Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la délibération du 28 décembre 2018 par laquelle le conseil municipal de la commune des Sables d'Olonne a approuvé la création d'une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine sur le territoire de cette commune.
Par un jugement n° 1902247 du 6 avril 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette délibération.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 mai 2021 et le 23 août 2021, la commune des Sables d'Olonne, représentée par Me Plateaux, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 6 avril 2021 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Nantes ;
3°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, qui ne pouvait, s'agissant d'un recours dirigé contre la délibération de 2018 approuvant la création d'une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine, se fonder sur l'insuffisance des modalités fixées par la délibération de 2014, les mesures prévues par cette délibération de 2014 ont été effectivement mises en œuvre ;
- à supposer qu'elles ne l'aient pas été, cette circonstance n'a pas eu d'incidence sur le sens de la délibération contestée ni privé le public d'une garantie ;
- les autres moyens soulevés par M. B... en première instance ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 29 juillet 2021 et le 8 septembre 2021, M. B..., représenté par Me Leraisnable, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la commune des Sables d'Olonne d'une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- les pièces opportunément produites par la commune en appel pour discuter le moyen d'annulation accueilli par le tribunal sont dépourvues de valeur probante ;
- l'insuffisance de la concertation a nui à la bonne information du public ;
- il n'est pas établi que, conformément à l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, les conseillers municipaux auraient été régulièrement convoqués ;
- ils n'ont pas été destinataires d'une note de synthèse si bien que leur droit général à l'information consacré à l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales a été méconnu ;
- il n'est pas établi que le projet d'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine ait fait l'objet d'un examen conjoint des personnes publiques associées ainsi que le prévoit le 3ème alinéa de l'article L. 642-3 du code du patrimoine ;
- le plan local d'urbanisme ayant été annulé, l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine n'est pas compatible avec les dispositions d'urbanisme applicables à sa parcelle ;
- il n'est pas établi que la délibération du 3 novembre 2014 prescrivant la mise à l'étude de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine ait fait l'objet des mesures de publicité exigées par les dispositions combinées des articles D. 642-1 du code du patrimoine et R. 2121-10 du code général des collectivités territoriales ;
- dès lors qu'il n'est pas établi que l'avis d'enquête publique ait, premièrement, fait l'objet d'une publicité dans la presse quinze jours au moins avant le début de l'enquête publique ni que cette publicité ait été réitérée dans les huit jours suivant l'ouverture de celle-ci, deuxièmement, été publié sur le site internet de la commune et, troisièmement, été affiché quinze jours au moins avant le début de l'enquête, les articles R. 123-11 et R. 123-9 du code de l'environnement ont été méconnus ;
- faute de contenir l'avis de la commission régionale du patrimoine et des sites, les comptes rendus des séances de la commission locale de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine et, alors que la délibération du 3 novembre 2014 prévoyait que le registre mis à la disposition du public au cours de la concertation serait remis au commissaire enquêteur, les éléments relatifs au bilan de cette concertation, le dossier soumis à l'enquête publique apparaît irrégulier au regard des dispositions de R. 123-8 du code de l'environnement ;
- le rapport du commissaire enquêteur de même que ses conclusions ne sont ni motivés ni personnels, en méconnaissance de l'article R. 123-9 du code de l'environnement ;
- le classement de sa propriété parmi le bâti d'intérêt architectural et du jardin entourant cette propriété comme " espace non bâti à préserver " est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
Vu :
- la décision n° 21NT01428 du 9 juillet 2021 statuant sur la demande de sursis à exécution du jugement attaqué ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement
- le code du patrimoine ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016, notamment son article 114 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,
- et les observations de Me Delaunay, substituant Me Plateaux et représentant la commune des Sables d'Olonne, et les observations de Me Le Pallabre, substituant Me Leraisnable et représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. La commune des Sables d'Olonne relève appel du jugement du 6 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de M. B..., la délibération du 28 décembre 2018 du conseil municipal de la commune des Sables d'Olonne approuvant la création d'une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En vertu de l'article L. 642-3 du code du patrimoine, dans sa rédaction applicable au litige, la création d'une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine fait l'objet d'une concertation, régie par les dispositions de l'article L. 300-2, reprises à l'article L. 103-3, du code de l'urbanisme, dont les modalités sont précisées par la délibération décidant la mise à l'étude de la création de cette aire.
3. Par sa délibération du 3 novembre 2014, décidant la mise à l'étude de la création d'une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine, le conseil municipal des Sables d'Olonne a prévu trois modalités de concertation consistant, premièrement, en la " présentation d'une exposition évolutive en fonction de l'avancée des études et du projet ", deuxièmement, en la " mise à disposition d'un registre afin de recueillir les observations du public, registre qui sera remis au Commissaire Enquêteur " et, troisièmement, en l'organisation d' " échanges réguliers avec les associations locales afin de présenter les avancées du projet et recueillir leurs observations ". Pour annuler la délibération du 28 décembre 2018, motif pris des irrégularités entachant la procédure de concertation, le tribunal administratif de Nantes a, notamment, considéré que, alors qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier qu'un registre ait été mis à la disposition du public ni que les associations locales aient été consultées, aucune autre modalité alternative de nature à pallier ces insuffisances dans la conduite de la phase de concertation et à comporter des effets similaires à ceux attendus des mesures définies par la délibération du 3 novembre 2014 n'a été mise en œuvre, de sorte que le population a été privée d'une garantie.
4. Pour établir la réalité des échanges entretenus avec les associations locales au cours de la phase de concertation, la commune des Sables d'Olonne produit les attestations des présidents de trois associations locales ainsi que l'attestation de l'adjoint au maire chargé des dossiers d'urbanisme entre avril 2014 et décembre 2018. Le président de l'association des résidents du quartier du passage indique avoir " rencontré à plusieurs reprises en 2018 l'adjoint au maire des Sables d'Olonne, dans le cadre de la concertation organisée pour la mise au point du projet d'AVAP ". Il précise également que les observations alors formulées par l'association n'ayant pas influé, dans le sens voulu, sur le contenu du projet, cette association a également participé à l'enquête publique. De même, la présidente de l'Association pour la protection du patrimoine du Pays des Olonnes atteste que l'association a " été consultée à plusieurs reprises par la municipalité sur l'élaboration de l'AVAP, a été en mesure de faire connaître ses observations sur le projet durant la phase de concertation ". Par ailleurs, l'ancien adjoint au maire détaille, dans son attestation du 26 juillet 2021, la forme qu'ont pris, à compter de février 2015, les échanges organisés avec huit associations et la Fondation du patrimoine, à savoir, notamment, des rencontres avec l'élu, une information au moins annuelle relative à l'avancement de l'élaboration du projet, la participation d'un membre d'une association au repérage des lieux réalisé le 27 juillet 2015. Les seules circonstances que ces attestations aient été rédigées en 2021 en vue d'être produites devant le juge et n'aient pas été versées aux débats de première instance, ne suffisent pas, en l'espèce, à les priver de valeur probante. Dans ces conditions, la mise en œuvre effective de la troisième modalité de concertation prévue par la délibération du 3 novembre 2014 doit être regardée comme établie.
5. En revanche, si, pour la première fois en appel, la commune des Sables d'Olonne verse aux débats un registre comportant les observations formulées par trois personnes le 26 avril 2018, le 15 mai 2018 et le 1er août 2018, seule la première de ces trois séries d'observations est antérieure à la délibération du 15 mai 2018 par laquelle le conseil municipal a tiré le bilan de la concertation et arrêté le projet de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine. D'ailleurs, le bilan de la concertation ne comporte aucune mention relative à la mise à disposition d'un registre permettant au public d'y déposer ses observations. Si la personne ayant formulé les observations sur le registre le 26 avril 2018 a, par une attestation du 14 avril 2021, certifié que le " registre éta[it] à l'époque très nettement disposé en vue du public " et que lors de la réunion publique du 17 avril 2018, " il a clairement été mentionné que le registre était disponible à la Mairie des Sables ", M. B... verse aux débats plusieurs attestations de personnes indiquant ne pas avoir eu connaissance de la mise à disposition d'un tel registre. En outre, alors qu'aucune des pièces produites par la commune des Sables d'Olonne ne porte sur la période de concertation antérieure à avril 2018, il ressort du rapport du commissaire enquêteur que de très nombreuses observations recueillies au cours de l'enquête publique ont exprimé " un manque de concertation et d'information ", une " campagne de communication (...) insuffisante ", l'absence de " concertation réelle ". Dans ces conditions, les pièces du dossier ne permettent pas d'établir que la mise à disposition d'un registre avant que le projet ne soit arrêté dans sa nature et ses options essentielles ait été effectivement assurée et ce, dans des conditions permettant de recueillir utilement les observations du public.
5. Les irrégularités ayant affecté le déroulement de la concertation au regard des modalités définies dans la délibération prescrivant la mise à l'étude de la création de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine ne sont de nature à entacher d'irrégularité la procédure d'élaboration du document que si ce vice a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la délibération approuvant le projet ou s'il a privé le public d'une garantie.
6. Il ressort des pièces du dossier, notamment du bilan de la concertation et des conclusions du commissaire enquêteur, que des panneaux d'information ont en 2017 et 2018 été exposés dans le bâtiment de la mairie ainsi que sur ses façades vitrées. De même, une réunion publique ayant pour objet de présenter le projet de règlement de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine s'est tenue, le 17 avril 2018. Toutefois, compte tenu de leur consistance et de leur date de réalisation, ces dispositifs n'ont pas été de nature à pallier l'absence de mise à disposition effective et en temps utile, d'un registre d'observations permettant au public d'y consigner ses observations à destination de la collectivité. Au regard des observations exprimées au cours de l'enquête publique, évoquées au point 4 du présent arrêt, et alors que l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine, d'une part, est de nature à impacter sensiblement le cadre de vie et, d'autre part, constitue une servitude d'utilité publique entraînant, pour les propriétaires des parcelles concernées, des contraintes d'urbanisme importantes, l'irrégularité entachant la procédure de concertation a, en l'espèce, privé le public d'une garantie et a été de nature à influer sur le sens de la délibération approuvant le projet et, par conséquent, sur celuide la délibération contestée.
7. Il suit de là que la commune des Sables d'Olonne n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la délibération du 28 décembre 2018.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de M. B..., lequel n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par la commune des Sables d'Olonne et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de la commune des Sables d'Olonne une somme au titre des frais de même nature supportés par M. B....
D E C I D E:
Article 1er : La requête de la commune des Sables d'Olonne est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié la commune des Sables d'Olonne et à M. A... B....
Une copie sera adressée pour information au préfet de la Vendée et au directeur régional des affaires culturelles des Pays de la Loire.
Délibéré après l'audience du 26 avril 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- Mme Douet, présidente-assesseure,
- Mme Bougrine, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 mai 2022.
La rapporteure,
K. C...
Le président,
A. PEREZ
La greffière,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de la culture et au ministre de la transition écologique en ce qui les concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT01427