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18/11/2022 | FRANCE | N°21NT00703

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 18 novembre 2022, 21NT00703


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile de construction vente (SCCV) Lecampion a demandé au tribunal administratif de Caen de prononcer la décharge de la majoration pour manquement délibéré dont ont été assortis les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 11 septembre 2015 au 31 juillet 2017.

Par un jugement n°1901805 du 13 janvier 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 mar

s 2021, la SCCV Lecampion, représentée par Me Mear, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile de construction vente (SCCV) Lecampion a demandé au tribunal administratif de Caen de prononcer la décharge de la majoration pour manquement délibéré dont ont été assortis les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 11 septembre 2015 au 31 juillet 2017.

Par un jugement n°1901805 du 13 janvier 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 mars 2021, la SCCV Lecampion, représentée par Me Mear, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration n'apporte pas la preuve du caractère délibéré du manquement qui lui est reproché alors qu'elle a cherché à régulariser spontanément sa situation compte tenu du caractère isolé du manquement et de l'inexpérience de son comptable ;

- elle peut se prévaloir du " droit à l'erreur " ;

- elle entend se prévaloir du paragraphe n° 40 de la documentation administrative BOI-CF-INF-10-20-20 du 8 mars 2017.

Par un mémoire en défense enregistré le 14 septembre 2021 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que l'application de la majoration de 40% pour manquement délibéré est justifiée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Brasnu, rapporteur public,

- et les observations de Me Harand, représentant la SCCV Lecampion.

Considérant ce qui suit :

1. La SCCV Lecampion, créée le 11 septembre 2015, a pour objet la réalisation et la commercialisation d'immeubles et, plus particulièrement, d'un immeuble situé rue Lecampion à Granville. Après avoir souscrit des déclarations mensuelles de taxe sur la valeur ajoutée, elle a formé, le 9 août 2017, une demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre du mois de juillet 2017 pour un montant de 175 349 euros. Une demande de renseignements lui a alors été adressée le 16 août 2017, à laquelle elle a répondu le 28 août 2017. La SCCV Lecampion a ensuite fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 11 septembre 2015 au 31 juillet 2017 à l'issue de laquelle l'administration fiscale a procédé à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée assortis de majorations pour manquement délibéré. La SCCV Lecampion relève appel du jugement du 13 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la décharge des pénalités pour manquement délibéré.

2. Aux termes de l'article 1729 code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ". Aux termes de l'article

L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration. ".

3. Il résulte de ces dispositions que la majoration pour manquement délibéré a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir le caractère délibéré du manquement reproché au contribuable, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.

4. Il résulte de l'instruction que l'administration a procédé à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour des montants de 39 433 euros et 155 946 euros respectivement au titre des mois d'avril et mai 2017, en conséquence d'une taxe collectée et non déclarée se rapportant à des acomptes perçus sur ces deux mois pour la vente de cinq appartements en état de futur achèvement.

5. Pour justifier l'application de la majoration prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration fiscale fait valoir que la société a omis de déclarer la taxe sur la valeur collectée sur l'ensemble des ventes intervenues au cours des mois d'avril et mai 2017 pour un montant significatif au regard de son activité, que la situation abusivement créditrice de taxe sur la valeur n'a pas été régularisée lors du dépôt de la demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée et que les cogérants de la société, en leur qualité de professionnels de l'immobilier, avaient connaissance des règles de taxe sur la valeur ajoutée applicables en matière de cession d'immeuble en l'état futur d'achèvement. Même si la société requérante n'établit pas par les pièces versées au dossier qu'elle a cherché à régulariser spontanément sa situation, il résulte de l'instruction et notamment des échanges intervenus entre la société requérante et l'administration lors de la vérification de comptabilité que l'omission de déclaration de la taxe sur les ventes intervenues sur deux mois ainsi que la demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée relèvent d'erreurs comptables ponctuelles et isolées. Dans ces conditions et dans les circonstances de l'espèce, l'administration fiscale n'établit pas l'intention d'éluder l'impôt justifiant l'application de la majoration pour manquement délibéré.

6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés, que la SCCV Lecampion est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la décharge de la majoration pour manquement délibéré.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au profit de la SCCV Lecampion, sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1 : Le jugement n°1901805 du 13 janvier 2021 du tribunal administratif de Caen est annulé.

Article 2 : La SCCV Lecampion est déchargée de la majoration pour manquement délibéré dont ont été assortis les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 11 septembre 2015 au 31 juillet 2017.

Article 3 : L'Etat versera à la SCCV Lecampion la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCCV Lecampion et au ministre de ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 20 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Geffray, président,

- M. Penhoat, premier conseiller,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 novembre 2022.

Le rapporteur,

A. A...Le président,

J.-E. Geffray

La greffière,

S. Pierodé

La République mande et ordonne au ministre de ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 21NT007032


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00703
Date de la décision : 18/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GEFFRAY
Rapporteur ?: M. Anthony PENHOAT
Rapporteur public ?: M. BRASNU
Avocat(s) : SELARL JURIS DOMUS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-11-18;21nt00703 ?
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