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01/06/2022 | FRANCE | N°19NT04493

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 01 juin 2022, 19NT04493


Vu la procédure suivante :

Procédure devant la cour :

Par un arrêt avant-dire droit du 16 juillet 2021, la cour, faisant application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, a sursis à statuer sur la requête de M. A... E..., enregistrée sous le n° 19NT004493 et sur la requête de la commune de Granville, enregistrée sous le n° 19NT05051, jusqu'à l'expiration d'un délai de cinq mois imparti pour permettre la régularisation de trois vices entachant le permis de construire délivré le 10 août 2018 par le maire de la commune de Granville à M. E... et tenant, pre

mièrement, à l'incomplétude du dossier de la demande de permis, deuxièmement...

Vu la procédure suivante :

Procédure devant la cour :

Par un arrêt avant-dire droit du 16 juillet 2021, la cour, faisant application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, a sursis à statuer sur la requête de M. A... E..., enregistrée sous le n° 19NT004493 et sur la requête de la commune de Granville, enregistrée sous le n° 19NT05051, jusqu'à l'expiration d'un délai de cinq mois imparti pour permettre la régularisation de trois vices entachant le permis de construire délivré le 10 août 2018 par le maire de la commune de Granville à M. E... et tenant, premièrement, à l'incomplétude du dossier de la demande de permis, deuxièmement, à la méconnaissance des dispositions de l'article UB 11.1 du règlement du plan local d'urbanisme de Granville et, troisièmement, à la non-conformité du projet aux dispositions de l'article UB 12 de ce règlement.

Par des mémoires, enregistrés le 15 décembre 2021 et le 17 février 2022, M. E... a, dans chacune des deux instances, produit divers éléments relatifs à la régularisation de l'autorisation d'urbanisme du 10 août 2018 dont il est titulaire.

La clôture de l'instruction a, dans chacune des deux instances, été fixée au 18 mars 2022 à douze heures.

Postérieurement à ces clôtures, la société civile immobilière (SCI) Van de Bout a produit des observations, enregistrées le 18 mars 2022 et le 28 mars 2022.

Les parties ont été informées, dans chacune des deux instances, de ce que la cour entendait apprécier la régularisation du vice tiré de la méconnaissance de l'article UB 12 du règlement du plan local d'urbanisme de Granville au regard de la version de cet article issue de la modification approuvée par la délibération du conseil municipal du 3 mars 2020 et invité les parties à formuler des observations sur ce point.

Par des mémoires, enregistrés le 3 mai 2022, M. E... a présenté, dans les deux instances, des observations en réponse à cette invitation.

Il soutient que l'autorisation qui lui a été délivrée doit être regardée comme régularisée au regard de l'article UB 12 du règlement du plan local d'urbanisme que ce soit dans sa version applicable à la date du permis de construire initial ou à celle applicable à la date du permis de régularisation.

Par des mémoires, enregistrés le 4 mai 2022, la commune de Granville a présenté, dans les deux instances, des observations en réponse à cette invitation.

Elle soutient que le vice tiré de la méconnaissance l'article UB 12 du règlement du plan local d'urbanisme a été régularisé.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- les observations de Me Delaunay, substituant Me Agostini et représentant M. E... et les observations de Me Trémouilles, substituant Me Gourvennec et représentant la commune de Granville.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 10 août 2018, le maire de Granville (Manche) a délivré à M. E... un permis de construire portant sur l'extension de la maison implantée sur les parcelles cadastrées BO nos 108 et 107 sur le territoire de cette commune. M. et Mme C..., d'une part, la société civile immobilière (SCI) Van de Bout, d'autre part, ont formé des recours gracieux contre ce permis de construire qui ont été rejetés par des décisions du 4 décembre 2018. Ils ont chacun introduit devant le tribunal administratif de Caen une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 août 2018 et des décisions du 4 décembre 2018 rejetant leurs recours gracieux respectifs. Par un jugement n° 1900186, 1900214 du 6 novembre 2019, le tribunal administratif de Caen a, après avoir joint la demande de M. et Mme C... et celle de la SCI Van de Bout, annulé l'arrêté du maire de Granville du 10 août 2018 ainsi que les décisions du 4 décembre 2018. M. E..., d'une part, la commune de Granville, d'autre part, ont relevé appel de ce jugement. Par un arrêt avant-dire droit du 16 juillet 2021, la cour a joint ces requêtes d'appel enregistrées, respectivement, sous le n° 19NT00493 et sous le n° 19NT05051 et, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, a sursis à statuer pour permettre la régularisation de trois vices entachant le permis de construire délivré par le maire de Granville à M. E....

2. Aux termes des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".

3. Il résulte de ces dispositions que, d'une part, si, à l'issue du délai qu'il a fixé dans sa décision avant dire droit pour que lui soit adressées la ou les mesures de régularisation du permis de construire attaqué, le juge peut à tout moment statuer sur la demande d'annulation de ce permis et, le cas échéant, y faire droit si aucune mesure de régularisation ne lui a été notifiée, il ne saurait se fonder sur la circonstance que ces mesures lui ont été adressées alors que le délai qu'il avait fixé dans sa décision avant dire droit était échu pour ne pas en tenir compte dans son appréciation de la légalité du permis attaqué.

4. Par un arrêté du 14 février 2022, le maire de Granville, saisi d'une demande de permis de construire modificatif de régularisation déposée par M. E... le 15 décembre 2021, a délivré à ce dernier un permis de régularisation. La circonstance que la délivrance de cette mesure de régularisation et sa production devant la cour soit intervenue deux mois après l'expiration du délai de cinq mois imparti par l'arrêt avant-dire droit du 16 juillet 2021 ne saurait faire obstacle à ce que la cour en tienne compte pour apprécier la légalité du permis de construire contesté.

Sur la régularisation du vice tenant à l'incomplétude du dossier de la demande :

5. L'article R. 431-9 du code de l'urbanisme dispose : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. (...).

6. Le dossier joint à la demande de permis déposée par M. E... le 15 décembre 2021 comporte plusieurs plans cotés de masse, de coupe, de façade et de toiture permettant au service instructeur de connaître les dimensions du projet en ce qui concerne sa longueur, sa largeur et sa hauteur. Ce premier vice entachant le permis de construire en litige doit ainsi être regardé comme régularisé.

Sur la régularisation du vice tenant à la méconnaissance de l'article UB 11 du règlement du plan local d'urbanisme :

7. Aux termes de l'article UB 11 du règlement du plan local d'urbanisme : " (...) / 11.2 Généralités / L'aspect extérieur des constructions ne doit pas porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants / Dans le cas de construction ou rénovation de bâtiment d'architecture traditionnelle, les projets doivent être en cohérence et en harmonie avec le bâti proche et reprendre les éléments de composition ainsi que de volumétrie tels que les ouvertures, traitements de façade, éléments de toiture, (...) / 11.3 Matériaux - coloris / les matériaux seront déterminés dans le but de permettre la meilleure intégration possible du projet avec le paysage urbain ; les teintes de ces matériaux se rapprocheront le plus possible de celles des matériaux traditionnels. / Les coloris des menuiseries et des façades seront choisis en harmonie avec les couleurs dominantes générales. (...) / 11.5 Façades / Les ouvertures en façades seront de proportions nettement verticales. A défaut, les compositions de menuiseries seront avec meneaux restituant cette proportion. (...) ".

8. Le projet d'extension tel qu'il a été autorisé par l'arrêté du 14 février 2022 prévoit une toiture " à la Mansart ", recouverte d'ardoises, rappelant celles de la construction existante et de la maison voisine ainsi que, pour les murs, une " maçonnerie traditionnelle enduite, au ravalement de teinte beige ". Le rythme et les dimensions des ouvertures permettent de souligner les " proportions nettement verticales " recherchées par les auteurs du plan local d'urbanisme. Les modifications du projet portant sur le traitement de ses façades et sa toiture permettent, ainsi, à celui-ci de s'intégrer dans son environnement. Dès lors, le vice entachant le permis de construire en litige et relatif à l'atteinte portée par l'aspect extérieur du projet au caractère des lieux avoisinants doit être regardé comme régularisé.

Sur la régularisation du vice tenant à la méconnaissance de l'article UB 12 du règlement du plan local d'urbanisme :

9. Par son arrêt avant-dire droit du 16 juillet 2021, la cour a, d'une part, relevé que le projet d'extension de M. E... entraînait la disparition d'un espace de stationnement extérieur privatif et que les mesures du garage existant ne respectaient pas les dimensions minimales de 5 mètres de longueur et de 2,50 mètres de largeur prévues par les dispositions de l'article UB 12 du règlement du plan local d'urbanisme et, d'autre part, considéré que le projet de M. E... n'était ainsi pas conforme aux dispositions de cet article qui exigeaient, compte tenu de la surface de plancher de la maison après travaux, au moins une place de stationnement.

10. Il ressort des pièces du dossier que si le règlement du plan local d'urbanisme de Granville, notamment son article UB 12 relatif au stationnement, a été modifié le 3 mars 2020, les règles, issues de cette modification et applicables au terrain d'assiette du projet de M. E..., terrain compris dans la zone UB1 située entre " la rue du Couraye, le début de l'avenue des Matignon et le début de l'avenue des Vendéens ", sont les mêmes, en substance, que celles au regard desquelles la cour a apprécié la légalité du permis de construire du 10 août 2018.

11. A l'appui de sa demande de permis de construire de régularisation, M. E... a justifié de la possession par son épouse d'un garage privatif au sein d'une copropriété située rue Pigeon Litan à environ 250 mètres du projet selon la notice descriptive jointe à la demande.

12. Par suite, le vice entachant le permis de construire du 10 août 2018 et tenant à la méconnaissance des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme relatives au stationnement a été régularisé par le permis de régularisation du 14 février 2022.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

14. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens (...) ". Il résulte de ces dispositions que le paiement des sommes exposées et non comprises dans les dépens ne peut être mis à la charge que de la partie qui perd pour l'essentiel. La circonstance qu'au vu de la régularisation intervenue en cours d'instance, le juge rejette finalement les conclusions dirigées contre la décision initiale, dont le requérant était fondé à soutenir qu'elle était illégale et dont il est, par son recours, à l'origine de la régularisation, ne doit pas à elle seule, pour l'application de ces dispositions, conduire le juge à mettre les frais à sa charge ou à rejeter les conclusions qu'il présente à ce titre.

15. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, au titre des frais exposés par les intimés dans les instances n°19NT004493 et 19NT05051 et non compris dans les dépens, d'une part, de mettre à la charge de la commune de Granville le versement à la SCI Van Debout d'une somme de 800 euros et le versement à M. et Mme C... d'une somme du même montant et, d'autre part, de mettre à la charge de M. E... le versement à la SCI Van Debout d'une somme de 800 euros et le versement à M. et Mme C... d'une somme du même montant. En revanche, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par la commune de Granville et par M. E... au titre des frais de même nature qu'ils ont supportés.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Caen du 6 novembre 2019 est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées respectivement par M. et Mme C... et par la SCI Van de Bout devant le tribunal administratif de Caen sont rejetées.

Article 3 : La commune de Granville versera une somme de 800 euros à M. et Mme C... et une somme du même montant à la SCI Van de Bout, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : M. E... versera une somme de 800 euros à M. et Mme C... et une somme du même montant à la SCI Van de Bout, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 par, d'une part, M. E... et, d'autre part, la commune de Granville sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E..., à la commune de Granville, à la société civile immobilière Van de Bout et à M. et Mme B... C....

Délibéré après l'audience du 10 mai 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Douet, présidente de la formation de jugement,

M. Bréchot, premier conseiller,

Mme Bougrine, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er juin 2022.

La rapporteure,

K. D...

La présidente,

H. DOUET

La greffière,

A. LEMEE

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT04493, 19NT05051


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT04493
Date de la décision : 01/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SCP ADJUDICIA

Origine de la décision
Date de l'import : 07/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-06-01;19nt04493 ?
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