadre des missions qui leur étaient confiées ou bénéficié des paiements déclarés par la société requérante, a estimé que ces circonstances établissaient que les factures émises par ces entreprises présentaient un caractère de complaisance et, pour ce motif, a appliqué l'amende prévue par les dispositions précitées du 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts. Ni ces circonstances de fait, ni le fait que les factures émises ne correspondent pas à des prestations réellement exécutées, ni celui qu'elles ont été réglées par des tiers ne sont sérieusement contestées par l'EURL MB Entreprise. Ainsi, celle-ci n'est pas fondée à soutenir que l'administration n'aurait pas dû les qualifier de factures de complaisance, que les sommes figurant sur les factures auraient dû être admises en déduction de son résultat imposable et que, dans la mesure où l'administration n'a pas regardé les factures en cause comme fictives pour l'application de l'amende prévue par le I de l'article 1737 du code général des impôts, cette amende aurait dû être mise à la charge des sociétés émettrices des factures en application du 2 du I de cet article. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration fiscale a mis à sa charge l'amende de 50 % prévue par le 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts.

20. Il résulte de ce qui précède que l'EURL MB Entreprise n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de l'EURL MB Entreprise à hauteur de 48 820 euros en matière d'impôt sur les sociétés au titre de la période du 1er juillet 2012 au 30 juin 2013, de 48 657 euros en matière d'amende prévue à l'article 1737 du code général des impôts pour la même période, de 58 773 euros en matière de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er juillet 2012 au 9 mars 2016 et de 41 188 euros en matière d'impôt sur les sociétés au titre de la période du 1er juillet 2012 au 30 juin 2015.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de l'EURL MB Entreprise est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL MB Entreprise et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- Mme Picquet, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 décembre 2022.

Le rapporteur

J.E. A...La présidente

I. Perrot

La greffière

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT00393


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00393
Date de la décision : 23/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : SCP BONDIGUEL et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-12-23;21nt00393 ?
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