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23/12/2022 | FRANCE | N°20NT03798

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 23 décembre 2022, 20NT03798


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2014.

Par un jugement n° 1708480 du 9 octobre 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 7 décembre 2020, 17 mai 2022 et 10 novembre 20

22, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, M. et Mme A..., représentés par Me Guinot puis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2014.

Par un jugement n° 1708480 du 9 octobre 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 7 décembre 2020, 17 mai 2022 et 10 novembre 2022, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, M. et Mme A..., représentés par Me Guinot puis par Me Le Camus et Me Vazeille, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la souscription au capital et les avances en compte courant dans la société en nom collectif (SNC) Mayinvest Hôtel, l'acquisition de créances bancaires et les avances en compte courant au groupe XCO Développement, les avances en compte courant à la société par actions simplifiée (SAS) Latitude 46 ainsi que la souscription au capital et les avances au profit de la société civile de construction et de vente (SCCV) Résidence Villa Broussais concernent des activités économiques et sont éligibles au dispositif de report d'imposition prévu à l'article

150-0 B ter du code général des impôts ;

- c'est à tort que l'administration a réintégré les sommes correspondantes dans leurs revenus imposables au titre de l'année 2014.

Par des mémoires en défense enregistrés les 16 juin 2021 et 26 septembre 2022 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public,

- et les observations de Me Le Camus, représentant M. et Mme A....

Une note en délibéré a été produite par M. et Mme A... le 8 décembre 2022.

Considérant ce qui suit :

1. Le 25 novembre 2012, M. et Mme A... ont constitué la société en nom collectif (SNC) Francinvest et apporté à celle-ci 1 175 actions qu'ils détenaient dans la société Allodis. En contrepartie, ils ont reçu le même nombre de parts de la SNC Francinvest, réparties en 587 parts pour Mme A... et 588 parts pour M. A... et représentant une valeur totale de 9 000 500 euros. Le 27 décembre 2012, la SNC Francinvest a cédé à la société Socamaine les 1 175 actions pour un montant de 8 999 836 euros. M. et Mme A... ont déclaré une plus-value de cession au titre de l'année 2012 à hauteur de 8 991 828 euros et placé cette plus-value sous le régime du report d'imposition prévu à l'article 150-0 B ter du code général des impôts dans la mesure où ils s'engageaient, par la SNC Francinvest, à réinvestir dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la date de la cession, soit jusqu'au 27 décembre 2014, au moins de 50 % du produit de la cession dans une activité économique. L'administration, qui a effectué un contrôle sur pièces de leur situation fiscale portant sur les années 2012 à 2014, a estimé, par une proposition de rectification du 27 juin 2016, que M. et Mme A... n'avaient réinvesti que 9,29 % de la plus-value dans des activités économiques dans le délai de deux ans et a en conséquence réintégré la somme de 8 991 828 euros dans leurs revenus imposables et assujetti cette somme à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2014 au taux forfaitaire de 24% et aux prélèvements sociaux. Par un jugement du 9 octobre 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de M. et Mme A... tendant à la décharge, en droits, intérêts de retard et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 qui en ont résulté. M. et Mme A... relèvent appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 150-0 B ter dans sa version applicable au litige : " I. - L'imposition de la plus-value réalisée, directement ou par personne interposée, dans le cadre d'un apport de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres ou de droits s'y rapportant tels que définis à l'article 150-0 A à une société soumise à l'impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent est reportée si les conditions prévues au III du présent article sont remplies. Le contribuable mentionne le montant de la plus-value dans la déclaration prévue à l'article 170. (...) / Il est mis fin au report d'imposition à l'occasion : (...) / 2° De la cession à titre onéreux, du rachat, du remboursement ou de l'annulation des titres apportés, si cet événement intervient dans un délai, décompté de date à date, de trois ans à compter de l'apport des titres. Toutefois, il n'est pas mis fin au report d'imposition lorsque la société bénéficiaire de l'apport cède les titres dans un délai de trois ans à compter de la date de l'apport et prend l'engagement d'investir le produit de leur cession, dans un délai de deux ans à compter de la date de la cession et à hauteur d'au moins 50 % du montant de ce produit, dans le financement d'une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière, à l'exception de la gestion d'un patrimoine mobilier ou immobilier, dans l'acquisition d'une fraction du capital d'une société exerçant une telle activité, sous la même exception, et qui a pour effet de lui en conférer le contrôle au sens du 2° du III du présent article, ou dans la souscription en numéraire au capital initial ou à l'augmentation de capital d'une ou plusieurs sociétés répondant aux conditions prévues au b du 3° du II de l'article 150-0 D bis. Le non-respect de la condition de réinvestissement met fin au report d'imposition au titre de l'année au cours de laquelle le délai de deux ans expire ; (...). ".

3. La SNC Francinvest a réinvesti une somme globale de 4 709 178 euros soit 52,37 % de 8 991 828 euros, répartie, d'une part, en prises de participations sous forme de souscription au capital de la SNC Mayinvest Hôtel ou à celui de la société civile de construction-vente (SCCV) Résidence Villa Broussais à hauteur respectivement de 49 500 euros et de 250 euros, d'acquisition d'actions de la société par actions simplifiée (SAS) XCO Développement à hauteur de

62 723 euros et de souscription à l'augmentation du capital de cette dernière société pour

723 000 euros, soit un total de 835 673 euros ou 9,29% du produit de la cession. Elle a, par ailleurs, consenti des avances en comptes courants à la SNC Mayinvest Hôtel, la SAS XCO Développement, la SAS Latitude 46 et la SCCV Résidence Villa Broussais pour respectivement 2 030 305 euros, 1 093 200 euros, 250 000 euros et 500 000 euros. L'administration a estimé que l'ensemble de ces apports en compte courant d'associé n'étaient pas des investissements éligibles au dispositif prévu à l'article 150-0 B ter du code général des impôts au motif que ces apports n'avaient pas été réinvestis dans des activités économiques.

4. En premier lieu, s'agissant des avances en compte courant d'associé à la SNC Mayinvest, celle-ci a été constituée par la SNC Francinvest dans le but d'acquérir un hôtel à Mayenne. Par actes notariés du 7 mars 2014, la SNC Mayinvest a acquis le fonds de commerce pour 280 000 euros et les murs de l'hôtel pour 1 020 000 euros. Les frais d'acquisition du fonds de commerce d'un montant de 23 463 euros et ceux des murs d'un montant de 74 462 euros ont été payés par la SNC Mayinvest. Les frais d'architecte d'un montant de 66 668,80 euros ont été payés par la SNC Francinvest et refacturés à la SNC Mayinvest. Des travaux de rénovation d'un montant global de 473 250,37 euros ont été engagés par la SNC Mayinvest mais également payés par la SNC Francinvest. Compte tenu de ces éléments, l'activité de l'hôtel, avec 39 chambres, restaurants, restaurants et salles pour réceptions ou séminaires, présentait une nature économique. Les avances en compte courant d'un montant de 2 030 305,00 euros effectuées par la SNC Francinvest pour financer ces dépenses, dont le coût total était de 1 937 844,17 euros, présentaient par suite le caractère d'un réinvestissement, qui était éligible au dispositif prévu à l'article 150-0 B ter du code général des impôts.

5. En revanche et en second lieu, s'agissant des apports en compte courant d'associés à la SAS XCO Développement, il résulte de l'instruction que, par acte de cession de créances du 23 décembre 2013, la société anonyme (SA) BNP Paribas a cédé à la SNC Francinvest une créance sur la SAS XCO Développement d'un montant de 550 000 euros, et que la SNC Francinvest a également racheté les obligations de la SA BNP Paribas et le compte courant de celle-ci au sein de la SAS XCO Développement pour respectivement 108 375,28 euros et 34 824,72 euros, soit un total de 693 200 euros. Ces opérations, qui relèvent de la gestion patrimoniale, ne concernaient pas une activité économique et ne pouvaient, par suite, être éligibles au dispositif prévu à l'article 150-0 B ter du code général des impôts. Par ailleurs, les apports en compte courant à la SNC XCO Développement ont été effectués par la SNC Francinvest pour que la SNC XCO Développement puisse répondre aux besoins de trésorerie de sa filiale, la SAS Latitude 46, en particulier pour payer des salaires et des fournisseurs pour un total de 400 000 euros. Ces apports ne concernaient pas davantage une activité économique au sens des dispositions précitées de l'article 150-0 B ter du code général des impôts et ainsi n'étaient pas éligibles au dispositif de report d'imposition.

6. En troisième lieu, s'agissant des apports en compte courant directement effectués par la SNC Francinvest au profit de la SAS Latitude 46 pour répondre à des besoins de trésorerie afin de payer notamment des salaires et des fournisseurs, soit un montant global de 250 000 euros, ils ne sont pas, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, éligibles au dispositif prévu à l'article 150-0 B ter du code général des impôts.

7. En quatrième lieu, s'agissant des apports en compte courant par la SNC Francinvest à la SCCV Résidence Villa Broussais, le versement de 500 000 euros a été effectué le 5 août 2013 à cette SCCV, créée le 23 juillet 2013, pour financer intégralement un projet de construction immobilière comprenant cinq maisons de 100 m2 chacune à Vitry-sur-Seine. A la date du versement et pas davantage à la date d'expiration du délai de deux ans prévu à l'article 150-0-B ter du code général des impôts, il n'y avait aucun élément suffisamment probant et avancé pour démontrer l'activité économique de la SCCV. En effet, si un permis de construire a été tardivement délivré le 5 mars 2020 sur une demande présentée en 2019, le projet n'a pas été réalisé compte tenu d'une préemption partielle appliquée en faveur d'un projet du " Grand Paris ".

8. Il suit de là que le taux de réinvestissement éligible au dispositif prévu à l'article

150-0 B ter du code général des impôts s'élève en l'espèce à 31,86%, soit un taux inférieur au seuil de 50 % prévu par ce dispositif. Dès lors, la réintégration de la somme de 8 991 828 euros dans les revenus imposables M. et Mme A... au titre de l'année 2014 était justifiée.

9. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... (Mme A... est décédée en cours d'instance) et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, présidente de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur

- M. Penhoat, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 décembre 2022.

Le rapporteur

J.E. B...La présidente

I. Perrot

La greffière

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°20NT03798


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : ARTHEMIS CONSEIL

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Date de la décision : 23/12/2022
Date de l'import : 01/01/2023

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 20NT03798
Numéro NOR : CETATEXT000046836265 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-12-23;20nt03798 ?
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