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20/05/2022 | FRANCE | N°21NT03063

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 20 mai 2022, 21NT03063


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 3 juin 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.

Par un jugement n° 2008716 du 1er octobre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une req

uête, enregistrée le 31 octobre 2021, Mme C... D..., représentée par Me Schauten, demande à la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 3 juin 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.

Par un jugement n° 2008716 du 1er octobre 2021, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 octobre 2021, Mme C... D..., représentée par Me Schauten, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 1er octobre 2021 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 juin 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ;

3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours suivant l'arrêt à intervenir et, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans le même délai et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est intervenue en violation du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que son compagnon et leur fille résident en France, ainsi que sa sœur ressortissante française ;

- la décision de refus de titre est intervenue en violation de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant dès lors que le père de sa fille n'envisage pas de vivre au Congo ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est intervenue en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard à la présence en France de son compagnon et de leur fille ;

- la décision portant fixation du pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 février 2022, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 février 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... D..., ressortissante congolaise née le 31 mai 1967, est entrée régulièrement en France le 29 juillet 2018, munie d'un visa de court séjour. Elle s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire à l'expiration de ce visa et a conclu un pacte civil de solidarité avec M. E... B..., compatriote et concubin allégué de la requérante depuis les années 1980, titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2024 et père de leur fille, F... B..., ressortissante congolaise née le 3 avril 2007 à Pointe-Noire. Mme D... a sollicité du préfet de Maine-et-Loire la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande a été rejetée par un arrêté du 3 juin 2020 portant en outre obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office lorsque le délai sera expiré. Par un jugement du 1er octobre 2021, dont Mme D... relève appel, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, Mme D... reprend en appel le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision portant refus de titre de séjour. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 2 du jugement attaqué.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...). ".

4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision préfectorale contestée Mme D..., alors âgée de 54 ans, séjourne en France depuis moins de deux ans. Si son compagnon congolais âgé à la même date de 63 ans, avec lequel elle a conclu un pacte civil de solidarité le 15 novembre 2018, séjourne régulièrement en France depuis 1983, selon ses dires, et dispose d'une carte de résident délivrée en dernier lieu en février 2014, il résulte des déclarations mêmes de la requérante que celui-ci a séjourné à plusieurs reprises, et pour de longues périodes, au Congo. Elle indique ainsi qu'ils y ont cohabité pendant un an entre 2006 et 2007, période où a été conçue leur enfant née en 2007. La requérante est ensuite imprécise sur la présence de son compagnon à ses côtés, mais indique à tout le moins qu'" il est reparti vers 2012 ". M. B... a également résidé au Congo en 2016 et 2017. En France cette personne ne se prévaut que de contrats de travail d'insertion à durée déterminée à temps partiel conclus à compter de 2018, sans autre élément concernant son insertion. La fille du couple née le 3 avril 2007 au Congo y a vécu avec sa mère jusqu'en 2015, dès lors qu'est produit un certificat du 8 septembre 2015 de scolarité de l'enfant en CE 2 à Brétigny sur Orge (Essonne) ainsi qu'un document de circulation pour étranger mineur établi par les autorités françaises le 21 octobre 2015, mais sans autre preuve de sa présence en France au-delà de cette date avant la rentrée scolaire 2018 et sa scolarisation en collège à Brétigny sur Orge. Enfin si Mme D... établit avoir une sœur de nationalité française résidant dans l'Essonne, elle ne peut sérieusement soutenir qu'elle ne dispose d'aucune attache familiale ou amicale au Congo, pays où elle a résidé jusqu'à l'âge de 54 ans. Dans ces conditions, eu égard à l'entrée récente en France de Mme D... et de sa fille à la date de la décision contestée, à la circonstance que le compagnon de la requérante a résidé pendant de longues périodes au Congo peu avant l'entrée en France de Mme D... et au peu d'éléments concernant son insertion en France, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée est intervenue en violation du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".

6. Ainsi qu'il a été exposé au point 4 Elisabeth-Antonia B..., âgée de quatorze ans à la date de l'arrêté contesté, a vécu pendant plusieurs années séparée soit de son père, soit de sa mère compte-tenu des choix de vie de ces derniers. Par suite, et alors qu'elle a été scolarisée tant au Congo qu'en France, le refus de titre de séjour opposé à sa mère n'est pas de nature à établir que cette décision serait intervenue en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, le moyen, soulevé par voie d'exception, tiré de l'illégalité de la décision du 3 juin 2020 du préfet de Maine-et-Loire refusant le titre de séjour sollicité par Mme D..., doit être écarté eu égard à ce qui est dit aux points 2 à 6.

8. En second lieu, pour les motifs exposés au point 4 il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur la décision portant fixation du pays de renvoi :

9. Les moyens, soulevés par voie d'exception, tirés de l'illégalité des décisions du 3 juin 2020 du préfet de Maine-et-Loire refusant le titre de séjour sollicité par Mme D... et lui faisant obligation de quitter le territoire français, doivent être écartés eu égard à ce qui est dit aux points 2 à 8.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D..., à Me Schauten et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 3 mai 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Rivas, président de la formation de jugement,

- M. Guéguen, premier conseiller,

- Mme Béria-Guillaumie, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 mai 2022.

Le président de la formation de jugement, rapporteur,

C. A...

Le magistrat le plus ancien dans le grade le plus élevé,

J-Y. GUÉGUEN

La greffière,

S. LEVANT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT03063


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT03063
Date de la décision : 20/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. RIVAS
Rapporteur ?: M. Christian RIVAS
Rapporteur public ?: M. PONS
Avocat(s) : SCHAUTEN

Origine de la décision
Date de l'import : 31/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-05-20;21nt03063 ?
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