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20/05/2022 | FRANCE | N°21NT01012

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 20 mai 2022, 21NT01012


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du préfet du Morbihan du 26 septembre 2018 en tant qu'elle prévoit une redevance domaniale annuelle de 2 525 euros.

Par un jugement n° 1901438 du 15 février 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 13 avril 2021, 7 juillet 2021 et 23 août 2021, l'asso

ciation Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon, représentée par Me Violette, demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du préfet du Morbihan du 26 septembre 2018 en tant qu'elle prévoit une redevance domaniale annuelle de 2 525 euros.

Par un jugement n° 1901438 du 15 février 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 13 avril 2021, 7 juillet 2021 et 23 août 2021, l'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon, représentée par Me Violette, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1901438 du tribunal administratif de Rennes du 15 février 2021 ;

2°) d'annuler la décision du préfet du Morbihan du 26 septembre 2018 en tant qu'elle prévoit une redevance domaniale annuelle de 2 525 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté du préfet du Morbihan du 26 septembre 2018 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et méconnait l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques :

o la hausse de redevance est manifestement disproportionnée par rapport aux avantages procurés ;

o elle ne loue pas des emplacements de stationnement de navires sur l'emprise du domaine public, les emplacement étant proposés sur la parcelle AO 702 qui lui appartient et ne relève pas du domaine public ;

o elle n'occupe le domaine public que quelques mois par an entre l'Ascension et la mi-septembre ; la redevance ne saurait donc être calculée sur une base annuelle.

- compte tenu de son rôle d'intérêt général, puisqu'elle joue un rôle de sécurisation de la plage publique et du plan d'eau, elle peut entrer dans le champ d'application de la gratuité prévue par les dispositions de l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 9 juin et 25 août 2021, ainsi qu'un mémoire enregistré le 15 juillet 2021 qui n'a pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par l'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 8 juillet 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 août 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Béria-Guillaumie, première conseillère,

- les conclusions de M. Pons, rapporteur public,

- et les observations de Me Logeriot, représentant l'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon.

Une pièce présentée pour l'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon par Me Violette a été enregistrée le 5 mai 2022.

Considérant ce qui suit :

1. L'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon, créée en 1955, assure une activité de club nautique et d'école de voile sur la plage de Kerbougnec à Saint-Pierre-Quiberon (Morbihan). Elle bénéficie d'une autorisation d'occupation du domaine public pour le stockage des dériveurs légers de l'école de voile, depuis l'année 2014, pour une redevance du montant minimal applicable de 128 euros. Le 9 mars 2018, l'association a demandé le renouvellement de l'autorisation d'occupation temporaire du domaine public maritime dont elle bénéficiait. Par un arrêté du 26 septembre 2018, le préfet du Morbihan a autorisé l'association, pour une durée de trois ans, à occuper une surface de 250 mètres carrés du domaine public maritime pour le stockage des dériveurs légers de l'école de voile et a fixé à 2 525 euros le montant de la redevance annuelle. L'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon relève appel du jugement du 15 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Morbihan du 26 septembre 2018 en tant qu'il fixe le montant de sa redevance annuelle d'occupation du domaine public.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. L'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques dispose que : " La redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation ". Par ailleurs, l'article R. 2125-1 du même code dispose que : " Sous réserve des dispositions réglementaires particulières qui déterminent au plan national le tarif des redevances pour certaines catégories d'occupation ou d'utilisation du domaine public de l'Etat, le directeur départemental des finances publiques fixe les conditions financières des titres d'occupation ou d'utilisation du domaine public de l'Etat, après avis du service gestionnaire du domaine public. / Le service gestionnaire dispose d'un délai de deux mois à compter de la demande qui lui est faite par le directeur départemental des finances publiques pour se prononcer sur les conditions financières de l'occupation ou de l'utilisation du domaine public. L'absence de réponse dans ce délai vaut avis favorable. (...) ".

3. Qu'elle détermine ou qu'elle révise le tarif d'une redevance d'occupation domaniale, l'autorité compétente doit tenir compte des avantages de toute nature que le titulaire de l'autorisation est susceptible de retirer de l'usage privatif du domaine public. Cette fixation ou cette révision du tarif ne saurait aboutir à ce que le montant de la redevance atteigne un niveau manifestement disproportionné au regard de ces avantages.

4. Il ressort des dispositions citées au point 2 du code général de la propriété des personnes publiques qu'il appartient à l'autorité chargée de la gestion du domaine public, qui doit à ce titre, en l'absence de dispositions contraires, fixer les conditions de délivrance des permissions d'occupation, de déterminer le tarif des redevances en tenant compte des avantages de toute nature que le permissionnaire est susceptible de retirer de l'occupation du domaine public. La nomenclature barème de l'année 2018, établie par le directeur départemental des finances publiques du Morbihan, dont le préfet a ici fait application, indique que, pour les " -clubs de plage / - bateaux, planches à voiles... (clubs nautiques) ", le tarif de la redevance est déterminé par application du tarif de référence de 10, 10 euros le mètre carré, avec un minimum applicable de 850 euros. Ce barème fixe également un " minimum de redevance applicable à toute occupation du domaine public maritime / 130 euros ".

5. Il ressort des pièces du dossier que l'autorisation accordée à l'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon d'occuper privativement une partie de la plage de Kerbougnec porte sur une surface totale de 250 mètres carrés. Il ressort également des pièces du dossier que la redevance demandée en 2014 à l'association avait été fixée à 128 euros, soit le montant annuel minimal alors prévu en raison d'une erreur sur la surface totale objet de la demande d'autorisation. Cette erreur de surface avait été rectifiée par une autorisation de janvier 2015 sans modification du montant de redevance requise. Il est constant que le montant fixé par l'arrêté litigieux du préfet du Morbihan correspond désormais à l'application du montant annuel prévu par le barème applicable en 2018 à la surface exacte objet de l'autorisation d'occupation privative du domaine public maritime. Ce barème, réévalué annuellement, procède à une classification fine des différents usages privatifs du domaine public maritime pouvant être concédés et prévoit pour chacun de ces usages des tarifs différenciés, prenant ainsi en compte les avantages de toute nature procurés aux différents titulaires des autorisations conformément aux dispositions de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques. L'association requérante se borne essentiellement à invoquer l'augmentation de la redevance mise à charge, résultant cependant ainsi qu'il a été dit ci-dessus de la rectification de l'emprise de son autorisation. Elle ne conteste ainsi pas les éléments apportés en défense par les ministres quant à l'adéquation des montants fixés par le barème annuel avec les avantages retirés par les différents occupants, conformément aux dispositions de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques.

6. Cependant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le montant annuel de la redevance mise à la charge de l'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon correspond au montant de base fixé annuellement par mètre carré par le barème de l'administration pour les écoles de voiles (10,10 euros) multiplié par la surface occupée (250 mètres carrés). Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que l'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon n'est explicitement autorisée, en application de l'arrêté litigieux du 26 septembre 2018, à occuper privativement 250 mètres carrés de la plage de Kerbougnec que du 1er juin au 31 août de chaque année, soit trois mois par an. Dans ces conditions, et alors que le montant de la redevance mise à sa charge ne prend pas en compte le caractère saisonnier de l'autorisation accordée, l'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon est fondée à soutenir que le montant de redevance mise à sa charge est, pour ce motif, entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, et à demander, pour ce motif, l'annulation de l'arrêté du préfet du Morbihan du 26 septembre 2018 en tant qu'il fixe à 2 525 euros la redevance d'occupation du domaine public maritime mise à sa charge.

7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, que l'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet du Morbihan du 26 septembre 2018 en tant qu'il fixe à 2 525 euros la redevance d'occupation du domaine public maritime mise à sa charge.

Sur les frais du litige :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros que demande l'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1901438 du tribunal administratif de Rennes du 15 février 2021 et l'arrêté du préfet du Morbihan du 26 septembre 2018 en tant qu'il fixe le montant de redevance due par l'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon pour l'occupation privative d'une parcelle de la plage de Kerbougnec sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à l'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Société des Régates de Saint-Pierre-Quiberon et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Une copie sera adressée pour information au préfet du Morbihan.

Délibéré après l'audience du 3 mai 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Rivas, président de la formation de jugement,

- M. Guéguen, premier conseiller,

- Mme Béria-Guillaumie, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 mai 2022.

La rapporteure,

M. BÉRIA-GUILLAUMIELe président de la formation de jugement,

C. RIVAS

La greffière,

S. LEVANT

La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT01012


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT01012
Date de la décision : 20/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. RIVAS
Rapporteur ?: Mme Marie BERIA-GUILLAUMIE
Rapporteur public ?: M. PONS
Avocat(s) : VIOLETTE

Origine de la décision
Date de l'import : 31/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-05-20;21nt01012 ?
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