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08/07/2022 | FRANCE | N°21NT00322

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 08 juillet 2022, 21NT00322


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... F... et Mme D... F... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les arrêtés du 29 juin 2016 et du 20 avril 2017 par lesquels le maire de Saint-Berthevin a délivré à M. B..., respectivement, un permis de construire une maison individuelle A... le terrain situé 52, rue de la Rousselière A... le territoire de cette commune et un permis de construire modificatif.

Par un jugement n° 1709429 du 3 décembre 2020, le tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du 20 avril

2017 portant permis de construire modificatif en tant qu'il emporte modification ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... F... et Mme D... F... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les arrêtés du 29 juin 2016 et du 20 avril 2017 par lesquels le maire de Saint-Berthevin a délivré à M. B..., respectivement, un permis de construire une maison individuelle A... le terrain situé 52, rue de la Rousselière A... le territoire de cette commune et un permis de construire modificatif.

Par un jugement n° 1709429 du 3 décembre 2020, le tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du 20 avril 2017 portant permis de construire modificatif en tant qu'il emporte modification des cotes altimétriques du projet et rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 janvier 2021 et le 20 septembre 2021, M. B..., représenté par Me Bouliou, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 décembre 2020 en ce qu'il annule l'arrêté du 20 avril 2017 portant permis de construire modificatif en tant qu'il emporte modification des cotes altimétriques du projet ;

2°) de rejeter, dans cette mesure, la demande présentée par M. et Mme F... tendant à l'annulation de cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme F... une somme de 4 000 euros A... le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- M. et Mme F... ne justifient pas d'un intérêt à agir contre le permis de construire modificatif ;

- il ressort des documents établis pat le cabinet de géomètres - experts fonciers Kaligeo, notamment ceux joints à sa demande de permis de construire modificatif, que son projet est parfaitement conforme aux dispositions de l'article UB 10 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- les dispositions du plan local d'urbanisme relatives aux hauteurs des constructions ont été modifiées.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 27 juillet 2021 et le 5 octobre 2021, M. et Mme F..., représentés par Me Fouassier, concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. B... et de la commune de Saint-Berthevin d'une somme de 4 000 euros A... le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- la circonstance que le règlement du plan local d'urbanisme a été modifié en 2019 est parfaitement inopérante ;

- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 9 août 2021, la commune de Saint-Berthevin, représentée par Me Poirier, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 3 décembre 2020 en ce qu'il annule l'arrêté du 20 avril 2017 portant permis de construire modificatif en tant qu'il emporte modification des cotes altimétriques du projet ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme F... tendant à l'annulation de cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de la partie perdante une somme de 5 000 euros A... le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. et Mme F..., qui n'ont pas contesté le permis de construire initial, ne justifient pas que les conditions d'occupation, d'utilisation et de jouissance de leur bien seraient affectées par l'erreur de côte altimétrique qu'ils allèguent ;

- la modification des côtes n'a pas été de nature à vicier l'appréciation du service instructeur de sorte qu'il ne saurait être reproché à la commune de ne pas avoir relevé une non-conformité du projet au règlement du plan local d'urbanisme ;

- la non-conformité alléguée de la construction érigée relève de l'exécution et est sans incidence A... la légalité du permis délivré au regard du dossier de la demande.

Par une lettre du 9 juin 2022, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, de ce que la cour était susceptible de surseoir à statuer afin de permettre la régularisation du permis de construire modificatif, délivré le 20 avril 2017.

M. B... a présenté des observations enregistrées le 14 juin 2022.

M. et Mme F... ont présenté des observations enregistrées le 14 juin 2022.

La commune de Saint-Berthevin a présenté des observations enregistrées le 20 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- les observations de Me Bouliou, représentant M. B... et les observations de Me Gardiennet, substituant Me Fouassier et représentant les époux F....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... B... a obtenu, par un arrêté du maire de la commune de Saint-Berthevin (Mayenne) du 29 juin 2016, l'autorisation de construire une maison individuelle d'habitation, d'une surface de plancher de 166 mètres carrés, A... le terrain cadastré AS 0431 et situé A... le territoire de cette commune. Après l'ouverture de chantier, il a sollicité un permis de construire modificatif dont l'un des objets était de modifier la cote altimétrique du terrain naturel et, par suite, celle de la construction. Ce permis de construire modificatif lui a été délivré par un arrêté du 20 avril 2017. M. et Mme F..., propriétaires de la parcelle jouxtant au nord et à l'est le terrain d'assiette, ont formé un recours gracieux contre l'arrêté du 20 avril 2017, qui a été expressément rejeté, puis ont demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation des arrêtés du maire de Saint-Berthevin du 29 juin 2016 et du 20 avril 2017 délivrant à M. B..., respectivement, un permis de construire et un permis de construire modificatif. M. B... relève appel du jugement du 3 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du 20 avril 2017 en tant qu'il emporte modification des cotes altimétriques du projet.

A... l'intérêt à agir des demandeurs :

2. Il résulte de l'article L .600-1-2 du code de l'urbanisme qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

3. M. et Mme F..., voisins immédiats du projet litigieux, lequel porte A... la construction d'une maison de 166 mètres carrés dont une partie, comportant deux étages, est implantée à trois mètres de la limite séparant le terrain d'assiette de leur propriété, font état des incidences de ce projet en terme d'ensoleillement et de vues du fait notamment de la hauteur de la construction et produisent, à l'appui de cette affirmation, un procès-verbal de constat d'huissier dressé le 24 janvier 2017 et le rapport d'expertise judiciaire du 20 novembre 2019. Les constatations consignées dans le procès-verbal d'huissier du 16 septembre 2021 produit par le requérant ne permettent pas, à elles-seules, d'établir que son projet serait insusceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation et de jouissance de leur bien par M. et Mme F.... Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'ils seraient dépourvus d'intérêt à agir contre le permis de construire modificatif, lequel porte notamment A... les cotes altimétriques du terrain naturel et de la construction projetée.

A... le motif d'annulation retenu par les premiers juges :

4. D'une part, en vertu des dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme, le projet architectural qu'un pétitionnaire doit joindre à sa demande de permis de construire doit comporter un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain et lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan doit faire apparaître l'état initial et l'état futur. D'autre part, il résulte des dispositions de l'article UB 10.2 du règlement du plan local d'urbanisme, alors applicables, que la hauteur d'une construction est mesurée dans l'axe de la façade principale à partir du sol de la voirie ou du " sol naturel avant travaux ".

5. A l'appui de sa demande de permis de construire modificatif, M. B... a produit le plan de façades figurant dans le dossier de sa demande de permis de construire initial A... lequel il a indiqué " Le terrain naturel a été mesuré par Kaligeo le 2/2/2017 à un Z de 111,84 m. A... le permis de construire initial le Z du terrain naturel ne correspond pas à la réalité puisqu'il était noté à 111,16 soit un décalage de 0,68 m. ". Il a également fourni le plan de profil du terrain issu du dossier initial A... lequel il a modifié la cote du terrain naturel en l'assortissant de la mention " Mesure faite par Kaligeo le 2/2/2017 ". A... ces deux plans modifiés, toutes les cotes altimétriques ont été augmentées de 0,68, la valeur des hauteurs restant inchangée.

6. Il résulte du " plan de nivellement d'un piquet et de la gouttière " dressé le 2 février 2017 par le cabinet de géomètres - experts fonciers Kaligeo et figurant dans le dossier de la demande de permis de construire modificatif qu'un levé topographique a permis de constater une position altimétrique de 111,84 correspondant au terrain naturel près d'un angle de la construction. Toutefois, ce levé a été réalisé en 2017 soit postérieurement aux premiers travaux de terrassement effectués dès 2016 ainsi qu'en attestent la facture de la société SMRBA du 5 janvier 2017. Il est ainsi peu à même de rendre compte de l'état initial du terrain et notamment du niveau du sol naturel avant les travaux liés au projet. En outre, alors qu'il est constant que le terrain d'assiette du projet est pentu, il ressort des pièces du dossier que la cote initiale de 111,16, que M. B... a entendu modifier, correspond à un point situé à gauche de la façade est du projet tandis que, d'une part, le courrier adressé le 11 mars 2019 par le cabinet Kaligeo au conseil de M. B... indique que le levé a été effectué au niveau de " la gouttière à l'angle ouest de la maison de la construction réalisée " et du " piquet en bordure du tronc de l'arbre situé à proximité de cet angle " et, d'autre part, le rapport d'intervention établi par ce même cabinet le 15 janvier 2021 expose, à propos du même levé, qu'il a été réalisé entre la façade est de la construction et la limite de propriété. De la même manière, M. B... a augmenté toutes les cotes altimétriques du projet de 0,68, quelle que soit leur situation A... le terrain d'assiette ou l'emprise du projet et donc sans considération du niveau du sol naturel en ces différents points et de la déclivité du terrain. Dans ces conditions, compte tenu du fait que le projet présente, à l'égout de la façade est, une hauteur de 6,80 mètres soit de seulement 20 centimètres de moins que la hauteur maximale prescrite par les dispositions de l'article UB 10.3.1 du règlement du plan local d'urbanisme, la modification des cotes altimétriques telle qu'elle résulte de la demande de permis de construire modificatif a, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Nantes, été de nature à induire en erreur le service instructeur dans l'appréciation de la conformité du projet aux règles de hauteur.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité des conclusions de la commune des Saint-Berthevin, que ni M. B... ni la commune de Saint-Berthevin ne sont fondés à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a partiellement annulé l'arrêté du 20 avril 2017 portant permis de construire modificatif.

A... les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge des époux F..., lesquels ne sont pas, dans la présente instance la partie perdante, une somme que demande M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

9. Il y a lieu, en revanche, d'une part, de mettre à la charge de M. B... le versement aux époux F... de la somme de 600 euros et, d'autre part, de mettre à la charge de la commune de Saint-Berthevin le versement aux époux F... de la somme de 600 euros au titre des frais de même nature qu'ils ont supportés.

10. Enfin, les conclusions présentées au même titre par la commune de Saint-Berthevin et tendant à la mise à la charge de la " partie perdante " d'une somme à lui verser doivent, dans les circonstances de l'espèce, être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... et les conclusions de la commune de Saint-Berthevin sont rejetées.

Article 2 : M. B... versera à M. et Mme F... la somme de 800 euros A... le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La commune de Saint-Berthevin versera à M. et Mme F... la somme de 800 euros A... le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., la commune de Saint-Berthevin et M G... F... et Mme D... F....

Une copie sera adressée au Procureur de la République près le tribunal judiciaire de Laval.

Délibéré après l'audience du 21 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Douet, présidente de la formation de jugement,

- M. Bréchot, premier conseiller,

- Mme Bougrine, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 juillet 2022.

La rapporteure,

K. E...

La présidente,

H. DOUET

La greffière,

A. LEMEE

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT00322


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00322
Date de la décision : 08/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DOUET
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SELARL PRAXIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-07-08;21nt00322 ?
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