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14/11/2022 | FRANCE | N°21NT00996

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 14 novembre 2022, 21NT00996


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 18 octobre 2017 par laquelle les autorités consulaires françaises en poste à Casablanca ont rejeté sa demande de visa de long séjour présentée en qualité de travailleur saisonnier ainsi que la décision du 15 février 2018 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a maintenu ce refus de visa.

Par un jugement n° 1803141 du 12 février 2021, le tribunal administ

ratif de Nantes a annulé la décision du 15 février 2018 de la commission de recours,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 18 octobre 2017 par laquelle les autorités consulaires françaises en poste à Casablanca ont rejeté sa demande de visa de long séjour présentée en qualité de travailleur saisonnier ainsi que la décision du 15 février 2018 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a maintenu ce refus de visa.

Par un jugement n° 1803141 du 12 février 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 15 février 2018 de la commission de recours, a enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à M. A... le visa sollicité et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 avril 2021, le ministre de l'intérieur demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 12 février 2021 en ce qu'il a annulé la décision du 15 février 2018 de la commission de recours et lui a enjoint de délivrer à M. A... le visa sollicité ;

2°) de rejeter, dans cette mesure, la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que M. A... ne présentait pas un risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mars 2022, M. A..., représenté par Me Hequet, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête du ministre de l'intérieur ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer le visa sollicité, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte, au besoin, de 500 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- le moyen soulevé par le ministre de l'intérieur n'est pas fondé ;

- la décision est insuffisamment motivée ;

- il présente toutes les aptitudes nécessaires à l'emploi d'ouvrier agricole qu'il se propose d'occuper et pour lequel son employeur a obtenu une autorisation d'introduction de travailleurs étrangers.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 12 février 2021 du tribunal administratif de Nantes en tant qu'il a annulé, à la demande de M. A..., la décision du 14 février 2018 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France confirmant le refus opposé par les autorités consulaires françaises en poste à Casablanca à sa demande de visa de long séjour, en qualité de travailleur saisonnier, et lui a enjoint de délivrer à M. A... le visa sollicité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 211-1, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / (...) 3° Des documents nécessaires à l'exercice d'une activité professionnelle s'il se propose d'en exercer une ". Aux termes de l'article L. 211-2-1, alors en vigueur, du même code : " (...) Tout étranger souhaitant entrer en France en vue d'y séjourner pour une durée supérieure à trois mois doit solliciter auprès des autorités diplomatiques et consulaires françaises un visa de long séjour (...) ". Aux termes de l'article R. 5221-2 du code du travail, dans sa version applicable au litige : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ". La circonstance qu'un travailleur étranger dispose d'un contrat de travail visé par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ou d'une autorisation de travail, ne fait pas obstacle à ce que l'autorité compétente refuse de lui délivrer un visa d'entrée en France en se fondant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, sur tout motif d'intérêt général.

3. Pour maintenir le refus opposé à la demande de visa de long séjour présentée par M. A... en qualité de travailleur salarié, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée, d'une part, sur l'inadéquation entre ses qualifications et expériences professionnelles et les caractéristiques de l'emploi d'ouvrier agricole qui lui était offert, d'autre part, sur le risque de détournement de l'objet du visa.

4. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de la demande d'autorisation de travail formée en vue de recruter M. A... ainsi que des correspondances entre Pôle Emploi et son employeur, que l'emploi de manœuvre agricole que le requérant se propose d'occuper consiste à récolter des légumes en pleins champs et en serres, à planter et à entretenir les plantations. La description de l'offre d'emploi enregistrée par Pôle Emploi indique, sous la rubrique " expérience ", que les débutants sont acceptés. M. A..., dont le contrat de travail a été visé par les services compétents, justifie avoir exercé, dans différentes exploitations agricoles du sud-est de la France, les fonctions d'ouvrier agricole de mars à août 2009, de mai à novembre 2010 et de janvier 2011 à janvier 2012. Le requérant verse également au dossier une attestation de la chambre d'agriculture de la région de l'Oriental et une attestation du caïd du Chouihia faisant état de ce que l'intéressé exerce, au Maroc, la profession d'agriculteur. De même, il justifie d'une attestation de travail au sein d'une exploitation agricole au titre de la période du 1er septembre 2013 au 31 septembre 2017. Dans ces conditions, en se fondant sur le premier motif énoncé au point 3, la commission a porté une inexacte appréciation sur l'adéquation de la qualification et de l'expérience professionnelle de l'intéressé à l'emploi proposé.

5. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France en 2009 au bénéfice d'une procédure d'introduction de travailleur saisonnier et qu'il s'y est irrégulièrement maintenu jusqu'en 2014, l'interéssé ayant en outre fait l'objet en 2013 d'une obligation de quitter le territoire français. Si le requérant justifie, par les pièces médicales qu'il verse au dossier, avoir été victime d'un accident sur la voie publique, le 6 mars 2013, ayant nécessité des soins qui l'ont immobilisé, il n'apporte aucune précision quant à sa situation administrative et professionnelle entre 2009 et cet accident, période au cours de laquelle il a travaillé plusieurs mois en France. Il s'ensuit, alors même que le requérant est marié et père de trois enfants mineurs résidant au Maroc et qu'il supporte la charge de ses parents résidant également au Maroc, que c'est à tort que, pour annuler la décision du 15 février 2018, le tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur l'absence de risque de détournement de l'objet du visa.

6. M. A... n'a soulevé, tant en appel qu'en première instance, aucun autre moyen à l'encontre de la décision du 14 février 2018 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 14 février 2018 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France et lui a enjoint de délivrer le visa sollicité par M. A....

Sur les conclusions à fin d'injonction présentées en appel par M. A... :

8. Le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions présentées à fin d'injonction et d'astreinte par M. A... ne peuvent être que rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande M. A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 12 février 2021 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la demande dirigées contre la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 15 février 2018 présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Nantes sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées en appel par M. A... ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. B... A....

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de chambre,

- Mme Montes-Derouet, présidente-assesseure,

- M. Bréchot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 novembre 2022.

La rapporteure,

I. C...

La présidente,

C. BUFFETLa greffière,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT00996


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00996
Date de la décision : 14/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUFFET
Rapporteur ?: Mme Isabelle MONTES-DEROUET
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE
Avocat(s) : HEQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-11-14;21nt00996 ?
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