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10/05/2022 | FRANCE | N°21NT01519

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 10 mai 2022, 21NT01519


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Les Amis de Kervoyal " a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 21 juin 2018 du conseil municipal approuvant le plan local d'urbanisme de la commune de Damgan (Morbihan) en ce qu'elle classe en zone Ul les campings " Oasis " et " Côte d'Amour ", en ce qu'elle classe en zone Ub les parcelles cadastrées AT 187 et 188 et le nord des parcelles cadastrées AP 220, 227 et 228, en ce qu'elle ne classe pas en espace boisé classé les pins de la parcelle cadastrée AR

33, en ce qu'elle ne classe pas en coupure d'urbanisation l'espace natu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Les Amis de Kervoyal " a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 21 juin 2018 du conseil municipal approuvant le plan local d'urbanisme de la commune de Damgan (Morbihan) en ce qu'elle classe en zone Ul les campings " Oasis " et " Côte d'Amour ", en ce qu'elle classe en zone Ub les parcelles cadastrées AT 187 et 188 et le nord des parcelles cadastrées AP 220, 227 et 228, en ce qu'elle ne classe pas en espace boisé classé les pins de la parcelle cadastrée AR 33, en ce qu'elle ne classe pas en coupure d'urbanisation l'espace naturel couvrant la section cadastrale AO et la zone Na du Vronsec, en ce qu'elle autorise l'extension de la zone artisanale de " La Lande " sur la parcelle cadastrée OT 172 et en ce que le règlement de la zone NI autorise l'extension de 30 % de la surface des constructions existantes.

Par un jugement n° 1805854 du 19 mars 2021, le tribunal administratif de Rennes a annulé cette délibération en ce qu'elle classe en zone Ub les parcelles cadastrées AT 187 et 188 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 mai et 26 novembre 2021, l'association " Les amis de Kervoyal ", représentée par la Sarl Antigone, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

2°) d'annuler la délibération du 21 juin 2018 du conseil municipal de Damgan approuvant le plan local d'urbanisme de la commune de Damgan en ce qu'elle classe en zone Ul les campings " Oasis " et " Côte d'Amour ", en ce qu'elle classe en zone Ub le nord des parcelles cadastrées AP 220, 227 et 228, en ce qu'il ne classe pas en espace boisé classé les pins de la parcelle cadastrée AR 33, en ce qu'elle ne classe pas en coupure d'urbanisation l'espace naturel couvrant la section cadastrale AO et la zone Na du Vronsec, en ce qu'elle autorise l'extension de la zone artisanale de " La Lande " sur la parcelle cadastrée OT 172 et en ce que le règlement de la zone NI autorise l'extension de 30 % de la surface des constructions existantes.

3°) de mettre à la charge de la commune de Damgan le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

- le tribunal administratif n'a pas examiné le moyen tiré de ce que le classement en zone Ul des campings " Oasis " et " Côte d'Amour " est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; il n'a pas répondu à son moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la délibération contestée ;

- le classement en zone Ul des campings " Oasis " et " Côte d'Amour ", qui jouxtent des espaces agricoles et naturels dont certains sont remarquables et classés en zone NDs, méconnaît les dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement en zone Ub des parcelles cadastrées AP 220, 227 et 228 méconnaît directement les dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme ; en outre, le schéma de cohérence territoriale (SCOT) n'est pas compatible avec la loi littoral ; les trois parcelles sont situées dans les espaces proches du rivage ; elles sont à l'état naturel et s'ouvrent sur de vastes espaces naturels Na et remarquables NDs ; la partie des nord des trois parcelles a été soustraite de la zone Na après enquête publique ; il s'agit d'une extension de l'urbanisation non justifiée dans le plan ; ce classement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- les auteurs du plan ont méconnu l'article L. 121-22 du code de l'urbanisme et commis une erreur manifeste d'appréciation en ne classant pas en coupure d'urbanisation l'espace naturel couvrant la section cadastrale AO correspondant à l'espace du Loch et la zone Na du Vronsec ; elle abandonne son moyen tiré de l'illégalité du SCOT est entaché d'illégalité en ce qu'il n'a pas prévu de coupure d'urbanisation sur l'espace naturel couvrant la section cadastrale AO et la zone Na du Vronsec ;

- en autorisant l'extension de 30 % de la surface des constructions existantes dans la zone NI, le règlement méconnait l'article L. 151-11 du code de l'urbanisme ; le règlement contredit le rapport de présentation sur ce point ; la mission régionale de l'autorité environnementale a recommandé de préserver l'espace du Loch de toute nouvelle forme d'urbanisation et de limiter strictement les aménagements à ceux compatibles avec la vocation naturelle de ce secteur et indispensables ; l'extension de la salle polyvalente existante à hauteur de 30% de sa surface actuelle et à 12,50 mètres de hauteur n'est pas compatible avec l'intérêt esthétique ou écologique du secteur ;

- elle abandonne le moyen tiré du déclassement de la parcelle cadastrée AR 33 et donc la contestation des considérants n° 44 à 48 du jugement ;

- en ne classant pas en espace boisé classé les pins de la parcelle cadastrée AR 33, alors qu'ils l'étaient précédemment, les auteurs du plan ont méconnu l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme ;

- l'extension de la zone artisanale de " La Lande " sur une surface de 1,2 hectare de la parcelle cadastrée OT 172 méconnait l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme ; elle n'est pas cohérente avec le projet d'aménagement et de développement durables qui entend favoriser l'optimisation des espaces disponibles dans la zone d'activité artisanale et non projeter son agrandissement.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 28 octobre et 16 décembre 2021 (ce dernier non communiqué), la commune de Damgan, représentée par le cabinet LGP, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de l'association " Les amis de Kervoyal " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que

- la demande de première instance est irrecevable dès lors que les requérants ne justifient pas de leur intérêt à agir contre la délibération du 21 juin 2018 en litige ;

- les moyens soulevés par l'association " Les amis de Kervoyal " ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,

- et les observations de Me Lefèvre, pour l'association " Les amis de Kervoyal " et de Me Tremouilles, pour la commune de Damgan.

Une note en délibéré, enregistrée le 26 avril 2022 a été présentée pour l'association " Les amis de Kervoyal ".

Une note en délibéré, enregistrée le 3 mai 2022 a été présentée pour la commune de Damgan.

Considérant ce qui suit :

1. L'association " Les amis de Kervoyal " a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 21 juin 2018 du conseil municipal de Damgan approuvant le plan local d'urbanisme de la commune en ce que cette délibération classe en zone Ul le secteur des campings " Oasis " et " Côte d'Amour ", en ce qu'elle classe en zone Ub les parcelles cadastrées AT 187 et 188 et le nord des parcelles cadastrées AP 220, 227 et 228, en ce qu'elle ne classe pas en espace boisé classé les pins de la parcelle cadastrée AR 33, en ce qu'elle ne classe pas en coupure d'urbanisation l'espace naturel couvrant la section cadastrale AO et la zone Na du Vronsec, en ce qu'elle autorise l'extension de la zone artisanale de " La Lande " sur la parcelle cadastrée OT 172 et en ce que le règlement de la zone Nl autorise l'extension de 30 % de la surface des constructions existantes. Par un jugement du 19 mars 2021, le tribunal administratif de Rennes a annulé cette délibération en tant qu'elle classe en zone Ub les parcelles cadastrées AT 187 et 188 et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. L'association " Les amis de Kervoyal " relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. L'association " Les amis de Kervoyal " a invoqué devant le tribunal administratif le moyen tiré de ce que l'extension de la zone artisanale de " La Lande " sur une surface de 1,2 hectare de la parcelle cadastrée OT 172 méconnaissait les dispositions de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme dans sa rédaction issue de la loi du 23 novembre 2018 dite loi Elan qui fixe un nouvel objectif de lutte contre l'étalement urbain, que les premiers juges ont écarté comme inopérant au motif que ces dispositions avaient été introduites par la loi du 23 novembre 2018 dite loi Elan postérieurement à la délibération contestée. En revanche l'association n'a pas soulevé le moyen tiré de ce que l'extension de cette zone artisanale méconnaissait les dispositions de cet article dans sa rédaction applicable à la date de la délibération contestée. Elle n'a pas davantage soulevé le moyen tiré de ce que le classement en zone Ul des campings " Oasis " et " Côte d'Amour " était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, le tribunal administratif n'a pas entaché son jugement d'irrégularité en ne répondant pas à ces deux derniers moyens.

Sur le bien- fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :

3. L'association " Les amis de Kervoyal " a pour objet, aux termes de l'article 2 de ses statuts, " La défense de l'environnement de Kervoyal et celui de toute la commune de Damgan ; la défense de l'environnement du littoral des communes voisines d'Ambon et de Billiers ". Cette association, dont le champ d'action couvre, notamment, le territoire de la commune de Damgan, justifie donc d'un intérêt lui donnant qualité pour agir à l'encontre de la délibération du 21 juin 2018 par lequel le conseil municipal a approuvé le plan local d'urbanisme de cette commune littorale. Par suite, la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance par la commune de Damgan doit être écartée.

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation de la délibération du 21 juin 2018 du conseil municipal de Damgan :

S'agissant du classement des parcelles cadastrées AS n°32 et AS n°33 en zone Ul :

4. En premier lieu et d'une part, aux termes de l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Les plans locaux d'urbanisme et les documents en tenant lieu (...) sont compatibles avec : 1° Les schémas de cohérence territoriale (...) ".

5. Aux termes de l'article L. 131-1 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Les schémas de cohérence territoriale sont compatibles avec : 1° Les dispositions particulières au littoral (...) ".

6. Aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. ". Aux termes de l'article L. 121-13 de ce code : " L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage (...) est justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l'urbanisation est conforme aux dispositions d'un schéma de cohérence territoriale (...) ". Doivent être regardées comme une extension de l'urbanisation au sens de ces dispositions l'ouverture à la construction de zones non urbanisées ainsi que la densification significative de zones déjà urbanisées. Enfin, aux termes de l'article L. 121-16 de ce code : " En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage (...) ".

7. S'il appartient à l'autorité administrative chargée de se prononcer sur une demande d'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de la conformité du projet avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral, il résulte des dispositions qui précèdent, que, s'agissant d'un plan local d'urbanisme, il appartient à ses auteurs de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de sa compatibilité avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral. Dans le cas où le territoire concerné est couvert par un schéma de cohérence territoriale, cette compatibilité s'apprécie en tenant compte des dispositions de ce document relatives à l'application des dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral, sans pouvoir en exclure certaines au motif qu'elles seraient insuffisamment précises, sous la seule réserve de leur propre compatibilité avec ces dernières.

8. Le document d'orientations et d'objectifs du SCOT Arc Sud Bretagne du 17 décembre 2013 précise, dans sa partie 3 " Un nouveau rapport aux ressources environnementales et patrimoniales pour l'affirmation d'un territoire de qualité " que, dans la bande des 100 mètres, " En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de 100 mètres à compter de la limite haute du rivage. Cette interdiction ne s'applique pas aux constructions ou installations nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau notamment aux ouvrages de raccordement aux réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité des installations marines utilisant les énergies renouvelables ". Il précise également que l'urbanisation au sein des espaces proches du rivages s'effectue " prioritairement à l'intérieur de l'enveloppe urbaine existante des villages et des agglomérations ; en continuité des agglomérations et des villages au sens de la loi

Littoral ; dans tous les cas de manière limitée. ". Le document cartographique, page 10, annexé au schéma de cohérence territoriale localise " les limites présumées des espaces proches du rivage ", sur le territoire de la commune de Damgan, en se fondant " sur des critères combinés définis par la jurisprudence, de covisibilité avec la mer, d'ambiance marine et de distance avec la mer ". Ces dispositions ne sont pas incompatibles avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral

9. D'autre part, aux termes de l'article Ul I.2 du règlement du plan local d'urbanisme : Dans la zone Ul sont autorisées : " Les constructions à usage d'habitation à condition d'être nécessaires et directement liées à une activité présente sur le site (gardiennage etc) ; / le camping et le caravanage ; / l'implantation de résidences mobiles de loisirs et d'habitations légères de loisirs sous réserve d'être implantées dans un cadre collectif (...) et d'une bonne insertion dans le site ; / les constructions et installations sous réserve d'être directement liées à des activités sportives et de loisirs ; / les constructions et installations sous réserve d'être directement liées à l'activité d'hébergement de plein air (restaurant, commerce, services, piscine, bâtiment de stockage, bureaux...) / les installations et constructions d'intérêt collectif et/ou liées à des services publics (...) ". En outre, selon les dispositions de l'article Ul II 1dans cette zone, la hauteur maximale des constructions est de 9 mètres au faîtage et de 4 mètres à l'acrotère et " le coefficient d'emprise au sol est de 70 % ".

10. Il ressort des pièces du dossier que la zone urbaine Ul est composée de deux parcelles cadastrées AS 32 et 33 accueillant respectivement deux campings dénommés " Oasis ", d'une surface de 3 hectares, et " Côte d'Amour ", d'une surface de 1,3 hectare environ. Il ressort également des pièces du dossier que le camping " Oasis " est situé à une distance de 70 à 300 mètres du rivage, en covisibilité avec la mer, et se trouve ainsi compris pour partie dans la bande littorale de 100 mètres à compter de la limite haute du rivage et pour partie dans un espace proche du rivage, et donc dans des espaces protégés par les articles L. 121-16 et L. 121-13 du code de l'urbanisme. Si le secteur correspondant est bordé à l'ouest par des maisons d'habitation, il jouxte, au nord-ouest, une zone agricole, au nord-est et à l'est, une vaste zone naturelle NDs, délimitant, selon le règlement du plan, les espaces terrestres et marins sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel de littoral et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques ou présentant un intérêt écologique, dépourvue de toute construction et, au sud, une petite zone naturelle Na définie comme délimitant les parties du territoire affectées à la protection stricte des sites des milieux naturels et des paysages, qui ne comporte que quatre constructions qui les séparent de la mer. Quant au camping " Côte d'Amour ", il se situe à moins de 300 mètres du rivage, en covisibilité avec la mer, et est inclus dans un espace proche du rivage, visé par l'article L. 121-13 code de l'urbanisme. Il jouxte une zone naturelle et se situe à proximité immédiate de la zone NDs de l'étang du Loch qui constitue une zone Natura 2000 d'environ 8 hectares. Contrairement à ce que soutient la commune, ces secteurs ne peuvent être rattachés à une zone " située au cœur de l'agglomération de Kervoyal ", ni comme identifiée par le SCOT, compte tenu de l'imprécision de la carte y figurant, comme compris dans l'agglomération de la commune. La zone Ul comprend quelques constructions telles qu'un bâtiment d'accueil, des blocs sanitaires ainsi que des mobil home dont il n'est pas contesté qu'une partie seulement est soumise à déclaration préalable. Par suite, le classement de ces parcelles peu urbanisée en zone urbaine dans laquelle sont autorisées des constructions liées à l'activité d'hébergement de plein air telles que des restaurants, des commerces, des bâtiments de stockage d'une hauteur pouvant atteindre 9 mètres au faîtage, avec un coefficient d'emprise au sol de 70 % constitue une extension non limitée de l'urbanisation, laquelle ne peut être regardée comme compatible avec les dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme particulières au littoral en tenant compte des dispositions, citées au point 8, du SCOT Arc Sud Bretagne.

11. En second lieu, aux termes de l'article R. 151-18 du code de l'urbanisme : " Les zones urbaines sont dites " zones U ". Peuvent être classés en zone urbaine, les secteurs déjà urbanisés et les secteurs où les équipements publics existants ou en cours de réalisation ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter ".

12. Compte tenu des éléments énoncés aux points 9 et 10 ci-dessus, le classement des parcelles en zone urbaine Ul est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant du classement, pour partie, des parcelles cadastrées AP 220, 227 et 228 en zone Ub :

13. Le règlement du plan définit la zone Ub comme destinée à l'habitat et aux activités compatibles avec l'habitat et correspond aux extensions urbaines du centre-bourg. Les dispositions de l'article UB II-1 de ce règlement précisent que les constructions peuvent atteindre une hauteur de 9 mètres " au faîtage ou au point le plus haut " et que leur emprise au sol " ne pourra excéder 70 % de la superficie du terrain d'assiette " du projet.

14. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles cadastrées AP 220, 227 et 228 s'étirent, pour la première, entre la rue du Vronsec et du boulevard de l'Atalante qui longe la mer, pour les autres, entre cette même rue et un petit compartiment urbanisé les séparant du boulevard de mer. Il n'est pas contesté qu'elles sont comprises dans un espace proche du rivage. Si ces parcelles, non bâties, sont voisines à l'est d'une dizaine de maison édifiées le long des voies qui délimitent ce secteur, elles jouxtent à l'ouest une vaste zone naturelle classée Na correspondant, ainsi qu'il a été dit au point 10, aux parties du territoire affectées à la protection stricte des sites des milieux naturels et des paysages, dans laquelle elles étaient d'ailleurs incluses dans leur totalité par le plan initialement arrêté par la commune, s'ouvrant sur la zone naturelle protégée NDs correspondant aux sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel de littoral. Contrairement à ce que soutient la commune, elles ne peuvent être regardées comme se rattachant au secteur densément bâti situé au nord dont elles sont séparées par la rue du Vronsec ni comme identifiées par le SCOT, compte tenu de l'imprécision de la carte y figurant, comme comprises dans l'agglomération de la commune. Par suite, et alors que le reste de la surface de ces parcelles est classé en zone naturelle Na, le classement de la partie nord de ces parcelles en zone urbaine Ub dans laquelle sont autorisées des constructions pouvant atteindre 9 mètres au faîtage, avec une emprise au sol pouvant atteindre 70 % constitue, une extension non limitée de l'urbanisation qui ne peut être regardée comme compatible avec les dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme particulières au littoral en tenant compte des dispositions citées précédemment au point 8 du SCOT Arc Sud Bretagne.

15. Eu égard aux développements qui précèdent, le classement de ces parcelles en zone urbaine Ub est également entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 151-18 du code de l'urbanisme.

Sur l'espace naturel " couvrant la section cadastrale AO correspondant à l'espace du Loch et la zone Na du Vronsec " :

16. Aux termes de l'article L. 121-22 du code de l'urbanisme : " Les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d'urbanisme doivent prévoir des espaces naturels présentant le caractère d'une coupure d'urbanisation. ".

17. Le plan approuvé par la délibération contestée classe le secteur du Loch en zone naturelle Nl destinée à recevoir des équipements collectifs et les aménagements liés aux loisirs (activités de plein air, de détente et du stationnement) " et le secteur de l'étang du Loch lui-même en zone NDs protégeant les sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel de littoral. En outre, la zone Na du plan correspond, ainsi qu'il a été dit au point 10, aux parties du territoire affectées à la protection stricte des sites des milieux naturels et des paysages. Dans ces conditions, et alors que le rapport de présentation identifie, ainsi que le relève d'ailleurs l'association requérante, l'espace du Loch comme " une ouverture dans le paysage urbain " et " une coupure permettant une aération du tissu urbain ", et à défaut de précisions particulières de la part de l'association requérante, ces classements en zones naturelles ne peuvent être regardés comme méconnaissant l'obligation rappelée par les dispositions de l'article L. 121-22 du code de l'urbanisme.

Sur le règlement applicable à la zone naturelle Nl en tant qu'il autorise une extension des constructions et installations d'intérêt collectif ou liées à des services publics :

18. Aux termes de l'article L. 151-11 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Dans les zones agricoles, naturelles ou forestières, le règlement peut : / 1° Autoriser les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs dès lors qu'elles ne sont pas incompatibles avec l'exercice d'une activité agricole, pastorale ou forestière du terrain sur lequel elles sont implantées et qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages ; / (...) ".

19. Aux termes du préambule du chapitre I relatif à la zone N du plan local d'urbanisme de la commune de Damgan : " La zone N est destinée à être protégée en raison, soit de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leurs intérêts, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique, soit en raison de l'existence d'exploitations forestières. ".

20. Il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que la zone Nl est demeurée préservée de toute urbanisation à l'exception d'une construction édifiée, il y a de nombreuses années, en face la mer, à usage de " salle polyvalente ", d'une superficie de 420 m2 et d'une hauteur de 12, 50 mètres, ainsi que d'emplacements de stationnement. Dans ces conditions, les dispositions de l'article Nl 2 du plan local d'urbanisme approuvé par la délibération contestée, qui autorisent, dans cet espace naturel à protéger qui longe la mer, à proximité immédiate de la zone NDs de l'étang du Loch et de la zone Natura 2000 correspondante, d'environ 8 hectares, " l'extension des constructions et installations d'intérêt collectif ou liés à des services publics " jusqu'à 30% " par rapport à l'emprise au sol du bâtiment existant ", sont de nature, ainsi d'ailleurs que l'a relevé la mission régionale de l'autorité environnementale (MRAE), à porter atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages et méconnaissent ainsi les dispositions précitées de l'article L. 151-11 du code de l'urbanisme.

S'agissant de l'ensemble boisé implanté sur la parcelle AR n° 33 :

21. Aux termes de l'article L. 121-27 du code de l'urbanisme : " Le plan local d'urbanisme classe en espaces boisés, au titre de l'article L. 113-1, les parcs et ensembles boisés existants les plus significatifs de la commune ou du groupement de communes, après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. ". Aux termes de l'article L. 113-1 du même code : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies ou des plantations d'alignements. ".

22. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle AR 33 est plantée de pins de haute taille formant un alignement boisé en front de mer qui domine la petite plage de Kervoyal et borde le sentier piéton dénommé " Promenade Guillaume Apollinaire ", qui longe la plage. Cet alignement représente, en outre, depuis la mer et la plage un écran naturel à la vue sur les constructions implantées à l'arrière de la promenade et offre un espace de transition entre la mer et cet environnement bâti. Il participe également à la continuité de la trame verte instituée le long du rivage de cette commune littorale. Cet espace boisé constitue ainsi un élément marquant du paysage de bord de mer, bénéficiant d'ailleurs d'une protection au titre des espaces boisés classés (EBC) par le précédent plan, sur le territoire de la commune, dont seulement 0, 59 % du territoire, soit 5, 69 hectares, est classé en espace boisé à protéger, et dont il n'est pas contesté qu'il ne comporte que très peu de boisements. Dans ces conditions, cet alignement doit être regardé, au sens des dispositions de l'article L. 121-27 du code de l'urbanisme, comme faisant partie des ensembles boisés existants les plus significatifs de la commune. Par suite, la délibération contestée est entachée d'une inexacte application de ces dispositions en tant qu'elle ne classe pas au titre des espaces boisés classés l'ensemble constitué, sur la parcelle AR 33, par cet alignement de pins.

S'agissant de l'extension de la zone d'activités de " La Lande " :

23. Aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ".

24. Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

25. Il ressort des pièces du dossier que, si le projet d'aménagement et développement durables du plan local d'urbanisme de la commune de Damgan comporte une orientation tendant à " Développer un urbanisme moins consommateur d'espaces agricoles et naturels ", il comporte également une orientation qui vise à " Renforcer la vie à l'année sur le territoire " en favorisant le maintien et le développement en assurant l'existence de possibilités d'implantation, notamment dans la zone d'activités artisanales ". Par suite, et alors même qu'elle s'effectue sur une parcelle agricole, l'extension, dans la limite de 1,2 hectare et dans la continuité directe des espaces déjà affectés aux activités artisanales, de la zone d'activités de " La Lande ", dont il ressort en outre des pièces du dossier qu'elle ne dispose plus d'une capacité foncière suffisante, ne révèle pas une incohérence entre le projet d'aménagement et de développement durables et le règlement du plan local d'urbanisme. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'absence de cohérence entre les orientations du projet d'aménagement et de développement durables et les dispositions en cause du règlement doit être écarté.

26. Aux termes de l'article 101-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " Dans le respect des objectifs du développement durable, l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme vise à atteindre les objectifs suivants : 1° L'équilibre entre : a) Les populations résidant dans les zones urbaines et rurales ; b) Le renouvellement urbain, le développement urbain maîtrisé, la restructuration des espaces urbanisés, la revitalisation des centres urbains et ruraux, la lutte contre l'étalement urbain ; c) Une utilisation économe des espaces naturels, la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des sites, des milieux et paysages naturels (...). ".

27. Eu égard à ce qui a été dit au point 25 ci-dessus, le moyen, au demeurant non assorti de précisions, tiré par l'association requérante de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté.

28. Il résulte de tout ce qui précède que la délibération du 21 juin 2018 du conseil municipal approuvant le plan local d'urbanisme de la commune de Damgan est entachée d'illégalité en tant qu'elle classe en zone Ul les parcelles AS n°32 ET n°33 correspondant au secteur des campings " Oasis " et " Côte d'Amour ", qu'elle classe en zone Ub le nord des parcelles cadastrées AP 220, 227 et 228, qu'elle ne classe pas en espace boisé classé l'alignement de pins de la parcelle cadastrée AR 33 et que le règlement de la zone Nl autorise l'extension jusqu'à 30 % de la surface de la construction existante édifiée dans cette zone. Il suit de là que l'association " Les amis de Kervoyal " est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation, dans cette mesure, de cette délibération.

Sur les frais liés au litige :

29. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Damgan le versement à l'association " Les amis de Kervoyal " d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'association " Les amis de Kervoyal ", qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la commune de la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 19 mars 2021du tribunal administratif de Rennes est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de l'association " Les amis de Kervoyal " tendant à l'annulation de la délibération du 21 juin 2018 du conseil municipal approuvant le plan local d'urbanisme de la commune de Damgan en tant qu'elle classe en zone Ul le secteur des campings " Oasis " et " Côte d'Amour ", qu'elle classe en zone Ub le nord des parcelles cadastrées AP 220, 227 et 228, qu'elle ne classe pas en espace boisé classé l'alignement de pins de la parcelle cadastrée AR 33 et que le règlement de la zone Nl autorise l'extension jusqu'à 30 % de la surface de la construction existante dans cette zone.

Article 2 : La délibération du 21 juin 2018 du conseil municipal approuvant le plan local d'urbanisme de la commune de Damgan est annulée en tant qu'elle classe en zone Ul le secteur des campings " Oasis " et " Côte d'Amour ", qu'elle classe en zone Ub le nord des parcelles cadastrées AP 220, 227 et 228, qu'elle ne classe pas en espace boisé classé les pins de la parcelle cadastrée AR 33 et que le règlement de la zone NI autorise l'extension jusqu' à 30 % de la surface des constructions existantes.

Article 3 : La commune de Damgan versera à l'association " Les amis de Kervoyal " une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de l'association " Les amis de Kervoyal " est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de la commune de Damgan tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à l'association " Les amis de Kervoyal " et à la commune de Damgan.

Délibéré après l'audience du 25 avril 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président de chambre,

- Mme Buffet, présidente-assesseure,

- M. Frank, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 mai 2022.

La rapporteure,

C. A...Le président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT01519


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT01519
Date de la décision : 10/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : SARL ANTIGONE

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-05-10;21nt01519 ?
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