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25/11/2022 | FRANCE | N°20NT01568

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 25 novembre 2022, 20NT01568


Vu la procédure suivante :

Par un jugement du 31 mars 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de l'association Bien vivre autour de la Carterie et autres tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 octobre 2018 par lequel le maire du Loroux-Bottereau a délivré à la société Francelot un permis d'aménager portant sur un lotissement de 50 lots et 5 îlots sur un terrain situé au Hameau de la Carterie.

Par un arrêt avant dire droit du 7 janvier 2022, la cour, faisant application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, a sursis à statuer sur la

requête de l'association Bien vivre autour de la Carterie et autres jusqu...

Vu la procédure suivante :

Par un jugement du 31 mars 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de l'association Bien vivre autour de la Carterie et autres tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 octobre 2018 par lequel le maire du Loroux-Bottereau a délivré à la société Francelot un permis d'aménager portant sur un lotissement de 50 lots et 5 îlots sur un terrain situé au Hameau de la Carterie.

Par un arrêt avant dire droit du 7 janvier 2022, la cour, faisant application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, a sursis à statuer sur la requête de l'association Bien vivre autour de la Carterie et autres jusqu'à l'expiration du délai de six mois imparti à la commune du Loroux-Bottereau et à la société Francelot pour produire devant la cour un permis d'aménager régularisant le vice tiré de la méconnaissance de l'article R. 441-8-3 du code de l'urbanisme.

Les 20 juin et 21 juin 2022, la commune du Loroux-Bottereau, représentée par Me B... et la société Francelot, représentée par Me A..., ont communiqué le permis d'aménager modificatif de régularisation délivré le 9 juin 2022 par le maire du Loroux-Bottereau à la société Francelot.

Par des mémoires, enregistrés les 8 août et 9 septembre 2022, l'association Bien vivre autour de la Carterie et autres, représentés par Me Diversay, concluent aux mêmes fins que leur requête ainsi qu'à l'annulation du permis de régularisation délivré par le maire du Loroux-Bottereau à la société Francelot le 9 juin 2022.

Ils soutiennent que :

- l'attestation fournie ne répond pas aux exigences de l'article R. 441-8-3 du code de l'urbanisme ;

- l'attestation produite ne permet pas d'établir l'absence de tout risque pour la santé humaine du fait de la présence de métaux lourds sur le terrain d'assiette de l'ancienne déchetterie et, dès lors, l'absence de méconnaissance par les décisions contestées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.

Par des mémoires, enregistrés les 17 août 2022 et 19 août 2022, la société Francelot, représentée par Mme A..., conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que le vice affectant la légalité du permis initial d'aménager retenu par l'arrêt du 7 janvier 2022 a été régularisé.

Par un mémoire, enregistré le 22 août 2022, la commune du Loroux-Bottereau, représentée par Mme B..., conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que le vice affectant la légalité du permis initial d'aménager, retenu par l'arrêt du 7 janvier 2022, a été régularisé.

Une note en délibéré présentée pour la société Francelot a été enregistrée le 18 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de Mme Bougrin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Diversay, représentant les requérants, et de Me Couetoux du Tertre, substituant Mme B..., représentant la commune du Loroux-Bottereau.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire (...) estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. ".

2. Par un arrêt avant dire droit du 7 janvier 2022, la cour a jugé que le permis d'aménager du 25 octobre 2018 était entaché d'illégalité en tant que le dossier de demande de permis n'était pas complet en ce qu'il ne comportait pas l'attestation d'un bureau d'études relative aux mesures envisagées dans la conception même du projet pour la gestion de la pollution sur un terrain ayant accueilli une installation classée, attestation exigée par les dispositions de l'article R. 441-8-3 du code de l'urbanisme. Elle a également jugé qu'en l'absence de cette attestation, elle n'était pas en mesure d'apprécier le respect, par la décision contestée, des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et a réservé la réponse de la cour au moyen tiré de la méconnaissance de cet article. Faisant application des dispositions précitées de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, la cour a sursis à statuer sur la requête de l'association Bien vivre autour de la Carterie et autres jusqu'à l'expiration du délai de six mois imparti à la commune du Loroux-Bottereau et à la société Francelot pour justifier de l'intervention d'une mesure de régularisation.

3. Le maire de la commune du Loroux-Bottereau, se prononçant sur la demande de permis déposée en mairie le 27 avril 2022, a délivré à la société Francelot, le 9 juin 2022, un permis d'aménager en vue de la régularisation du vice relevé dans cet arrêt avant dire droit, que la commune et la société Francelot ont produit dans l'instance.

Sur la régularisation du vice relevé par l'arrêt avant dire droit du 7 janvier 2022 :

4. Aux termes de l'article R. 441-8-3 du code de l'urbanisme : " Lorsque les travaux projetés sont situés sur un terrain ayant accueilli une installation classée mise à l'arrêt définitif, dans le cas prévu par l'article L. 556-1 du code de l'environnement, la demande de permis d'aménager est complétée par un document établi par un bureau d'études certifié dans le domaine des sites et sols pollués, ou équivalent, attestant que les mesures de gestion de la pollution au regard du nouvel usage du terrain ont été prises en compte dans la conception du projet. Cette pièce est fournie sous l'entière responsabilité du demandeur ". Aux termes de l'article L. 556-1 du code de l'environnement : " Sans préjudice des articles L. 512-6-1, L. 512-7-6 et L. 512-12-1, sur les terrains ayant accueilli une installation classée mise à l'arrêt définitif et régulièrement réhabilitée pour permettre l'usage défini dans les conditions prévues par ces mêmes articles, lorsqu'un usage différent est ultérieurement envisagé, le maître d'ouvrage à l'initiative du changement d'usage doit définir des mesures de gestion de la pollution des sols et les mettre en œuvre afin d'assurer la compatibilité entre l'état des sols et la protection de la sécurité, de la santé ou de la salubrité publiques, l'agriculture et l'environnement au regard du nouvel usage projeté. / (...). Le maître d'ouvrage à l'initiative du changement d'usage fait attester de cette prise en compte par un bureau d'études certifié dans le domaine des sites et sols pollués, conformément à une norme définie par arrêté du ministre chargé de l'environnement, ou équivalent. Le cas échéant, cette attestation est jointe au dossier de demande de permis de construire ou d'aménager. (...) ".

5. Les parties peuvent, à l'appui de la contestation de l'acte de régularisation, invoquer des vices affectant sa légalité externe et soutenir qu'il n'a pas pour effet de régulariser le vice que le juge a constaté dans sa décision avant dire droit. Elles ne peuvent soulever aucun autre moyen, qu'il s'agisse d'un moyen déjà écarté par la décision avant dire droit ou de moyens nouveaux, à l'exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.

6. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le permis d'aménager du 9 juin 2022 a été délivré à la société Francelot au vu de la présentation, à l'appui de sa demande d'un permis d'aménager modificatif à titre de régularisation, de l'attestation d'un bureau d'études établie à la date du 19 avril 2022. Ce document comprend une note de synthèse garantissant " qu'une étude des sols a bien été réalisée et que ses résultats sont pris en compte dans la conception du projet de construction ou d'aménagement afin d'assurer la compatibilité entre l'état des sols et l'usage futur du site de l'ancienne déchetterie " ainsi qu'une attestation certifiant que les études de sols prévues par l'article R. 556-2 du code de l'environnement ont été réalisées au droit de l'ancienne déchetterie et que le maître d'ouvrage a " pris connaissance des recommandations des études environnementales et s'engage à les mettre en œuvre dans la réalisation de son projet ", conformément aux mesures de gestion préconisées dans la note de synthèse. Cette attestation satisfait ainsi, contrairement à ce que soutiennent les requérants, aux exigences prévues par les articles R. 441-8-3 du code de l'urbanisme et L. 556-1 du code de l'environnement.

7. En second lieu, si le certificat produit par la société Francelot, pour justifier de la certification du cabinet d'études qui lui a délivré l'attestation prévue par l'article R. 441-8-3 du code de l'urbanisme, a été établi à la date du 20 septembre 2018, soit à une date postérieure à la réalisation des études de sols sur la base desquelles ont été définies les mesures de gestion de la pollution des sols au regard de l'usage futur du site, il ressort des mentions de ce même certificat qu'il présente une durée de validité de 5 ans et qu'il a été délivré en renouvellement du précédent certificat. Il s'ensuit que le précédent certificat a été délivré le 20 septembre 2013 et que le bureau d'études était titulaire d'une certification lorsqu'il a réalisé, en décembre 2015, une étude des sols du terrain d'assiette du projet contesté.

8. Il résulte de ce qui précède que le vice tiré de ce que la société pétitionnaire ne justifiait pas de l'attestation requise par les dispositions de l'article R. 441-8-3 du code de l'urbanisme a été régularisé.

Sur la légalité du permis d'aménager initial au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme :

9. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".

10. Il ressort de l'attestation établie par le cabinet d'études certifié sur la base des études de sols réalisées en mai et décembre 2015, mais aussi d'un rapport d'analyse des risques résiduels et du plan de gestion des déblais du 23 novembre 2018, que le site est compatible avec un usage d'habitat, sous réserve de procéder, d'une part, à l'enlèvement des remblais situés au droit et à proximité des futurs habitats dont la teneur en arsenic et en mercure dépasse les concentrations maximales et moyennes admissibles, d'autre part, au recouvrement pérenne, par des matériaux d'apport sains, des remblais situés au droit des espaces verts, collectifs comme privatifs présentant les mêmes concentrations, sur des épaisseurs minimales variables selon la nature des aménagements paysagers, une épaisseur minimale d'un mètre étant en outre recommandée pour l'aménagement de l'espace vert collectif et récréatif. Si les requérants soutiennent que les études de sols réalisées en 2015 se limitent à la seule emprise de l'ancienne déchèterie déclarée en 2007 et dont l'exploitation a cessé en 2015 alors que d'autres terrains situés au sud-ouest de cette emprise auraient, entre 1986 et 2007, été utilisés comme " décharge sauvage ", l'analyse des études écologiques qu'ils ont fait réaliser en 2021 et la photo aérienne qu'ils produisent ne permettent pas d'établir l'existence de cette décharge sauvage ni de localiser son emplacement exact ni, par suite, de démontrer que les sondages ayant servi à l'élaboration des études de sols auraient été insuffisants, alors qu'il résulte de l'instruction que 8 de ces sondages ont été réalisés au sein de l'emprise de l'ancienne déchetterie et 5 autres à la périphérie de ce site. Cette analyse de 2021 qui se borne à faire état, dans ses conclusions, d'un doute sur la présence ou non d'éléments polluants sur le site, notamment de fibres d'amiante qui auraient été découvertes lors de travaux de dépollution réalisés par la commune sur le site en janvier 2020, ne permet pas davantage de remettre en cause les conclusions des études de sols réalisées. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que le permis d'aménager contesté serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande, ni à demander l'annulation du permis d'aménager de régularisation du 9 juin 2022.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune du Loroux-Bottereau, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par l'association Bien vivre autour de la Carterie et autres au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association Bien vivre autour de la Carterie et autres la somme demandée par la commune du Loroux-Bottereau et la société Francelot au même titre.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'association bien vivre autour de la Carterie et autres est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune du Loroux-Bottereau et de la société Francelot présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Bien vivre autour de la Carterie, représentant unique désigné par Me Diversay, à la commune du Loroux-Bottereau et à la société Francelot.

Délibéré après l'audience du 8 novembre 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente,

- Mme Montes-Derouet, présidente assesseure,

- M. Le Brun, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 novembre 2022.

La rapporteure,

I. C...

La présidente,

C. BUFFETLa greffière,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT01568


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT01568
Date de la décision : 25/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Hélène DOUET
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE
Avocat(s) : CABINET ARCC

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-11-25;20nt01568 ?
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