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03/11/2022 | FRANCE | N°21NT01916

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 03 novembre 2022, 21NT01916


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours dirigé contre la décision du 26 février 2020 des autorités consulaires françaises à Alger (Alger) refusant de lui délivrer un visa d'établissement en France en qualité d'enfant majeur à charge de ressortissants français.

Par un jugement n° 2010549 du 10 mai 2021, le tribunal administr

atif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours dirigé contre la décision du 26 février 2020 des autorités consulaires françaises à Alger (Alger) refusant de lui délivrer un visa d'établissement en France en qualité d'enfant majeur à charge de ressortissants français.

Par un jugement n° 2010549 du 10 mai 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 juillet 2021, et des productions de pièces enregistrées les 31 janvier, 3 février et 8 février 2022 (non communiquées), Mme C... B..., représentée par Me Gillioen, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 mai 2021 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté le recours dirigé contre la décision du 26 février 2020 des autorités consulaires françaises à Alger (Alger) refusant de lui délivrer un visa d'établissement en France en qualité d'enfant majeur à charge de ressortissants français ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer le visa sollicité dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, en ce qu'il n'a pas répondu aux moyens tirés de ce que sa demande de visa était complète et d'une erreur de fait ;

- la décision contestée, ainsi que le refus consulaire, sont entachés d'un défaut de motivation ;

- la décision contestée, ainsi que le refus consulaire, sont entachés d'un défaut d'examen complet et sérieux de sa situation ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations du b) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations des articles 8 et 6-5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 août 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... B..., ressortissante algérienne née le 4 juillet 1995, a sollicité le 4 février 2020 la délivrance d'un visa d'établissement en France en qualité d'enfant majeur à charge de ressortissants français auprès des autorités consulaires françaises à Alger. Par une décision du 26 février 2020, l'autorité consulaire française à Alger (Algérie) a rejeté sa demande. La commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a implicitement rejeté les recours dirigés contre ces décisions. Mme B... relève appel du jugement du 10 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande d'annulation de la décision de la commission de recours.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, si Mme B... soutient que le jugement attaqué est entaché de défaut de réponse " au moyen invoqué relatif à l'erreur de fait ", elle n'assortit pas son argumentation sur ce point des précisions qui permettraient d'en apprécier la portée. Le moyen ne peut, dès lors, qu'être écarté.

3. En second lieu, il ne ressort pas des écritures de première instance que les demandeurs auraient soulevé un moyen tiré de ce que son dossier était complet et répondait aux exigences de l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors même, en tout état de cause, que le ministre n'a pas rejeté la demande de visa de Mme B... au motif qu'elle aurait été incomplète, mais en raison d'une part, de ce que la demanderesse de visa, âgée de plus de 21 ans, ne justifie pas être à la charge de ses parents de nationalité française, d'autre part, de ce que ses ascendants de nationalité française ne pourvoient pas régulièrement à ses besoins et ne justifient pas des ressources nécessaires pour le faire. Par suite, et alors que ce moyen n'avait pas à être relevé d'office par le tribunal, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité en ce qu'il n'a pas répondu à ce moyen.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. En premier lieu, en vertu des dispositions de l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, désormais repris à l'article D. 312-3 du même code, la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, prise sur recours préalable obligatoire, s'est substituée à la décision consulaire du 26 février 2020. Il suit de là que les moyens dirigés contre la décision de l'autorité consulaire doivent être écartés comme inopérants.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués ". En l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B... ait demandé la communication des motifs de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté sa demande. Dans ces conditions, et à supposer qu'il ait été soulevé, le moyen tiré de l'absence de motivation de cette décision implicite ne peut qu'être écarté.

6. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision contestée serait entachée d'un défaut d'examen de la situation personnelle de Mme B....

7. En quatrième lieu, et ainsi qu'il a été dit au point 3, il ressort des pièces du dossier que le ministre n'a pas rejeté la demande de visa de Mme B... au motif qu'elle aurait été incomplète, mais en raison d'une part, de ce que la demanderesse de visa, âgée de plus de 21 ans, ne justifie pas être à la charge de ses parents de nationalité française, d'autre part, de ce que ses ascendants de nationalité française ne pourvoient pas régulièrement à ses besoins et ne justifient pas des ressources nécessaires pour le faire. Par suite, et à supposer qu'il ait été soulevé, le moyen tiré de ce que son dossier était complet et de ce que la décision contestée méconnaît ainsi l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, doit être écarté comme inopérant.

8. En cinquième lieu, aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit (...) : / b) (...) aux ascendants d'un ressortissant français et de son conjoint qui sont à sa charge ". Le deuxième alinéa de l'article 9 du même accord prévoit que : " Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5, 7, 7 bis, alinéa 4 (lettres c à d), et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. ".

9. Il résulte de la combinaison de ces stipulations que, que, lorsqu'elles sont saisies d'une demande tendant à la délivrance d'un visa de long séjour au bénéfice d'un ressortissant algérien âgé de plus de 21 ans qui fait état de sa qualité de descendant à charge d'un ressortissant français, les autorités consulaires et la commission de recours contre les décisions de refus de visas d'entrée en France peuvent légalement fonder leur décision de refus sur la circonstance que l'intéressé ne saurait être regardé comme étant à la charge de son ascendant dès lors qu'il dispose de ressources propres, que son ascendant de nationalité française ne pourvoit pas régulièrement à ses besoins, ou qu'il ne justifie pas des ressources nécessaires pour le faire.

10. D'une part, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, les parents de Mme B..., M. D... B... et Mme E... B..., de nationalité française, ont envoyé à la requérante des sommes se limitant à 250 euros pour l'année 2018, et 220 euros pour l'année 2019. Les parents de Mme B... résident en France, sont locataires d'un appartement pour lequel ils acquittent un loyer d'environ 600 euros par mois et prennent en charge quatre de leurs cinq enfants présents en France. M. D... B... percevait, à la date de la décision contestée, un revenu d'un montant mensuel net d'environ 1 600 euros. Il est constant que Mme E... B... n'exerce pas d'activité professionnelle et ne perçoit aucun revenu autre que des prestations familiales. Dans ces conditions, Mme B... ne peut être regardée comme à la charge de ses parents à la date de la décision attaquée. Mme B... ne peut, au demeurant, utilement se prévaloir des revenus perçus par ses deux sœurs résidant en France.

11. D'autre part, et en tout état de cause, la seule circonstance que Mme B..., âgée de 25 ans à la date de la décision contestée, n'exercerait aucune activité professionnelle, ne suffit pas à justifier qu'elle serait dépourvue de ressources dans son pays d'origine.

12. Il résulte de ce qui précède qu'en estimant que Mme B... ne pouvait être regardée comme étant à charge de ses ascendants de nationalité française pour obtenir un visa de long séjour en qualité d'enfant majeur à charge de ressortissants français, la commission de recours n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 citées au point 8.

13. En sixième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme B..., âgée de 26 ans, réside en Algérie avec trois membres de la fratrie. Il n'est pas établi qu'elle serait dépourvue d'attaches personnes significatives en Algérie, où elle a toujours vécu, ni que ses parents ou les autres membres de la famille qui résident en France seraient dans l'impossibilité de lui rendre visite en Algérie. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision contestée porterait une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations des articles 8 et 6-5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de la requérante, doivent être écartés.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Dès lors, les conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 14 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- M. Rivas, président-assesseur,

- M. Frank, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 novembre 2022.

Le rapporteur,

A. A...Le président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 21NT01916


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT01916
Date de la décision : 03/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. Alexis FRANK
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : GILLIOEN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-11-03;21nt01916 ?
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